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La Bible face à la critique historique

La diversité des Églises chrétiennes.

Statut actuel des religions et des Églises (I)

Si on en juge par la manière dont Jésus organisa son ministère, dès le début il semblait conscient que son mouvement allait semer des troubles, qu'il serait subversif et le menerait à une mort violente (Marc 10:32-34) mais qu'en contrepartie il s'étendrait bien au-delà de sa province natale et de son pays. 

Selon le sociologue des religions Rodney Stark de l'Université Baylor au Texas, le mouvement réformateur de Jésus comptait environ 1000 adeptes en l'an 40 de notre ère, puis 217000 à la fin du IIe siècle pour dépasser 34 millions de chrétiens en 350 de notre ère, à l'époque de l'empereur Constantin Ier et plus de 2.4 milliards aujourd'hui. On y reviendra.

Au cours des différents conciles pontificaux (catholiques), saint-synodes (orthodoxes) et assemblées luthériennes (protestants), les chefs spirituels des différentes Églises ont âprement discuté des termes mêmes de cette alliance avec Dieu, du Crédo et de la docte observance du dogme. Revers de ces décrets et autres canons, au "nom de Dieu" les Églises n'ont pas hésité à excommunier et persécuter les blasphémateurs et les hérétiques et à partir en guerre sainte contre les profanateurs du Temple et des lieux saints et à pourchasser les infidèles en commençant par les juifs. On y reviendra à propos des guerres de religion.

Après des siècles de querelles théologiques, de divisions fratricides, d'intolérance et de guerres de religion, quel est aujourd'hui le statut et l'avenir de cette Église revendiquant la place des apôtres et la véritable gnose divine ? Que représente-t-elle parmi les religions ? Comment les jeunes la juge-t-elle et considèrent son rôle dans la société moderne ? L'Église reste-t-elle un repère crédible dans ce concert mondial des choses qui se transforment, un monde capitaliste et ultra libéral, cosmopolite et pluriculturel où les individus sont de plus en plus isolés, égoïstes, violents, opportunistes et semblent avoir perdu tous les repères culturels et nationaux qui faisaient la fierté de leur nation ? Telles sont les questions auxquelles sont aujourd'hui confrontés l'Église et ses adeptes et auxquelles nous allons tenter de répondre.

Statistiques

Malgré ses heures sombres et des brebis galeuses, l'Église chrétienne se porte bien. Selon différentes sources (cf. les références statistiques), en 2015 on comptait plus de 2.4 milliards de chrétiens dans le monde dont 50% de catholiques, 37% de protestants et 12% d'orthodoxes, formant le premier groupe religieux devant les musulmans (1.7 milliard et en forte hausse). Du fait qu'ils ne sont pas attachés à un pays ni à une culture comme s'en était étonné l'empereur Pompée, les chrétiens sont les plus dispersés. Alors qu'en 1910, près de 70% des chrétiens vivaient en Europe et moins de 30% en Amérique, après l'explosion du marché mondial au milieu du XXe siècle et suivant les flux migratoires, aujourd'hui 24% des chrétiens vivent en Europe, 24% en Amérique centrale et latine et 24% en Afrique sub-saharienne. Les Etats-Unis, le Mexique et le Brésil en accueillent 27%.

La vieille ville de Jérusalem vue au lever du Soleil en direction du sud-est (cf. Google Maps) avec la basilique de l'Ecce Homo à l'avant-plan construite durant la seconde moitié du XIXe siècle (attenante au couvent de l'Ecco Homo fondé en 1862), le minaret d'une mosquée et le Dôme du Rocher ou mosquée Al-Sakhrah inaugurée en l'an 705 reconnaissable à son dôme doré. Environ 400 mètres ou 5 minutes à pied séparent la basilique de la mosquée. Sur la droite on reconnaît le dôme gris de la mosquée Al-Aqsa située à l'extrémité sud de l'Esplanade et un autre minaret plus loin.

