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La Bible face à la critique historique

Fresque en mosaïques évoquant le concile d'Ephèse de 431 dans la Basilique Notre-Dame de Fourvière à Lyon.

L'histoire du Crédo (II)

La substance du Fils de Dieu

Malgré le Symbole de Nicée, pour les théologiens les questions de la "substance" du Fils de Dieu et de la nature du Christ n'étaient toujours pas résolues, pas plus que celle du statut de l'Esprit (la fameuse "force de l'Esprit") interprétée par la Grande Église par le concept de la Trinité (Dieu est unique mais également, sur le même pied, représenté par le Père, le Fils et le Saint-Esprit), des concepts au coeur du dogme au même titre que la résurrection.

Concernant la "substance" du Fils de Dieu, c'est-à-dire la double nature du Christ, divine et terrestre, les deux grandes Églises sont restées arc-boutées sur leur convictions dogmatiques tout au long des différents synodes et conciles, les défenseurs des uns considérant que le Christ "présentait les deux natures uniquement avant l'union, mais une seule après l'union" comme Cyrille, ou au contraire que le Seigneur a toujours présenté deux natures comme le soutenaient la curie romaine.

A propos de l'Esprit , la question à résoudre était de savoir si "l'Esprit procède du Père et du Fils", ce qu'on appelle le "filioque", ou seulement du Père, une question typiquement dogmatique loin des préoccupations de la population mais qui eut des conséquences importantes pour l'Église.

La Grande Église finit par imposer l'idée que "l'Esprit procède du Père et du Fils". Passant du "blasphème" à "l'hérésie", les défenseurs d'une autre version du Crédo, celle d'Arius et plus tard de Nestor (l'évêque Nestorius refusa d'appeler Marie, la mère de Dieu, ce qui dans un certain sens revenait à nier la divinité de Jésus) n'ont finalement pas réussi à imposer leurs idées face à la majorité.

En 431, le concile d'Ephèse condamna le nestorianisme comme hérésie et déposa Nestorius jugé "hérésiarque". Rome promulgua des canons condamnant les idées hérétiques qui aboutirent littéralement au clash des Églises. Et comme tout décret relatif à l'hérésie, les ouvrages blasphématoires furent détruits et les hérétiques furent pourchassés avec plus ou moins de zèle et de violence. A l'inverse des conciles de Nicée I et de Constantinople I, le concile d'Ephèse aboutit à la définition de "l'union hypostatique" selon laquelle le Christ possède des deux natures, humaine et divine. C'est depuis cette époque que l'Église proclame que le Christ est homme et Dieu. Or Jésus ne s'est jamais proclamé Dieu malgré ce que prétend la communauté johannique quand elle écrit à propos de Jésus : "Le Père et moi nous sommes un" (Jean 10:30). On y reviendra à propos du Messie.

La définition de Chalcédoine et le premier schisme

Finalement, après des décennies de querelles, d'injures par missives interposées, d'excommunications et de reniements entre les évêques des différentes confessions, l'empereur d'Orient Marcien en accord avec le pape Léon I organisèrent le 4e Concile de la Chalcédoine en 451 qui réunit pendant plus de trois semaines 630 pères pendant 16 sessions dans l'église Sainte-Euphémie à Chalcédoine, aujourd'hui Kadiköy dans la banlieue d'Istanbul (ne pas confondre cette église avec la cathédrale-basilique Sainte-Euphémie de Rovigno aujourd'hui en Croatie), afin de trancher les questions dogmatiques et sacrementales.

Icône du miracle de Sainte Euphémie (451) en l'église éponyme.

Les débats furent comme d'habitude très houleux et certaines questions tellement abstraites que les évêques ont compté sur le hasard, ou sur un "miracle" comme le veut la tradition, pour résoudre la question de la nature du Christ. Pour ceux appelés les monophysistes, le Christ présentait une seule nature divine tandis que les dyophysistes leur opposaient  la double nature, divine et humaine. Pour trancher la question, la légende raconte que "le tombeau [de sainte Euphémlie] fut ouvert et l'on plaça les deux rouleaux scellés contenant les deux thèses sur la poitrine de la sainte en présence de l’empereur Marcien et de l’impératrice Pulchérie. Le tombeau fut à nouveau scellé et un gardien fut placé devant pour le surveiller. Pendant trois jours, les deux parties se sont imposées un jeûne strict et ont prié. Au bout des trois jours, l’empereur et le patriarche firent ouvrir le tombeau en présence de tous les participants au concile. Le rouleau des dyophysistes était dans la main droite d’Euphémie, tandis que le rouleau des monophysistes était à ses pieds." La thèse dyophysiste fut adoptée. Voilà comment l'Église résout ses problèmes en flagrante incompétence et voudrait en plus qu'on y croit !

