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Astrologie et divination

De l'art d'interpréter les signes du ciel (I)

Ce site éducatif étant consacré aux sciences et en particulier à l’astronomie, il est bon de rappeler que les astronomes n’aiment pas être pris pour des astrologes. Et ils ont mille fois raisons ! Tout comme l'homme primitif ignorant et craintif, l’astrologue croit encore que l'univers est à notre image et que les choses de la nature peuvent nous influencer ! Seriez-vous soumis "à l'emprise de Vénus", "lunatique" ou "fragile de l'oeil droit parce que la Lune cache Arcturus" ?

Selon les astrologues, Einstein devait son génie "à la position dominante d'Uranus le jour de sa naissance, s'opposant à Jupiter qui gouverne le savoir"... "Quel délire incroyable ! disait déjà Cicéron il y a 2000 ans à propos de l'astrologie, car toute erreur ne doit pas être appelée bêtise"[1].

Historique

Le grand public confond encore parfois astronome et astrologue. Cela était peut-être vrai dans l'Antiquité, il y a 5000 ans, époque à laquelle les signes astrologiques prirent naissance en Mésopotamie, à l'époque des civilisations Sumériennes, Chaldéennes et Assyriennes qui se développèrent dans la région située entre le Tigre et l'Euphrate qui s'ouvre sur le Golfe Persique.

L'astrologie - l’astromancie devrions-nous dire - trouve ses fondements dans son usage culturel et son caractère moral. A l'image de la pensée d'Aristote, le monde supralunaire, domaine des étoiles fixes était immuable et éternel, pays des âmes et des esprits. Ici bas, nous étions sous l'emprise du changement, en quelque sorte manipulés par un déterminisme dont seuls les astrologues pouvaient infléchir le destin.

Si leurs prédictions n'étaient pas toujours exactes, ils avaient un argument efficace pour leurs détracteurs tels Calvin ou Gassendi : "Les astres inclinent mais ne contraignent pas". Grâce à ce principe, l'astrologue pouvait se permettre d'être évasif, utilisant un langage ambigu propice aux interprétations dont profitèrent longtemps les oracles et autre Pithie de Delphes.

A voir : B comme Babylone

L'art divinatoire est né en Mésopotamie vers 2500 ans avant notre ère. A droite, la Pythie rendant un oracle à Delphes (peinture sur Kylix attique, vers 440 avant notre ère). Documents T.Lombry et Altes Museum.

De nos jours ce principe transformant des généralités en tendances personnalisées a été conservé. En effet, faite lire le même horoscope à des personnes nées sous des signes différents. Tous les lecteurs se retrouveront dans 60 à 70 % des faits évoqués. Pourquoi ? Parce qu'ils sont suffisamment évasifs. Les personnes les moins critiques ont tendance à se retrouver dans des généralités, c'est l'effet Barnum : "dans un spectacle de cirque disait Branum, il y en a un peu pour tout le monde". C'est exactement le même principe qui s'applique à l'astrologie. Exemple, si je prédis que vous avez les yeux noisettes et que cette semaine vous souhaitez faire des économies, je suis certain que la majorité d'entre vous me confirmera ces faits; ce n'est qu'une question de probabilité. Certains évidemment en tireront du profit.

Tycho Brahé croyait à l'influence des astres sur la destinée des hommes. Il fut astrologue mais aussi astronome au XVIe.s.

L'astrologie comme nous la connaissons aujourd'hui était appelée l'"astrologie juridique" car comme la médecine ou la justice, le diagnostic posé par deux experts était souvent contradictoire. Comme le rappelle Keith Thomas[2] ce n'est pas parce qu'un malade est mécontent de son médecin que la "science" thérapeutique est mise en cause.

Pendant son époque faste, l'astrologie orientale ou arabe avait comme tâche première de conseiller les dignitaires, avec le risque qu'ils prennent des décisions peu appréciées. L'astrologue avait donc une tâche sociale très malicieuse, mêlée de diplomatie et de bon sens.

Mais l'astrologue et astronome danois Tycho Brahé découvrit une étoile soudainement dans le ciel en 1572[3], phénomène qui ébréchait les théories d'Aristote sur la perfection du monde supralunaire. Un demi-siècle plus tard Galilée découvrit des taches sombres sur le Soleil et Halley démontra que les comètes appartenaient au système solaire. Les cieux n'étaient plus immuables et il devint évident que les astres n'étaient ni plus ni moins que des corps semblables à notre Terre mais prodigieusement éloignés.