Selon les Frères Maristes, en 2010 le Moyen-Orient comptait 0.83% soit 20 millions de chrétiens dont environ 3.5 millions vivent dans les pays du Golfe (il s'agit surtout d'immigrés d'Asie ou d'Occident) et appartiennent à différentes Églises, entre 1-2 millions vivent en Syrie (chrétiens maronites, chaldéens, syriens, arméniens et grecs-melkites). Le Liban abrite 34% de chrétiens soit 4 millions de personnes dont 1 million de catholiques. Il faut y ajouter les chrétiens vivant en Irak (suite aux guerres, leur nombre est retombé à ~300000 chrétiens surtout chaldéens et syriens), en Égypte (225000 coptes catholiques), en Jordanie (200000 catholiques maronites, chaldéens et latins), en Israël (143000 chrétiens), dans les territoires palestiniens (57000 chrétiens), en Iran (135000 dont 20000 catholiques surtout chaldéens), en Turquie (80000 chrétiens) et à Chypre (~35000 catholiques maronites, chaldéens et latins).

157 pays sur 192 États membres de l'ONU sont à majorité chrétienne contre 49 à majorité musulmane. Par comparaison, en 2013 on dénombrait 13.85 millions de juifs dans le monde dont 39% vivaient en Amérique du Nord (en baisse) et 39% en Israël (en hausse).

Selon les projections globales, du fait que la natalité augmente fortement dans la population musulmane, bien qu'elle soit moins nombreuse en 2010 (23.2% dans le monde) que la chrétienne (31.4%), en 2050 on estime qu'il y aurait 2.92 milliards de chrétiens et 2.76 milliards de musulmans, des chiffres encore difficiles à valider mais dont la tendance est vérifiée. D'ici deux générations, il y aura donc plus de musulmans que de chrétiens dans le monde (les premiers restants concentrés dans certains pays) et plus de juifs en Israël qu'à l'étranger.

Évolution du christianisme (au-dessus) et distribution mondiale des Chrétiens en 2012 (en dessous).

A propos des relations entre juifs et chrétiens

Les guerres de religion ont marqué l'Histoire du monde et continuent à semer la terreur à travers les actes de terrorisme comme nous l'avons évoqué. Depuis la fondation de l'Église, pendant près de deux mille ans les chrétiens ont systématiquement convertis ou asssassinés les peuples insoumis au nom de Dieu (au cours de l'Histoire, les musulmans ont également convertis les peuples mais de manière souvent bien plus douce). Plus récemment, au XXe siècle, les juifs furent même exterminés par les Nazis avec l'approbation tacite de l'Église et des gouvernements démocratiques !

Comment le Vatican réagit-il aujourd'hui face à de tels actes et quelle est la mission de l'Église en ce troisième millénaire ? S'éloigne-t-elle ou se rapproche-t-elle de l'enseignement des premiers apôtres ?

Historiquement, les différences d'interprétations de la Bible entre juifs et chrétiens et la défense des lieux saints face à l'envahisseur musulman ont conduit les représentants des trois religions à se quereller et même se battre à mort pour défendre leur foi pendant deux millénaires. Si la Torah et les Talmuds sont les seuls livres qui méritent d'être reconnus pour les juifs, pour les chrétiens c'est avant tout le Nouveau Testament et le message du Christ qui est porteur de sens.

Encore aujourd'hui, certains juifs comme Moreh ben Friedman dit clairement dans sa page "What is nazarene (netzarim) judaism ?" que "l'Église chrétienne a obscurci, voire déformé, la véritable identité du Messie, l'a vêtu de théologie et de rituels païens et lui a donné un nom étranger. Pour le dire franchement, pour suivre Yahshua, vous devez d'abord être capable de reconnaître le vrai Messie". Si on en juge par la tradition chrétienne, il ne croit pas si bien dire en avouant qu'il faut "reconnaître le vrai Messie". Bref, les points de vues théologiques divergent avec toutes querelles que cela sous-entend.

Le pape François et le rabbin du Mur Shmuel Rabinovit se recueillant devant le Mur des Lamentations à Jérusalem le 26 mai 2014. Document EPE.

Se greffe sur cette incompréhension, l'antisémitisme occidental, l'idée que l'autorité religieuse juive a nié la divinité de Jésus et l'a condamné à mort, décision que les juifs n'ont jamais remise en question et de ce fait ne le reconnaissent pas comme étant le Messie et encore moins le Fils de Dieu puis qu'il n'existe qu'un Dieu, YHWH. Ceci dit, certains chrétiens comme les protestants ne le croient pas non plus, considérant plutôt que Jésus fut un intermédiaire entre Dieu et les hommes, ce que l'auteur de l'Épître (pseudépigraphe) de Paul à son ami Timothée a bien révélé : "Car il y a un seul Dieu, et aussi un seul médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme" (1 Timothée 2:5), un avis très particulier que la Grande Église (et plus tard l'Église catholique) a préféré ignorer s'agissant d'un texte non authentique n'allant pas dans le sens du dogme.

