Les
combinaisons spatiales
|
Edward
White lors d'une EVA au cours de la mission Gemini 4 en 1965.
Il est équipé d'une combinaison G4C et du HHSMU. Document
NIX. |
Les
modules de propulsion (VI)
Au
cours d'une sortie dans l'espace, si un astronaute autonome venait
par accident à s'éloigner de la station spatiale ISS, celle-ci
n'étant pas équipée de propulseurs propres, sans l'aide de la
navette, l'équipage n'aurait aucun moyen pour récupérer leur
collègue. Laissé à lui-même dans l'espace, l'astronaute serait
incapable de se mouvoir et dériverait au gré de son impulsion
initiale et des champs gravitationnels.
Pour
éviter que ce cauchemar ne se produise, pour pouvoir se déplacer
aisément dans l'espace, dès 1964 le DoD américain et la NASA
signèrent un contrat avec la société Vought pour la fabrication
d'un module autopropulsé pour les sorties extravéhiculaires.
Il
sera fourni en janvier 1965 et intégré dans le système de
survie par AiResearch. C'est la naissance du MMU de la première
génération qui sera baptisé EVAMU,
"Extravehicular Maneuvering Unit". Il sera intégré à
l"Extravehicular Life Support System" (ELSS) de Gemini 9
et volera sous le nom de code "expérience D-12" donné
par le DoD.
En
parallèle, en 1965 la NASA équipa Edward White d'un petit
propulseur portatif qu'il tenait à la main, le "Hand-Held
Self-Maneuvering Unit" (HHSMU), ainsi qu'on peut le voir sur
la photographie présentée à droite. Grâce à ce système
propulsé par deux bouteilles d'air comprimé, White put se
déplacer librement autour de la capsule Gemini 4.
Mais
les bouteilles étant de capacité réduite, il consomma
rapidement sa réserve de gaz. Par ailleurs il était toujours
relié à la cabine par un cordon ombilical qui l'alimentait
notamment en oxygène (le tuyau doré sur la photographie). S'il
s'agissait d'une solution de secours, elle était néanmoins d'un
usage très limité.
Pour
lui offrir plus d'autonomie, l'autopropulseur fut amélioré sur
Gemini 10 et 11, où il fut équipé d'un tuyau d'alimentation
connecté à un réservoir d'azote de plus grande capacité
installé dans le vaisseau spatial ce qui permit aux astronautes
de l'utiliser plus longtemps. Mais du fait de la longueur limitée
de leur cable, les astronautes ne pouvaient pas s'écarter à plus
de 5 mètres de la cabine. Un troisième modèle qui devait se
porter comme un sac à dos n'a jamais été utilisé lors des EVA.
Au
cours des missions Skylab 3 et 4, deux systèmes mobiles autonomes
ressemblant à un siège autopropulsé seront testés à
l'intérieur de la station. Le modèle muni d'accoudoirs utilisé
à bord de Skylab
4 préfigurait le MMU classique.
|
|
A
gauche, Bruce McCandless aux commandes du MMU en 1984 au
cours de la mission STS-41B. Voici une vue
générale plus étonnante encore qui remet l'astronaute en perspective
dans l'espace. A droite, Mark Lee aux commandes de sa version allégée, le SAFER
en 1994 au cours de la mission STS-64. Dans les deux cas les astronautes portent une combinaison EMU.
Documents NIX. |
|
En
1984, au cours de la mission STS-41B, l'astronaute Bruce
McCandless expérimenta le "Manned Maneuvering Unit"
(MMU), permettant à l'astronaute de se
déplacer jusqu'à 90 mètres de la navette. Le système était
l'aboutissement de 20 années de recherches. Il eut un
succès incontesté dans le public toujours amateur de
"gadgets high-tech".
Le MMU pèse 115.5 kg sur Terre. Il
est propulsé par de la vapeur d'azote qui alimente 24 petits
propulseurs à réaction d'une poussée de 3.58 Newtons chacun.
Deux réservoirs d'azote sous pression peuvent être remplis à
partir des réservoirs de la navette spatiale. Pour éviter tout
incident, tous les systèmes embarqués à bord du MMU sont
redondants.
