Les
combinaisons spatiales
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Edward
E. White en combinaison G4-C au cours de la mission Gemini-Titan 4 le 5 juin
1965. Pour la première fois un Américain faisait l'expérience
du vide au cours d'une EVA qui dura 21 minutes. Document NASA. |
Les
combinaisons spatiales Dave Clark (III)
La
deuxième génération de combinaison spatiale avait pour
principal but de protéger l'astronaute contre la dépressuration
durant la mission orbitale.
En
1964, la NASA inaugura la combinaison G3-C fabriquée par Dave
Clark. Elle ne sera portée qu'une seule fois par Gus Grissom
et John Young au cours de la mission Gemini-Titan 3. Elle était
constituée de trois couches de protection.
Pour
la mission suivante Gemini-Titan 4 de juin 1965 il état prévu de
réaliser la toute première sortie dans l'espace. Il fallait
s'entourer de précautions. A cette occasion, la NASA inaugura la combinaison
G4-C constituée de 4 couches : deux couches internes enduites de Nylon
pour arrêter les éventuels micrométéoroïdes, une couche de Néoprène pour
l'isolation et une couche protectrice superficielle en Nylon.
Cette combinaison
était ultralégère, pesant à peine 745 g pour une épaisseur de 0.94 mm. Equipé de la sorte,
la sortie dans l'espace n'était pas envisageable car ce type
de combinaison ne protégeait pas l'astronaute contre les températures
extrêmes et autres désagréments de l'espace.
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Les
astronautes Guss Grissom et John Young de l'équipage Gemini en combinaison G3-C en
1964. |
Peu
après Dave Clark mis au point un modèle composé de 5 couches
protectrices. Celle en contact avec le corps était un sous-vêtement
en coton blanc sur lequel était fixé des attaches pour des appareils
médicaux. Une couche de Nylon bleu constituait la couche de confort
suivante. Elle devait également protéger l'astronaute contre les
micrométéoroïdes. Elle était recouverte d'une couche isolante en Néoprène
enduite de Nylon noir et pressurisée à l'oxygène.
Un
revêtement ou une couche de Teflon ou de Nylon venait ensuite
pour maintenir la structure de la combinaison lorsqu'elle était pressurisée. Le
Teflon protégait également l'astronaute contre les micrométéoroïdes. Enfin
il y avait une dernière couche de Nylon blanc qui reflétait la
lumière du Soleil et protégeait l'astronaute de tout dommage
accidentel. Cette combinaison pesait 961 g pour une épaisseur de
5.08 mm.
Pour
la première sortie dans l'espace, Edward White inaugura la combinaison
G4-C de Dave Clark. Elle pesait 15 kg et était constituée de 7 couches
de matière, offrant une protection renforcée et plus de mobilité. La couche
pressurisée était enveloppée et retenue par un filet lui donnant plus de
flexibilité et sa structure. Les couches additionnelles étaient constituées de
Mylar aluminisé qui offrait une meilleure protection thermique et
contre les micrométéoroïdes. L'astronaute était toutefois relié
par un cordon ombilical à la cabine qui l'alimentait en oxygène
et assurait le refroidissement de sa combinaison tout en servant
de cable d'encrage.
Après
un essai de la combinaison G5-C au cours des missions Gemini 5 et 7, les
astronautes sont revenus à la combinaison G4C. C'est au cours de la
dernière mission Gemini 12 que cette combinaison permit à
Edwin "Buzz" Aldrin de battre un nouveau record : entre le 11
et le 15 novembre 1966 il effectua 2 EVA (plus une interne) d'une durée totale de
5h 33min. C'est également à cette occasion qu'il démontra avec
excellence et pour la première fois qu'il était possible de
travailler efficacement dans le vide, en dehors de la capsule.
Les leçons de Buzz Aldrin
Pour
l'anecdote, précisons que Edwin "Buzz" Aldrin était sorti de West Point et
participa à des combats aériens en Corée aux commandes d'un
F-86 "Sabre" puis pilota un F-100 et un hélicoptère,
totalisant environ 3500 heures de vol en 11 ans. Il avait une
idée bien précise de la manière de gérer sa future carrière d'astronaute.