Cette humanisation de Jésus est une différence importante entre les Crédo catholique et protestant car elle soustrait aussi à Jésus une grande partie de son aura divine qui transpire pourtant dans de nombreuxes textes bibliques comme nous l'avons démontré. Finalement, ce n'est peut être pas plus mal, car pour ceux qui sont intimidés par le personnage, cela le rend plus accessible sans pour autant rejeter l'existence de Dieu.

Cette différence de point de vue représente bien le schisme entre les Églises catholique et protestante : la première impose son opinion infaillible tandis que la seconde refuse cette autorité qu'elle ne reconnaît qu'en Dieu et insiste sur le partage des idées et la participation des fidèles à la vie religieuse.

Même intolérance et état d'esprit "anti-christ" chez les musulmans qui considèrent Jésus comme un simple prophète au même titre que Mahomet. Ces motifs et le refus de dialoguer ont justifié les guerres de religion. Cette controverse théologique sur l'identité de Jésus a divisé la communauté judéo-chrétienne dès le Ier siècle de notre ère. Notons que les Actes des Apôtres décrivent ce conflit entre les deux écoles de pensées.

Heureusement, aujourd'hui les relations entre juifs et chrétiens est beaucoup plus saine qu'au siècle dernier. Les nouveaux intellectuels juifs voient le Nouveau Testament avec un nouveau regard, voyant dans certains passages des Évangiles non pas une description de la vie de Jésus en son temps mais des situations à l'origine du développement des premières Églises chrétiennes, comme c'est notamment le cas des auteurs de la New Standard Jewish Encyclopedia. Cet ouvrage encyclopédique sur le judaïsme illustré et comprenant plusieurs milliers d'entrées décrit la culture, l'histoire, les coutumes et les traditions juives ainsi que quelques grandes personnalités juives de l'époque mythologique à aujourd'hui sans aucune discrimination (la biographie de Moïse est aussi longue que celle de ... Woody Allen).

Suite à la Diaspora du peuple juif qui commença réellement à l'époque de Titus (en l'an 70 de notre ère), selon l'American Jewish Committee, en 2010 on recensait plus de 5.4 millions de Juifs immigrés aux États-Unis contre ~200000 Palestiniens. Par comparaison, en 2016 Israël comptait 8.5 millions d'habitants dont 75% de Juifs et 20% d'Arabes. Au total, près de 2.5 millions de Juifs de la Diaspora ont rejoint leur patrie dont près de la moitié proviennent de pays européens.

Aux États-Unis, il existe un véritable lobby pro-israélien, l'AIPAC, dont l'influence est la plus importante parmi tous les groupes de pression ethniques, y compris comparé au lobby arabe. En raison de leur réussite, les juifs ne sont plus considérés comme une "minorité" victime d'oppressions par les autres groupes ethniques ou religieux ni même rejetés. Ce paradoxe s'explique par l'évolution des mentalités depuis les années 1970 où les juifs américains ont réellement affirmé leur identité.

Le pape François, chef religieux de l'Église catholique élu par ses pairs en 2013, et les évêques, considérés comme les successeurs des apôtres.

Le rôle de l'éducation et du sens civique sont également fondamentaux au même titre que la modération en politique et l'ouverture d'esprit de la population. Cette évolution positive des mentalités ont heureusement assagi les moeurs mais il ne faut pas se cacher qu'en temps de crise et surtout lors des guerres, le rejet, la conversion forcée ou l'extermination de l'étranger refait aussi facilement surface que la mauvaise herbe.

Sur le plan strictement religieux et de la coexistence des différentes religions, dans les années 1960 l'idée que l'Eglise devait convertir tous les peuples y compris les juifs au christianisme et qu'il n'était pas tolérable qu'un Catholique discute avec un Protestant n'étaient plus tenables. Après tout Jésus était juif. Le concile Vatican II révisa donc ces idées parmi d'autres à partir de 1962 (il débuta sous Jean XXIII en 1962 et se termina sous Paul VI en 1965).

En 1965, le Vatican publia "Nostra Aetata" dans laquelle le pape Paul VI expliqua clairement que la mission de l'Église n'est pas de convertir le peuple juif ou les musulmans. "L'Église réprouve donc, en tant que contraire à l’esprit du Christ, toute discrimination ou vexation dont sont victimes des hommes en raison de leur race, de leur couleur, de leur condition ou de leur religion. En conséquence, le saint Concile, suivant les traces des saints Apôtres Pierre et Paul, prie ardemment les fidèles du Christ « d’avoir au milieu des nations une belle conduite »." En 2001, le Vatican réitira ce principe et exposa clairement sa mission dans le document intitulé "Le peuple juif et ses Saintes Ecritures dans la Bible chrétienne".

