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A la recherche des exoplanètes superhabitables

Une planète rocheuse, une étoile solaire dG ou dK, de l'énergie, une atmosphère filtrée pour les rayonnements ionisants, de l'oxygène, des terres émergées et de l'eau; nous sommes en bonne voie vers l'habitabilité. Reste à vérifier si une vie complexe peut se développer dans cet environnement et en combien de temps. Document T.Lombry.

Qu'est-ce qui rend une planète superhabitable ? (II)

Lorsque nous recherchons une planète plus habitable que la Terre, dans l'esprit des astrobiologistes il s'agit d'une planète présentant une biomasse et une biodiversité plus élevées que celle que nous connaissons. Mais nous devons également faire la distinction entre les propriétés stellaires et les propriétés planétaires qui sont pertinentes pour l'habitabilité.

La vie complexe aura des exigences plus strictes sur ces deux propriétés que la vie microbienne tandis que la vie complexe sera probablement présente dans tout environnement planétaire disposant d'une biosphère globale au moins aussi diversifiée et prévalente que celle de la Terre. Ainsi, une approche réalisable pourrait être de rechercher des biosignatures complexe pour identifier les planètes et les lunes extrasolaires superhabitables.

Propriétés stellaires

En ce qui concerne les propriétés stellaires appropriées, nous devons considérer que différents types d'étoiles ont des durées de vie et une production d'énergie différentes. Ainsi, les étoiles naines de type spectral G similaires à notre Soleil, classées dG ("d" pour "dwarf", naine), peuvent ne pas être les étoiles hôtes les plus appropriées pour l'émergence de la vie sur leur(s)s planète(s) en raison de leur durée de vie relativement courte (J.F. Kasting et al., 1993). Puisqu'il fallut environ 3.5 milliards d'années pour qu'une vie macroscopique complexe apparaisse sur la Terre et environ 4 milliards d'années pour aboutir à une vie technologiquement avancée (nous), la vie sur de nombreuses planètes en orbite autour d'étoiles dG peut simplement manquer de temps pour se développer. Ce sera encore plus probable pour les étoiles de masse plus élevée que celle du Soleil (étoiles naines de type B, A et F), qui ont une durée de vie encore plus courte.

En outre, des études ont montré que les jeunes étoiles dG tournent au moins 10 fois plus vite que les étoiles dG proche de l'âge du Soleil et ont des niveaux élevés d'activité magnétique ainsi que des émissions de rayons X coronaux et d'UVE chromosphériques très intenses (E.F. Guinan et al., 2005), ce qui rend difficile la formation et l'évolution d'une vie primitive. Armstrong et al. (2014) ont soutenu que l'augmentation de la durée de vie des étoiles ayant des masses inférieures à une masse solaire (1 M) permettrait aux planètes habitées de développer une biodiversité plus élevée et peut-être même un écosystème plus complexe.

Cet argument permettrait aux étoiles naines de type spectral K et M - oranges et rouge - d'entrer dans le petit club fermé des étoiles hôtes planétaires superhabitables. Toutefois, la limite minimale de la masse des étoiles hébergeant des planètes superhabitables est donnée par le verrouillage des marées (J.F. Kasting et al., 1993), la perte des saisons (R.Heller et al., 2011), la perte d'eau précoce (R.Barnes et al., 2015) et les sursauts de haute énergie subis par les planètes dans la zone habitable autour des étoiles naines (cf. les systèmes de Proxima du Centaure et de TRAPPIST-1). De plus, comme la ZH est située beaucoup plus près des étoiles M, les planètes gravitant dans cette zone connaîtront des taux d'exposition beaucoup plus élevés au vent stellaire. Toutes choses confondues, les naines M ne sont peut-être pas les meilleurs endroits pour l'émergence de formes de vie complexes.