Lors de la clôture, le Concile de Chalcédoine également appelé le Symbole de Nicée-Constantinople décréta 28 canons, reconfirmant notamment que le Seigneur présente les deux natures (humaine et divine) et que l'Esprit-Saint procède du Père et du Fils. Il confirma aussi la définition de l'incarnation comme "deux natures, une personne".

Parmi ces canons il y a le 9e qui stipule "Que les clercs ne doivent pas recourir à un tribunal civil, mais avoir leur évêque pour juge", ce qu'on appelle le tribunal ecclésiastique. Nous savons de triste mémoire à quels abus criminels et aveuglements coupables cela conduisit jusqu'a aujourd'hui au point que le pape François s'excusa publiquement au nom de l'Église ! Mais le mal était fait et le loup reste tapi dans la bergerie.

Le Crédo définit lors de ce concile se libelle ainsi : "Selon les Saints Pères, nous enseignons tous, d'une seule voix, un seul et même Fils, Notre Seigneur Jésus-Christ, le même parfait en divinité, le même parfait en humanité, le même Dieu vraiment et homme vraiment, d'une âme raisonnable et d'un corps, consubstantiel au Père selon la divinité, consubstantiel à nous selon l'humanité, semblable à nous en tout hormis le péché, engendré du Père avant les siècles quant à la divinité, mais aux derniers jours, pour nous et notre salut, engendré de la Vierge Marie Mère de Dieu selon l'humanité, un seul et même Christ, Fils, Seigneur, Monogène. Nous le reconnaissons de deux natures sans confusion ni changement, sans division ni séparation. La différence des natures n'est nullement supprimée par l'union, mais, au contraire, les propriétés de chacune des deux natures sont sauvegardées et se rencontrent en une seule personne." Cela n'a l'air de rien, mais il fallut des siècles et du sang versé pour que l'Église s'accorde sur cette définition !

Notons que dans les actes du concile de 451, on trouve également le "Symbole des Apôtres" (ou Crédo des Apôtres) qui affirme "je crois [...] à la résurrection de la chair, à la vie éternelle", deux dogmes qui sont non seulement au coeur mais forment les piliers de la foi chrétienne. On reviendra en détails sur le sujet dans les articles sur le Crédo des chrétiens et la résurrection et la vie après la mort.

L'empereur déclara ensuite solennellement aux évêques que "le peuple soit unifié dans sa pensée par l'enseignement vrai et sain, qu'il revienne à la même religion et reconnaisse la vraie foi catholique", précisant en substance qu'il exercera des sanctions à l'encontre des contrevenants. En d'autres termes, la "définition de Chalcédoine" comme sera appelé ce texte du Crédo réhabilite le "Symbole de Nicée" et permet à Rome de condamner toutes les autres doctrines et d'excommunier les hérétiques. Exit l'arianisme et ses dérives.

L'introduction du Fils dans le filioque ne fut acceptée que par l'Église d'Occident alors que paradoxalement Athanase d'Alexandrie de l'Église copte (et future orthodoxe) l'avait acceptée. Alexandrie se prétend première Église de la chrétienté sous le titre de pape des Coptes. Cette situation provoqua le schisme de l'Église en 451 et la fondation des Églises antichalcédoniennes dites des trois conciles (rassemblant les Églises arménienne, orthodoxes (syrienne, copte, éthiopienne, malankare) et assyrienne).

La nature de Marie

La Virginité Perpétuelle de Marie

Parmi les idées dogmatiques pour ainsi dire "inventées" par la Grande Église, il y a la notion de "Virginité Perpétuelle" accolée à Marie, mère de Jésus. Cela signifie en deux mots que pour l'Église romaine et principalement catholique, Marie a toujours été vierge, même si on peut se demander en quoi cela concerne la curie romaine. Mais qu'on se détrompe car sur le plan dogmatique, pour l'Église catholique c'est important de le préciser pour défendre la nature divine de Jésus dès sa conception tel que Paul l'enseigna à partir de ses visions.

