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La bioastronomie

Analyse de grains de riz transgéniques. Document Buwal.ch.

Définition de la vie

Pour comprendre notre spécificité et avant de rechercher les origines de la vie sur Terre et ailleurs dans l'univers, nous devons d'abord définir ce qu'elle représente. Qu'est ce que la vie ?

Beaucoup de philosophes et de biologistes ont disserté sur la question sans vraiment apporter de réponse convaincante jusqu’au XIXe siècle. On reconnaît la vie quand on la voit, dit-on quelquefois. Cet argument à l’emporte-pièce est insuffisant car rien ne la définit sur le plan biologique ou thermodynamique.

Nous allons découvrir qu'une bonne définition de la vie fait autant référence à la théorie de l'information qu'aux lois fondamentales de la biologie.

On peut dire que la vie se manifeste lorsque le sujet transforme de l’énergie, métabolise et excrète. Or une usine, une automobile ou un ordinateur effectue ces opérations mais nous ne les considérons pas comme des êtres vivants. On peut ajouter que le sujet doit se situer loin de l’équilibre. Mais la manifestation d’un éclair ou une réaction chimique auto-entretenue est bel et bien une réaction se déroulant en dehors de l’équilibre thermodynamique mais elle n’est toujours pas un être vivant. Qu’est donc la vie ?

"La vie est l'ensemble des fonctions qui résistent à la mort" disait l'anatomiste Richard Xavier Bichat au XVIIIe siècle. Si c'est vrai globalement, encore faut-il définir les fonctions dont il parle, une question... vitale !

Il existe une définition biologique de la vie : "un organisme est dit vivant lorsqu'il échange de la matière et de l'énergie avec son environnement en conservant son autonomie, lorsqu'il se reproduit et évolue par sélection naturelle." Mais cette définition est encore insuffisante.

Une raffinerie transorme de l'énergie mais ce n'est pas un organisme vivant. Document Getty Images.

Entre une pierre inerte et un organisme, un cristal en phase de croissance paraît vivant : il grandit et est capable de choisir des éléments de sa nature afin de ne pas créer d’impuretés, pourtant ce n’est qu’un minéral, il n’est pas vivant.

A l’inverse, une mule (croisement entre un âne et une jument) est bien vivante, mais comme la plupart des hybrides elle est incapable d'avoir une descendance.

Un virus informatique peut se multiplier en contaminant des programmes comme son équivalent biologique infecte une cellule, mais mérite-t-il pour autant le qualificatif d’organisme ? Grâce à l'informatique, les chercheurs disposent d'un outil puissant capable de simuler les fonctions du vivant et ils incorporent dans leurs programmes tant de paramètres qu'ils peuvent reproduire des organismes virtuels : des colonies de fourmis, l'évolution d'un oeuf d'escargot ou la croissance des plantes.

Si le robot musicien de l'Exposition de Tsukuba (Japon, 1989) ou la créature de Mary Shelley "Frankenstein" semblent tout aussi vivants que vous et moi, il manque à ces créatures humanoïdes fantasques ou ces robots, une combinaison subtile qui gouverne tous les processus du vivant : le hasard. La vie évolue en effet dans le temps et met en jeu une infinité de paramètres, ce qui la rend apparemment imprévisible.

Tous les organismes vivent selon un "ordre aléatoire" qui assure leur stabilité, tout en leur permettant de réagir à l'environnement. C'est la faculté d'adaptation, l'apprentissage. Sans ordre, le monde plongerait dans l'anarchie; sans hasard - et nous verrons en cosmologie qu'il n'est pas "innocent" - il n'y aurait pas d'évolution. Toutefois tous les programmes informatiques, même s'ils paraissent capables de réagir à des situations imprévues ou de prendre des décisions, sont créés en fonction d'un but précis. Nous relevons là une ambiguïté. Tout comme au Moyen-Age les vitalistes affirmaient que la finalité de l'homme était à l'image de Dieu (principe anthropique), un organisme vivant n'est pas pour autant une machine. Et inversement, on ne peut accorder à une machine les mêmes droits qu'à un être vivant, encore moins ceux d'un humain.

Un robot est une machine programmée, il ne fonctionne pas au hasard et sa mécanique s'use. Il n'est pas vivant.

On peut aussi considérer que l'être est dit vivant lorsqu'il suit une évolution; comme la survie, la conservation de l'espèce. Cela nous permet de proposer une définition de la vie qui se dégage de tout anthropocentrisme, sans finalité particulière, ni morale. A la définition précédente il faut ajouter que "la matière est capable de s'auto-organiser sans être programmée."

