Spectrographie et Webcamera

LA SPECTRO DU DEBUTANT

Ou la spectro sans spectrographe.

 

Dans le petit milieu des astronomes amateurs "pratiquants" la spectrographie n'a pas très bonne réputation : "c'est difficile, ça ne marche jamais, c'est trop scientifique…" Et pourtant, avec de très modestes moyens, tout utilisateur d'une Webcam, d'un appareil photographique reflex ou même d'un appareil photo numérique (c'est à à essayer….) peut obtenir assez facilement des spectres "lisibles", donnant des informations chimiques et physiques sur différentes sources lumineuses telles que les ampoules, les étoiles, les planètes… Et cela sans spectrographe, en utilisant un simple réseau de diffraction sous cache diapositive, fixé devant un objectif photographique.

Mais avant de viser les cibles stellaires des travaux "en salle" vont nous permettre d'aborder les techniques élémentaires de la prise d'images spectrales. Quelques traitements simplifiés seront ensuite appliqués aux spectres obtenus.

 

LE MATERIEL POUR DEBUTER

1- Une Webcamera ("bricolée" pouvant recevoir un objectif photo), un boîtier photo reflex ou un appareil photo numérique.

2- Un réseau Jeulin 300 traits/mm (blazé), sous cache de verre, en montage diapo de format 24x36 (référence : 212 023 01). En vente (autour de 25 euros) chez Jeulin, rue Jacques Monod, ZI n°1 - BP 1900 27019 Evreux Cedex Tel : 02 32 29 40 40. Site Internet : http://www.jeulin.fr

3- Un objectif de 28mm ou de 35 mm de focale (un zoom photo 35-70 convient également) devant lequel on fixe le réseau avec du ruban adhésif (ou tout autre moyen…)

4- Un pied photo

5- Une ampoule dite à économie d'énergie. En fonctionnement ce type de lampe (à vapeur de mercure) émet un très beau spectre de raies d'émissions, bien pratique pour les essais. Elle peut-être achetée (pour environ 10 euros) chez un fournisseur de matériel électrique, ou au rayon électricité d'une Grande Surface. On préférera l'ampoule de forme classique à celle se présentant sous la forme d'un mince tube enroulé sur lui-même.

LES PREPARATIFS

  1. On commence par fixer le réseau. Les bandes adhésives qui maintiennent le réseau sur l'objectif photographique sont visibles sur la photo ci-dessous. On veillera, tout particulièrement, à orienter correctement les traits du réseau.

 

 

 

  

2- Le couple Webcam-optique photographique est ensuite installé sur un pied photo.

 

LE PREMIER SPECTRE

 

REMARQUE : Les images présentées dans cet article ont été obtenues avec une Webcam Philips Vesta Pro équipée d'un objectif photo de 28 mm de focale et d'un réseau 300 traits/mm.

  1. Placé à environ 4 mètres de distance, on vise l'ampoule de manière à voir apparaître sur l'écran de l'ordinateur, ou dans le viseur de l'appareil photo, l'image de l'ampoule (image du milieu, ci-dessous)

 

 Au centre, l'image de la source lumineuse (l'ampoule) n'est pas déviée par le réseau. Cette image -dite spectre d'ordre zéro- est d'une seule couleur (monochromatique). Par contre, si l'on fait tourner la Webcam de quelques degrés vers la gauche on peut voir une succession d'images de la source de plusieurs couleurs, violet, bleu, vert, jaune, orange, rouge. Il y a eu déviation de la lumière par le réseau et étalement des couleurs : on est devant le spectre d'ordre un, le plus intense. C'est en général celui qui est utilisé pour les travaux de spectrographie. Si maintenant on fait tourner la Webcam vers la droite, au-delà de l'image de l'ampoule, un autre spectre apparaît : c'est le spectre d'ordre moins un, semblable au spectre d'ordre un, mais beaucoup plus faible. Si l'on tourne la Webcam encore un peu plus vers la droite un autre spectre plus étalé et beaucoup plus faible apparaît encore : c'est le spectre d'ordre moins deux. La même constatation peut-être faite en tournant à nouveau la Webcam vers la gauche : après le spectre d'ordre un on peut voir le spectre d'ordre deux. Dans certains cas des spectres d'ordres plus faibles (trois, moins trois …) peuvent être encore observés.