"La Madone du Magnificat" de Sandro Botticelli peinte en 1481. Technique de Tempera sur bois. Ce chef-d'oeuvre de la Première Renaissance mesure 118 cm de diamètre et est exposé à la Galerie des Offices à Florence.

Nous verrons à propos de la venue du Messie et de la conception de Jésus que selon la tradition, Joseph est le père adoptif de Jésus. Des textes non canoniques prétendent aussi que Marie a probablement eu plusieurs enfants, Jésus ayant donc eu des frères et soeurs. Ce fait qui est pratiquement attesté et accepté par tous les historiens est totalement en contradiction avec ce que nous venons de dire et ce que veut nous imposer l'Église romaine. Qui a raison ? Si l'Église n'a jamais répondu honnêtement à cette question et reste évasive sur le sujet en raison de ses convictions, les historiens sont plus objectifs.

Vers l'an 93-94, Flavius Josèphe connaissait déjà la fraterie de Jésus car il écrivit brièvement dans les "Antiquités Judaïques" : "il réunit un sanhédrin, traduisit devant lui Jacques, frère de Jésus appelé le Christ" (Livre XX, ch. IX, 1.200) et le Protévangile de Jacques, un manuscrit apocryphe du IIe siècle (dont le papyrus Bodmer 5) confirme que Jacques avait un frère appelé Jésus. On y reviendra.

Plus tard, dans son "Histoire ecclésiastique" écrite en 324, Eusèbe, évêque de Césarée en Palestine évoque les frères de Jésus "selon la chair" (HE, 2:23 et 3:19). On peut donc en déduire que très tôt l'Église accepta le fait que Marie ait eu des enfants, un évènement par ailleurs banal si elle était mariée alors que l'inverse eut été étonnant.

Puis soudainement, on constate l'apparition de la "conception virginale" de Marie en 374 exactement sous la plume du théologien Epiphane de Salamine dans son livre "Ancoratus" (signifiant "ancré" dans le sens de l'homme ancré dans la foi) dans lequel il disserte sur les dogmes de la Trinité et de la Résurrection (c'est encore lui qui écrira le "Panarion" contre les hérésies).

Mais peu après, vraisemblablement avant 383, Helvidius insista encore sur l'existence des frères et soeurs de Jésus pour démontrer que Marie avait eu des relations maritales normales avec Joseph et n'était en rien restée vierge toute sa vie, une thèse hérétique que saint Jérome essaya aussitôt de réfuter. Les propos d'Helvidius traverseront les siècles sous le nom de "théorie helvidienne" qui est aujourd'hui intégrée dans le dogme de l'Église protestante. Toutefois cette dernière considère malgré tout que Marie était vierge lors de la naissance de Jésus tout en réfutant sa viginité perpétuelle.

Finalement le concept de "Virginité Perpétuelle" de Marie fut confirmé et canonisé lors du second Concile de Constantinople en 553 et confirmé lors du Concile de Latran en 649. Toutefois, à l'inverse des autres dogmes, ce concept n'a pas été intégré dans "l'infaillibilité du magistère" (le principe que "l'Église ne se trompe pas", voir plus bas).

Depuis, malgré les découvertes archéologiques et en exégèse biblique, l'Église catholique s'arqueboute sur le fait que Marie n'eut jamais d'autres enfants que Jésus.

Entre-temps, l'évêque Cyrile d'Alexandrie (376-444) qualifia Marie "mère de Dieu", une manière de défendre la divinité de Jésus. De plus, étant donné que les Pères de la Grande Église ont prétendu que Marie fut élevée au ciel (Assomption), il n'y a donc pas de reliques à vénérer. Par conséquent, les Catholiques et les Orthodoxes (les Protestants ne fêtent pas les Saints) peuvent juste se recueillir devant les figures à son image ou dans les lieux saints consacrés à la Sainte Vierge Marie (à Rome, à Nazareth, à Bethléem, etc).

L'Immaculée Conception de Marie

C'est au VIIIe siècle dans les Églises grecques qu'apparaît le concept de "l'Immaculée Conception" de la Vierge Marie. Ce dogme prétend que Marie est née sans péché originel, c'est-à-dire sans tache ou déchéance de sa pureté, dans le respect de l'Esprit-Saint. Malgré tout ce qu'on peut en penser connaissant le statut d'Adam et Ève et de concepts comme le Bien et le Mal, ce dogme fut confirmé par le pape Pie IX en 1854 puis redéfinit et promulgué par le pape Paul VI lors du Concile Vatican II en 1964 dans "Lumen Gentium" (§53. La Sainte Vierge et l'Église), un texte constitutionnel accepté par 2151 voix contre 5. Nous verrons plus bas que les Églises réformées rejetèrent ces deux dogmes.