Ainsi, en 1962 il avait obtenu son doctorat en astronautique du MIT en présentant une
thèse sur le rendez-vous orbital intitulée "Guidance for Manned
Orbital Rendezvous".
Un
an auparavant, il avait entendu le discours du Président Kennedy et
était intrigué par la manière de réaliser une mission spatiale vers
la Lune. Cela l'incita à étudier le sujet et c'est ainsi qu'il rédigea
cette thèse dans laquelle il prôna l'intérêt d'effectuer des rendez-vous
spatiaux manuellement, au moyen de cartes au lieu des ordinateurs.
Il était devenu l'un des rares spécialistes au
monde des rendez-vous orbitaux et des accostages. L'année suivante, le
Colonel Aldrin rentra au service de la NASA ou il sera notamment
pilote d'essai et Capcom, mais les ingénieurs ne juraient que par la
toute jeune informatique et n'ont jamais tenu compte de ses suggestions
concernant les rendez-vous orbitaux.
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Adwin
"Buzz" Aldrin au cours de son EVA du 11 novembre 1966 pendant la mission
Gemini 12. Ce fut plus qu'une mission, une véritable leçon
d'astronautique. Document NASA. |
Jusqu'au
jour où, coïncidence et hasard de l'histoire, l'ordinateur de bord de
Gemini 12 accusa une surcharge et une perte de données,
phénomène récurrent sur les premiers systèmes informatiques
d'IBM mais qui allait postposer le rendez-vous orbital de plusieurs heures.
Quelque
part ce problème n'inquiéta pas Aldrin, que du contraire. Cela
lui permit de démontrer l'utilité des procédures manuelles et
des cartes. Il réalisa un rendez-vous orbital avec le module Agena
12 digne des cas d'école, sans l'aide d'aucun
ordinateur au grand étonnement des ingénieurs de la NASA.
L'agence finit par reconnaîtrre l'intérêt de son idée et l'incorpora
par la suite au programme des astronautes. Depuis lors, Aldrin fut
surnommé "Dr Rendezvous".
De
tout le programme spatial accompli jusqu'alors, ses EVA furent également considérées
comme les plus réussies, permettant d'aboutir au terme du
planning comme aucune autre mission jusqu'alors. En fait, tous les
astronautes avaient du mal à contrôler leurs mouvements en état
d'apensateur. Aldrin imagina de s'entraîner en piscine, milieu
qui lui semblait simuler le mieux l'état d'apesanteur. C'est
ainsi que ses EVA furent couronnées de succès; Aldrin se
déplaçait dans le vide comme un poisson dans l'eau !
Rappelons
que 3 ans plus tard Aldrin participa à la mission Apollo 11 aux
côtés de Neil Armstrong et de Michael Collins.
Bien qu'elle fut relativement adaptée aux EVA ainsi que l'ont
démontré White et Aldrin notamment, la combinaison G4-C présentait cependant
deux problèmes majeurs. La visière du casque avait tendance
à s'embuer et gênait la vision. Ensuite, le système de
refroidissement à gaz n'était pas adapté car il ne parvenait
pas à supprimer l'excès de chaleur ni l'humidité
suffisamment vite. En d'autres termes, les astronautes
transpiraient à grosses gouttes chaque fois qu'ils portaient
cette combinaison et n'y voyaient plus grand chose au bout de
quelques minutes. Ces deux problèmes devaient impérativement être
résolus pour les prochaines EVA.
La
combinaison A7-L des missions Apollo
Avec
les missions Apollo, la NASA pensa tout d'abord réutiliser des
versions modifiées de la combinaison G4-C. L'US Navy testa
ce qu'ils ont appelé la combinaison "Gemini Block I" dans
différentes conditions de température et de pression
pour évaluer son confort et les réponses physiologiques de
l'astronaute. Mais ce ne fut pas concluant car il était difficile
de contrôler le taux d'humidité de la combinaison. Le programme
fut terminé anticipativement au bout d'un mois.