Par conséquent, les étoiles naines K pourraient bien offrir les environnements les plus agréables, exposées aux forces et rayonnements les plus bénins (durables et stables) pour les planètes superhabitables. En utilisant un modèle simple pour l'érosion des atmosphères planétaires par le vent stellaire et pour l'irradiance UV biologiquement active, Lingam et Loeb (2018, 2019) sont arrivés à une conclusion similaire. Ainsi, d'un point de vue objectif, les étoiles similaires à notre Soleil de type dG pourraient ne pas être les plus adaptées pour héberger des planètes superhabitables, mais bien les étoiles dK de masse inférieure car bon nombre des inconvénients des étoiles dG et dM ne s'y appliquent pas.

Propriétés planétaires

En ce qui concerne les propriétés planétaires, de nombreux paramètres affectent l'habitabilité, et nombre d'entre eux sont intrinsèquement liés. De plus, à l'heure actuelle, peu de ces paramètres d'habitabilité, voire aucun, sont connus de manière fiable pour une planète. L'un d'eux est la différenciation géophysique d'une planète en noyau, manteau et croûte. Cette différenciation associée à un mécanisme de recyclage efficace tel que la tectonique des plaques offre l'opportunité de multiples habitats et interfaces entre ces habitats. Si la planète est plus massive que la Terre, elle présente une plus grande surface et plus de biotopes seront disponibles près de sa surface. Par conséquent une telle planète est potentiellement capable de supporter plus de biomasse et une biodiversité plus vaste (J.C. Armstrong et al., 2014).

Exoplanète superhabitable orbitant autour d'une étoile dK. Document T.Lombry.

Une masse planétaire plus importante suggère également une plus grande quantité de chauffage intérieur par désintégration radioactive, ce qui signifie que la planète pourrait rester habitable plus longtemps.

Une planète de masse plus grande avec une gravité plus élevée conserverait également une atmosphère plus épaisse, ce qui ferait du vol le moyen de locomotion préféré. Sur Terre, le vol est utilisé par de nombreuses espèces comme moyen de locomotion, et sur une planète ayant une atmosphère encore plus épaisse, ce serait encore plus approprié. Cela aurait des avantages pour la distribution des espèces et leur installation sur les îles et les continents.

Cependant, cette relation ne tiendrait que dans une certaine mesure, car si la masse planétaire devenait trop importante, la planète pourrait évoluer en une géante gazeuse ou mini-Neptune retenant les gaz légers tels que l'hydrogène ou se transformant en corps indifférencié riche en fer. Dès lors, les biotopes souterrains pourraient être réduits en raison d'une plus grande gravité induisant des volumes de pores plus petits et parce qu'une température de stérilisation serait atteinte à une profondeur planétaire inférieure.

Il est naturellement difficile de déterminer la masse optimale d'une planète superhabitable, mais Armstrong et al. (2014) ont émis l'hypothèse que les planètes ayant jusqu'à deux masses terrestres (2 M) pourraient avoir un potentiel de superhabitabilité. Cependant, des recherches plus récentes indiquent que de nombreuses exoplanètes de cette masse sont gazeuses, des mini-Neptunes plutôt que des planètes rocheuses (L.Zeng et al., 2016), de sorte qu'une estimation plus prudente allant jusqu'à environ 1.5 à 1.6 M semble être plus probable.

De plus, des planètes plus massives pourraient former une couche stagnante entre leur noyau et leur manteau, ce qui entraînerait un flux de chaleur réduit à partir du noyau et, par conséquent, entraverait la tectonique des plaques (V.Stamenković et al., 2012; L.Noack et D.Breuer, 2014). Cela pourrait empêcher la planète de réaliser son cycle du carbone (ou carbonates-silicates, cf. ce schéma pour la Terre actuelle) qui agit comme un thermostat naturel sur Terre.

De plus, des planètes plus massives peuvent facilement se transformer en une planète comme Vénus avec une activité volcanique plus intense et des émissions de gaz organiques volatils à effet de serre. Dorn et al. (2018) et Noack et al. (2017) ont suggéré qu'il existe une limite de masse jusqu'à laquelle les planètes peuvent efficacement dégazer les atmosphères denses et rester habitables.