Enfin, parmi les points à l'ordre du jour du pape François, il y a le changement de nom des Anciens Testaments et Nouveaux Testaments en Ancienne Alliance et Nouvelle Alliance, plus conforme au sens original des textes. En effet, historiquement dès la fin du IIe siècle, la plupart des textes sacrés réunis décrivant la vie de Jésus portaient en grec le nom de "Nouvelle Alliance" mais fut traduit en latin par "Nouveau Testament" qui comprennent les Évangiles et les textes apostoliques. De plus, le message de Jésus n'est pas un testament mais doit être compris comme une rupture (le sens premier du mot alliance en hébreu), c'est-à-dire un choix qui par nature rejette quelque chose au profit d'une autre que le fidèle doit réaliser s'il veut respecter la doctrine enseignée par le Christ.

Du schisme des Églises au schisme silencieux des jeunes

Avec 2500 évèques réunis à Rome dans un basilique richement ornée, à la décoration très flatteuse, et des orateurs tenant des propos inattendus et parfois conciliants, pour le grand public le concile Vatican II resssemblait à un vent de modernité oecuménique attendu par tous et donc sans critiques d'éventuels opposants. Mais derrière cet lourd apparat séduisant, les seize textes théologiques constituant la nouvelle "constitution" du Vatican furent révolutionnaires dans tous les sens du terme. Le pape Jean XXIII s'en rendit vite compte dès la publication du premier texte adopté en 1963 consacré à la liturgie, la rénovation et la simplication des rites. Dorénavant la messe pouvait être célébrée dans la langue vernaculaire de la populations et non plus en latin incompréhensible. Les autres textes furent tout aussi "révolutionnaires".

Les conclusions du concile Vatican II n'ont pas plu à tous les catholiques. D'abord, Vatican II s'est réglé entre hommes et en particulier au sein de la Curie sans que personne n'ait ne fut-ce qu'une attention envers les problèmes des paroisses locales et encore moins envers les problèmes des couples ou ceux propres à la gente féminine, notamment autour des questions du divorce, de l'avortement et du mariage des ecclésiastes catholiques. Résultat, après le concile Vatican II de nombreuses femmes se sont senties incomprises et exclues des débats religieux et ont abandonné définitivement le catholicisme. De même, les évêques et parfois jusqu'à Rome savaient pertinemment bien que des ecclésiastes fréquentaient des femmes (ou étaient pédophiles) mais ne prirent aucune mesure.

De plus, tous les catholiques n'ont pas accepté les conclusions du concile Vatican II. Ses positions déplurent aux intégristes qui refusaient l'ouverture d'esprit de l'Eglise et voulaient au contraire revenir à des idées plus traditionnelles et moins nuancées, ce que certains évèques (cf. Mgr Lefèbvre en France) et curés ont effectivement fait en refusant d'obéir au Pape, ce qui leur valut d'être excommuniés. En réaction à l'ouverture jugée trop libérale de l'Eglise, dans les années 1980 beaucoup de jeunes sont devenus intégristes. Plus récemment, en 2020 le pape François publia sa lettre encyclique "Fratelli Tutti" qui demande aux catholiques d'accepter les migrants alors que l'Europe par exemple ferme ses frontières et que dans certains pays, les personnes qui accueillent des réfugiés sont mises à l'amende. Cette idée d'ouverture aux étrangers déplait fortement aux catholiques conservateurs.

De façon générale, aujourd'hui, pour la population active (tranche d'âge de 18 à 65 ans) l'Église ne représente pas la même chose que pour nos parents ou grands-parents qui eux-mêmes n'avaient pas la même vision de la doctrine qu'à l'époque de la chrétienté. A partir du moment où les États sont devenus laïques et que la raison s'est émancipée de la Foi, la population prit conscience de sa liberté et de ses droits. Depuis le concile Vatican II, les croyants prirent conscience du vrai sens des mots et beaucoup ne se retrouvaient plus dans le discours de l'Eglise, soit trop ouvert pour les traditionnalistes soit trop traditionnel pour les libéraux.