Les astrologues versés dans les mathématiques (l'astrologie naturelle) rationalisèrent son aspect prophétique, caractérisé de judiciaire. Un courant de pensées tenta de "laïciser" l'astrologie, évacuant son côté irrationnel et son charlatanisme. Il fallut attendre que s'opère un changement de mentalité pour finalement considérer l'astrologie comme une "pseudoscience aussi fragile que dangereuse"[4]. Mais les hommes de sciences gardaient leurs passions et leurs préjugés.

Aujourd'hui encore, de nombreux chercheurs croient en l'influence des astres. Pour l'astronome moderne, la vision du monde est toute différente. Il travaille avec la rigueur scientifique, cherchant à élucider les problèmes que lui pose la nature. Les astres n'ont plus de fonction pratique et ne peuvent en rien guider les "affaires humaines".

Le philosophe et logicien Karl Popper disait que l'on reconnaissait une pensée scientifique à ce qu'elle devait être réfutable[5]. Enoncer un fait à l'instar de l'astrologue. S'il vous est possible de le contredire, il s'agit d'une théorie scientifique. Dans le cas contraire, cette hypothèse est une idée du ressort de la philosophie. De la physique quantique à la Relativité générale, de l'infiniment petit à l'infiniment grand, ce principe fait loi. Ne pas y souscrire relève de la métaphysique, cette philosophie de la Grèce Antique qui met l'accès sur notre perception du monde. Cela ne signifie pas que la science garantisse ses résultats, mais la "méthode scientifique", expérimentale, écarte la plupart des croyances philosophiques.

Nostradamus

Michel de Nostredame dit Nostradamus, devenu célèbre suite à la publication de ses "Prophéties" en 1555, était étudiant en médecine à la faculté de Montpellier en France. Bien que l'Université n'a aucune trace de son diplôme, il dut l'obtenir car juste après son mariage il ouvrit un cabinet de médecine à Ajen en 1533. Comme tous les médecins de l'époque, Il faisait des horoscopes, surtout à des fins thérapeutiques. A partir de 1549, il publia également des almanachs (qui comprennent des horoscopes) qu'il signa sous son nom latinisé. Rabelais et Montaigne comptaient parmi ses amis. Il servit également Catherine de Médicis, connue pour son intérêt pour l'ésotérisme, à laquelle il dédia son almanach de 1556.

Michel de Nostredame dit Nostradamus.

Nostradamus descend d'une famille juive convertie au catholicisme un siècle plus tôt, mais reste très influencé par la Kabbale qui imprègnera plus tard ses "Prophétie". Humaniste avant d'être astrologue, il ne considéra jamais ses "prophéties" comme un recueil de catastrophes comme les médias tentent de les présenter, mais plutôt comme des indications du déroulement de l'avenir "pour le profit commun de l'humanité" comme il l'écrit lui-même, et une leçon sur l'Histoire des hommes. Il se présente donc comme un prophète inspiré doublé d'un savant, des qualités dont il va tirer profit.

"Les Prophéties" de Nostradamus constituent un ensemble de plus de 1000 prophéties et présages organisés en quatrains volontairement codés, sans pratiquement mentionner de lieu ni de date qui, selon les astrologues et autres "experts" en prophéties "regorgent de détails si précis qu'ils ne peuvent s'appliquer qu'à un seul évènement". Des centuries comme "Soleil Levant un grand feu l'on verra" signifie selon les astrologues "l'explosion d'Hiroshima au pays du Soleil Levant". Certains ont lu dans ces quatrains la révolution française, l'avènement de Napoléon, d'Hitler, l'attentat du World Trade Center voire même la fin du monde en 2012 (mais ce quatrain est un faux qui n'a jamais  été écrit par Nostradamus) !

Malheureusement, le texte de Nostradamus est obscur et chaque mot peut avoir plusieurs sens. De plus, les "Prophéties" ont fait l'objet de plusieurs éditions, parfois durant la même année, souvent basées sur des manuscrits dans lesquels certains quatrains furent modifiés, peut-être mal transcrits par l'éditeur, et nous avons perdu le texte original. Par conséquent les quatrains peuvent être interprétés de nombreuses manières différentes. On peut même y déceler des incohérences !

La tour de Montpellier depuis laquelle Nostradamus préparait ses cours de médecine et observait le ciel.

