COMMENT JE VOIS LA "MECANIQUE CELESTE"

Une jolie comète à la longue chevelure fait une promenade autour du Soleil.
("Se promener autour" se disait en grec peripatetein....)
Le tracé de sa promenade n'est rien d'autre que le résultat de ses tergiversations:
D'une part elle brûle d'envie de se jeter dans les bras de ce bouillant
Soleil pour lequel elle éprouve une réelle attirance physique mais d'autre
part... son besoin d'indépendance lui donne aussi l'envie de "passer son
chemin", de "rester sur sa lancée", d'aller droit devant elle à la vitesse
qu'elle a acquise.
Elles sont toutes les mêmes. Les planètes ou "astres errants", selon
l'étymologie, ont le même comportement: Leurs atermoiements les
entraînent dans des courbes complexes. Ces courbes ont longtemps été prises
pour des cercles ou encore des combinaisons de cercles.
C'est plus compliqué que cela: Penserait-on, Saturne, malgré son auréole,
n'est pas indifférente au charme du puissant Jupiter qui la détourne de son
chemin. Mais il ne fait pas le poids et ce sacré Soleil l'emporte nettement.
Revenons à cette jolie comète. Lorsque nous l'apercevons pour la première
fois, elle se trouve dans une phase de sa vie où l'attirance pour le Soleil
l'emporte. Son envie de s'en rapprocher la pousse dans le même sens que son
besoin d'indépendance. Sa vitesse ne fait qu'augmenter. Cette vitesse
la grise et du coup elle en oublie presque le Soleil. Elle décide de
continuer sa route. C'est le périhélie. Elle n'ira pas plus près.
A partir de ce moment, l'attirance pour le Soleil, pourtant encore très forte,
n'est plus du tout dans le même sens que la vitesse. Voilà donc notre comète
qui se demande si elle a tellement raison de s'en écarter. Petit à petit sa
vitesse, son besoin d'aller droit devant elle, diminue. Et vient le moment où
le souvenir du Soleil prend le dessus. Notre belle change d'avis. C'est
l'aphélie. Et cette dame tente à nouveau sa chance...

Les hommes ont cru bon de mettre tout cela en chiffres...
C'est à la fois sordide et bien utile.
Tycho Brahe fut un voyeur impénitent. Mais cela a permis à Johannes Kepler
d'analyser ces allées et venues. Il a ravalé ces galantes ballades à
d'arrides équations. Mais reconnaissons que grâce à elles Isaac Newton a
pu déduire les causes des effets: Cette attirance physique fut baptisée
attraction universelle. On sait maintenant que le désir de se jeter dans les
bras l'un de l'autre est d'autant plus fort que la distance est courte.
Il est même quatre fois plus intense si l'éloignement est deux fois moindre.
"Inversement proportionnel au carré de la distance"...
On s'est aussi rendu compte que pour attirer il faut être lourd.
"Proportionnel à la masse"...
Il est bien sûr impossible de tenir compte d'absolument toutes les influences
que ces "corps" exercent les uns sur les autres.
Mais on peut tout de même calculer et prévoir avec une précision qui nous
satisfait les éclipses, les "rapprochements", les occultations et bien
d'autres phénomènes du plus haut intérêt.
J'éprouve donc un profond respect pour ces hommes.

Alphonse POUPLIER Esparron, mai 1991