Les images et les icônes

Jusqu'à présent les conciles s'étaient concentrés sur les questions théologiques et dogmatiques autour de la nature du Christ et de Marie. En 787, l'empereur Contantin VI (771-797) et l'impératrice Irène l'Athénienne (752-803, d'abord régente puis impératrice après le décès de Constantin VI) convoquèrent le deuxième Concile de Nicée (Nicée II) afin de mettre fin au conflit des images. En effet, l'empereur byzantin Léon III l'Isaurien qui régna sur l'Empire romain d'Orient de 717 à 741 interdit la représentation du Christ, de la Vierge Marie et des saints et ordonna la destruction des icônes chrétiennes. Son fils Constantin V qui régna de 741 à 775 fit également condamner la vénération et la création d'images religieuses, conduisant au premier iconoclasme.

En résumé, par tradition l'Église chrétienne maintenait l'usage des icônes car selon sa définition elles représentaient à la fois un objet de culte et d'ornement des lieux de prière. Le Concile de Nicée avait affirmé qu'on ne pouvait pas plus rejeter ou détruire les icônes que les autres objets sacrés. Rome les considérait au même titre que les reliques, tel un honneur rendu à travers elles à la personne qu'elles représentaient.

Rome appuya son argument en disant que si dans l'Ancien Testament, Dieu interdit les images pieuses, dans le Nouveau Testament Dieu se manifeste et se laisse voir dans l'incarnation du Christ. Les images ne sont donc qu'un hommage rendu au modèle original.

A gauche, la plus ancienne icône représentant un Christ et ses apôtres noirs. Cette icône est exposée au Musée copte du Caire. Elle serait antérieure au VIe siècle. Au centre, le saint Mandylion. Icône écrite par Théophane le Crétois en 1546 et exposée au monastère de Stavronikita au mont Athos, situé sur la péninsule de l'Aktès, en Grèce. Traditionnellement, le Christ essuya son visage qui s'imprima sur un tissu aujourd'hui vénéré par l’Église orthodoxe qui le considère comme une réalité historique (comme l'Église catholique vénère le saint Suaire de Turin). A droite, un triptique peint par Grifo di Tancredi vers 1310 représentant le Christ Bénissant (centre), Jacques le Majeur (droite) et Pierre (gauche). A l'inverse des icônes byzantines traditionnelles, le peintre a tenté de représenter les émotions des personnages. Son style est influencé par le peintre florentin Cenni di Peopo dit Cimabue (c.1240-1302) qui influencera également Giotto à partir de 1280. Notez la ressemblance presque gémellaire entre Jésus et Jacques. Selon l'archéologue bibliste James Tabor, il pourrait s'agir de Jacques le Juste, le frère de Jésus. Mais cette interprétation est incorrecte. En effet, Jacques porte en haut à gauche de son manteau l'attribut traditionnel de ce saint, la coquille Saint-Jacques, ce qui prévaut sur l'idée qu'il s'agirait du frère de Jésus malgré sa ressemblance. De plus, jusqu'au XXe les Catholiques ont toujours prétendu que Jésus était enfant unique. Enfin, historiquement l'oeuvre originale fait partie d'un polyptyque comprenant également Saint Jean le Baptiste et Sainte Ursule où cette interprétation perd son sens. Ce retable n'est pas exposé mais conservé à la National Gallery of Art (en ligne p33 et p34) à Washington, D.C.

Le Concile de Nicée II rassembla 365 évêques dont 37 seulement venaient d'Europe qui discutèrent pendant un mois des positions des différents courants et des règles à respecter. Finalement, la majorité reconnut qu'il fallait respecter le Symbole de Nicée et faire la distinction entre le sacré et le profane :  les images saintes ne sont en aucun cas des idoles diaboliques, pas plus que les croix et les images représentant Jésus, Marie ou les saints. Ces images doivent être vénérées et non adorées, et on pouvait faire brûler devant elles de l'encens ou des lumières.

Les Actes du concile promolguèrent 22 canons rappelant les devoirs du clergé vis-à-vis des normes canoniques et notamment le fait qu'il ne fallait "rien y ajouter ni rien y ôter", l'indépendance de tous les serviteurs de l'Église et surtout le risque d'excommunication encouru par les obstinés.