Au contraire, l'historien Roger Prévost voit plutôt dans ces quatrains les comptes-rendus d'un chroniqueur se penchant sur son temps et décrivant des faits historiques de son époque ou passés (par exemple, le quatrain XXXV évoquant soi-disant la mort du roi Henri II correspondrait à la prise de Byzance en 1453 du fait que chaque mot colle parfaitement au contexte).

Jean Céard, professeur émérite d'histoire littéraire et culturelle de la Renaissance critique également l'interprétation farfelue que de soi-disant experts donnent aux "Prophéties", spécialement aux Français qui les interprètent comme autant d'évènements touchant la France, ce qui est loin d'être démontré. Céard rappelle que le sens des prophéties est caché et a prêté à toutes les interprétations depuis près de cinq siècles sans qu'aucune ne puisse être validée avec certitude.

L'interprétation n'est pas aisée car pour comprendre le sens des quatrains, il faut interpréter les mots sans équivoque, ce qui exige également une maîtrise de l'histoire et de plusieurs langues et patois (vieux français, latin, grec, provencal) ainsi que leurs arcanes et les changements de sens des mots au fil des siècles, des connaissances que peu d'experts peuvent revendiquer.

Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que des auteurs incompétents ou de simples amateurs en mal d'imagination interprètent les "Prophéties" selon leur humeur et qu'on assiste au développement de tout un folklore autour des "Prophéties" dont abusent les astrologues en mal de renommée. Rappelons que même Hitler et les Alliers essayèrent d'en tirer profit au cours de la Seconde guerre mondiale.

Les sceptiques se demandent toujours si Nostradamus a réellement prédit l'avenir. En fait, toutes les prophéties de Nostradamus furent interprétées a posteriori. En effet, des astrologues ont cru prédire l'avenir sur base des "Prophéties" mais ils se sont toujours trompés (et ont trompé leurs lecteurs par la même occasion). Pas une seule "Prophétie" n'a pu prédire un évènement futur ! Conclusion, soit les astrologues et les exégètes se sont trompés... soit Nostradamus n'a jamais rien prédit !

Chaque époque à ses soi-disant prophètes. Déjà de son temps, si Nostradamus était un médecin réputé (notamment durant les épidémies de peste), il comprit très tôt que ses horoscopes personnalisés pouvaient lui rapporter beaucoup d'argent.

Suite à la visite de Catherine de Médicis chez Nostredame à Salon de Crau en 1564 qui fut organisée avec faste, Nostradamus fut nommé Médecin ordinaire du Roi, un titre prestigieux qui ne fera qu'embellir sa réputation de devin. Face à son succès, certains auteurs de pamphlets ont voulu mettre la population en garde et qualifièrent Nostradamus de charlatan. Mais devant l'intérêt de la population pour l'ésotérisme, Nostradamus profita de cette mode et de l'essort de l'imprimerie pour accroître ses affaires et asseoir sa réputation.

Le seul frein à sa célébrité c'est Nostradamus lui-même qui tenta de l'imposer en exigeant de ses héritiers de ne jamais publier ses "Prophéties". Or dès le décès de son maître, son secrétaire Jean-Aimé de Chavigny viola son serment et chercha le sens caché des "Prophéties" comme d'autres amateurs après lui, conduisant près de 500 ans plus tard à la publication de plus de 100000 ouvrages sur ce thème.

En résumé, bien que les "Prophéties" de Nostradamus restent d'actualité en ces temps de crises où les gens sont anxieux ou angoissés et cherchent des réponses à leurs interrogations, le texte est suffisamment obscur et souple pour que chacun puisse y trouver des réponses en fonction de ce qu'il cherche. C'est un style littéraire typique des horoscopes et qui les rendent peu fiables. Rappelez-vous que le verbe nous est donné pour flatter ou médire, rechercher la vérité ou nous arranger avec la réalité. A chacun de juger.

Retour de l'obscurantisme

De Platon à Einstein, les chercheurs ont tenté de comprendre la relation que nous avions avec l'espace et le temps. Le monde qu'ils fabriquaient n'était pas lié à des méditations métaphysiques. Quelquefois même il n'était même pas lié à la réalité, mais bâti autour d'une intuition géniale. Mais jamais les scientifiques n'ont oublié qu’in fine leur théorie devait subir l'épreuve de la réalité.