La température est une variable critique pour tous les aspects de la biologie. Les températures globales sont principalement déterminées par l'emplacement de la planète dans l'espace par rapport à son étoile hôte, son activité endogène et ses variations de température dépendant principalement de l'inclinaison de l'axe de la planète par rapport à son étoile. La vie nécessite une certaine plage de températures qui dépend de sa biochimie. Sur la Terre, la vie complexe présente une plage plus étroite que la vie microbienne (tableau 1). Aucune preuve empirique n'est cependant disponible sur ce qu'est cet optimum, mis à part l'exemple de la vie sur Terre. De ce que nous savons, la biomasse et la biodiversité les plus élevées sont présentes dans les forêts tropicales humides et les plus faibles dans les régions polaires froides (J.H. Brown, 1990, 2013; N.J. Kraft et al., 2011).

A gauche, une exoplanète désertique chaude située dans la zone habitable de son étoile de type solaire (type G). Son atmosphère contient de l'humidité qui peut se condenser la nuit et son sous-sol plus tempéré peut contenir de l'humidité voire des poches d'eau. L'atmosphère comme le sous-sol pourraient donc abriter des formes de vie, par exemple l'équivalent terrestre des microbes voire même des insectes et des animaux adaptés à la vie souterraine. A droite, un jeune système planétaire comprenant deux exoplanètes rocheuses "habitables" dont l'une est escortée par une lune gazeuse. Malgré la présence d'une couche dense d'ozone stratosphérique autour de la principale planète, les rayonnements X et UV intenses de l'étoile finiront par vaporiser les surfaces liquides et éroder son atmosphère au détriment des formes de vie complexes. Documents T.Lombry.

Ainsi, des températures plus élevées que celles qui existent de nos jours sur Terre semblent être plus favorables à la vie. Le bémol est que de l'humidité doit également être disponible car les déserts à faible biomasse et biodiversité sont également courants sur notre planète. Un exemple est la période du Carbonifère précoce (356 Mio) qui était plus chaude et plus humide (A.Raymond, 1985; G.Bardossy, 1994) qu'aujourd'hui, avec une biomasse tellement importante que nous en récoltons encore les dépôts organiques sous forme de charbon, de pétrole et de gaz naturel. Ainsi, une température légèrement plus élevée, disons de 5°C - semblable à celle du début du Carbonifère - fournirait des conditions plus habitables jusqu'à ce qu'un optimum soit atteint. Cependant, cela dépendra de la biochimie et de la physiologie des organismes vivants et de la quantité d'eau présente.

Comme expliqué précédemment, une teneur en eau plus élevée sous la forme de plus d'humidité et de plus de nuages serait en principe bénéfique pour la vie, les forêts tropicales sur Terre étant encore un bon exemple. Une teneur en eau plus élevée (humidité absolue) dans l'atmosphère offrirait également une meilleure protection contre les rayonnements UV. Cependant, la Terre est déjà couverte à environ 71% d'eau, il est donc difficile d'imaginer à quel point une couverture légèrement plus élevée offrirait un avantage significatif. Nous savons déjà qu'une planète océanique ne permet pas aux organismes d'atteindre un degré élevé de technologie.

La Pangée il y a 300 millions d'années. L'Amérique du Nord et centrale est à gauche, l'Afrique à droite. Voici une autre représentation de la Pangée.

Le paramètre le plus critique est la répartition des zones terrestres et océaniques, en particulier les zones peu profondes où la diversité biologique et la biomasse sont les plus élevées. La position des terres et leur répartition affecteront également les modèles de circulation océanique et atmosphérique (J.R. Borchert, 1953). Ainsi, des zones terrestres plus uniformément réparties fourniraient plus d'interfaces terre-océan par rapport à l'autre extrême, la période permienne, connue pour la Pangée, la présence d'un immense supercontinent et de grands déserts intérieurs (K.W. Glennie, 1987; F.R. Abrantes et al., 2016). C'est un scénario d'une distribution terre-eau extrêmement inégale dans l'histoire de notre planète, ce qui était le pire des cas d'habitabilité sur Terre.