Si ce concile vit le triomphe des défenseurs des icônes sur les iconoclastes, un nouveau courant d'opposition surgit dès 794 dans l'Empire carolingien de Charlemagne sous l'instiguation de l'abbé Alcuin et du lettré Théodulf d'Orléans, un chrétien d'origne wisigothique. Ce dernier publia en 787 les "Libri carolini" (Livres carolins) dans lesquels il refuta tous les idées défendues à Nicée, sans réussir à s'imposer. Toutefois, malgré les menaces de l'Église, l'empereur Léon V d'Arménien qui régna de 813 à 820 provoqua un second iconoclasme, plus sévère que le premier.

Finalement, l'impératrice Irénée et l'empereur Michel II parvinrent à réimposer les icônes dans les églises dont la vénération fut officiellement rétablie en 843 par son fils Michel III.

Le schisme entre les Églises d'Orient et d'Occident

Après plusieurs siècles de querelles dogmatiques (du IIIe au IXe siècle), ce n'est qu'en 809, sous Charlemagne, que le pape Léon III confirma les décisions du concile en déclarant orthodoxe la doctrine selon laquelle le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. Mais l'idée ne fut intégrée au Crédo et incluse dans la liturgie qu'au XIe siècle, conduisant à la séparation des Églises orthodoxe et catholiques et au schisme des Églises d'Orient (présente dans les principautés slaves et l'empire byzantin) et d'Occident (présente en Europe de l'ouest) en 1054.

Pour la petite histoire, le filioque n'était qu'un prétexte pour les Orthodoxes car la querelle entre les deux Églises était avant tout d'ordre politique et d'organisation du clergé dans cette partie du monde.

A présent, chaque Église dispose du dyptique biblique complété par son Crédo "personnalisé". Pour l'Église catholique, cet ensemble forme un outil théologique complet, une vision dogmatique standardisée, universelle et commune qui permet désormais aux serviteurs du pape d'évangéliser les peuples en louant Dieu d'une même et seule voix et de mieux lutter contre les Églises concurrentes qui se comptaient par dizaines durant les premiers siècles de la chrétienté.

Le dogme selon les Églises catholique et protestante

Il serait trop long et ce n'est pas le sujet de discuter en détails des différences entre le catholicisme et le protestantisme, sujet qui est d'ailleurs largement documenté sur Internet et dans différents livres consacrés à l'histoire du christianisme. Soulevons toutefois quelques principes importants qui résument bien la profondeur du schisme entre les deux Églises.

Les catholiques et l'infaibilité du magistère

Pour le Saint-Siège, "l'infaillibilité du magistère" fait partie des points fondamentaux du dogme. C'est le principe par lequel les ecclésiastes catholiques affirment qu'ils ne peuvent pas se tromper lorsqu'ils s'expriment en matière de foi et de morale. Ce qu'ils décrètent ou promulgent est donc "Parole d'Évangile", un principe dogmatique quelque peu désuet en ce XXIe siècle qui nous faire retourner au Moyen-Âge !

En revanche, depuis la Réforme, l'Église protestante se considère comme faisant partie de la réalité humaine et à ce titre, comme le disait Martin Luther, les Églises "peuvent se tromper". Cela se traduit concrètement notamment par le principe "Soli Deo gloria" (à Dieu Seul la gloire) par lequel les protestants considèrent que seul Dieu est sacré, divin et absolu. Selon Luther, toute autre entreprise humaine est faillible et ne peut prétendre à un caractère absolu et universel. Les protestants en concluent donc que la société doit respecter la pluralité des libertés et des opinions.

Précisons toutefois que lors de la fondation de l'Église d'Angleterre en 1534, le roi Henry VIII et son conseiller Thomas Cromwell eurent une lecture plus personnelle de certaines passages de la Bible qui les opposa à Rome, conduisant finalement à la persécution des catholiques. On y reviendra à propos des guerres de religion.