Sous le couvert d'une formation scientifique, certains astrologues publient des ouvrages de vulgarisation[6] sans même imaginer les conséquences intellectuelles de leurs actes.

Ainsi, en 1990, les éditions PUF ont décidé au bout de 16 ans de remplacer l'excellent ouvrage sur l'astrologie écrit par l'astronome Paul Couderc (PUF-Que Sais-Je ? N° 508, disponible en ligne chez Dominique Caudron) par celui de Mme Suzel Fuseau-Braesch, auteur d’un petit opuscule sur le sujet, alors que cette personne est... docteur en biochimie !

Mais l'éditeur ne s'y est pas trompé et à tout de même classé l'ouvrage soi-disant scientifique de Mme Fuseau-Braesch dans le genre "ésotérisme". Bien que totalement non fondé et vide de sens, cet opuscule a malgré tout rapporté à son auteur quelques centaines d'euros durant 15 ans. A se demander jusqu'où va l'escroquerie et la naïveté des lecteurs comme de l'éditeur...

Cette écrivaine qui mèle dangereusement mysticisme et science n'hésite pas à aborder seule des sujets controversés qu’elle ne maîtrise pas, dans un but purement lucratif, confondant astrologie et astronomie, croyances et théories scientifiques, concepts philosophiques et politiques.

En fait, il est navrant de constater qu'il est encore possible au XXIe siècle, dédié à la science et la technique, que l'ouvrage d'un éminent astronome soit remplacé, sans l'égaler, par celui d'une personne incompétente sur le sujet qui, de surcroît n'est même pas astrologue !

Les douze maisons astrologiques.

Ainsi que le souligne dans un encart l'astronome Denis Savoie, attaché au Palais de la découverte de Paris, voici par exemple ce que dit Mme Fuseau-Braesch en citant un astrologue parlant d'astronomie : "Saturne, par sa masse, sa lenteur, la relative stabilité de sa tension gravitationnelle, se rapproche de Jupiter. Par contre, l'inclinaison de son axe en sens contraire de celui de la Terre et son énorme anneau font que la planète intercepte le flux électromagnétique composé qui, du centre de la galaxie et du Soleil, se dirige vers la Terre... Ainsi, l'influence de Saturne est toujours privative d'énergie, de vitalité." Que le lecteur averti, l'astronome ou le physicien qui comprend ce charabia m'écrive ! Pas étonnement que les astronomes rejettent l'astrologie dans les pseudosciences !

Ainsi que le dit si justement Denis Savoie, Mme Suzel Fuseau-Braesch ne croit pas si bien dire quand elle cite un auteur : "la plupart des astrologues font preuve d'une méconnaissance de l'astronomie et de la science à faire frémir "... Michel Rouzé[7], rédacteur à "Science et Vie" faisait judicieusement remarquer : "l'ouvrage de Suzel Fuseau-Braesch est le contraire de l'actualisation du sujet : il le ramène à des siècles en arrière."

Heureusement cet ouvrage n'est plus édité. En effet, depuis 2005 les astrophysiciens Daniel Kunth et Philippe Zarka ont publié un nouveau "Que Sais-Je ?" sur L'astrologie qui remet cette pseudoscience à sa juste place en ce XXIe siècle qui n'a que faire du charlatanisme. Mais il fallut 15 ans à l'éditeur pour se décider à remplacer l'ouvrage pseudoscientifique de Fuseau-Braesch par une critique scientifique en règle ! Bien sûr mieux vaut tard que jamais mais le peu de sens critique du comité de lecture des éditions PUF est édifiant pour avoir accepté l'édition précédente.

Pour l'anecdote, sur le site "La Lettre des Astrologues" (FDAF), Suzel Fuseau-Braesch n'a pas apprécié sa mise à l'écart. Elle qualifie cette nouvelle édition "écrite par des antiastrologues" de "régression des Presses Universitaires de France" ! Sans commentaire. Elle évoque le fait que l'éditeur a "refusé [sa] proposition de refondre la prochaine édition [de son livre] tant les choses ont changé depuis 15 ans..." ! Disons plutôt que l'éditeur a revu sa position et laissé les pseudosciences à la seule place qu'elles méritent, la critique scientifique, et remis les sciences à l'honneur. Ouf ! Depuis cette époque, on n'a plus jamais entendu parlé de Suzel Fuseau-Braesch.