Un jour, pour une raison mystérieuse, Lokiarchaeum qui n'est plus une cellule procaryote et pas encore une cellule eucaryote a voulu se complexifier. Elle ne possède pas de noyau mais dispose d'un génome et code des protéines. Cet organisme transitionnel marque une étape majeure dans la complexification de la vie.

Cette organisation élémentaire de la vie est le plus souvent régie par un programme génétique, une série d’instructions permettant de réaliser les réactions métaboliques indispensables au fonctionnement de la cellule et de l'organisme si elles vivent en communauté.

Le robot et autre gynoïde ne font donc pas partie de cette catégorie même s'ils sont aujourd'hui capables de réagir à leur environnement sans instructions déterminées. Nous nuancerons toutefois cette affirmation lorsque nous aborderons le thème des différentes formes de vie possibles.

Le médecin et biochimiste Christian de Duve (1917-2013) de l'Université Catholique de Louvain, prix Nobel de Médecine, définissait la vie rationnellement par sa structure physique. Partant d'un ordre particulièrement diversifié de l'arbre de l'évolution (l'arbre phylogénique divisé en branches, classes et ordres), les statistiques sur le classement moléculaire du génome des êtres vivants - ou du moins d'une partie des gènes qui le composent - prouvent que nous descendons tous d'un tronc commun où nous trouvons la première cellule eucaryote, l'organisme ancestral dont le noyau est séparé du cytoplasme.

Antérieurement, on constate que les organismes procaryotes n'ont pas besoin de noyau cellulaire pour vivre ni pour se reproduire; la présence d'un génome protégé derrière une membrane cellulaire et éventuellement une paroi cellulaire suffisent.

En résumé, un être vivant se compose de 3 parties :

- Une membrane perméable qui le sépare du monde extérieur (cf. la structure cellulaire et la chimie prébiotique)

- Un matériel génétique qui préside à l'auto-réplication (cf. le code génétique)

- Des protéines qui assurent le travail et dont la conformation spatiale est très importante (cf. la synthèse des protéines)

Ces définitions de la vie s’appliquent parfaitement aux organismes unicellulaires, des bactéries aux paramécies. Leur agilité à se déplacer, leur mode de reproduction sont autant de signes de leur vivacité. Elle s'applique évidemment aussi aux métazoaires, c'est-à-dire aux animaux au sens large.

Mais ces définitions ne s'appliquent pas aux virus (à ARN ou à ADN) car ils ne possèdent pas la machinerie génétique pour s'auto-répliquer et produire des protéines. En effet, ils doivent infecter une cellule hôte pour détourner son métabolisme à leur profit (cf. le SARS-CoV-2). On ne les considère donc pas comme vivants. En revanche, leur charge virale est active comme l'est un poison. Mais cela ne veut pas dire que les virus n'ont pas un ancêtre commun que l'on peut situer dans l'arbre phylogénétique du vivant. Si les microbiologistes et les virologues ne l'ont pas encore identifié, la piste des virus géants (par ex. le mimivirus) pourrait les mettre sur une voie.

Ci-dessus, structures de base d'une cellule procaryote, un bacille (gauche) et d'une cellule eucaryote animale (droite). Ci-dessous, le rétrovirus SARS-CoV-2 (gauche) et une amibe arcella grossie 400X (droite), un protozoaire eucaryote autonome capable de se reproduire. Documents Encarta/Microsoft, D.R., Scientific Animations adapté par l'auteur et SPL.

Ceci dit, durant l’étonnante division cellulaire d’un embryon humain il en va tout autrement. Prémices d’un organisme pluricellulaire, la question se pose à nouveau de savoir à quel stade de son évolution peut-on parler d’organisme vivant ? En laissant à d’autres le soin de répondre au problème éthique, on constate que la réponse n’est plus aussi simple que tout à l’heure. Les yeux rivés à l’oculaire d’un microscope, on observe de nombreuses divisions cellulaires, pourtant il n’y a toujours qu’un seul organisme.

Cette répartition des rôles a pour conséquence de déléguer à l’organisme certaines fonctions physiologiques, telle la respiration, la digestion, l’excrétion, etc., autant de fonctions vitales dont toutes les cellules ont besoin pour se développer.