Il
fallait également résoudre les questions accoustiques. Le casque sera notamment
amélioré : la visière sera remplacée, des micros et des
écouteurs seront installés ainsi qu'un harnais pour les telecoms
et un système d'éclairage portable temporairement fixé sur les gants.
Malheureusement,
en 1967 il y eut la mort tragique des trois membres d'équipage
d'Apollo 1 (Virgil "Gus" Grissom, Edward White et Roger
Chaffee) suite à un court-circuit qui enflamma l'oxygène à bord
de la capsule 012 sur le pas de tir. Le projet fut annulé et la
combinaison ne volera jamais.
Pour résoudre
tous les problèmes en suspens et en prévision d'un
débarquement sur la Lune, la NASA commanda une combinaison
spatiale beaucoup plus sûre et sophistiquée baptisée
"Block II". Elle devait être conçue pour affronter les
rigueurs du vide, résister à la chaleur et aux impacts de
météoroïdes et supporter des températures oscillant entre
-179°C et +154°C.
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Les
héros des héros. L'équipage d'Apollo
11 posant fièrement et très enthousiaste dans sa combinaison spatiale
ITMG A7-L juste avant la mission historique vers la Lune en
juillet 1969. De gauche à droite, Neil Armstrong
(civil au moment de la mission), le Lt Col Michael Collins
et le Col Edwin Aldrin. Voici une autre
version. Document NASA. |
Les
principales sociétés en compétition seront Hamilton
Standard qui une fois absorbée par UTC deviendra un géant et
une petite société de 400 personnes installée à Dover dans le
Delaware, ILC Dover.
D'autres sociétés telles que DuPont (crée par du Pont de
Nemours) et David
Clark seront également contactées pour confectionner les vêtements pressurisés, le casque, etc.
C'est
ILC Dover qui fabriquera la combinaison A1-C. Cette combinaison
spatiale appelée du nom générique de "Space Suit Assembly" (SSA)
était totalement pressurisée et de dimension variable. Pour la
première fois une combinaison disposait d'un système de survie
autonome fonctionnant en circuit fermé, le "Life
Support System" (LSS).
L'équipage
d'Apollo 11 et toutes celles qui suivirent porteront la combinaison
A7-L fabriquée par ILC Dover constituée de 7 couches de
protection, certaines contenant plusieurs films.
La société DuPont fabriquera ainsi 23 des 25 couches d'isolation
constituant la combinaison Apollo (voir plus bas).
Pour
l'histoire, rappelons que DuPont
fabriquera plus d'une dizaine de matières synthétiques
d'exception (polymères, tissus, films métallisés, résines,
etc) pour citer le Nylon (1935), le Teflon, le Butacite et le
Lucite (1937), le Dacron, le Mylar et l'Orlon (1952), le Lycra
(1959), le Tyvek (1967), le Nomex (1967), le Riston (1968), le
Corian (1969), le Kevlar (~1970) et récemment le Sonora (~2000).
Techniquement
parlant, la combinaison Apollo est qualifiée de Vêtement
Thermique et Météoroïde Intégré, "Integrated Thermal and
Meteoroid Garment" (ITMG) mais on l'appelle plus simplement
l'ensemble pressurisé, "Pressure Garment Assembly"
(PGA) et dans le langage courant, la combinaison spatiale. C'est
celle que les astronautes portaient durant les EVA.
En
fait il existait deux modèles de combinaison PGA : l'un que l'astronaute
et notamment le pilote du module de commande (Command Module
Pilot) portait à l'intérieur du vaisseau spatial, dénommé "Intravehicular
Pressure Garment Assembly", en abrégé "CMP A7-L
PGA" ou plus simplement IV A7-L; l'autre réservée aux EVA
appelée "Extravehicular Pressure Garment Assembly",
en abrégé "EV A7-L PGA" ou plus simplement A7-L.