Les propos ésotériques et l'amertume de Suzel Fuseau-Braesch montrent avec éloquence que l'astrologie à tout de même le pouvoir de tromper bien des gens cultivés. Mais le refus de l'éditeur de publier sa nouvelle édition n'est qu'un juste retour des choses : à tromper les gens pour le lucre on finit méprisé.

En revanche, d'autres astrologues tout aussi peu crédibles mais médiatisés conservent un certain public pour ne citer que Françoise Hardy (chanteuse) et Elizabeth Teissier (sociologue de formation) qui malgré les critiques de nombreux scientifiques, y compris à la télévision, continuent à duper les gens en publiant annuellement des horoscopes bidons (car leurs prédictions ne se sont jamais confirmées) dans la presse, soutenus par une réputation surannée et un marketing efficace à défaut de cohérence scientifique.

Cette vision du monde que nous proposent les astrologues est en soi obsolète car elle ne correspond plus à notre mentalité : les translations socioculturelles de nos sociétés ont conduit à modifier notre sens de la réalité et notre façon de penser. Les langages mystiques, herméneutiques et autre sorcier sont des reliquats d'un âge révolu qui n'ont plus cours au XXIe siècle !

Voyons concrètement sur quelles bases se fonde l'astrologie et si elles résistent à la critique scientifique.

Les faux repères de l'astrologie

Qu'en est-il de l'utilisation des fameux signes du zodiaque en astrologie ? Ceux-ci font référence à douze constellations. Et c'est ici que l'astrologue commet une première erreur. Chaque constellation représente un ensemble d'étoiles plus ou moins étendu dont les hommes ont associé le dessin à un animal ou un personnage (le taureau, le lion, la vierge, etc). Mais ces étoiles sont réunies arbitrairement par un effet de perspective. Observez-les depuis une autre étoile du ciel ou attendez quelques centaines de milliers d'années et vous constaterez que le dessin des constellations se sera modifié. L'astrologue ne tient pas compte du mouvement propre des étoiles dans ses calculs : les étoiles sont fixes sur la voûte céleste comme du temps des Anciens Grecs ! Or certaines étoiles proches se déplacent à plus de 100 km/s !

Deuxième erreur, les astrologues ont divisé le ciel en douze constellations s'étendant sur 30°, le Soleil mettant 30.5 jours pour traverser chacune d'elle. Or tout astronome pourrait leur dire que le Soleil met 2 mois pour traverser la Vierge mais à peine 10 jours pour traverser le Scorpion. Si les astrologues veulent ne fût-ce que respecter le déplacement apparent du Soleil à travers le ciel, il n'y a aucun raison d'attribuer des périodes égales aux douze constellations du zodiaque. S'ils le font c'est par paresse intellectuelle, pour simplifier leurs calculs.

L'astrologie ne se repère pas par rapport aux constellations ou aux astres comme on pourrait l'imaginer. Les astrologues associent uniquement un constellation (une maison) aux dates de naissance des individus (et des objets parfois) et en corollaire, puisqu'ils sont nés sous "cette étoile", ils ont associé le comportement des individus à tel ou telle constellation ou astre. Comme le dirait un astrologue, "si vous êtes né sous le signe du bélier vous êtes sûr de vous et fonceur", bref nous serions prédestinés... A chacun d'apprécier cette conclusion non fondée.

Ensuite, l'astrologue détermine les longitudes et latitudes des planètes du système solaire, de la Lune et du Soleil repérées par rapport au plan de l'écliptique et au Point vernal γ. Ce dernier correspond à l'équinoxe de printemps et représente le point d’intersection entre l’écliptique et l’équateur céleste, lieu annonçant le passage du Soleil dans l’hémisphère nord. Les subdivisions du zodiaque sont donc repérées par rapport aux équinoxes et aux solstices. Mais l'emplacement du Point vernal prête lui aussi à discussion. En effet, parmi les erreurs que l'on rencontre en astrologie et dont les astronomes Paul Couderc, Daniel Kunth et Philippe Zarka ont donné une analyse méticuleuse, il y a le problème des coordonnées du Point vernal. C'est un problème relatif mais il a son importance.

