|
Devenez chasseur de comètes, par Michel Festou, CNRS Conseils (II) Rolph Meier nous donne quelques conseils d'observation. Evitez l'amas de la Vierge, vous y passeriez trop de temps à constater que vous avez vu une galaxie de plus appartenant à cet amas. La Grande Ourse n'est guère meilleure. Il évite également l'horizon ouest : astucieusement il précise que l'objet douteux sera sous l'horizon avant que vous ne l'ayez identifié, ce qui est très décevant. Si cela est vrai pour une nébulosité faible, l'argument est moins valable quand son éclat augmente comme le prouve les découvertes de MM.Bradfield ou Ikeya. Comme Meier veut utiliser son instrument au maximum de ses possibilités, il ne cherche ni au crépuscule ni lorsque la Lune est présente. Bradfield se couche en général plus tôt que lui et se lève sans doute avant. Sauf peut-être après la Pleine Lune, car Meier ne veut pas manquer ces matins après lesquels chacun a été stoppé dans ses recherches depuis 15 jours. En moyenne, il trouve des objets suspects trois à quatre fois par séance. Ce nombre n'est faible que parce qu'il connaît très bien le ciel, que son instrument est bien réglé et qu'il a une bonne documentation. Quand il pense "tenir" une comète, l'heure qui suit est cruciale, tout comme pour Ikeya : il faut faire une mesure de position et une autre de mouvement apparent. Pour deux raisons : avant tout être capable de retrouver l'objet plus tard dans la nuit, et surtout la nuit suivante; ensuite il faut communiquer ses observations à d'autres observateurs. Imaginons qu'une comète soit découverte au Japon : elle peut-être suivie (confirmée) en Europe la même nuit, puis en Amérique du Nord. Quand Meier découvrit 1978 f, il ne perdit pas de temps à la photographier : il rentra chez lui aussi vite qu'il put... pour téléphoner à Brian G.Marsden, le responsable du Service des Télégrammes de l'UAI ! Tout le monde ne peut faire cela : M.Marsden reçoit des quantités de "fausses" observations, (toujours envoyées de bonne fois). peu d'amateurs sont "crédibles" et la machine des télégrammes ne se mettra pas en route immédiatement. Sauf si l'information provient d'un observatoire dans lequel se trouve un astronome qui aura pris la peine de vérifier vos assertions. ce n'est pas une garantie ultime, mais peu d'erreurs sont malgré tout commises avec cette méthode. Il faut donc être crédible auprès de l'observatoire le plus proche de votre domicile. Ce n'est pas une tâche facile...
Spécialiste des questions cométaires, Michel Festou a l'impression que la "méthode Meier" est extrêmement prometteuse et qu'elle mérite d'être employée plus largement. Les régions polaires par exemple ne sont pas assez observées, l'écliptique aussi devrait être fructueuse. C'est là, et l'auteur le confirme après un relevé des coordonnées de nombreuses comètes, à plus ou moins 10° que l'on trouve 95% des périodiques, lesquelles sont souvent autour des magnitudes 10 à 13 lorsqu'elles s'approchent de 1 UA. Passez donc plus de temps à regarder les élongations 60-150° et 210-300° du Soleil (comprenant les ascensions droites 4-12h et 14-22h). Les zones 300-60° étant trop proches du Soleil, alors que dans la zone 150-210° les comètes sont nécessairement à plus de 1 UA et donc plus faibles. Mais dans ce cas la difficulté réside dans le grand nombre d'astéroïdes qui peuvent tromper l'observateur. Mais est-il besoin de rappeler qu'un astéroïde n'a pas de chevelure ? Les optiques John Bortle qui fut rédacteur de la rubrique "Comet Digest" de "Sky & Telescope" entre 1977 et 1994 utilisait de préférence des jumelles 20 x 120 ou un télescope de 320 mm de diamètre. Et bien qu'il n'ai jamais découvert de comètes sa contribution aux mesures de magnitudes est inestimable (il réalisa notamment plus de 200000 observations d'étoiles variables pour le compte de l'AAVSO et inventa "l'échelle de Bortle" en 2001). Le premier facteur qu'il considère est la qualité du ciel : un site idéal devrait permettre de voir M33 à l'oeil nu lors d'une nuit sans Lune, lorsque la galaxie est haute sur l'horizon. De même la lumière zodiacale devrait être aisément aperçue au printemps et en automne. Mais avec l'intensification de la pollution lumineuse, de telles conditions d'observations deviennent très rares autour de la plupart des grandes villes et même à la campagne.
Le type d'instrument lui paraît peu important du moment qu'il est utilisé comme collecteur de lumière (faible grossissement) et dispose d'un champ important (rapport f/D court). Au cours du XIXe siècle, les "chasseurs" fameux utilisaient surtout des lunettes de 120 à 150 mm d'ouverture à environ f/10 parce que c'était les seuls instruments disponibles sur le marché. Mais lorsque les télescopes sont devenus plus courants et moins chers, la taille des instruments a augmenté : Brooks avait un télescope de 230 mm f/10 et un autre de 260 mm f/10; Kohler utilisait un Schmidt-Cassegrain de 200 mm f/5; Machholtz un 200 et un 250 mm f/8; Denning un 250 mm f/8; Ikeya un 200 mm f/5 et comme a l'a vu Meier utilise un 400 mm f/5. L'avantage des jumelles de 80 à 120 mm d'ouverture réside dans leur commodité d'emploi (une monture azimutale suffit) et dans le peu de fatigue oculaire qui résulte de la vision binoculaire. On peut donc observer longtemps. L'Anglais Alkock, les Tchèques Mrkos, Padujsakova et Kresak ont eu beaucoup de succès dans les années '50 avec ce type de jumelles. En 1986, Don Machholtz utilisa un binoculaire de 29x130 mm pour découvrir Machholtz 1 qui était alors de 11e magnitude et sans queue apparente. A lire : Quel télescope acheter et pour quel usage ?
L'ouverture de l'instrument ne joue aucun rôle à grossissement donné : une comète à la même brillance dans un f/6 ou un f/10. Mais la taille de l'image sera différente selon la focale du télescope et cela se ressentira au moment d'identifier le type d'objet observé, et est-il besoin de le préciser, l'ouverture sera un facteur essentiel en photographie. Le grossissement doit donner une pupille de sortie de 5 à 7 mm : il vaut donc 1.5 à 2 fois le diamètre de l'objectif exprimé en centimètres. Si l'instrument à moins de 80 mm, Bortle conseille un grossissement de 20 pour tous les instruments (oculaire de 20-25 mm de focale). Mais il ne dit pas pourquoi : serait-ce pour réduire l'aspect stellaire de la comète ? Pour évaluer le potentiel de vos oculaires consultez ce tableau Excel. Dernier chapitre Le balayage du ciel et les découvertes fortuites
|