Les enfants d'Orion

La Nature
revue scientifique


LES OBSERVATOIRES DES ETATS-UNIS

par Camille Flammarion
(La Nature, revue des sciences et de leurs applications aux arts et à l'industrie, 4° année, n° 144, 4 mars 1876 (p218-219), n°146, 18 mars 1876 (p247sq))

OBSERVATOIRE DE CAMBRIDGE

La Nature a déjà signalé le goût des Américains pour l'astronomie et les progrès rapides qui ont été faits sur cette terre nouvelle dans la création et le développement des observatoires. Mais dans cette première esquisse le sujet n'a été qu'effleuré (Voy. la Nature du 6 juin 1871). Nous avons à signaler maintenant à l'attention de nos lecteurs les nombreux établissements astronomiques qui recouvrent aujourd'hui le Nouveau-Monde.

Occupons-nous d'abord de celui de Cambridge. L'idée de sa fondation pourrait remonter jusqu'à l'année 1761 à l'occasion du passage de Vénus. En 1780 l'histoire du pays mentionne une autre commission astronomique ayant pour objet l'observation d'une éclipse de soleil. En 1805, M. Joha Lowell, de Boston, se mit en relation avec Delambre, à Paris, pour étudier la question des observatoires. Dix ans plus tard un comité de l'Université, au sein duquel on remarquait le savant Bowditch, donna au professeur W. C. Bond des instructions détaillées pour l'étude de l'observatoire royal de Greenwich, tant pour les bâtiments que pour les instruments. Lorsque M. Bond revint d'Angleterre, on construisit un modèle de dôme tournant, et on prépara les plans de la fondation de l'observatoire de Cambridge. Mais quoique ces plans fussent terminés en 1822, il fallut attendre jusqu'à l'année 1839 pour obtenir les premiers fonds nécessaires à cette fondation : la somme de dix mille livres sterlings.

L'observatoire fut érigé dans l'Etat de Dana en 1839, et les observations autorisées par le gouvernement des Etats-Unis, pour être faites en correspondance avec les explorations du lieutenant Wilkes, furent dirigées par le professeur Bond, jusqu'en 1842.

L'apparition soudaine de la comète de 1843 fut l'occasion du succès définitif de la fondation, attendu que pour observer cet astre splendide qui remplissait [début de la page 219] d'étonnement les deux Amériques, on fut obligé d'acheter des instruments, télescopes, équatoriaux, micromètres, etc. Ce réveil des passions astronomiques eut pour résultat l'érection du nouvel observatoire de Harvard Collège muni d'un excellent équatorial de Merz et d'autres instruments de grande valeur. Les bâtiments furent terminés en 1844 et le grand équatorial fut définitivement installé le 24 juin 1847.

Les premières merveilles célestes étudiées à l'Observatoire de Cambridge furent les nébuleuses d'Andromède et d'Orion qui étaient considérées comme les plus fermes soutiens de la théorie nébulaire d'Herschel et de Laplace, et qu'aucun télescope n'avait pu jusqu'alors résoudre en étoiles. Nond annonça, le 27 septembre 1847, que le réfracteur de Cambridge, armé d'un grossissement de 200 et dirigé sur le trapèze, résolvait cette région en points brillants, innombrables ; avec un grossissement de 600, le compagnon de Struve était distinctement séparé, et d'autres étoiles aussi apparaissaient comme doubles.

Des découvertes plus brillantes encore devaient bientôt illustrer le nouvel observatoire. Par une coïncidence assez fréquente dans l'histoire des sciences, deux de ces découvertes, celle de l'anneau intérieur de Saturne et celle de son huitième satellite furent faites le même jour à la fois à Cambridge et en Angleterre; c'était le 19 septembre 1848.

L'observatoire ayant été doté en 1849 d'un legs de cent mille livres sterlings par M. E. B. Phillips, et le testament de M. J. Quincy ayant pourvu aux fonds nécessaires pour l'impression des observations, on publia, en 1855, un premier volume d'annales dans lequel se trouve un catalogue de 5,500 étoiles comprises entre l'équateur et 0°20' de déclinaison boréale. Le second volume, publié en 1857, contient les observations de la planète Saturne faites pendant une période de dix ans, les mesures de son disque et de ses anneaux, la disparition de ceux-ci, la découverte du nouvel anneau et celle d'Hypérion le 8e satellite.