La différence
se situe au niveau des articulations de la combinaison
EV (dans le coup, aux épaules, aux coudes, aux poignets, à la
taille, aux cuisses, aux genoux et aux cheville) qui devaient
être plus souples afin que l'astronaute puisse travailler à
l'extérieur. La combinaison EV était également équipée d'une
fermeture-éclair sécurisée qui courait en diagonale sur le
torse. En théorie l'astronaute pouvait s'habiller seul mais il
était généralement aidé par un coéquipier.
La
combinaison A7-L se compose tout d'abord d'un sous-vêtement en Nylon
contenant un système de refroidissement constitué de très fins tuyaux en
plastique contenant de l'eau froide appelé "Liquid Cooling
Garment" (LCG). Ce sous-vêtement est encore utilisé aujourd'hui
(mais il est équipé d'un système de ventilation) car on n'a pas encore
trouvé de meilleure solution pour rafraîchir l'atmosphère de la
combinaison pressurisée et maintenir le confort de l'astronaute lors des EVA.
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Ci-dessus
à gauche, la combinaison A7-LB conçue par Hamilton Standard et DuPont.
A droite, une vue éclatée de la combinaison A7-L dessinée par Paul
Calle en 1969 et publiée dans Time-Life (cf. la lithographie
de 21.5x28 cm mise aux enchères chez Regency).
En-dessous à gauche, les connecteurs ombilicaux des combinaisons A7-L et A7LB.
A droite, Edwin Aldrin explorant la surface lunaire au cours de la mission
Apollo 11 du 20 juillet 1969. Il porte une combinaison A7-L et
un survêtements
TMG. L'image de Neil Armstrong et du LEM "Eagle" se réfléchissent dans sa
visière. Documents NASA
adaptés par l'auteur et NASA. |
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L'astronaute
enfile ensuite une combinaison pressurisée constituée de trois couches :
un tissu en Nylon percé d'alvéoles (gores) servant à évacuer le surplus
d'oxygène lors des mouvements du corps évoqués précédemment, une
couche en Néoprène recouverte de Nylon pour maintenir la couche
pressurisée et une couche extérieure en Nylon pour éviter que
les couches intérieures ne se distandent. Venait ensuite
un feuillet isolant très léger constitué de cinq couches de Mylar
aluminisé entrelacés avec quatre couches de Dacron pour offrir une
protection contre la chaleur, puis deux couches de Kapton (un Nylon
modifié) pour renforcer la protection thermique et une couche de
Beta qui est une fibre de verre ignifugée enduite de Teflon. Enfin, le tissu
superficiel était fabriqué en Teflon blanc et offrait une
protection contre l'abrasion et l'usure mécanique.
Les différents joints et
six connecteurs ombilicaux pour le système de survie LSS étaient
ensuite fixés sur la combinaison. Les genoux et les épaules de la
combinaison étaient protégées par un tissu métallisé tissé en Chromel-R.
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Une
photographie assez rare prise le 8 mars 1972 soit 9 mois avant
la mission Apollo 17 (déc 1972). L'astronaute Jack Schmitt
(présumé) participe à un contrôle d'aisance de la combinaison
A7-LB non revêtue de sa couche TMG extérieure. A l'arrière-plan se
trouvent, à gauche, John Leshko, représentant de la NASA
auprès d'ILC, au centre John McMullen et à droite Steve
Rubin, "suit engineer" de la combinaison A7-LB. Document NASA
restauré par l'auteur. |
Les
gants utilisés sur la Lune étaient fabriqués selon le même
modèle que la combinaison. Ils étaient pressurisés et moulés à partir
des
mains des astronautes. Ils contenaient une couche de maintien structurel
recouverte de plusieurs couches protectrices isolantes contre les effets
thermiques et l'abrasion. Le pouce et les extrémités des doigts étaient
moulés dans de la gomme silicone afin d'offrir une certaine
sensibilité et de permettre aux astronautes de ressentir le contact des
objets. Les joints placés au niveau des avant-bras disposaient du
même système de fermeture que le casque.
Enfin,
les bottes étaient tout aussi sophistiquées. Les couches
internes étaient constituées de tissu en fibre de verre revêtus
de Teflon et recouverts en alternance de 25 couches de Kapton et
de fibre de verre afin de créer une isolation thermique efficace
tout en restant légères.