Avec ou sans hiérarchie

C'est également en raison du caractère absolu de Dieu que Luther annula les principes de la hiérarchie dans son Église réformée; chaque fidèle baptisé est "prophète, prêtre et roi" sous la seule obédience du Christ. Concrètement, tous les protestants sont placés sur le même pied d'égalité qu'ils soient homme ou femme, simples baptisés, pasteurs ou ministres pastorals (diacres, pasteurs enseignants, Anciens dirigeants, etc.) alors que chez les catholiques seuls les hommes peuvent excercer les fonctions du culte et seul le Ministère est habilité à nommer les membres du clergé, les prêtres, les évêques et le pape. Ainsi, chez les protestants, chaque homme ou femme qu'il soit célibataire, veuf ou marié, est au service de la communauté et peut prêcher la Bonne Nouvelle ou donner les sacrements. Bien entendu, il en découle que les protestants ne reconnaissent pas l'autorité du Pape ni des cardinaux et concernant les textes, les livres deutérocanoniques ont été exclus de la bible protestante (Segond 21, KJV, NIV, etc) et sont tout au mieux placés en annexes et classés comme apocryphes. Mais à l'avenir, dans un soucis d'oecuménisme toutes les bibles chrétiennes devraient contenir les mêmes textes, y compris les livres deutérocanoniques. On y reviendra à propos de la transmission de la Bible.

Le culte de la personnalité et les fêtes liturgiques

Un troisième point important, les Églises réformées ne vénèrent pas Jésus ni aucun saint, pas même Marie, la mère de Jésus. Les protestants et les fidèles des confessions assimilées prient Dieu et personne d'autre.

Ainsi, dans l'Église catholique la Sainte Vierge Marie est célébrée à de nombreuses occasions parmi lesquelles l'Immaculée Conception le 8 décembre, l'Annonciation le 25 décembre, la Visitation le 31 mai, l'Assomption le 15 août, la Nativité le 8 septembre, la Présentation de Marie au Temple le 21 novembre, la Mémoire de la Présentation le 31 novembre et la Solennité de Sainte Marie Mère de Dieu le 1er janvier.

Notons que l'Église orthodoxe fête pratiquement autant de fêtes mariales que l'Église catholique. En revanche, les Églises réformées les ignorent toutes étant donné qu'elles ne ne croient pas à la Virginité Perpétuelle et l'Immaculée Conception de Marie comme l'imposa la Grande Église (voir plus haut).

Comme les catholiques, les protestants célèbrent Noël, la semaine Sainte et Pâques (avec s car elle inclut trois fêtes), l'Ascension et la Pentecôte mais ils ne fêtent pas la Toussaint et ne suivent pas le carême. Nous verrons également à propos de l'Eucharistie que toutes les Églises chrétiennes ne lui accordent pas la même sigtnification. Précisons également que les Orthodoxes fêtent Noël non pas le 25 décembre (du calendrier Julien) mais le 7 janvier car ils se basent sur le calendrier Grégorien.

Comme les autres chrétiens, les protestants vénèrent les lieux saints cités dans la Bible et effectuent également des pèlerinages que ce soit à Compostelle, à Jérusalem ou Bethléem parmi d'autres villes, mais en dehors du cadre imposé par les fêtes catholiques.

En résumé, sur le principe le schisme entre catholiques et protestants se traduit comme une opposition fondamentale dans la manière de concevoir la théologie et d'enseigner la religion : les catholiques l'imposent et l'ont légalisé à travers l'infaillible du magistère alors que les protestants insistent sur le partage et la participation de tous.

Pour en savoir plus sur le protestantisme et son actualité, consultez le site Regards Protestants et le blog Réflexions protestantes libérales.

Après avoir défini le canon et le Crédo, l'Église semblait à l'abri de toute critique sur les plans théologique et dogmatique. Mais c'était sans compter sur la curiosité des chercheurs biblistes et notamment des protestants libérés de l'emprise du Pape qui ont voulu vérifier l'exactitude et l'authenticité des textes bibliques. En effet, puisque les Pères de l'Église reconnaissaient eux-mêmes au IVe siècle qu'ils ne savaient pas qui étaient réellement les auteurs des Évangiles et sachant que l'Ancien Testament contenait de toute évidence des légendes et des faits largement interprétés dans le sens du judaïsme, des archéologues, des spécialistes des langues sémitiques et des épigraphistes ont recherché au Moyen-Orient et en Égypte toutes les traces susceptibles d'avoir un lien avec la Bible : des lieux, des objets et des manuscrits antiques. C'est au cours de ces missions que les chercheurs découvrirent de nouveaux manuscrits apportant un nouveau regard sur les doctrines et les pratiques religieuses au cours des premiers siècles de la chrétienté. C'est l'objet du prochain article.

A lire : La découverte de nouveaux manuscrits

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