Le texte est illustré de 94 dessins de la planète. La seconde partie de ce deuxième volume n'a été publié qu'en 1866 et renferme un second catalogue de 4,484 étoiles. Le troisième volume publié en 1862, est un magnifique in-4e de 372 pages, illustré de planches presuqe entièrement consacrées à la grande comète de Donati.

La grande nébuleuse d'Orion fut l'un des principaux objets d'étude de l'observatoire jusqu'à la mort du professeur W.-C. Bond, le père, en 1859, et aussi la mort de son fils G.-P. Bond, en 1865. Les observations de cette nébuleuse forment le dernier volume publié des annales (1867) sous la direction de M. Safford alors directeur de l'observatoire de Dearborn qui avait fait partie antérieurement de l'observatoire d'Harvard. Cette nébuleuse a été aussi l'objet spécial des observations de lord Rosse à l'aide de ses deux grands télescopes pendant 19 ans ; on trouve les résultats de ces observations illustrées de magnifiques dessins dans les transactions de la Société royale de 1868.

Depuis l'année 1866, dans laquelle le professeur Joseph Winlock fut nommé directeur, le travail de l'observatoire a pris une extension plus considérable encore.

CAMILLE FLAMMARION
-- La suite prochainement. --

(Début de : n°146, 18 mars 1876 (p247sq))
LES OBSERVATOIRES DES ETATS-UNIS
OBSERVATOIRE DE CAMBRIDGE

(Suite et fin. -- Voy. p. 218)


Outre les recherches habituelles de tout observatoire, telles que les positions des étoiles, planètes, comètes, étoiles doubles et nébuleuses, on s'occupa spécialement à l'observatoire de Cambridge d'observations spectroscopiques. Cinq cents dessins du soleil ont été faits pendant les années 1872 et 1873, avec cinq cents dessins de protubérances solaires. De magnifiques photographies des éclipses solaires ont été exécutées, ainsi que des taches et des facules dans leurs rapports visibles avec les protubérances. Citons encore de beaux dessins de cratères lunaires et des planètes Jupiter et Saturne.

Le grand équatorial de Merz, construit en 1847, a pour objectif une lentille de 15 pouces anglais de diamètre dont la distance focale est de 22 pieds 6 pouces. Le pouvoir grossissant des oculaires s'élève de 100 à 2000. Le prix de cet instrument monté parallactiquement a été d'environ 20 000 livres sterling.

Les appareils spectroscopiques photométriques et photographiques sont particulièrement dignes d'attention. Le spectroscope dont on se sert pour les observations solaires disperse puissamment les rayons lumineux qui traversent deux fois la série des prismes. On se sert, pour photographier le soleil, d'un lentille à long foyer sur laquelle la lumière arrive à l'aide d'un miroir plan mobile. Le photomètre, construit par Zollner, a servi au professeur Peirce à mesurer les grandeurs de toutes les étoiles de l'uranométrie d'Argelander, situées entre 40 et 50 degrés de déclinaison boréale, en déterminant ces grandeurs par une échelle exacte de proportion de lumière.

Ajoutons enfin que l'heure exacte est donnée par l'observatoire, au palais du gouvernement à Boston, par communication télégraphique, ainsi qu'aux Etats de la Nouvelle Angleterre tout entiers. On la reçoit chaque jour directement à midi, sans aucun intermédiaire. Voilà un progrès que nous n'avons pas encore su réaliser en France. En se rendant au palais du gouvernement, chaque citoyen peut, s'il lui plaît, s'y mettre en relation télégraphique avec l'horloge de l'observatoire, entendre les battements de la seconde, constater si sa montre avance ou retarde, et la régler exactement. Sans entrer dans d'autres détails, nous voyons que l'observatoire de Cambridge a su prendre rapidement sa place, et a déjà rendu d'éminents services, tant à la science qu'à l'intérêt public.

M. Joseph Winlock est mort l'été dernier. En nous annonçant la mort de ce laborieux astronome, M. Arthur Searle, "Assistant in charge of the observatory", nous apprenait en même temps qu'on vient de terminer à cet observatoire de magnifiques dessins des planètes, des comètes et des nébuleuses, et que [début de la page 248] le prochain volume des annales, comprenant de bonnes observations d'étoiles doubles, paraîtra incessamment.