Enfin,
en 1994 au cours de la mission STS-64, l'astronaute Mark Lee expérimenta un modèle simplifié, le
"Simplified Aid for EVA Rescue" (SAFER)
fabriqué par Hamilton Sunstrand et ILC Dover. A l'origine il
s'agissait d'un système de propulsion de réserve dans l'éventualité où le MMU
serait en panne. Il se fixe sous le PLSS. Il ne dispose plus d'accoudoirs et se commande
avec un petit boîtier fixé sur le torse de l'astronaute et d'un
système informatique embarqué qui gère les fonctions d'attitude
afin de maintenir le cap prévu. Le SAFER devait en principe être
utilisé à bord d'ISS. Il est beaucoup moins encombrant que le
MMU et plus flexible. Il devrait le remplacer à terme puisqu'il
est relativement bien intégré au PLSS.
En
attendant, les astronautes ont trouvé plus pratique d'utiliser des filins,
des attaches, des mousquetons et le bras robot de la navette pour travailler à
l'extérieur en toute sécurité, réservant le MMU et SAFER à des
situations d'urgence, en espérant ne jamais devoir les utiliser.
Le
prix
A
présent que notre combinaison spatiale est assemblée et a passé
le contrôle qualité, passons voulez-vous à la commande.
Du
temps des missions Gemini, la NASA signa un contrat de 829594.80$
pour la conception et la fabrication des combinaisons Dave
Clark. Chaque combinaison revenait à environ 80000$.
En
1963, en prévision des vols non habités Gemini et Apollo,
Ling-Temco-Vought reçut un contrat de 365000$ du centre
Marshall de la NASA pour fabriquer une combinaison d'entraînement
qui sera utilisée lors des simulations dans leur usine.
Du
temps d'Apollo, une combinaison spatiale coûtait environ 100000$
(270000$ actualisés). En 1983, rien qu'une paire de gants d'EVA pour
l'équipage de la navette spatiale coûtait environ 25000$ ! Quant au prix de
production des combinaisons pressurisées S1032 et S1035 (oranges), il est
d'environ 30000$ pièce.
Avant
l'accident survenu à
la navette spatiale Columbia en 2003, la NASA disposait de 17 combinaisons
spatiales EMU, chacune coûtant plus de 10.4 millions de dollars !
Selon Pablo de Leon, ingénieur en aérospatiale à l'Université
North Dakota (UND), en 2006 le prix d'une ISS EMU était de
22 millions de dollars. On l'estime aujourd'hui à environ 9
millions d'euros.
Le fait d'apposer le
logo "NASA" sur leurs articles a certainement chargé
la facture, comme le sont tous les produits très performants et high-tech.
Ainsi
qu'on le constate, en valeurs actualisées (franc constant), en
40 ans le prix des combinaisons spatiales a explosé comme nul autre produit.
En fait, on peut dire que chaque
couche de matière ajoutée à la combinaison augmente son prix
d'environ un million de dollars, une somme qui n'est pas vraiment justifiable
même s'il est vrai que techniquement parlant, elles n'ont plus
grand chose à voir avec les versions "light" portées
du temps des missions Gemini.
Pour
ce qui n'est en somme qu'un vêtement pressurisé sophistiqué, c'est
un prix exorbitant et qui ne représente que son prix de production.
Mais dans les faits, vu qu'on ne fabrique en moyenne qu'une
combinaison spatiale tous les 30 mois à l'heure actuelle et qu'il s'agit
pratiquement à chaque fois d'un prototype vu qu'on repousse tous les
jours ses limites en modifiant l'un ou l'autre détail,
on peut dire qu'il comprend les coûts d'investissement globaux en
recherche et développement.
Son élaboration a également
largement bénéficié à d'autres projets de recherche et eut des
retombées civiles, principalement dans la fabrication de tissus
plus résistants et offrant une meilleure isolation pour un
poids et un volume réduits, ainsi qu'en médecine et en plongée
sous-marine.
Dernier chapitre
L'avenir
Page
1 - 2 -
3 -
4 - 5 - 6 - 7
-
|
|