On peut donc en conclure que du plus frêle arbrisseau au plus grand mammifère, la vie n’est pas contenue dans la cellule, mais dans l’organisme tout entier. L’individu en soit n’existe plus. C'est à ce point vrai qu'au stade initial pratiquement toutes les cellules peuvent assurer n'importe quelle fonction de l'organisme. Que l'individu adulte vienne à disparaître, d’autres cellules spécialisées prendront sa place pour assurer la survie de l’ensemble. Des millions de cellules meurent ainsi chaque jour dans le corps humain dans notre plus grande indifférence. Mais si l’organisme meurt ce sont toutes les cellules qui subiront la même loi universelle.

Chez les métazoaires (ici une rainette aux yeux rouges Agalychnis callidryas), la vie est contenue dans l'organisme tout entier. S'il meurt toutes les cellules subiront la même loi naturelle. Document ForWallpaper.

On peut enfin définir la vie, non pas sur le plan organique mais d’un point de vue spirituel, conforme en cela aux conceptions philosophiques de certains courants de pensées ou doctrines.

Les adeptes du principe anthropique par exemple considèrent que la vie représente avant tout notre conscience, qu’elle soit à l’image d’un être supérieur (principe anthropique fort) ou des lois de la nature qui orientent l’évolution vers la complexité croissante (principe anthropique faible).

A ce stade du discours on découvre que la vie ne peut plus se définir à partir des mêmes principes. Il est même probable que notre recherche d’une définition précise est utopique, chaque stade de l’évolution définissant ses propres règles, la vie apparaissant en fait graduellement dans des systèmes de plus en plus évolués. Le cailloux est inerte, le cristal grandit et se définit par sa pureté, les argiles ont des capacités de mémorisation et de chaînage, les protéines assurent le travail de la cellule, les virus ont des capacités de reproduction, les protozoaires sont autonomes et les métazoaires sont organisés.

Nous considérons que la vie ne concerne que les organismes les plus élevés dans cette évolution. Mais en voulant donner une étiquette à chaque maillon de cette chaîne continue, en cherchant une définition exacte de la vie, en considérant uniquement ses extrêmes ou en arrêtant arbitrairement ses propriétés, on se trouvera à un stade ou un autre face à des confusions et entravés dans les paradoxes du langage et de la classification par nature arbitraire.

En conclusion, une bonne définition de la vie doit approcher ce concept d’un point de vue plus général en observant quelles sont les sources d'énergie disponibles ainsi que les propriétés et le comportement de la matière et la façon dont ces phénomènes ont évolué et notamment comment les premières cellules ont progressivement gravi les différents échelons de la complexité en exploitant ces énergies libres.

A ce sujet, l’objet du dossier consacré à la bioastronomie sera d’essayer de comprendre comment la première cellule est apparue, si elle est apparue sur la Terre ou ailleurs dans l’univers. Nous devrons pour cela également définir ce qu’est une cellule et quelles sont ses propriétés, ses avantages et ses points faibles. La biologie moléculaire et la biochimie nous conduiront ainsi jusqu’aux briques du code génétique.

Lorsque nous aurons des éléments de solutions, nous tâcherons de savoir quels avantages ont-elles gagné à vivre en communauté. L’expérience de Miller, les principes de la thermodynamique et la théorie de Darwin seront les mots-clés de nos discussions. Notre pôle d’intérêt se portera enfin sur l’efficacité des fonctions de cet organisme en observant comment la vie s’est adaptée dans les milieux extrêmes. Si nous parvenons à comprendre ces différents mécanismes, nous pourrons peut-être élucider le mystère de la vie et proposer quelques idées sur son évolution extraterrestre.

Enfin, pour résumer cette coévolution, nous passerons également en revue les grandes étapes de l'évolution de la Terre et de la vie.

Ceci dit, pour être complet, à l'heure des développements de l'intelligence artificielle, dans le cadre de la recherche de la vie dans l'univers, nous aborderons également la question des formes de vie artificielles.

Cet article fut publié sur Futura-Sciences en 2005 et a été mis à jour.

Pour plus d'informations

Bactéries et virus (sur ce site)

Les grandes étapes de l'évolution de la Terre et de la vie (sur ce site)

Les clés de la vie sur Terre (sur ce site)

La place des virus dans le monde vivant, thèse de Gladys Kostyrka, 2018

Catalogues de la vie

Encyclopedia of Life (EOL)

Project Noah

Tree of Life web project

Catalogue of Life (ITIS)

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