Dans ces conditions, la tectonique des plaques est cruciale. Combinée à l'érosion, elle est en grande partie responsable de la topographie de notre planète, et certains taux pourraient conduire à des régions côtières biologiquement plus actives. 

La tectonique des plaques est essentielle pour le recyclage des nutriments, et sans un mécanisme de recyclage aussi efficace, les nutriments nécessaires à une biosphère globale seraient assez rapidement épuisés. Ainsi, la tectonique des plaques est, au moins pour la Terre, essentielle pour son haut degré d'habitabilité. Les taux de tectonique des plaques (mouvement des plaques et création de nouveaux fonds océaniques) ont varié tout au long de l'histoire de la Terre et nous ne savons pas quel est le taux optimal d'activité tectonique pour maximiser la biomasse et la biodiversité.

Un autre paramètre important qui affecterait généralement favorablement l'habitabilité d'une planète est le temps, ou mieux appelé l'âge de la planète concernée. Sur Terre, le développement de la vie est très lent. Il fallut plus de 2 milliards d'années pour qu'apparaissent les premiers métazoaires et près de 4 milliards d'années pour que des organismes complexes soient communs sur notre planète. La plus grande partie du temps fut "perdue" durant l'époque où les roches de la Terre furent oxydées et que l'oxygène s'accumula dans l'atmosphère, sans laquelle des macro-organismes comme les animaux n'auraient jamais pu exister. Si la période de temps pour atteindre ce niveau de complexité et de biodiversité représenterait la moyenne, cela signifierait statistiquement que sur de nombreuses planètes habitables, ce saut évolutif ne serait pas atteint au cours de la même période, peut-être même pas pendant la durée de vie de l'étoile (surtout si l'étoile est une étoile dG similaire à la nôtre).

Ainsi, dans cette catégorie, nous avons également un âge optimal et nous ne savons pas où il se trouve, sauf qu'une planète un peu plus âgée a plus de chances d'être plus habitable que la Terre. Si une planète est trop âgée, l'épuisement de la chaleur générée en interne peut entraîner un éventuel refroidissement, avec des conséquences sur la température moyenne en surface et la composition de l'atmosphère (bien que les interactions des marées puissent contrecarrer le refroidissement interne). Ceci est particulièrement pertinent pour les planètes de masse inférieure à la Terre, comme on l'observe sur Mars par exemple.

En outre, plus une planète est âgée, plus il y a de chances qu'elle ait connu une catastrophe globale qui aurait considérablement affecté la biosphère, comme un impact majeur, des éruptions volcaniques à répétition ou l'explosion d'une supernova à proximité, trois évènements capables de stériliser ou quasi stérilisant. Ce genre de catastrophe devrait entraîner une dévastation extrême car avec l'expérience de la vie sur Terre nous savons que même de grandes extinctions préjudiciables à la biosphère peuvent paradoxalement stimuler l'évolution et entraîner ainsi une voie plus rapide vers la complexité biologique. Sur la base de cette compréhension, statistiquement parlant on peut estimer qu'une planète âgée de 5 à 8 milliards d'années devrait être généralement plus habitable que la Terre.

Le fameux clair de Terre photographié par l'équipage d'Apollo 11 le 20 juillet 1969. En voyant la beauté de la Terre suspendue dans le ciel et son isolement, James Lovell et Neil Armstrong l'ont qualifiée d' "oasis dans l'espace". Document NASA.