OBSERVATOIRE DE DARTMOUTH COLLEGE

De même que plusieurs institutions de caractère purement scientifique, l'observatoire de Dartmouth doit son existence et ses progrès principalement à la munificence privée. Le docteur Georges Shattuck, de Boston, offrit, en 1862, la somme nécessaire pour élever l'observatoire et acheter les instruments. Cet observatoire est construit à côté du Collège sur une hauteur qui domine la vallée de Connecticut : les travaux furent terminés en 1853. Notre gravure montre le dôme central, qui mesure 20 pieds de diamètre, et deux des trois ailes qui en rayonnent. Le bâtiment est fort soigneusement bâti, à l'abri du feu, et autant que possible aussi à l'abri des grandes inégalités de température provenant du soleil, l'extérieur étant peint en blanc, et l'intérieur du dôme étant peint en noir. Le directeur de cet observatoire est le professeur C.-A. Young, qui, depuis plusieurs années, s'est fait un nom illustre par ses découvertes spectroscopiques. Cet établissement est muni entre autre d'une excellente lunette méridienne et d'instruments enregistreurs perfectionnés.

En 1871, on a fait l'acquisition d'un équatorial construit par Alvan Clark, l'éminent opticien ; il mesure 9 pouces 4 dixièmes d'ouverture et 12 pieds de distance focale. Cet instrument est parfait. Il est, de plus, muni d'un spectroscope, à l'aide duquel le professeur Young a fait ses belles recherches sur les raies du spectre solaire.



Le dôme de l'équatorial, très-solidement établi et pesant 2800 livres anglaises, tourne sur six boulets de canon de 6 pouces de diamètre chacun, courant dans une gorge circulaire, avec un frottement si faible, qu'une force de 6 livres suffit pour lui donner une vitesse de rotation uniforme.

L'observatoire de Dartmouth s'occupe spécialement de la physique solaire, de l'étude du spectre, de l'observation des éclipses et des autres sujets en rapport spécial avec l'astronomie physique. C'est de plus une école d'astronomie. En 1872, sous les auspices du Coast-Survey, il porta son nouvel équatorial à la station Sherman, au sommet du chemin de fer du Pacifique, pour essayer les avantages qu'une pareille station, élevée à 8,300 pieds au-dessus du niveau de la mer, doit offrir à l'astronomie à cause de la transparence de l'atmosphère dans ces hautes régions. Les résultats ont été merveilleux, et il est probable qu'on construire un observatoire en ces hautes régions.



OBSERVATOIRE DUDLEY

Le professeur américain 0.-M. Mitchel ayant accepté en 1851 la proposition qui lui était faite d'être nommé directeur d'un observatoire à Albany, une somme de 25 000 livres sterling fut aussitôt votée dans la ville, et un propriétaire généreux fit don du terrain nécessaire pour construire l'observatoire. On éleva les bâtiments sur une colline dominant un bel horizon ; le plan fut tracé en forme de croix, avec deux ailes à l'est et à l'ouest pour les instruments méridiens, et une aile au nord pour la bibliothèque, le bureau des calculs, les appareils magnétiques, etc. Une tour circulaire s'élève au centre et un portique donne accès à l'observatoire. La salle de l'équatorial est un cercle mesurant 24 pieds de diamètre et muni d'une tour mobile.

Dé l'entrée de l'observatoire le vestibule offre un [début de la page 249] aspect imposant et en harmonie avec le but de l'établissement. En face la porte, on remarque un beau buste de marbre portant cette inscription :
CHARLES DUDLEY
PAR BLANDINA, SON EPOUSE
DEDIE A L'ASTRONOMIE


Dans la bibliothèque, deux tableaux de marbre portent gravés les noms des principaux donateurs ; on y remarque entr'autres ceux de Dudley, Olcott, Rathbane, de Witt, Van Rensselaer, Armsby et un très grand nombre d'autres.

L'Observatoire fut inauguré le 28 août 1856, et eut pour premier directeur le professeur Mitchel, major général des Etats-Unis, qui mourut en 1862 dans la Caroline du Sud.

Le cercle méridien a pour objectif une lentille de 8 pouces anglais, dont la distance focale est de 10 pieds ; les cercles sont divisés de deux en deux secondes ; l'instrument est excellent et provient des ateliers de Pistor et Martins. On doit cette acquisition à la libéralité de M. Olcott, d'Albany. L'instrument des passages a un objectif de 6 pouces 1/2. L'équatorial est de 13 pouces avec une distance focale de 15 pieds. Il peut recevoir six oculaires portant différents grossissements.