Pour
les missions Apollo 15 à 17 qui utiliseront la rover
lunaire fabriquée par Boeing, la NASA modifia légèrement leur combinaison au niveau de la
ceinture abdominale, lui donnant plus de flexibilité afin que les
astronautes puissent s'asseoir plus confortablement dans le rover.
Ces
trois derniers équipages ainsi que ceux de Skylab porteront
la combinaison A7-LB (EV A7-LB PGA), sur laquelle travaillera
notamment l'ingénieur Steve Rubin de la NASA, que l'on voit à droite.
Cette
combinaison comprenait une protection
TMG renforcée constituée de 18 couches. Cette combinaison contenait
une couche intérieure antidérapante en Nylon contre les micrométéoroïdes
puis en alternance une couche de protection thermique en Mylar aluminisé
et une couche isolante. Les 5 couches isolantes intérieures étaient en
Dacron non tissé, les 3 couches isolantes extérieures en
marquisette Beta (fibre de verre ignifugée enduite de Teflon).
Les deux couches extérieures étaient l'une en
Téflon enduite de Beta ignifugé, l'autre en contact avec
l'extérieur était en Teflon, garantissant une bonne protection
contre l'abrasion.
Cette
tenue comprenait également une paire de surbottes réservées
à l'exploration lunaire. Elles étaient conçues pour
préserver les pieds de l'astronaute des chaleurs excessives
régnant sur le sol lunaire qui peuvent atteindre 150°C au bout de
quelques heures d'exposition au Soleil.
Les
surbottes contenaient une couche isolante TMG constituée en
alternance de 25 couches de Kapton et de fibre de verre. La
coquille extérieure était fabriquée en fil métallisé ou
Chromel-R et la semelle en caoutchouc silicone
Les
surgants protecteurs utilisés les des EVA étaient fabriqués
avec les mêmes matières TMG et fil métallisé que les surbottes.
Le bout des doigts était recouvert d'un capuchon en caoutchouc
silicone pour donner à l'astronaute une sensation de contact au
touché des objets.
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Surbottes et surgants lunaires offrant une protection thermique renforcée.
Documents NASA adaptés par l'auteur. |
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Enfin,
cette tenue comprenait des filtres et des visières
supplémentaires pour le casque afin de protéger l'astronaute des
rayonnements solaires, sans oublier le système de survie LSS
fixé sur le dos, rendant l'astronaute totalement autonome.
Au total, la combinaison spatiale A7-LB pesait 106.5 kg sur Terre
dont 26 kg pour le LSS. Elle sera alléguée pour les missions ISS.
Si
cette combinaison un peu trop pressurisée contrariait assez bien
la démarche et les mouvements des astronautes, elle ne les
empêcha nullement d'essayer de sauter ou d'effectuer de petits
bonds à la surface de la Lune au gré de leur humeur, au risque
parfois de trébucher sur le sol comme Aldrin et d'autres en
firent l'expérience et qui reçurent un avertissement
du Capcom car en cas d'accident, l'hôpital le plus proche était
à 400000 km et 3 jours de voyage ! Même Armstrong expérimenta
l'impesanteur en essayant de faire de grands bons (depuis l'échelle du LEM en
sautant trois échelons ou sur le sol) mais compris vite qu'il
risquait de tomber en arrière et arrêta ses "expériences".
Par ailleurs la poussière
lunaire envahissait tout, surtout lorsque les trois derniers
équipages utilisèrent la rover lunaire, et cela présentait un certain risque pour
les optiques et le matériel car cette poussière microscopique était adhérente comme du
talc, rêche, contenait du verre pulvérisé et formait une couche isolante difficile à éliminer.