Mieux éduqués, plus critiques envers les idées traditionnelles, les fidèles ont fini par tout remettre en question, y compris l'autorité du Vatican qui prétend toujours être infaillible ("L'Église ne se trompe jamais") et détenir la seule Vérité ! Comment en effet peut-on accepter une telle ineptie à l'époque moderne et dans des pays démocratiques ? 

Dans un mélange étonnant des genres, les Églises américaines racolent les clients à renfort de publicité ostentatoires dans un pays où presque tout est permis et les paroles de Jésus aussi sacrées que les messages messianiques du Président ! Document Jan Banning/Panos.

Avant le concile Vatican II, le pape se défendait en répondant que si l'Église ne peut pas se tromper, en revanche ses membres en tant que pêcheurs peuvent s'égarer, faisant ainsi une distinction en le dogme et les fidèles. Mais le sens de l'infaillibilité a dû échapper à l'Église puisqu'il existe différents courants : catholiques, orthodoxes, protestants et arméniens. Bien malin celui qui indiquerait quelle Église est "dissidente" ou "hérétique". Alors soit tout le monde dit la Vérité, soit personne ne détient la Vérité ! Mais alors, sur quoi repose le dogme ? Sur des préjugés ? Des décisions laissées à  l'appréciation du hasard comme jadis ? Des prises de positions réactionnaires pour se démarquer de "l'autre Église" ? Ces réactions égocentriques ressemblent à des "enfantillages" d'Églises égoïstes et autoritaires, loin de la sagesse des paroles du Christ (ou de Paul sur lequel l'Église fut fondée).

Comme le disait Paul VI lors du concile Vatican II, aujourd'hui le rôle de l'Église est de "se réconcilier avec le monde de son temps", notamment en cessant de systématiquement s'opposer aux idées nouvelles, en particulier aux découvertes scientifiques (non seulement en archéologie mais également en astronomie et en biologie) qui n'iraient pas dans le même sens que la doctrine ou le récit biblique. Ouf ! Son honneur est sauve.

Du fait que l'Église ne s'adapte que très lentement aux mentalités et par conséquent est inadaptée à jouer un rôle majeur dans les sociétés laïques, il est naturel qu'il se produise des schismes, surtout du chef des mouvements réformés et intégristes. Ainsi, quelques mouvements sectaires très conservateurs ont vu le jour, notamment aux États-Unis où la loi permet à chacun de fonder son Église. C'est ainsi que des communautés comme les Témoins de Jéhovah, les Hamish, les Mormons et autres Créationistes restent sourds et aveugles face à la réalité du monde et en sont toujours à croire que l'homme descend d'Adam et Ève, que le monde à moins de 6000 ans ou que la Terre est plate, paroles bibliques à l'appui ! Nous avons démontré dans ce dossier combien ces idées sont non seulement naïves mais parfois dangereuses quand une minorité veut imposer sa vision du monde au plus grand nombre.

Mais il existe une autre forme de schisme, celle silencieuse des enfants des chrétiens pieux qui aujourd'hui sont en désaccord avec les positions de l'Église par exemple sur le dogme et le sens du Crédo, sur le rôle des femmes, la contraception, l'avortement, le divorce, le mariage du clergé catholique romain, le manque de transparence, de démocratie interne, sur la "fortune" de l'Église, etc. Selon l'Église, certains faits comme l'avortement méritent l'excommunication. "Et après ?!..., diront les concernés, mon corps m'appartient !". Ce point de vue "anti-chrétien" fut légalisé dans de nombreux pays où le pouvoir est aux mains des Démocrates ou des Socialistes, ce qui prouve bien que l'Église perd de son pouvoir et n'a plus d'autorité en matière civile. Reste le cas des États-Unis où lorsque le pays tombe aux mains des Républicains, sa vision du monde rejoint dangereusement celle de l'Église conservatrice d'entemps très rétrograde et intolérante.

En parallèle, jamais plus qu'à l'époque contemporaine l'Église n'a été confrontée à une incrédulité et une désaffection aussi importantes, ce que l'écrivain, philosophe et historien français Ernest Renan (1823-1892) avait déjà décrit dans son livre "Souvenirs d’enfance et de jeunesse" (1883, cf. la version PDF), un "nomadisme spirituel"qui inquiéta le pape Jean-Paul II dans les années 1990 qui s'est concrétisé au fil des décennies par la fermeture ou la transformation de nombreuses églises et chapelles et l'abandon des fabriques d'église (les sociétés morales qui gèrent les biens du clergé) dans certains pays au profit de nouvelles institutions de gestion plus adaptées à leur temps.

