Les enfants d'Orion

La spectroscopie

La matière a ceci d'exceptionnel , c'est de pouvoir émettre ou absorber de l'énergie sous forme de lumière. Or, pour étudier une étoile, nous ne disposons que de sa lumière. Toutes les connaissances que nous avons des étoiles nous viennent de l'analyse de la lumière qu'elles émettent . Cette analyse s'appelle la spectroscopie : science fondamentale en astronomie.
Après avoir présenté les différents spectres observables et la façon de les obtenir, nous avons essayé de les expliquer simplement , en prenant, pour l'atome , le modèle de Bohr. Il nous permet d'interpréter les phénomènes d'absorption et d'émission de lumière correspondant aux observations spectrales.
Une troisième partie développe les applications de la spectroscopie à l'astrophysique : couleur des nébuleuses, couleur et température des étoiles, composition de leur atmosphère, détermination de leur taille , effet Doppler-Fizeau.


La spectroscopie a pour but d'analyser la lumière émise par une source ou transmise par un corps absorbant.

I- Différents types de spectres :

On peut observer deux types de spectres types : les spectres d'émission, parmi lesquels les spectres continus ou les spectres de raies, et les spectres d'absorption.

I-1 : Les spectres continus d'émission :

Pour en observer, il suffit de faire passer la lumière blanche à travers un prisme ou un réseau , qui ont, tous deux, la capacité de décomposer la lumière.
L'arc-en-ciel est, en fait, le spectre continu d'émission de la lumière du Soleil, celle-ci étant décomposée par les gouttes d'eau .

Spectre continu de la lumière blanche que l'on observe sur l'écran.

Lorsque l'intensité lumineuse de la lampe augmente ( donc lorsque la température du filament de la lampe augmente), on assiste à l'apparition progressive des couleurs vers le bleu.

Un spectre d'émission dépend de la température de la source. Plus la source est chaude , plus il est étendu vers le bleu. Un gaz à pression élevée, un liquide ou un solide, portés à haute température, émettent un spectre continu.

I-2 : Spectres de raies d'émission :

Ils sont observés avec des lampes à décharge.
Une lampe à décharge est un tube de verre contenant une vapeur métallique (mercure, sodium…) ou un gaz (néon, azote , argon …) sous faible pression.
Quand le gaz est traversé par une décharge électrique, il restitue une partie de cette énergie sous forme lumineuse.
L'analyse de cette lumière par un spectroscope conduit à un spectre discontinu. Il est constitué de raies de couleurs bien précises. Pour un élément donné, on observe toujours les mêmes raies.

Spectre d'une lampe à vapeur de sodium


Spectre d'une lampe à vapeur de mercure



I-3 : Spectres d'absorption :

Si on éclaire un gaz avec de la lumière blanche, il absorbe certaines radiations qu'il reçoit. On obtient alors un spectre d'absorption : raies noires sur un fond continu coloré.
Pour chaque élément, les raies noires se trouvent exactement à la même place que les raies colorées émises.

Spectre d'absorption du sodium


Spectre d'absorption du mercure


Si on superpose les spectres d'émission et d'absorption, on remarque que les raies noires et les raies colorées sont au même endroit.

Vapeurs de Sodium


Vapeurs de Mercure



II- Comment peut-on expliquer ces spectres ?

La matière possède une propriété importante qui est de pouvoir émettre ou absorber de l'énergie sous forme de lumière.

II-1 : De quoi est constituée la matière ?

La matière est constituée d'atomes. Ce terme a été utilisé pour la première fois par Démocrite au Vè siècle avant Jésus-Christ. " Atome " signifie " que l'on ne peut pas couper, insécable ".
Un atome est donc, pour Démocrite, une particule indivisible.
Puis , ce terme est repris, au 19è siècle, par John Dalton qui en fait le constituant principal de la matière.
Le modèle de l'atome a beaucoup évolué au cours du 20è siècle.
Nous allons prendre le modèle décrit par Niels Bohr en 1913 pour expliquer les spectres.

II-2 : Le modèle de Niels Bohr :

Pour Niels Bohr, l'atome est constitué d'un noyau chargé positivement autour duquel gravitent des électrons chargés négativement, modèle qui s'inspire du système solaire. Les électrons tournent autour du noyau comme les planètes autour du Soleil. La différence avec les planètes, c'est que les électrons ne peuvent pas avoir n'importe quelle " trajectoire " autour du noyau. Ils sont tenus de d'occuper des orbites stables dont la distance au noyau et l'énergie correspondante sont bien définies. A chaque orbite correspond un niveau d'énergie.