Comme
Jim Irwin le mentionna au cours de la mission Apollo 15,
"le secret de la vie ici en haut (dans le LEM) est de sortir de
ces combinaisons. Cela fait vraiment une différence." Ainsi que le
précise l'astronome Eric Jones qui réalisa la transcription de toutes les
bandes sons Apollo pour la NASA,
après une journée complète d'EVA c'était un grand soulagement d'être débarrassé
de la friction constante et du frottement de la combinaison, libre d'étirer les
bras et les jambes et de plier les doigts sans ressentir cette pression interne
constante, et libre de laisser sécher ses sous-vêtements.
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L'astronaute Jack R. Lousma lors de l'une de ses deux EVA à bord
de Skylab 3 en août 1973, au cours de laquelle il utilisa une combinaison très similaire à
celle que portait les équipages Apollo. Lousma vola également à bord de la navette spatiale
(mission STS-3). Document NASA. |
Comme la plupart des
choses, l'absence de combinaison à un prix, et ce prix c'était la perte
d'espace. Un sixième de g peut être amusant et reposant mais, excepté quand
les astronautes étaient dans les hamacs, il leur était difficile de faire
beaucoup d'usage de la faible pesanteur dans le confinement du LEM. La cabine était
un endroit où manger, réparer et préparer l'équipement les doigts nus,
et un endroit où dormir. Il était agréable d'être en dehors de la combinaison mais,
au matin - reposé et séché - les astronautes désiraient à nouveau y retourner,
les EVA restant des moments inoubliables, notamment quand Dave Scott reproduisit l'expérience
de Galilée sur la chute
des corps.
Entre
1973 et 1974, les neufs équipages de Skylab
utiliseront une combinaison Apollo A7-LB simplifiée. Cette
combinaison contenait une protection TMG moins chère à fabriquer
et plus légère, les bottes lunaires avaient été supprimés et la
visière dorée EVVA était également simplifiée et moins cher.
Le sous-vêtement LCVG avait été conservé mais un cordon
ombilical et un nouveau système de survie dénommé
"Astronaut Life Support Assembly" (ALSA) remplaça le
LSS durant les EVA.
La
combinaison A7-L des missions Apollo sera réutilisée au cours des
rendez-vous spatiaux Apollo-Soyouz et durant le Test Project en juillet 1975. Puisqu'il n'y
avait pas d'EVA au programme de ces missions, les équipages américains
furent équipés d'une combinaison A7-LB d'intérieur modifiée
dans laquelle la couche TMG était remplacée par un simple survêtement.
Sur
la totalité du programme spatial qui s'étendit de Mercury à
Apollo-Soyouz, les astronautes utilisèrent quelque 82 combinaisons
spatiales mais les ingénieurs ont travaillé sur près de 220
modèles différents en comptant toutes les versions interimaires.
La
NASA sera sous contrat avec ILC Dover durant les 15 missions des programmes
Apollo et Skylab sans connaître le moindre échec. De nos jours, cette
société continue à fabriquer des combinaisons de protection à usage
professionnel et des ballons pour les dirigeables. Par la qualité de ses
produits, il n'est donc pas étonnant que la NASA fasse toujours appel à cette
société pour concevoir les ballons amortisseurs utilisés au cours des
missions d'exploration de Mars ainsi que des accessoires (protège-gants,
ceinture, actuateurs, etc) pour la combinaison EMU que portent les équipages de
la navette spatiale lors des EVA.
Les
combinaisons des équipages de la navette spatiale
Pour
les équipages de la navette spatiale et en prévision des EVA,
notamment la construction d'ISS et la maintenance des satellites
qui exigeaient beaucoup de manipulations, la NASA inaugura en 1981
deux nouvelles combinaisons.
Tout d'abord une combinaison de vol
pressurisée de couleur beige ou orange qui, fonctionnellement, était identique à
celle que portaient les astronautes d'Apollo. Lorsque les
vols spatiaux sont devenus routiniers, les astronautes n'ont plus
porté cette combinaison encombrante durant la phase d'envol. Ils
ont adopté un survêtement légé bleu muni de bottes noires et
d'un casque en plastique anti-choc blanc muni de moyens telecom
comme illustré ci-dessous à gauche.
