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L'après-Kyoto et les conférences sur le climat

Document http://www.aa1car.com/

Brouillard glacé par -40°C à Fairbanks, Alaska, le 27 janvier 1999. Les fumées proviennent de la centrale électrique thermique (au charbon) Aurora Energy et sont une importrante source de pollution (poussières, NOx, SO2) et d’effet de serre (CH4, CO2). Document Sam Harrel/Daily News Miner.

Le principe "pollueur-payeur" (I)

Si nous voulons vivre dans un monde sain et durable, nous devons protéger notre environnement des actions destructrices de l'homme et en parallèle disposer d'une éthique de responsabilité. En effet, on ne peut pas se contenter de promesses en matière de protection de l'environnement et continuer de polluer ou d'être laxiste envers les pollueurs car très rapidement des effets négatifs vous surgir et le chaos finira par s'installer dans tous les secteurs de la vie en commençant par l'économie et la santé.

Si nous voulons protéger notre planète de la convoitise des industriels et de l'inconscience de quelques autres, en économie on aboutit au principe "pollueur-payeur".

Créé en 1972 à l'initiative de l’OCDE, à une époque où l'écologie se développait aux Etats-Unis, ce principe économique vise à limiter les nuisances sur l’environnement provoquées par les activités humaines (professionnelles et privées) et vise trois objectifs :

- l'efficacité économique : les dédommagements doivent refléter la réalité économique des coûts de pollution, de telle sorte que les mécanismes du marché favorisent les activités ne portant pas atteinte à l’environnement

- l'incitation à minimiser la pollution produite

- l’équité : à défaut de dédommagement par le pollueur, les coûts incombent au contribuable qui n’est pas responsable de ces atteintes. Le principe "pollueur-payeur" doit donc être inclus dans la législation et ce sont les pouvoirs publics qui doivent veiller à l’application de ce principe.

Le principe "pollueur-payeur" a donc pour but d'anticiper et de prévenir une nuisance ou un dommage et à fixer une règle d'imputation du coût des mesures en faveur de l'environnement. En d'autres termes, celui qui pollue doit réparer l'impact économique en participant notamment aux dépenses occasionnées par les mesures de prévention, de réduction ou d'assainissement de la pollution qu'il a provoquée.

Ce principe a d'importantes conséquences dans tous les secteurs économiques, en commençant par les grands secteurs industriels source de pollutions (métallurgie, chimie, automobile, transports, etc) mais également dans l'urbanisation et le secteur agricole (cultures intensives). Indirectement ce principe va affecter notre portefeuille à tous car chacun doit être responsabilisé puisque nous polluons tous à degré ou un autre (utilisation d’un véhicule, chauffage domestique, déversement illicite, etc.).

2003 : L'an 1 de l'Europe écologiste

L'écologie a donc un coût pour la société mais il est d'autant plus faible et supportable que nous agissons de manière préventive ou à la source de la pollution et le plus tôt possible après un accident.

Todd Stern, l'émissaire spécial des Etats-Unis pour le réchauffement climatique, estime qu'un bon aménagement du territoire et l'utilisation d'énergies alternatives ainsi que des mesures de sécurité préventives peuvent diviser le prix associé aux catastrophes par 10 (de 20 à 2% du PNB des Etats-Unis par exemple).

Entre 1905 et 1944 nous avons assisté à 44 accidents industriels ayant entraîné la mort de plus de 17000 personnes ! Ce n'est que dans les années 1960 que les Etats-Unis ont pris conscience des risques associés au secteur industriel et se sont préoccupés de l'aspect social des accidents.

Document T.Lombry

Mais il faudra attendre des accidents écologiques et industriels majeurs et dramatiques pour que les Etats et l'Union Européenne reconnaissent collectivement qu'il fallait réglementer l'utilisation des substances dangereuses : il y eut les graves intoxications aux métaux lourds (Minamanta, 1953), aux pesticides et autres DDT (~1960), les nombreuses marées-noires (Torre Canyon, Amoco Cadiz, Erika, etc), l'accident de Seveso en 1976 (37000 contaminés), Bhopal en 1984 (Inde, 3000 morts), Mexico en 1984 (Mexique, 500 morts), Tchernobyl en 1986 (31 morts directs et des centaines de milliers de contaminés) et Toulouse en 2001 (France, 30 morts).