Schéma simplifié d'un atome qui ne possède qu'un électron : l'atome d'hydrogène


L'électron se trouve sur l'orbite la plus proche du noyau : il est au repos. On dit qu'il est dans son état fondamental.

II-3 : Interprétation des spectres de raies :

Mécanisme de l'émission :
En l'absence de stimulation( on dit d'excitation) extérieure, les électrons occupent les niveaux ( ou orbites) de plus basse énergie. Mais si on leur fournit l'énergie correspondant à la différence entre deux niveaux, ils migrent sur une orbite supérieure puis en regagnant leur niveau d'origine, ils restituent l'énergie en émettant un photon.
L'énergie de ce photon sera exactement égale à la différence d'énergie entre les deux orbites visitées. Le photon émis aura alors une couleur bien précise correspondant à son énergie. Plus le photon est bleu, plus il transporte de l'énergie, plus il est rouge, moins il en transporte. Or , les orbites permises pour chaque type d'atome lui sont propres : pas deux éléments chimiques n'en possèdent de semblables. C'est pourquoi, les raies d'émission d'un élément sont aussi caractéristiques que les empreintes digitales d'une personne.

Schémas très simplifiés montrant le mécanisme de l'émission de lumière :


Si on fournit une quantité d'énergie correspondant à la différence entre les deux niveaux, l'atome se trouve dans un état excité : l'électron est sur une orbite supérieure. Il redescend très rapidement sur l'orbite la plus basse en émettant un photon (de la lumière). Plus il redescend " de haut ", plus il a de l'énergie, plus il est bleu (si on est dans le visible).

Mécanisme de l'absorption :
Quand un gaz est éclairé avec de la lumière blanche, il absorbe une proportion importante de lumière dont la couleur correspond à des transitions possibles de l'atome, c'est-à-dire de passages possibles des électrons d'un niveau à un autre. Un observateur placé dans le prolongement de ce faisceau verra donc des " raies noires " correspondant aux couleurs absorbées par le gaz.
Les transitions possibles en émission et en absorption sont les mêmes, c'est pourquoi les raies colorées et les raies noires se superposent.

Schémas très simplifiés montrant le mécanisme de l'émission de lumière :


II-4 : Interprétation des spectres continus :

Un atome ionisé (ayant perdu un ou plusieurs électrons) possède des états d'énergie quelconques. Par capture d'un électron , il revient à un niveau d'énergie inférieur en émettant de la lumière. Comme l'énergie de l'état initial est quelconque, l'énergie du photon émis est aussi quelconque : on obtient ainsi un spectre continu d'émission.

Schéma simplifié :


On obtient un spectre continu d'absorption quand l'atome absorbe un photon suffisamment énergétique pour l'ioniser.

III- Application à l'astrophysique :

III-1 : Couleur des nébuleuses à émission

Les nébuleuses à émission sont essentiellement constituées d'hydrogène gazeux à basse pression et chauffées par des étoiles proches et jeunes donc très chaudes. Les photons qu'elles émettent sont assez énergétiques pour ioniser les atomes d'hydrogène. Chaque atome concerné perd provisoirement son unique électron. Les noyaux ainsi formés, des protons, en capturant les électrons libérés précédemment redonnent des atomes d'hydrogène excités, c'est-à-dire possédant trop d'énergie pour demeurer ainsi. Les atomes excités perdent leur surplus d'énergie en émettant des photons, ce qui se traduit par une émission de lumière. L' énergie perdue par une grande majorité des atomes d'hydrogène correspond à une lumière rouge (il s'agit de la transition électronique du niveau n = 2 à n = 3 donnant la raie Ha de la série de Balmer Ä = 658 nm). La spectroscopie a donc permis, compte tenu de la nature du spectre d'émission de ce type de nébuleuses, de reconnaître la composition chimique de ces vastes nuages gazeux tels que M42, la grande nébuleuse d'Orion, M l6, la nébuleuse de l' Aigle, M20 la nébuleuse Trifide, M8 la nébuleuse de la Lagune et bien d'autres encore.

