Mascotte, mon ami le renard de la Montagne de Lure, le 5 septembre 2005 

Questions sans réponses après la pluie

Lors d'une récente et brève rencontre, le 27 août, je n'avais pas photographié Mascotte car il pleuvait. J'ai pris l'habitude d'espérer le soleil et les rencontres d'avant la tombée du jour, qui me permettent de disposer d'un maximum de lumière pour photographier mon animal sauvage préféré.

Le lundi 5 septembre, profitant de quelques jours de vacances, je suis allé à la rencontre de Mascotte dans la forêt de Lure. Le ciel était très gris et il y avait assez peu de lumière. Je suis arrivé tôt dans la forêt, craignant de ne disposer que de trop peu de lumière si j'attendais la toute fin de la journée. La pluie avait cessé de tomber mais il avait beaucoup plu la veille et encore le jour même. J'ai été surpris par la beauté du territoire de Mascotte, complètement imprégné d'humidité, que je redécouvrais sous un éclairage nouveau.

J'ai appelé Mascotte sans trop de conviction puisqu'il était encore tôt. Il n'y avait pas un bruit et pas même un souffle de vent, ce qui était très inhabituel. Le paysage était absolument inerte et comme figé dans son humidité : pratiquement aucun son et assez peu de lumière, mais la force des contrastes et des détails illuminait le paysage. La moindre feuille luisait sur le sol, les branches des arbres étaient plus sombres, mieux découpées devant mes yeux. J'avais l'impression de me trouver dans une autre forêt, en un autre lieu. Je me suis arrêté et j'ai respiré à pleins poumons l'air de ce paysage immobile et magnifié par l'humidité : il était gorgé de senteurs mélangées et fortes. Comme décidément tout semblait devoir être différent ce jour-là, Mascotte est arrivé soudainement en face de moi et non pas par derrière. Il m'a tout de suite paru très calme et serein. J'étais étonné de le retrouver si tôt et profondément heureux de tout simplement le retrouver.

Nous nous sommes promenés dans la forêt, sa forêt. J'étais empreint d'une sorte de nostalgie et d'une vague tristesse en pensant que cette balade avec Mascotte était sans doute la dernière avant l'ouverture de la chasse, puis l'arrivée de l'automne et plus tard de l'hiver. La vie d'un renard sauvage excède rarement un an ou deux, compte tenu de la multiplicité des dangers et des prédateurs. J'ai réalisé que Mascotte avait maintenant un an et demi. Avec l'ouverture de la chasse et l'arrivée de l'automne allait s'ouvrir pour lui la saison de tous les dangers.

C'était peut-être notre dernière grande promenade, elle fut extraordinaire. Les couleurs et les senteurs paraissaient un peu irréelles, la profondeur du regard de Mascotte aussi. Je crois que jamais il ne m'avait fixé aussi intensément, et je ne l'avais jamais trouvé aussi envoûtant. J'étais comme subjugué par sa beauté et sa majesté silencieuses. Je pense que chaque image de cette rencontre si particulière traduit un peu de la charge émotionnelle de ces instants.

Je lui ai très peu parlé, mais lui ne m'a pratiquement jamais quitté des yeux. Il m'a très souvent fixé de son regard intense et interrogateur. Je me suis tu comme pour me joindre au silence de la forêt. Tout n'était qu'humidité, calme et senteurs. La présence de Mascotte était impressionnante. J'ai eu le sentiment que la forêt tout entière lui appartenait et qu'il en était à ce moment-là l'incarnation et le maître absolu. Il m'a semblé aussi que le regard insistant de Mascotte me posait des questions auxquelles je n'étais pas capable de répondre.

La séparation a été plus difficile qu'à l'accoutumée. Ému et le coeur lourd, je me suis éloigné de mon renard sur le bord d'un chemin. J'ai pensé que l'été venait de se refermer derrière nous et je me suis demandé si Mascotte connaîtrait un jour un autre printemps.

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