C'est avec le procès de l'Amoco Cadiz en 1981 que le principe "pollueur-payeur" fut appliqué pour la première fois.

Mais il faudra attendre la directive européenne dite "Seveso" 96/82/EC du 24 juin 1982 pour préciser les conditions de maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses. La condamnation de l'exploitant de Seveso (Meda) sera prononcée lors de son procès en 1983 et confirmée en appel en 1985. Une fois de plus le principe "pollueur-payeur" fut appliqué.

Toutefois, sa base juridique était encore insuffisante pour définir une approche globale de la prévention des risques technologiques et naturels. Le cadre de cette directive devait donc être amendé et si possible être plus contraignant pour les pollueurs.

Le 27 janvier 2003, après discussion (houleuse suite à l'intervention des écolo allemands) au Parlement Européen, le Conseil de l'Europe pris la décision d'incorporer le principe "pollueur-payeur" dans une directive européenne. Dorénavant les pollueurs sont objectivement responsables pour la prévention et la réparation des dégâts environnementaux. Ainsi, une société à l'origine d'une pollution - même involontaire - sera tenue pour responsable, ce qui devrait inciter les entreprises à plus de prudence et de prévention.

Mais en parallèle, le 4 octobre 2003, le Parlement européen et le Conseil de l'Europe ont adopté une autre directive établissant un système d’échanges de quotas d’émissions de gaz à effet de serre (ou GES). Autrement dit, si vous ne polluez pas assez, d'autres le feront pour vous légalement moyennant finance ! Les écologistes allemands parmi d'autres ont désapprouvé cette directive qui équivaut à légaliser la pollution. Quoi qu'il en soi, l'Europe se mobilisait contre les pollueurs.

Enfin, suite à l'accident de Seveso, le 16 décembre 2003 le Parlement européen et le Conseil de l'Europe ont adopté la directive "Seveso II" 2003/105/EC, amendant la directive 96/82/EC du Conseil. Cette fois son champ d'application couvre sans distinction l’activité de stockage et la mise en oeuvre de substances dangereuses dans un procédé manufacturé.

Cette nouvelle directive prend en compte les études relatives aux propriétés dangereuses de certaines substances et le retour d’expérience de plusieurs accidents graves survenus en Europe entre 2000 et 2003 : la pollution du Danube par des cyanures en janvier 2000, la pollution de Baïa Mare en Roumanie, les explosion d’artifices en mai 2000 à Enschede aux Pays-Bas ainsi que l'explosion de l'usine AZF en septembre 2001 à Toulouse.

Finalement, le 21 avril 2004, le Parlement et le Conseil européens publièrent la directive 2004/35/CE sur la responsabilité environnementale concernant la prévention et la réparation des dommages environnementaux, le fameux principe "pollueur-payeur".

Le Protocole de Kyoto

Depuis 2004, le principe "pollueur-payeur" est évidemment inclus dans tous les protocoles protégeant l'environnement dont le Protocole de Kyoto.

Rappelons que le Protocole de Kyoto (cf. aussi ONU) entra en vigueur le 16 février 2005, soit 7 ans après sa ratification. Il expira en 2012 mais l'Accord de Paris (cf. COP21) entré en vigueur en 2016 fixa de nouveaux objectifs. On y reviendra (cf. page 5).

Ainsi que nous l'avons expliqué dans l'article consacré à la climatologie, beaucoup d'États pollueurs n'y participent pas. Heureusement le 30 septembre 2004, devant l'état vagabond de son propre pays, après trois ans de réflexion et d'analyse, la Russie du président Putine accepta de ratifier le Protocole de Kyoto. A elle seule elle produit 17% des gaz à effet de serre.

Grâce à cette ratification nous avions atteint les 55% requis et le monde pouvait enfin espérer réellement une réduction substantielle de la pollution de l'air. Ce fut une très bonne nouvelle pour tout le monde. Le mérite du président Putine fut à la hauteur des enjeux. En effet, malgré son économie déficiente et sa société en pleine mutation, le Gouvernement russe accepta le défi du développement durable.

C'est également une bonne leçon pour les trois mauvais élèves. Aujourd'hui les Etats-Unis et la Chine sont les deux pays ayant la croissance la plus forte, le Japon étant en perte de vitesse. Mais ce sont aussi trois parmi les pays les plus riches ou qui le seront bientôt. Ils peuvent en tous cas beaucoup plus facilement exécuter ce Protocole que beaucoup d'autres signataires. Espérons qu'ils en tirent la leçon.