La plupart des observations faites à cet observatoire s'enregistrent d'elles-mêmes à l'aide de l'électricité, et on a constaté que ces opérations purement [début de la page 250] mécaniques sont en général plus exactes que celles dues aux observateurs, même les plus soigneux.

Grâce à la munificence de souscripteurs instruits et dignes d'être associés aux immortelles découvertes de l'astronomie, on a pu, en 1872, ajouter à l'observatoire des appareils nécessaires pour étudier l'analyse spectrale, faire des photographies célestes, et observer le magnétisme terrestre. Un pavillon a été construit, dans lequel n'est entrée aucune espèce de métal.

L'observatoire Dudley doit se louer de la générosité des donateurs qui l'ont successivement enrichi. Le chiffre des dons s'élevait l'année dernière à la somme de 20 0000 livres sterling, c'est-à-dire de 5 millions de francs ; et sur cette somme les dons de Madame Dudley seule dépassaient la somme de deux millions et demi. Voilà un noble emploi de la fortune !

OBSERVATOIRE DE LITCHFIELD

L'érection d'un observatoire en correspondance avec Hamilton College, Clinton, à New-York, est due aux efforts du professeur Charles Avery, qui assura en 1852 la somme de 15 000 livres sterling pour un télescope de première classe, de fabrication américaine.

L'observatoire fut construit en 1854. Il se compose essentiellement d'un bâtiment carré, flanqué de deux ailes, et surmonté d'une tour de 20 pieds de diamètre tournant sur huit boulets. Le grand équatorial installé dans la tour a été construit par Spencer et Eaton, son objectif est de 13 pouces et demi, et sa longueur focale de 16 pieds. Il est muni d'un système complet d'oculaires, ainsi que de deux micromètres. Un mouvement horaire le fait tourner parallactiquement autour de l'axe du monde.

L'observatoire est muni des autres instruments classiques, sur lesquels il serait superflu de nous étendre, mais parmi lesquels cependant nous citerons particulièrement un excellent chercheur de comètes de 5 pouces d'ouverture, supportant des grossissements de 25 à 275. La longitude de cet observatoire a été rigoureusement déterminée à 17 minutes 6 secondes et demie à l'ouest de Cambridge. L'établissement a du reste servi de base à la fixation d'un grand nombre de longitudes.

En 1869, les astronomes de cet observatoire organisèrent, aux frais de M. Edwin Litchfield, une expédition pour aller observer l'éclipse totale du soleil 7 août qui a donné d'importants résultats à la science.

On doit au docteur C.-H.-F. Peters, directeur de cet observatoire, la découverte de 22 planètes entre Mars et Jupiter.

Par une fondation définitive M. Litchfield a placé en 1866 l'observatoire qui porte son nom à l'abri de tout besoin matériel ; une rente permanente lui est servie en exécution des volontés de ce généreux bienfaiteur de la science.

OBSERVATOIRE DE L'UNIVERSITE DE MICHIGAN

On doit l'observatoire D'Ann Arbor à l'initiative du docteur Tappan, chancelier de l'Université de Michigan en 1862, et aux libéralités des citoyens de Détroit. Le bâtiment fut terminé et adapté aux observations en 1864. (Il nous semble que l'Université de Michigan rappelle beaucoup, par son aspect extérieur, l'édifice de la Minerve, à Rome, sur la place Navone ; il ne manque que les deux fontaines jaillissantes de cette belle place pour compléter la ressemblance.) Cet observatoire se compose naturellement d'un salle méridienne, et d'un dôme équatorial ; comme pièces essentielles, le dôme hémisphérique a 23 pieds de diamètre et tourne en glissant horizontalement sur cinq boulets de canon ; l'équatorial lui-même a été construit en 1857 par Henry Fitz, de New-York, son objectif mesure 12 pouces 1/2 d'ouverture, et la longueur focale est de 17 pieds. C'est à l'aide de cet instrument que le professeur Watson a fait ses principales découvertes. L'appareil est muni d'un chercheur achromatique, d'un système complet d'oculaires, tant positifs que négatifs, d'un micromètre filaire et d'un mouvement d'horlogerie ; ses cercles sont grands et très-soigneusement gradués, et il paraît du reste que c'est un chef-d'oeuvre de construction. Son prix a été de 9500 livres sterling.