La Terre est unique dans le système solaire en ce sens qu'elle dispose d'une grande lune (à l'exception du système Pluton-Charon). La Lune assure la stabilité de l'axe de rotation de la Terre et donc du climat. L'impact majeur qui créa la Lune (cf. Théia), pourrait avoir livré des éléments critiques tels que le carbone, l'azote et le soufre à la Terre primitive (D.S. Grewal et al., 2019). Des recherches récentes indiquent qu'une lune n'est peut-être pas nécessaire pour une obliquité stable (J.Lissauer et al., 2011) et que des variations d'obliquité extrêmes peuvent ne pas nuire à la vie (J.C. Armstrong et al., 2014). Cependant, si la Terre avait eu les variations énormes et chaotiques de l'obliquité que Mars avait (P.D. Ward, 1973; J.Touma et J.Wisdom, 1993; M.T. Mellon et B.M. Jakosky, 1995), le résultat serait préjudiciable à la vie car les espèces n'auraient pas le temps de s'adapter à ces changements rapides et cela entraînerait peut-être une faible biodiversité et des extinctions massives.

Les variations des paramètres environnementaux sont généralement bénéfiques pour l'évolution, mais seulement dans une certaine mesure avant que les changements drastiques qui en résultent ne soient probablement trop extrêmes et ne conduisent à l'extinction de la vie. Un avantage supplémentaire du couple Terre-Lune est que notre satellite provoque des marées sur notre planète (combinées à celles provoquées par le Soleil), qui peuvent avoir joué un rôle dans l'émergence de la vie (F.Westall et al., 2013).

Parmi les autres paramètres, citons que la Lune s'éloigne de la Terre et était beaucoup plus proche de la Terre (15000-25000 km de distance) à l'aube de la vie. Enfin, le cycle continu du magma à l'intérieur de la Terre et des masses d'eau à la surface de la Terre offrent un énorme avantage pour le développement de la vie.

En fait, le PHI pour la Terre primitive était de 1.0 contre 0.96 pour la Terre actuelle en raison de la réduction des forces de marée (D.Schulze-Makuch et al., 2011). Ainsi, on peut supposer qu'une planète ayant une lune plus grande que la Lune de la Terre ou plus proche que la distance de la Terre à la Lune actuelle serait, en général, plus habitable que la Terre. Cependant, avec une lune très massive trop proche, l'habitabilité de la Terre aurait probablement été pire qu'elle ne l'a été en raison du verrouillage des marées imposé par l'attraction gravitationnelle de cette lune hypothétique. Une fois le verrouillage gravitationnel établi, la longueur du jour de la Terre pourrait être plusieurs fois sa valeur actuelle, ce qui aurait des effets dramatiques sur la distribution de la lumière en surface et donc de la disponibilité de la principale source d'énergie extérieure.

Une propriété critique pour savoir si une planète est plus habitable que la Terre est son histoire planétaire, mais dans un proche avenir elle ne peut pas être évaluée pour les exoplanètes (D.Schulze-Makuch et E.Guinan, 2016). Les conditions étaient-elles propices à l'émergence de la vie au début de l'histoire de la planète ou de la lune ? Un évènement cataclysmique s'est-il produit dans son histoire qui anéantit toute vie et rendu impossible le développement ultérieur de la vie ? Dans le cas de la Terre, un tel évènement s'est produit avec la collision qui créa notre Lune; cependant, par la suite, les conditions étaient toujours favorables à l'émergence de la vie. Mais que se passerait-il si la collision s'était produite 3 milliards d'années plus tard, alors que l'atmosphère terrestre était déjà riche en oxygène ?

Bien que nous ne sachions pas quelles sont les conditions exactes nécessaires à l'émergence de la vie, une condition préalable semble être la disponibilité d'environnements anaérobies dans lesquels la synthèse de molécules organiques peut avoir lieu. Dans les deux cas, nous ne pourrons pas répondre à cette question en observant une exoplanète ou une exolune aujourd'hui, des milliards d'années après sa formation. Ainsi, même si nous trouvons une planète qui semblerait être plus habitable que la Terre sur la base des paramètres identifiés ici, il se peut que ce ne soit pas le cas. En fait, notre planète "idéale" peut même être inhabitable et dépourvue de vie. Néanmoins, sur la base de ce que nous avons expliqué, nous pouvons rassembler les points clés à réunir lors de la recherche d'une planète potentiellement superhabitable dans le tableau 2 suivant.