III-2 : Composition de l'atmosphère d'une étoile

Il est évident que depuis 1859 des progrès importants ont été réalisés dans le domaine de la spectroscopie et aussi dans la connaissance des étoiles. On supposera cependant que les lois de Kirchhoff et Bunsen peuvent être appliquées dans le cas de modèles simplifiés. Alors, le spectre d'une étoile peut être expliqué par la présence de la partie extérieure, l'atmosphère, considérée comme un gaz relativement froid et à basse pression, éclairée par la lumière qui provient de la photosphère. Lorsque les astronomes photographient le spectre (obtenu à l'aide d'un spectroscope à réseau) de la lumière provenant de l'étoile, ils réalisent sur le même cliché le spectre d'émission de l'argon, élément chimique, qui sert de référence pour l' étalonnage des distances séparant les différentes raies d'absorption. Sur le cliché obtenu on observe un spectre continu coloré présentant par endroits des raies sombres. Le spectre continu est celui de la lumière émise par l'étoile, les raies sombres correspondent aux couleurs absorbées par les éléments chimiques présents dans l' atmosphère de l' étoile.
La comparaison du spectre d'absorption de l'étoile (raies sombres) et du spectre d'émission de l'argon, élément de référence (raies colorées), permet de trouver la nature des éléments chimiques présents dans l'atmosphère de l'étoile. En effet, le spectre d'absorption (ou d'émission) d'un élément est sa carte d'identité et il est donc possible de le reconnaître sans aucun doute.

III-3 : Température de surface d'une étoile. Type spectral

La lumière émise par une étoile donne, nous l'avons vu, un spectre d'émission continu.
Si la température de surface de l' étoile est élevée, le spectre présentera une partie importante dans le bleu. Au contraire, si la température de surface de l'astre est relativement faible, le spectre montrera une zone importante dans le rouge. La température de surface d'une étoile peut être évaluée à partir de l'étude du spectre continu de la lumière qu' elle émet. C'est la loi de Wien. Les étoiles ont été classées en types spectraux :
O, B, A, F, G, K, M, R, N, S, I
(pour s'en souvenir: " Oh! Be A Fine Girl, Kiss Me Right Now Sweatheart " " Oh! Soit une chic fille, embrasse-moi tout de suite chérie " ).

Par exemple les étoiles de type O sont bleues et très chaudes (de 20 000 à 30 000 K), celle de type A sont blanches et chaudes (de 8 000 à 12 000 K), les étoiles jaunes comme le Soleil, de type G ont une température de surface de l' ordre de 6 000 K, les étoiles de type I, froides (1 000 à 1 500 K) sont difficiles à détecter. Les températures sont exprimées en kelvin ( 0° C = 273 K) .

III-4 : Détermination du rayon d'une étoile.

La loi de Stéfan est un outil précieux pour les astronomes. Elle nous dit que la puissance totale rayonnée L par un corps noir dans toutes les longueurs d'onde et dans toutes les directions est proportionnelle à sa surface S et à la quatrième puissance de sa température.
L = a S T4
Cette loi permet d'évaluer le rayon d'une étoile . En effet, si l'on sait mesurer l'énergie totale rayonnée chaque seconde par l'étoile ( que les astronomes appellent sa luminosité) et déduire sa température de la loi de Wien, on peut en déduire sa surface et donc son rayon.

III-5 : L'effet Doppler-Fizeau :

La spectroscopie a permis d'observer , dans de nombreux spectres d'étoiles, un décalage de certaines raies caractéristiques.
Cette observation, appelée effet Doppler, est liée au mouvement des astres les uns par rapport aux autres :
Une étoile qui se rapproche aura un spectre décalé vers le bleu.
Une étoile qui s'éloigne aura un spectre décalé vers le rouge.
Hubble a remarqué que les galaxies ont systématiquement un spectre plus décalé vers le rouge. Et ce d'autant plus qu'elles sont éloignées de nous.
Ceci apporte la preuve que l'univers est en expansion.


Conclusion :
La spectroscopie, puissant moyen d'investigation, a fait avancer de façon spectaculaire la recherche en astronomie, notamment dans la connaissance des étoiles.
Elle a permis, entre autres découvertes :
l'identification d'éléments chimiques dans leur atmosphère,
l'évaluation de leur température externe,
la mise en évidence de l'élément hydrogène dans les vastes nuages de gaz et de poussières interstellaires.

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mise à jour 17 juillet 2005