LHIRES III
REALISATION D'UNE IMAGE FLAT-FIELD


Voici une méthode pour réaliser un flat-field. Un diffuseur est disposer à l'entrée du télescope, ici de simples feuilles de papier calque. Le diffuseur est éclairé par un spot-halogène (de 150 W) :


Voici le résultat d'un compositage de 17 flats posés 60 secondes prises dans les conditions ci-dessus (le compositage d'un grand nombre d'images est indispensable pour obtenir un très bon rapport signal sur bruit) :

Bien sur, le noir et l'offset (bias) ont été retiré. Les stries diagonales représentent des non uniformités du CCD. Elle sont ici de faible amplitude (la visualiation est à haut constraste). Le PRNU (Pixel Response Non Uniformity) est de 1% maximum dans ce cas. Le gradiant entre la partie droite et la partie gauche de l'image est normal : il traduit le produit du contenu spectral de la source et la réponse instrumentale, qui sont une fonction de la longueur d'onde.

Voici à présent un spectre de la Lune avec la même installation (somme de 3 poses de 90 secondes). Durant toute la pose le télescope est continuellement déplacé à la raquette afin de brouiller tous les détails :

A présent, la division du spectre de la Lune par le flat-field :

Toute trace de PRNU à disparu, c'est un signe de qualité du flat-field. Il demeure des stries horizontales (le "transversalium"). C'est normal, les infimes flexions du spectro font que la caméra à légèrement bougé entre la prise du spectre lunaire et celle du flat. Les défauts de fente ne sont pas nécessairement retirés, il peuvent même être amplifiés. Ce n'est pas grave du tout,  car ces défauts (qui demeurent de faible amplitude ici) sont dans l'axe de la dispersion. Ils ne perturbent donc pas significativement l'allure du profil spectral extrait (qu'il s'agisse Lune ou des étoiles).

Le flat-field peut être obtenu de manière très différente, en dehors du télescope. La fente est éclairée avec une lampe produisant un spectre continu. Mais la méthode ne fonctionne correctement qu'en simulant à l'entrée du spectrographe un faisceau ayant une étendue géométrique proche à celle définie par le télescope. Il faut pour cela créer un cône de lumière ouvert à f/10 (le télescope utilé à un rapport F/D de 10). Un trou dans du papier Canson noir d'un diamètre de l'ordre de 14 mm et positionné en avant du coulant de 50 mm du spectrographe simule approximativement f/10 (le diaphragme est situé dans ce cas à 140 mm de la fente, d'où le rapport 140/14 = 10). Le diamètre du trou est à ajuster en fonction de la sa distance à la fente. Il faut ajouter une couche de papier calque dans le trou pour diffuser la lumière de la lampe halogène. Ce montage est conforme à la figure suivanre :

Il est extrêmement important de bien soigner l'étancheité à la lumière. Au besoin, couvrir le spectrographe d'un bon drap noir, sauf bien sur l'entrée du diaphragme. Il faut ainsi s'assurer que la quasi totalité du flux parvenant au détecteur est passé par le diaphragme, et pas ailleurs. Dans ces conditions, le flat-field obtenu sera de qualité et utilisable pour traiter les images de la nuit, même s'il a été obtenu de jour (mais dans la pénombre tout de même pour réduire les risques de lumière parasite). Voici ce flat-field, qui est ici la moyenne de 13 poses de 10 secondes :


Ce flat corrige très bien le défaut de PRNU de l'image lunaire. Voici à nouveau ce spectre lunaire avant division :


Puis le même spectre 2D traité avec le flat fait en laboratoire :


L'interet de cette méthode d'acquisition du flat-field est d'être très confortable (acquisition durant la journée avec le spectrographe sur table si on le désire) et expéditive (le temps de pose n'est ici que de quelques secondes).

Une fois de plus l'étanchéité à la lumière parasite est cruciale. C'est vrai en toute situations, y compris lors de l'acquisition des spectres d'étoiles. Voici par exemple le flat fait sur table alors que l'éclairage ambiant est trop important et que le spectrographe n'est pas totalement hermétique:


L'allure générale est retrouvée, mais les poussières éclairées sous des incidences probablement plus rasantes par la lumière parasite produisent des ombres anormales. Attention, faire des tests d'usages, par exemple en analysant la quantité de signal arrivant sur le détecteur alors même que la lampe éclairant le diaphragme est éteinte : la valeur trouvée doit êre très faible.

Noter encore qu'un spectrographe ne se distingue pas d'une caméra servant à faire de l'imagerie du ciel au travers de filtres colorés. Pour réaliser du bon travail avec cette dernière, il est nécessaire de faire un flat-field spécifique par filtre. C'est la même chose avec Lhires lorsque la longueur d'onde centrale est modifiée.

Cependant, en général, la forme du flat-field propre au détecteur n'évolue que lentement avec la longueur d'onde. Si la longueur d'onde centrale change de quelques dizaines d'angstroms, il n'est pas utile de refaire le flat-field. Une conséquence importante est que si vous restez sur la raie Halpha, d'une nuit à l'autre, le même flat-field peut servir s'en problème, même après démontage du spectrographe du télescope. Cela couvre aussi une manipulation accidentelle du micromètre, il ne devrait pas y avoir d'effet visible sur le flat-field. La procédure d'utilisation du spectrographe en est fortement allègée. Sur la durée,  il faut simplement vérifier de temps à autre que le flat-field ne varie pas significativement. Diviser deux flat-field fait à quelques nuits d'intervalle est une précaution sanitaire de base pour vérifier que tout est stable (par exemple qu'une grosse poussière n'est pas arrivée sur le détecteur)..

Il faut être plus prudent en revanche si on se sert d'un flat-field fait dans le rouge pour corriger un spectre couvrant la partie bleu...