Tableau 2. Les exoplanètes qui pourraient être plus habitables que la Terre

- En orbite autour d'une étoile naine K

- Âgée d'environ 5 à 8 milliards d'années

- Jusqu'à 1.5 plus massive que la Terre et environ 10% plus grande que la Terre

- Température de surface moyenne environ 5°C plus élevée que sur Terre

- Atmosphère humide avec des niveaux de 25 à 30% d'O2, le reste étant principalement des gaz inertes (par exemple, N2)

- Des terres/eaux éparses réparties avec de nombreuses zones d'eau peu profonde et des archipels

- Grande lune (1 à 10% de la masse planétaire) à distance modérée (10 à 100 rayons planétaires)

- Possède une tectonique des plaques ou un mécanisme de recyclage géologique/géochimique similaire ainsi qu'un champ géomagnétique protecteur puissant.

NB. Pour une évaluation des propriétés planétaires susceptibles d'être directement observables avec les missions spatiales actuelles et proposées, voir le tableau 1 de D.Schulze-Makuch et E.Guinan (2016).

Trouver une planète superhabitable

Avons-nous une planète candidate répondant à tous ces critères ? Pour l'instant, cette question reste ouverte car nous ne pouvons pas évaluer tous les critères sur toutes les exoplanètes confirmées. En effet, la technologie actuelle ne nous permet tout simplement pas, par exemple, de mesurer les températures globales sur des exoplanètes rocheuses avec la précision requise. Les données manquent également actuellement pour calculer le PHI de chaque exoplanète. Néanmoins, on peut dire si une exoplanète évolue dans la zone habitable avec des températures telles que de l'eau liquide pourrait être présente en surface. En outre, nous ne pouvons pas déterminer la quantité de terres sur une exoplanète ou si elle dispose d'une tectonique des plaques, ni si une grande lune gravite autour d'elle. Cependant, les technologies futures nous permettront de le faire. La future mission Starshade par exemple est un premier pas important dans cette direction (M.C. Turnbull et al., 2012).

Plus de 4000 exoplanètes ont été identifiées et plusieurs centaines de candidates restent à confirmer à ce jour. Beaucoup d'entre elles se trouvent dans la zone habitable reprise dans les graphiques présentés ci-dessous (Fig. 1 et Fig.2). Ceci est une condition préalable à notre processus de sélection, sinon les températures de surface sont défavorables au développement d'une biosphère globale.

A gauche, Figure 1. Représentation de la distance étoile-planète en fonction de la masse de l'étoile hôte d'environ 4500 exoplanètes confirmées et candidates extraites du catalogue de exoplanets.org au 20 mai 2019. Les températures effectives (de surface) des étoiles sont indiquées par des couleurs des points (voir barre de couleur). Les rayons planétaires sontreprésentés par la taille des points (voir l'échelle des tailles en bas). La zone habitable conservatrice, définie par un effet de serre humide et les limites maximales de cet effet (Kopparapu et al., 2013) est délimitée par les deux lignes noires en oblique. Les luminosités stellaires nécessaires au paramétrage de ces limites sont exraites de Baraffe et al. (2015) en fonction de la masse de l'étoile. A droite, Figure 2. Un agrandissement de la zone habitable de la Fig.1. Documents D.Schulze-Makuch et al. (2020) adapté par l'auteur.

Comme expliqué précédemment, les étoiles dK semblent avoir les propriétés stellaires idéales pour héberger des planètes superhabitables. Heureusement, elles sont également relativement fréquentes dans la Galaxie (~12%), plus que les étoiles dG (~8%). Dans l'étape suivante, la question se pose naturellement de savoir si nous pouvons identifier les planètes dans la zone d'habitabilité des étoiles naines K. Dans un diagramme couvrant la distance étoile-planète et la masse stellaire, la zone habitable est située entre 0.5 et 1.0 UA et entre 0.5 et 1.0 M (Fig. 2).