Selon le premier rapport annuel de l'Église catholique de Belgique publié en 2018, on apprend que pour 2016, 52.8% de la population belge s'est déclarée catholique mais seulement 9.4% de la population belge s'est déclarée pratiquante. Il y a 2274 ministres du culte (prêtes, diacres ou laïcs formés et nommés par les évêques) et 10262 religieux et religieuses dont 71.7% de femmes. Mais la relève n'est pas assurée. En effet, plus de 76% d'entre eux ont plus de 70 ans et la plupart approchent des 80 ans. Quant aux églises, entre 2012 et 2016, 75 bâtiments d’église ont été désaffectés.

A voir : Le charme des églises et bâtiments abandonnés - House of God

Galerie photo du photographe hollandais Roman Robroek

Signe des temps, trois édifices religieux abandonnés photographiés par Roman Robroek. De gauche à droite, une chapelle en France, une église en Allemagne et une église en Italie.

Aujourd'hui, tous les sondages montrent que la majorité des jeunes ont du mal à croire que Jésus serait le fils de Dieu, qu'il serait ressuscité ou que Marie est tombée enceinte "par le Saint-Esprit", une expression qui est même devenue péjorative. Pourtant l'Église revendique toujours que Jésus est le Fils de Dieu, qu'il mourut et ressuscita et reste présent en esprit parmi les hommes. Autrement dit, un rationnel dirait que Dieu doit être absent pour être présent; c'est effectivement une bonne définition d'une profession de foi aveugle.

Autre indice révélateur, si l'Église fait toujours des émules, elle attire moins de vocations qu'au siècle dernier. Même les Jésuites qui furent pourtant très nombreux et attirés par les sciences à une époque, voient leur effectif se réduire au fil des décennies car leur foi et leur style de vie n'attirent plus aucun adepte; même les anciens collèges qu'ils présidaient ou dans lesquels ils enseignaient sont aujourd'hui gérés par des civils et même parfois dirigés par des femmes comme le collège Saint Paul à Godinne (B). Si cela ne dérange pas le public, Saint Ignace de Loyola a dû se retourner dans sa tombe !

Pire pour l'image de l'Église, suite aux découvertes de l'archéologie (alliée aux linguistes et autres papyrologues) ou simplement en s'interrogeant sur les souffrances qu'endure l'humanité en regards des paroles de la Bible ou plus spécifiquement de Jésus, on apprend que plus d'un chercheur et même des évangélistes ont perdu leur foi et sont devenus agnostiques.

Enfin, il y a la question du pouvoir de l'autorité civile sur le clergé. Longtemps, l'Église de Rome a réglé seule ses problèmes à l'abri des murs de la cité du Vatican sous prétexte que ses dévoués serviteurs consacrés n'avaient pas de comptes à rendre à la société civile. Aujourd'hui encore, le Saint-Siège reste une "cité interdite". Points d'indiscrétions sortent des murs de la cité, juste des rumeurs aussi rapidement dissipées que la poussière par le vent. Or l'Histoire nous a malheureusement prouvé que les hommes d'Église et peu importe leur confession sont avant des hommes avec leurs forces mais aussi leurs faiblesses. Quelques papes épaulés par des empereurs chrétiens ont montré leur zèle du temps des persécutions et de l'Inquisition ou leur complaisance envers certaines brebis égarées dans le vice et le crime bien à l'abri des regards et des reproches sous leur robe austère. Face à cette Église hypocrite et pervertie qui s'est plus enrichie sur le dos des pauvres que les souverains, on comprend mieux pourquoi Jésus s'en était pris au marchands du Temple et aux faux croyants aussi fidèles que des serpents et que les jeunes chrétiens d'aujourd'hui se détournent de cette Église corrompue très éloignée de leurs aspirations ou du message de Jésus. Heureusement, de temps en temps, un pape plus humain et plus proche du peuple pour l'avoir cotoyé de près (Jean-Paul II, François I) essaye de redorer le blason de l'Église à défaut d'avoir pu préserver son image de sainteté. Mais en tant que protectrice ultime de la Foi, en toute rigueur l'Église catholique ne pourra jamais rattraper le train de la modernité qui de toute façon ne la concerne pas, son rôle étant d'élever les âmes et non la cupidité des hommes.

Deuxième partie

La science face à la foi

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