Le principe
Qu'est ce que
le multipose ?
C'est le terme qu'on a trouvé pour
décrire le principe de faire plusieurs poses CCD sur un objet céleste
puis de les assembler. Le but est, comme nous allons le montrer, d'améliorer
la qualité des images.
Les limites de
la monture et les solutions
Tout le monde sait qu'en astronomie,
plus la longueur de la pose est grande et plus on aura des objets de
faible luminosité sur notre image. Mais en général, la monture ne peut
suivre plus de 1 à 2 minutes sans des erreurs visibles sur l'image.
Une solution est d'avoir une caméra avec capteur de guidage qui permet
de corriger ces erreurs.
Pour ceux qui n'ont pas de caméra de
guidage et c'est notre cas, il ne reste plus qu'à faire des poses d'une
certaine durée pour avoir de bonnes images puis de les additionner.
Notre monture est de bonne qualité,
ce qui nous permet de faire des poses de 1 à 4 minutes sans correction,
suivant la focale (avec ou sans réducteur) et l'endroit dans le ciel
(l'erreur de poursuite est moins importante aux hautes déclinaisons).
Le prétraitement
et l'assemblage des images
Une fois la série d'images prétraitées,
on les recale les unes par rapport aux autres, puis on les assemble.
Pour l'assemblage, il y a 4 possibilités
: l'addition, l'addition sigma-kappa
(valables tant que la dynamique de l'image n'est pas atteinte), la moyenne
et la médiane.
Pour les exemples ci-dessous, vu la
dynamique d'une image seule, on a pu additionner jusqu'à 16 images.
Pour la suite, on a effectué des moyennes (qui correspondent à une addition
puis une remise à niveau).
Réalisation
Première étape:
le choix du sujet
La première chose à faire était de
choisir un sujet. Comme on avait commencé les images en automne 2000,
on a pris un objet qui serait visible tout l'hiver : M1 la nébuleuse
du crabe. Au foyer du télescope il prend tout le champ CCD. Il est assez
lumineux et présente suffisament de détails pour montrer l'amélioration
due à l'accumulation de poses.
Seconde étape:
faire des images si le temps le permet !
Mais, avec les conditions que nous
avons eu cet hiver, nous n'avons pu faire qu'une série d'image dont
32 étaient assez bonnes pour la composition. Pour le printemps et l'été,
M1 n'étant plus visible, nous allons choisir d'autres objets pour continuer
l'étude.
Troisième étape:
prétraiter les images et les assembler
Voici donc les résultats. Nous vous
présentons ce que donne une pose de 1 minute, puis de 2, 5, 10, 15 et
finalement 30 minutes. L'image entière a été réduite d'un facteur 2
pour améliorer le temps de chargement.
A côté de l'image, un détail a été
aggrandi afin de montrer l'amélioration sur les détails. Pour chaque
image, on indique également : la magnitude limite atteinte,
les niveaux de bruit dans une zone sans étoile (les
niveaux de bruit ont été ramené à un niveau de référence d'une image
de 32 minutes) et le rapport signal/bruit d'une étoile
(la grosse au milieu du détail).
Pose de 1 minute

Mag. lim : 16.4
Bruit : min 48, max 1936, moy 972, écart type 227.4
s/b ét. : 29.26
Pose de 2 minutes

Mag. lim : 17.2
Bruit : min 448, max 1496, moy 970, écart type 131.2
s/b ét. : 40.18
Pose de 5 minutes

Mag lim : 17.7
Bruit : min 666, max 1216, moy 908, écart type 71.8
s/b ét. : 51.77
Pose 10 minutes:

Mag lim : 18.2
Bruit : min 746, max 1138, moy 915, écart type 50.9
s/b ét. : 61.37
Pose 15 minutes:

Mag lim : 18.6
Bruit : min 750, max 1102, moy 913, écart type 42.9
s/b ét. : 65.93
Pose de 30 minutes:

Mag lim : 19
Bruit : min 795, max 1046, moy 907, écart type 30.5
s/b ét. : 69.91
Analyse des résultats
Les images parlent
d'elles-mêmes
Même sans les valeurs, on voit nettement
l'amélioration entre chaque image. Vu qu'elle est encore bien visible
entre les poses de 15 et de 30 minutes, il sera intéressant de poursuivre
l'expérience pour obtenir des poses plus longues.
Les valeurs obtenues
Pour les valeurs, on voit également
l'amélioration : diminution du bruit, augmentation du rapport signal/bruit.
Ce qui est logique. Pour mieux voir l'amélioration, on va répéter les
valeurs dans un tableau:
Quelle est la
différence entre une pose de 10 minutes et 10 poses d'une minute ?
Vu que le capteur CCD est linéaire,
il n'y a pas de différence au niveau du signal. Pour ce qui est du bruit,
il ne devrait pas y avoir de différence au niveau du bruit thermique
car celui-ci dépend du temps. Par contre, pour le bruit de lecture,
on ne l'a qu'une fois sur la pose de 10 minutes et 10 fois sur la composition
des 10 poses. Mais ce bruit n'est pas 10 fois plus grand, il est seulement
racine de 10 (=3.16) fois plus grand (5.5 fois plus grand pour 30 poses).
Si ce bruit est très petit par rapport au bruit thermique, il n'y a
pas de problème. Par contre, si ce bruit est du même niveau, on perd
de la qualité. En mesurant les bruits des images de 1 minutes (noir
et offset), on obtient :
Bruit thermique: écart type
22.2 sur une image brute et 19.5 sur la médiane de 5 images
Bruit de lecture: écart type
12.3 sur une image brute et 6.5 sur la médiane de 5 images
Sur 10 poses, les bruits seront multipliés
par 3. Donc 66 pour le thermique et 36 pour la lecture au lieu de 12.3.
La dégradation n'est donc pas trop critique.
Les avantages
de la méthode
Par contre, en additionnant des poses
(addition sigma-kappa ou médiane), on peut supprimer les rayons cosmiques
et autres perturbations qui seraient venues gâcher notre image. Comment
enlever la trace d'avion sur notre pose de 60 minute !!! Alors qu'il
suffit de supprimer la pose d'une minute où l'avion est passé.
La suite...
Maintenant, en ce qui concerne les
tests, le problème est que la prochaine étape est 60 minutes ce qui
veut dire 1 séance de plus. Et la prochaine étape est 120 minutes (2
séances de plus, ou alors il faut faire des images toute la nuit....).
C'est donc un travail de longue haleine. Mais les résultats en valent
la peine. Mieux vaut faire une image de plusieurs heures et de qualité
que des quantités d'images de quelques minutes où l'on ne voit que la
structure de base sans les détails.