Remarque : des mesures faites par Christian Buil montrent que le réseau utilisé (Jeulin 300 t/mm), qui est un réseau blazé, concentre 43% de l'énergie dans l'ordre zéro, 47% dans l'ordre 1 et 10% dans les autres ordres. Ce qui n'est pas le cas pour les réseaux non blazés : l'énergie lumineuse est répartie sur l'ensemble des ordres (1,2,3 …) et non pas majoritairement concentrée sur l'ordre un. C'est pour cette raison que l'utilisation d'un réseau blazé est fortement conseillée, tout particulièrement si l'on souhaite faire le spectre d'une source faible (cas des étoiles).

 2- On place maintenant à environ vingt centimètres de l'ampoule un carton rigide, d'une trentaine de centimètres de côté. On aura pris soin, auparavant, de percer un petit trou d'environ 2 mm avec une pointe de compas, au milieu du carton. Ce trou, situé à hauteur de l'ampoule, simule grossièrement une étoile artificielle.

3- La Webcam, avec objectif et réseau, est placée à environ 1 mètre du carton.

4- En visant le petit trou une image du spectre d'ordre 1 est prise. Elle doit ressembler à l'image ci-dessous.

 

LE TRAITEMENT DE L'IMAGE

Un logiciel tel que Paint Shop Pro permet d'appliquer ensuite à l'image brute quelques traitements très simples, qui vont améliorer nettement l'aspect du spectre.

1- Agrandissement en hauteur de l'image d'un facteur 10, puis sélection d'une bande étroite de quelques pixels de hauteur.

 

 

2- Bande spectrale après découpage.

 

 

3- Agrandissement de la bande à 60 pixels de hauteur.

 

Ce premier spectre, obtenu avec nos très simples moyens, montre parfaitement les raies en émissions sous la forme de bandes verticales colorées. Ces raies, propres au mercure, sont la "signature" spectrale de cet élément.

La prise de spectre est en général suivie d'une phase d'identification des raies (longueur d'onde, nature des éléments présent dans le spectre…). Cette démarche, souvent délicate, voire difficile, mais toujours passionnante pourra faire l'objet d'une présentation ultérieure.

 

D'AUTRES SPECTRES

Avant de passer à la spectrographie stellaire les techniques d'acquisitions et de traitements des spectres pourront être encore améliorées en "s'attaquant" à différentes sources d'éclairages publics ou domestiques.

Les lampes au sodium. Elles équipent la grande majorité des lampadaires d'éclairage public. La lumière jaune orangée diffusée permet de les identifier facilement. L'utilisation d'un carton placé à quelques centimètres de la source n'est plus possible. Mais cela ne présente pas un obstacle majeur, comme le montre le spectre ci-dessous obtenu en visant directement la source lumineuse située à un quarantaine de mètres de la Webcam. Un réseau 300 traits/mm avait été placé devant un objectif de 28 mm de focale. La large bande jaune correspond au fameux doublet du sodium, que l'on retrouve dans le spectre du Soleil et des étoiles de même classe spectrale.

Image du haut : spectre brut. Image du bas : spectre après traitement (identique au traitement décrit en détail un peu plus haut).

 

Les lampes aux halogénures métalliques. Ces éclairages très blancs utilisés sur les terrains de sports, les parkings… présentent de superbes raies bien colorées.

Image du haut : spectre brut. Image du bas : spectre après traitement (identique au traitement décrit en détail un peu plus haut).

 

Les lampe à incandescence ordinaire. Utilisées habituellement pour de l'éclairage intérieur de la maison. On constate qu'il n'y aucune raies visibles sur le spectre. Les couleurs se succèdent, du violet au rouge, sans interruptions ni transitions brutales. Ce type de spectre est dit spectre continu (ou continuum).

Spectre traité

 

Ces premiers "exercices" de spectro élémentaire étant terminés nous allons maintenant pouvoir aborder la spectrographie stellaire, toujours sans spectrographe, avec notre seul réseau sous diapositive.

En attendant, bonne spectro à tous !

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Contacter l'auteur : guy.libante@wanadoo.fr

site web : http:www.astrosurf.com/astro-images

 

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