L'aile orientale referme le cercle méridien, construit par Distor et Martens de Berlin ; la lunette de ce cercle a 6 pouces 1/2 d'ouverture et 9 pieds de longueur focale, c'est aussi un excellent instrument. l'aile occidentale renferme divers instruments relatif à la physique du globe, un chercheur de comètes, des chronomètres, etc.

L'observatoire est en rapport direct avec les lignes de Western Union Telegraph Company, et avec celles du chemin de fer central ; l'heure est transmise régulièrement à ces compagnies, ainsi qu'aux villes principales, telles que Détroit, Tolède, Chicago et autres.

L'observatoire, y compris la résidence du directeur, a coûté 20 000 livres sterling, les instruments ont coûté presque la même somme, 18 000. L'Université est entrée pour un tiers dans ces frais ; 2500 livres ont été souscrites par la ville d'Ann Arbor, le reste des dépenses est dû à la libéralité de plusieurs souscripteurs, parmi lesquels il est juste de mentionner particulièrement M. Walker, de Détroit.

Cet observatoire a eu deux hommes éminents pour directeurs successifs. Le premier a été M. Brunow de Berlin, qui depuis a été directeur de l'observatoire de Dublin, en irlande. Il fut directeur de l'observatoire d'Ann Arbor depuis l'année 1854 jusqu'en 1863. C'est pendant son séjour en Amérique qu'il publia son "Astronomie sphérique".

En 1863, il fut remplacé par M. James Watson qui avait été son assistant depuis 1857. On doit à celui-ci la découverte de 20 petites planètes de la zone comprise entre Mars et Jupiter, qu'il [début de la page 251] trouva en construisant des cartes écliptiques et un catalogue d'étoiles. On lui doit aussi la découverte de deux comètes télescopiques, l'observation de la grande éclipse solaire de 1869 à Iowa, celle de 1870 en Sicile, l'observation du passage de Vénus à Pékin, et un excellent volume d'astronomie théorique.

OBSERVATOIRE DE YALE COLLEGE

Cet observatoire appartient à l'Ecole scientifique Sheffield ; il occupe deux tours, dont chacune mesure seize pieds carrés, l'une contenant un équatorial et l'autre un cercle méridien ; ces deux instruments sont dus à la générosité de M. Sheffield.

L'équatorial, construit par Alvan Clark and Sons, de Cambridgeport, a été monté en 1866 dans la tour tournante au sommet de la façade, cette tour ayant été spécialement organisée pour supporter l'appareil sans lui transmettre aucune vibration. L'objectif a 9 pouces de diamètre et une longueur focale de 9 pieds 10 pouces ; le grossissement des oculaires varie depuis 40 jusqu'à 620 ; plusieurs sont construits spécialement pour l'observation prismatique du soleil. L'instrument complet est à la fois très-solide et très-léger ; un mouvement d'horlogerie maintient constamment dans son champ l'étoile vers laquelle il est dirigé. Comme preuve de l'excellence optique de cet équatorial, on remarque qu'il dédouble aisément l'étoile Delta du Cygne, le compagnon de Sirius, la 6e étoile du trapèze d'Orion, et le compagnon de Gamma d'Andromède. La tour de l'ouest a été élevée en 1866, spécialement pour recevoir le cercle méridien du gouvernement, qui se trouvait d'abord à l'observatoire naval des Etats-Unis. Il a été installé avec les plus grands soins sur des piliers d'une solidité et d'une immobilité éprouvées, et protégé contre les changements de température ; sa lunette est de 4 pouces. Les cercles sont gradués sur argent, la minute se lit sur l'un à l'aide d'un vernier et la seconde se lit sur l'autre à l'aide de six microscopes.

Cet observatoire est sous la direction du professeur Lyman et sert principalement d'école pratique pour les étudiants d'astronomie. Nous nous faisons cependant un devoir de signaler ici, en terminant, que plusieurs observations originales ont été faites dans cet établissement par son directeur, entr'autres celle des protubérances solaires et celle de Vénus vue sous la forme d'un anneau lumineux lorsque la planète était voisine de sa conjonction. Cette dernière observation surtout est importante pour la connaissance de l'atmosphère de Vénus.

Tels sont les principaux observatoires des Etats-Unis, dont nous avons fait la description d'après le Harpers' Magazine de New-York. On voit que la culture de la science astronomique dans le Nouveau Monde est brillante et féconde, et pourrait souvent servir d'exemple à plusieurs des anciens Etats de notre vieille Europe.
CAMILLE FLAMMARION.

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Mise à jour : 31 juillet 2003