Ils ont porté cette tenue légère pour l'embarquement jusqu'à l'accident de Challenger en
1986. A partir de cette date, la NASA leur imposa de porter à
nouveau la combinaison pressurisée durant la phase d'envol (tenue
qu'ils portaient déjà pour le retour de mission jusqu'au
débarquement).
Cette combinaison pressurisée est en fait un nouveau modèle fabriqué par
Dave Clark, baptisé "Shuttle Launch/Entry Suit" (LES),
référence S1032. Avec le casque mais sans le PLSS (système de survie)
ni le parachute, cette combinaison pèse 11 kg.
Cette
combinaison est partiellement pressurisée et protège les
astronautes jusqu'à 30 km d'altitude. Le brevet US N° 5208514
attaché à cette invention précise que c'est également un
vêtement isolant et imperméable qui, en cas de saut en parachute
les protège du froid (de l'air et de l'eau). Elle est dérivée
de la CSU-4/P utilisée par l'USAF lors des sauts en parachute
stratosphériques et par la suite par les astronautes japonais.
Elle dispose de tous les moyens de survie : bottes, gants, radio,
d'un casque pressurisé, d'un harnais pour le parachute et même
d'un système de flottaison.
Durant la phase de réentrée dans
l'atmosphère et après un séjour prolongé en impesanteur, un
système anti-G se déclenche serrant le bas de l'abdomen et les
jambes de l'astronaute pour éviter qu'il ne perde conscience.
Cette combinaison protège également l'équipage d'une
éventuelle contamination de l'atmosphère de la cabine.
La
combinaison LES fut remplacée par la "Shuttle Advanced Crew
Escape Suit" (ACES), référence S1035. C'est la combinaison
orange qu'ils utilisent depuis la mission STS-64 en 1994 (et la
beige que portent les pilotes de l'USAF/US Navy). Contrairement à
la combinaison précédente et bien qu'elle en soit dérivée,
l'ACES est totalement pressurisée et dispose d'un système de
refroidissement liquide LCVG et d'un système de survie intégré.
Elle a été conçue avant tout pour réduire le stress et la
fatigue qu'éprouvaient les pilotes avec les anciennes combinaisons.
Cette
combinaison a servi de base fonctionnelle, mais dont la conception
s'écarte assez bien, pour concevoir un prototype S1035X destiné
à l'exploration de Mars. On y reviendra.
La
seconde innovation et la plus importante concerne
"l'Extravehicular Mobility Unit" ou EMU qui, comme son
nom l'indique, est plus qu'une combinaison : il s'agit d'une unité mobile
conçue pour aider l'astronaute au cours des sorties autonomes
dans l'espace et uniquement dans ces conditions. C'est l'ensemble
blanc cerclé de joints rouges ou bleus qu'ils portaient lors des
EVA jusqu'en 1994. Ainsi équipé d'une SSA, du casque et du PLSS,
l'astronaute peut travailler en toute indépendance, sans cordon
ombilical le reliant à la navette ou à la station.
Le dernier modèle d'EMU
utilisé depuis 1994 est prévu exclusivement pour l'assemblage et
le travail autour de la station ISS et est baptisé ISS EMU. Ses
dimensions et sa flexibilité ont encore été améliorées,
la dimension du module de propulsion (SAFER) a été réduite et
enveloppée dans un tissu TMG comme toutes les autres pièces
exposées au vide.
Voyons à présent en
détail les différents composants de la combinaison EMU.
Prochain chapitre
La
combinaison spatiale EMU
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Hamilton Standard fut fondée en 1910. Elle fusionna avec Sundstrand
Aerospace Corp., un constructeur de moteurs d'avions, en 1999 pour
devenir Hamilton Sundstrand. Cette société appartient
aujourd'hui à United
Technologies Corp., une multinationale de 220000 employés (2005)
établie dans le Connecticut. Elle fabrique notamment les moteurs d'avions
Pratt & Whitney, les hélicoptères Sikorsky, les ascenseurs Otis, des piles
à hydrogène et divers produits industriels. C'est la 20eme
société américaine en chiffre d'affaires et la 65e au monde.
A côté d'elle ILC Dover est une entreprise familiale !
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