A voir : Le Décalage du Point Vernal, Larousse

A consulter en ligne : Stellarium Web, simulateur du ciel

A gauche, seul héritage de l'astrologie, pour des raison pratiques les astronomes (surtout amateurs) utilisent les constellations du zodiaque pour repérer les astres du système solaire. Il est en effet plus facile de citer le nom d'une constellation que des coordonnées. Sur cette carte du ciel simulée pour le 6 décembre 2020 au soir, Mars est dans les Poissons, Uranus dans le Verseau, Saturne et Jupiter dans le Sagittaire. Mais à part les astrologues, personne ne voit dans cette carte du ciel un lien de cause à effet avec les activités humaines. A droite, schéma de la précession des équinoxes. Voir le texte pour les explications. Document Stellarium/T.Lombry et Larousse.

Dans le mouvement propre apparent du Soleil sur l'écliptique, la région du ciel où il traverse l'équateur céleste varie au cours du temps, obéissant à la période de rotation de l'axe de la Terre sur elle-même. Comme le montre le schéma ci-dessus à droite, la Terre décrit ainsi dans l'espace un grand cercle en 25800 ans environ donnant à différentes étoiles le rôle d'étoile Polaire (Polaris aujourd'hui, Errai en l'an 4500, Aldéramin en l'an 7500, Véga en l'an 12000, etc).

Etabli à l'époque d'Hipparque, au IIe siècle de notre ère, en 2000 ans le zodiaque s'est modifié au point que l'équinoxe de printemps, le fameux Point vernal, a rétrogradé pratiquement d'une constellation : signes et constellations se chevauchent de 90%. Le passage du Soleil dans chaque constellation recule ainsi par rapport aux signes du zodiaque : aujourd'hui, le 20 ou le 21 mars, sous le premier signe du zodiaque (le Bélier) en réalité le Soleil traverse seulement le dernier (les Poissons). Il faudra près de 258 siècles pour rétablir la coïncidence des constellations et des signes... Le Soleil a bien du chemin à parcourir si ceux qui croient en l'astrologie veulent ne fut-ce qu'appliquer des "formules" exactes, tenant compte de ce que qu'on appelle la précession des équinoxes ! Cette astrologie est appelée l'astrologie tropicale, c'est la plus pratiquée en Occident. Plus respectueuses des faits mais peu pratiquées sous nos latitudes, l'astrologie sidérale et l'astrologie stellaire tiennent compte du lent glissement du zodiaque.

Ceci dit, le glissement apparent des constellations n'empêche nullement les astrologues d'établir des prédictions aussi "précises" qu'il y a 2000 ans puisqu'elles sont avant tout basées sur les positions des astres par rapport au système de repères. Comme celui-ci reste fixe relativement aux astres, les prévisions résultantes gardent constamment la même "précision". Aussi on peut considérer le problème du glissement des constellations comme une déformation ou une mauvaise interprétation concernant les bases de l'astrologie. Il n'en reste pas moins vrai que les signes du zodiaque ne sont plus à leur place, ce qui fausse totalement leurs prédictions, si jamais elles étaient exactes ! Dans ces conditions, "lire dans les astres" revient donc à humer l'air du temps ou sucer son pouce pour prédire l'avenir. Mais d'autres raisons poussent encore l'astrologie un peu plus loin dans l'absurdité et les pseudosciences.

Deuxième partie

Influence et relation de cause à effet

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[1] Cicéron, "De la Divination", Les Belles Lettres, trad. G.Freyburger/J.Scheid, 1992, p149.

[2] Keith Thomas, "Religion and the decline of magic", Penguin Books.

[3] Toutes les dates mentionnées font référence au calendrier Julien.

[4] Remarque d'un Marbod de Rennes du XVIIe siècle, cité par Pierre Thuillier dans "D'Archimède à Einstein", Fayard, p143.

[5] Quoique les preuves soient quelques fois délicates et difficiles à reproduire. Nous reviendrons sur ce thème dans le dossier consacré à la philosophie des sciences.

[6] S.Fuseau-Braesch, "L'Astrologie", PUF-Que sais-je, 2481. Cet ouvrage remplaçait malheureusement celui de l'astronome Paul Couderc édité en 1951 sous le N° 508. Ce dernier est heureusement accessible en ligne sur le site de "l'Oncle Dom", Dominique Caudron. Depuis 2005, les astrophysiciens Daniel Kunth et Philippe Zarka on réécrit cet ouvrage critique sur L'astrologie aux éditions PUF-Que Sais-Je, N° 2481. Il remplace avantageusement les anciennes éditions.

[7] M.Rouzé, "L'astrologie déguisée en astronomie", Science et Vie , 887, Août 1991, p23.


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