Comparatif performances de trois réducteurs de focale sur un C14

 

Problématique

Le C14 est un télescope de diamètre respectable mais avec l'inconvénient en astrophotographie du ciel profond d'une très longue focale de quatre mètres et donc d'une faible ouverture de f/11. Pour ne rien arranger, lorsque l'on rajoute du backfocus avec par exemple un crayford, des bagues, un AOL et une caméra, l'ouverture native de f/11 tombe alors à f/12. L'utilisation d'un réducteur de focale est alors intéressante pour accroître sensiblement l'ouverture vers f/7. Soit un gain de près de deux diaphragmes !

Mais quel réducteur choisir ? Celestron propose pour sa gamme SCT un réducteur-correcteur x0.63 que j'utilise depuis peu avec ma STL4020. J'ai intégré ce réducteur dans le focuser pour permettre une focalisation plus facile et une collimation plus durable (voir içi pour plus de détails). La marque Astrophysics propose deux réducteurs dans son catalogue : le CCDT67 x0.67 et le 27TVPH x0.75. La réputation des deux réducteurs Astrophysics est bien établie mais que donnent-ils sur un C14 ? Le vignetage est-il mieux corrigé avec les Astrophysics ? Le piqué dans les angles est-il meilleur avec le réducteur-correcteur dédié de Celestron ? Pour juger, rien de mieux qu'un petit test...

Les réducteurs testés

Les trois prétendants :

Ce réducteur-correcteur (référence 94175) est calculé pour un facteur de réduction de 0,63x et joue aussi comme un aplanisseur de champ. Sa focale est de 230mm et le tirage optique préconisé est de 86mm pour atteindre les 0,63x. Compact, il se visse en face AV et AR à l'aide de filetages 2"-24tpi. Son ouverture optique est de 41mm et sa masse de 124g. Son prix est de 130 $. Un plan coté est disponible içi.

Ce pur réducteur est optimisé pour des optiques d'ouverture supérieure à f/9. Sa réduction est de 0,67x. Sa focale est de 305mm et le tirage optique préconisé est de 101mm pour atteindre les 0,67x. Très compact, il se visse en face AV et AR à l'aide de filetages M48x0,75 ou peut être monté par son diamètre exter de coulant 2". Son ouverture optique est de 44mm et sa masse de 108g. Son prix est de 148 $. Un plan coté est disponible içi.

Ce pur réducteur est optimisé pour un usage photographique mais aussi visuel avec des optiques d'ouverture variées. Son facteur de réduction est de 0,75x. Sa focale est de 700mm et le tirage optique préconisé est de 175mm pour obtenir les 0,75x. Massif, son montage s'effectue à l'aide de filetages au standard AP (2,74"-24tpi). Son diamètre optique est de 56mm et sa masse de 295g. Son prix est de 250 $. Un plan coté est disponible içi.

 

Les conditions du test

Test 1 : Vignetage

La caméra utilisée est une STL11000 avec un capteur 24,7x36mm (diagonale 43mm). Le capteur est positionné à un backfocus fixe de 198mm du barillet AR du C14. Ce backfocus est imposé par mon train d'imagerie composé du focuser, d'un collier rotatif Takahashi, d'un AOL et de la caméra CCD. Les réducteurs sont installés dans le focuser JMI à différents tirages du capteur CCD fixe. La mise au point à l'infini est retouchée via la molette de map du C14 à chaque changement de tirage. Un écran lumineux à flats Gerd Neumann est placé devant le tube optique. Une pose fixe est donnée pour toutes combinaisons afin de juger des gains en luminosité pour les différents tirages et réducteurs. Le logiciel MaximDL est utilisé pour extraire les courbes de vignetage sur la diagonale du capteur.

Test 2 : FWHM

Pour ce test de nuit, le set-up est le même que pour le test précédent. J'ai testé les deux petits réducteurs : le réducteur-correcteur Celestron avec un tirage optique de 92mm et le réducteur AP CCDT67 avec un tirage de 98mm. Je n'ai pu monter en hard le "gros" AP 27TVPH faute de bague d'adaptation dispo lors du test. Le C14 est dirigé vers M44, l'amas de la crèche. Une pose autoguidée (capteur interne STL et AOL désactivé) de 300s est donnée pour chaque réducteur. Le logiciel IRIS analyse la position et la FWHM de toutes les étoiles du champ. Il est alors possible de tracer l'évolution de la FWHM du centre de l'image vers les bords.

Résultats

Pour tous les résultats ci-après, le tirage indiqué est le tirage optique et non mécanique.

Test 1 : Vignetage

De chaque image test est extraite une coupe selon la diagonale image à l'aide du logiciel MaximDL.

Le profil de vignetage pour chaque combinaison est tracé à partir du centre du champ. On trouvera en ordonnée l'intensité lumineuse (niveau ADU) et en abscisse la distance en mm au centre du champ. Une mesure sans réducteur (f/11,8) avec le même backfocus donne une référence. Il ressort :

On note l'augmentation de luminosité par rapport à la solution de base sans réducteur (f/11,8), une baisse régulière à mesure que l'on s'éloigne du centre du champ et une inflexion brutale due au vignetage mécanique des réducteurs. On remarquera aussi que le centre optique ne présente quasiment aucun plateau (rayon max 2mm).