Voyons comment les différentes nations ont réagi au cours des conférences sur les Changements Climatiques qui se sont déroulées par la suite et les mesures prises pour éviter que le réchauffement climatique ne s'aggrave.

La Conférence de Montréal (2005)

La Conférence sur les Changements Climatiques qui s'est tenue à Montréal du 28 novembre au 10 décembre 2005 (UNCCC et Conférence des Parties COP 11 et COP/MOP 1) a vu la participation de plus de 150 pays (contre 157 en 2001 et 141 en 1997) qui ont accepté de lancer des négociations formelles sur la réduction des gaz à effet de serre après 2012.

Mais du fait que les Etats-Unis ont rejeté toute discussion en 2001, l'un des objectifs de Montréal était d'impliquer Washington dans les futurs efforts de réduction de l'effet de serre ainsi que les pays émergents comme la Chine ou l'Inde, qui n'ont pas non plus d'engagements formels dans le cadre du Protocole.

Les Etats-Unis ont refusé d'y prendre part officiellement du fait qu'ils n'étaient pas signataire du précédent traité. L'ancien président américain Bill Clinton, partisan de Kyoto, pris alors la parole soulignant que l'administration Bush avait "totalement tort" de refuser le Protocole. Sous la pression des autres signataires et des opposants de son propre pays, les Etats-Unis ont malgré tout accepté un dialogue informel pour limiter le réchauffement climatique et entériner le Protocole.

Concrètement la participation des Etats-Unis a permis aux acteurs de Kyoto de poursuivre leurs efforts après 2012. C'est déjà un pas positif même si les Etats-Unis n'ont rien promis.

Ceci dit, depuis quelques années les Etats-Unis commencent à réagir, en particulier en Californie et de nombreuses villes ont déjà conclu de leur côté des accords de limitation de leurs émissions de gaz carbonique. Une fois de plus l'exemple vient du bas et on peut espérer qu'à travers ses représentants écologistes et ses portes-paroles tel Al Gore, la population américaine forcera l'Administration a changé de politique.

A voir : What's Really Warming tthe World?, Bloomberg

Que représente réellement le réchauffement mondial ?

Durant sa phase d'industrialisation aucun pays développé ou en voie de développement ne peut éviter de polluer l'atmosphère. Ce n'est généralement qu'une fois cette phase passée que les sociétés pensent à y remédier. Dans le cadre de la réduction des émissions de gaz carbonique, les participants à la Conférence de Montréal sur le climat qui s'est tenue en 2005 et notamment les membres du G8 ont essayé de sensibiliser les pays en voie de développement à plus de responsabilité dès le début de leur industrialisation. Le message ne passe pas facilement car les donneurs de leçons n'ont jamais montré l'exemple. Documents ISTP et NurseZone.

La Conférence de Nairobi (2006)

Suite à la Conférence sur le Climat (UNCCC - COP12 et CMP2) qui s'est tenue à Nairobi du 6 au 17 novembre 2006, il a été décidé de revoir le Protocole de Kyoto non pas en 2012 mais déjà en 2008. En effet, pour tous les participants l'après-Kyoto est un défi pour le XXIe siècle. Après l'accord mitigé obtenu à Montréal, celui de Nairobi démontre que même les pays en voie de développement acceptent de discuter des moyens et méthodes à mettre en place pour réduire leurs émissions de gaz carbonique.

En 2006, les Etats-Unis, l'Australie, le Japon, la Chine, la Corée du Sud et l'Inde ont également décidé de signer un "Partenariat Asie-Pacifique pour le développement propre et le climat". Bien que cette convention n'offre aucun caractère obligatoire, elle incite tout de mêmes ces pays à lutter contre la pollution et mettre en place des réformes visant à réduire l'émission des gaz à effet de serre. 

Aujourd'hui, 200 Etats doivent trouver les moyens concrets pour réduire individuellement leurs agents polluants et à terme l'effet de serre. Pratiquement aucun pays n'a atteint ses objectifs. Autrement dit, nous sommes en retard sur nos prévisions.