Un paramètre évident absent du tableau 3 ci-dessous est la masse de la planète. Ce manque de connaissances est inhérent à la plupart des exoplanètes et candidates détectées grâce aux satellites Kepler de la NASA et CHEOPS de l'ESA parmi d'autres qui exploitent la méthode du transit. Cette méthode donne des informations sur le rayon de la planète par rapport au rayon stellaire, mais dans la plupart des cas, les mesures de masse nécessitent des observations supplémentaires de suivi par spectroscopie stellaire afin de mesurer la vitesse radiale. Néanmoins, comme l'indique le tableau 3, deux explanètes présentant un rayon à la limite supérieure R < 1.6 R ont des chances d'être rocheuses plutôt que gazeuses (L.A. Rogers, 2015; B.J. Fulton et al., 2017). Soulignons également que les mondes superhabitables devraient être plus grands et plus massifs que les exoplanètes de la masse et de la taille de la Terre. En vertu des biais d'observation des méthodes de la vitesse radiale et du transit, les planètes superhabitables devraient être plus faciles à détecter que les planètes semblables à la Terre.

A gauche, Tableau 3. Les cellules grisées indiquent les conditions de superhabitabilité telles que définies dans le texte. Les cellules grisées avec texte en gras indiquent des rayons planétaires <1.6 R pour des exoplanètes rocheuses. KOI est la désignation du catalogue Kepler (KOI 2162.01 est Kepler 1126 b et KOI 172.02 est Kepler 69 c). Bp-Rp est l'indice de couleur B-R. A droite, illustration artistique de quelques exoplanètes potentiellement habitables. Documents D.Schulze-Makuch et al. (2020) et PHL/UPR adapté par l'auteur.

En guise de conclusion

Certaines des conditions astrophysiques que nous avons identifiées comme cruciales pour qu'une planète (ou lune) soit potentiellement superhabitable sont loin d'être testables par l'observation des exoplanètes. Cela dit, nos contraintes ont permis de dresser une courte listes de candidates de planètes superhabitable ou, plus correctement, de planètes superhabitables qui suivent le modèle de la Terre, car nos analyses des propriétés d'une planète sont principalement basées sur l'histoire de la Terre. En revanche, l'évaluation des propriétés stellaires ne présente pas ce fort biais de la Terre et a pour résultat que les planètes en orbite autour des étoiles naines K sont plus susceptibles d'être superhabitables et d'héberger la vie, principalement en raison de la durée de vie plus longue des naines K par rapport aux étoiles de type solaire.

Bien qu'aucune de ces planètes et candidates ne soit à moins de 100 années-lumière (tableau 3) et, par conséquent, inaccessibles pour des observations de haute qualité par les satellites actuels, des planètes superhabitables pourraient bien être présentes parmi les quelques 4000 connues. Si une telle planète devait être découverte à environ 100 années-lumière dans un proche avenir, alors un tel monde mériterait une priorité plus élevée pour un programme de suivi à la recherche d'une vie extraterrestre que les autres planètes rocheuses. Le fait d'être classée parmi les planètes superhabitables est également un bon critère pour éviter de dissiper les ressources d'une discipline de niche de la recherche scientifique.

Pour plus d'informations

Sur ce site

A la recherche des exoplanètes

A la recherche de planètes habitables

La vie autour des étoiles géantes rouges

L'échelle CoLD

Autres ressources

Exoplanet.eu (catalogue)

Exoplanet Catalog, NASA

Exoplanet Exploration Program, NASA

Open Exoplanet Catalog

The Habitable Exoplanets Catalog, UPR

In Search for a Planet Better than Earth: Top Contenders for a Superhabitable World, D.Schulze-Makuch et al., Astrobiology, 18 sep 2020

Sellers Exoplanet Environments Collaboration (SEEC), NASA-GSFC

Base de données VIZIER

Base de données Gaia (ESA).

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