De ces courbes, on peut calculer le gain en luminosité par rapport au foyer direct f/11,8, le rayon utilisable avant un vignetage sévère et la perte de luminosité du bord utile / centre.

On notera que :

 

Test 2 : FWHM

J'ai testé les deux petits réducteurs avec un tirage minimal compatible avec mon montage et offrant le champ de lumière le plus grand possible (voir graphique précédent). Le Celestron est testé avec un tirage de 92 mm soit un facteur de réduction de 0.60x et une focale mesurée de 2720 mm (f/d 7.6). L'Astrophysics CCDT67 est placé à 98 mm du CCD et la focale résultante mesurée est de 3005 mm (f/d 8.5) soit un facteur de réduction de 0.68x.

Réducteur Celestron f/6.3 (clic image 50%)

Réducteur Astrophysics CCDT67 (clic image 50%)

Pour chaque étoile du champ photographié, le logiciel IRIS mesure la FWHM et la position XY du centroïde. Il est alors possible de tracer pour les étoiles les plus faibles une courbe FWHM / centre du champ. On trouvera en ordonnée la FWHM en seconde d'arc et en abscisse la distance en mm par rapport au centre du champ. Il ressort :

On note :

Sur un rayon de 7mm, les deux réducteurs offre la même performance avec une FWHM quasi constante de 2,5".

Au delà de 7mm, le Celestron décroche plus brutalement que son concurrent Astrophysics.

Sur la limite de son champ de pleine lumière (rayon de 12,4mm), le Celestron donne une FWHM moyenne de 4,5" soit près du double du centre. Pour un rayon identique, l'Astrophysics donne une FWHM de 3,3" et en bordure de pleine lumière (rayon de 15,3 mm) la chute est limitée à 4".

 

Conclusion

Sans réducteur et pour un backfocus de 198mm, le vignetage du C14 est modéré avec -24% sur la diagonale d'un capteur 24x36mm. Bien sûr, l'ajout d'un réducteur dégrade d'autant plus le résultat que la réduction demandée est importante. A ce petit jeu de l'assombrissement bord/centre, le réducteur-correcteur dédié Celestron est le meilleur grace à sa double fonction réducteur-aplanisseur de champ.

Mais un vignetage minimal n'est pas tout. Avec l'avènement de capteurs CCD de plus en plus grands, il faut aussi un champ de lumière le plus grand possible. Là, le Celestron souffre d'un diamètre optique trop petit pour un C14 avec un champ limité à un diamètre de 24 mm. Les deux réducteurs Astrophysics sont mieux placés avec 30mm pour le CCDT67 (x0.68) et 41 mm avec le 27TVPH (x.75). Leur diamètre optique plus grand et un facteur de réduction plus faible améliorent bien les choses.

Coté piqué, la bonne surprise vient du réducteur AP CCDT67 bien plus homogène que le réducteur-correcteur de la marque.

Alors quel réducteur choisir pour un C14 non Edge HD ?

Le choix est piloté par la position de l'autoguidage par prisme (OAG) ou via un deuxième capteur type SBIG. Si ces derniers sont trop éloignés du centre optique, la perte de lumière sur le CCD de guidage devient rédhibitoire à la recherche d'une étoile guide suffisement lumineuse et peu déformée par les aberrations. Exemples :

Ces trois exemples montrent bien que sur un instrument à champ courbe et vigneté comme le C14, le choix d'un réducteur est intimement lié au positionnement de l'autoguideur par rapport à l'axe optique. Une caméra à autoguideur intégré (SBIG) a l'avantage d'avoir le ccd de guidage proche (3-4mm) du ccd imageur. Un diviseur optique (OAG) peut être intéressant si le prisme est réglable verticalement pour atteindre le champ de pleine lumière. Quelques caméras :

Caméra
Pos. Guideur
Format CCD
1/2 diagonale Diagonale
STL 4020
11,95
15,2x15,2
10,75
21,5
STL 11000
15,4
24,7x36
21,8
43,6
STL 6303
14,4
27,5x18,4
16,5
33
QSI 583 wsg
17,3
18x13,5
11,25
22,5
QSI 540 wsg
17,3
15,2x15,2
10,75
21,5

La position optimale de l'autoguideur, CCD ou prisme, par rapport au champ de lumière permet ensuite de dimensionner la largeur maximale du CCD imageur... et donc le choix de la caméra à utiliser ! Avec un SC non corrigé, on détermine d'abord son réducteur puis sa caméra. L'inverse peut conduire à de graves désillusions...

Avec une optique à champ plan, comme les nouveaux Celestron Edge HD, le chip d'autoguidage aura toujours une étoile propre de disponible. Dans ce cas, un simple réducteur tel le 27TVPH d'Astrophysics sera bien adapté. Celestron devra impérativement produire un nouveau réducteur non correcteur de grand diamètre...