Selon l'économiste anglais Sir Nicholas Stern, les effets financiers du réchauffement climatique on été estimés à plus de 5500 milliards d’euros. Les conséquences de cette crise pourraient être catastrophiques pour l'économie mondiale, plongeant les pays des cinq continents dans une profonde et durable récession. Si on ne réagit pas avec plus de rigueur et de volonté, nous allons tout droit dans le mur et se sont nos enfants qui payeront la facture. On reparlera des résultats concrets de chaque nation lors de la prochaine conférence sur le climat mais d'ores et déjà les grandes nations, y compris l'Europe, peuvent avoir honte de la lenteur de leurs actions.

La conférence de Bangkok de l'IPCC (2007)

Le rapport de l'IPCC publié en février 2007 (IPPC WG1 AR4) envisageait une hausse des températures pouvant atteindre dans le pire des cas jusqu'à +6.4°C d'ici 2100 par rapport à la période 1980-1999. Il était donc grand temps que nous changions de mentalité !

Au terme de la 9e Session du 3e groupe de travail de l'IPCC (GIEC) sur l'"Atténuation du Changement Climatique" (Mitigation of Climatic Change) qui s'est tenue du 30 avril au 3 mai 2007 à Bangkok en Thailande, les spécialistes mondiaux du climat ont publié leur rapport.

A lire : Le rapport Stern

Revue économique du changement climatique

A gauche, Rajendra K.Pachauri, président de l'IPCC en 2007. A droite, l'évolution de la concentration de gaz carbonique prédite jusqu'en 2100.

En résumé, ils ont reconnu que les 20 à 30 prochaines années seront cruciales pour atténuer le réchauffement planétaire. "Si nous continuons à faire ce que nous faisons maintenant, nous aurons de sérieux problèmes", a averti Ogunlade Davidson, co-président du groupe de travail.

Rajendra K. Pachauri, président de l'IPCC a précisé que ce rapport est un "résumé à l'intention des décideurs [politiques qui] identifie clairement des mesures pour lutter contre le changement climatique à un coût relativement modéré". "Il existe un potentiel important pour réduire les émissions [des gaz à effet de serre] dans les prochaines décennies", a renchéri Bert Metz, co-président du 3e groupe de travail. "Et ce potentiel est tel qu'il permettrait de compenser la croissance des émissions de gaz à effet de serre avec les technologies actuelles", a-t-il ajouté. "Il y a tant de choses qu'on pourrait faire à des coûts bas. Tous les secteurs pourraient contribuer à la réduction des émissions dans tous les pays du monde", a-t-il également fait valoir. 

"Le secteur du bâtiment est celui qui offre le plus grand potentiel pour des actions à coûts bas", a précisé B.Metz. "Réduire la déforestation permettrait également d'apporter une contribution majeure à la réduction des émissions", a-t-il ajouté.

Mais il faut faire vite, ont alerté les experts. "Les efforts d'atténuation [du réchauffement climatique] dans les 20 à 30 prochaines années auront un large impact sur les possibilités d'atteindre des niveaux plus bas de stabilisation" des émissions de gaz à effet de serre, souligne le rapport de synthèse de l'IPCC.

A l'époque, les spécialistes estimaient que pour stabiliser cette pollution à des niveaux situés entre 445-490 ppm pour le CO2 et autres gaz à effet de serre, fallait que ces émissions atteignent leur pic avant 2015 puis diminuent si on voulait redescendent ensuite à 50% du niveau de 2015 soit ~200 ppm d'ici 2050 et contenir la hausse de la température moyenne mondiale entre + 2°C et + 2.4°C, selon le meilleur scénario présenté par l'IPCC. Mais "plus on voudra atteindre un niveau de stabilisation bas, plus vite ce pic devra être atteint et le déclin des émissions s'amorcer", ont souligné les experts. Or c'est tout le contraire qu'on observa avec une valeur moyenne de 408 ppm de CO2 en 2016 et toujours en hausse ! Les conférences ultérieures de l'IPCC n'ont fait que renforcer les prévisions alarmantes des changements climatiques et de nouveau mis en évidence le manque de volonté de beaucoup de grandes nations.

En fait, pour atteindre les objectifs du Protocole de Kyoto dans les délais, il n'y a qu'une solution : changer nos mentalités. Ce sera l'objet du prochain chapitre.

Prochain chapitre

Changeons nos mentalités

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