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Définition des reliefs lunaires

écrit en collaboration avec la Dr Winifred S.Cameron, NASA-GSFC

Selênê, la Belle de nuit (I)

Cent fois plus rapprochée de la Terre que n'importe quelle planète, nous pouvons observer la Lune à l'oeil nu et y distinguer des détails qui requièrent un télescope grossissant au moins 100x si nous voulons les observer avec la même résolution sur d'autres planètes. Equipé d'un instrument d'astronomie, le paysage chaotique de la Lune apparaît distinctement dans la plus simple lunette astronomique de 60 mm d'ouverture à moins de 100 €.

L'oeil rivé à l'oculaire, on découvre des cratères proéminents tout le long du terminateur, là où la lumière du Soleil joue avec les ombres des reliefs; ci et là on découvre des traces légèrement colorées signes d'une composition minéralogique particulière de même que des systèmes de rayons brillants provoqués par de massifs éjecta émis par des impacts récents.

Étant donné sa proximité et son absence d'atmosphère, observer la Lune au télescope offre l'avantage que la résolution des détails est comparable à celle des images transmises par les sondes spatiales survolant les planètes et leurs satellites. Il n'est donc pas surprenant que les astronomes s'en soient servis comme sujet d'entraînement en planétologie; son albedo (pouvoir réfléchissant) permet de mesurer la réflectivité des surfaces, les ombres portées dans la zone du terminateur permettent d'étudier le profil des reliefs.

C'est aussi sur la Lune que les scientifiques ont testé leurs premières hypothèses concernant les processus ayant aboutit à la formation des bassins et des cratères d'impacts ainsi que la différenciation de l'écorce, autant de thèmes qui seront discutés à propos de la Lune avant que les planétologues les appliquent aux mondes plus lointains, Mercure, Vénus, Mars ainsi qu'aux satellites glacés des planètes géantes, sans oublier les astéroïdes.

A consulter : Liste des reliefs lunaires (sur ce site)

Les processus lunaires et leurs effets

Tout bon géologue observant la Lune au télescope et ayant à sa disposition les images photogrammétriques prises par les équipages d'Apollo ou les missions ultérieures d'exploration découvrira rapidement que la variété des structures lunaires résulte de la combinaison de quatre principaux processus :

1. Les cratères d'impacts, allant des performations de quelques millimètres aux bassins de plusieurs milliers de kilomètres de diamètre provoqués par des météorites de toute taille.

Etant donné que le taux des collisions météoritiques fut très variable au cours du temps, nous devrons faire la distinction entre les cratères d'impacts primaires et ceux qui se sont superposés aux premiers, les cratères secondaires résultant de l'impact des débris issus de la première collision. Dans cette catégorie nous trouvons également les catenae ou chaînes de cratères.

Les éjecta font partie des effets secondaires de l'impact. Ils sont constitués de matériau éjecté hors du cratère lors de l'impact et parfois rejeté à plusieurs centaines de kilomètres de distance. Ces éjecta peuvent être solides ou liquides et donnèrent soit naissance à des chaînes de montagnes (par exemple les Appennins) soit à des plaines aux tons clairs telles celle qui entoure Mare Orientale.

2. Le volcanisme constitue le second processus. Il concerne tous les reliefs formés ou modifiés par la chaleur interne de la Lune. De nos jours l'activité volcanique de la Lune est faible si pas absente. La plupart des évènements se sont manifestés dans un lointain passé.

Les effets les plus marqués de cette activité sont de nature extrusives : des éjections de magma sur la surface lunaire. On retrouve leurs traces dans les flots sombres qui ont submergés les mers (maria, sinus, lacus, etc) et qui ressortent le mieux à la Pleine Lune. Cette lave présente une faible viscosité ce qui lui a permit aux flots de lave de parcouvrir de grandes étendues avant de se solidifier.

Un autre type de paysage extrusif est le classique dôme lunaire qui ressemble aux calderas terrestres comme celle de Mauna Loa dans l'archipel d'Hawaï. Certains ont toutefois une origine inverse et ont été formés suite à l'infiltration de magma sous la surface lunaire, il s'agit des laccolithes.

Il existe également des montagnes aux pentes assez raides ressemblant à des cônes de cendre formés par des matériaux éjectés de cheminées volcaniques.

Certaines crêtes situées en bordure des mers peuvent avoir été formées par des extrusions de magma le long des fissures, bien que l'origine tectonique (compression des plaques) soit plus généralement admise.

Enfin le volcanisme a certainement formé certains cratères, en particulier les cratères dits de sommet que l'on trouve au sommet de nombreux dômes, les cratères-trous sans rebord, certaines chaînes de cratères ainsi que des dépressions irrégulières formées par l'effondrement des réservoirs ou des tunnels de lave.

Les dessins d'Anthony Sanchez

Deux dessins réalisés au crayon par Anthony Sanchez à partir d'un ensemble de photographies réalisées avec un télescope S-C Celestron C5+ à différents grossissements, des photographies réalisées par les talentueux amateurs K.C.Pau à Hong Kong et John Sussenbach aux Pays-Bas avec des télescopes de 200 mm d'ouverture ainsi qu'à partir d'images prises par les sondes Lunar Orbiter IV et Ranger 8. Ces dessins ont nécessité chacun environ 40 heures de travail. A gauche, le cratère Burg et une image télescopique de référence réalisée par K.C.Pau avec un télescope Newton-Cassegrain de 212 mm de diamètre équipé d'une webcam Philips ToUcam Pro. A droite, les cratères Sabine et Ritter et une photographie de référence pris par Ranger 8. Vous trouverez d'autres dessins réalisés à l'oculaire par des amateurs dans mes 1001 liens.

3. Les mouvements tectoniques constituent le troisième processus, là où l'écorce de la Lune a été déformée verticalement, horizontalement ou dans les deux directions.

Bien que la Lune ne présente pas de plaques continentales à l'image de la Terre, des parties de sa surface ont été déplacées suite à de gros impacts ou par l'effet des marées terrestres, ce dernier effet ayant été plus marqué dans le lointain passé géologique lorsque la Terre et la Lune étaient beaucoup plus rapprochés l'une de l'autre (La Lune s'éloigne aujourd'hui de la Terre à raison d'un mètre par siècle). Ce passé tectonique pourrait expliquer la forme polygonale de nombreux grands cratères.

Le soulèvement du sol a donné naissance au pic central de certains cratères. D'autres phénomènes ont également pu déformer l'écorce lunaire pour citer  les remontées de magma, les intrusions et extrusions de magma ainsi que la contraction de l'écorce suite au refroidissement du magma.

Tous ces effets ont laissé des traces à l'intérieur ou près des mers lunaires. La compression tectonique a probablement créé les crêtes plissées pour ne citer qu'un exempl. D'un autre côté l'extension de l'écorce a créé des fractures, créant des escarpements et des graben, ces derniers ayant formé les escarpements linaires (Rimae Sulpicius Gallus, la vallée des Alpes, etc.).

4. Le dernier processus de surface est l'érosion. Evidemment pas celui lié à une activité atmosphérique mais plutôt au bombardement micrométéoritique, complété par le stress thermique mais qui vient loin derrière.

De nos jours ce processus opère toujours mais très lentement et sur une petite échelle, d'où ne résulte aucun effet évident lorsqu'on observe la Lune au télescope. Toutefois, à grande échelle il faut bien comprendre que c'est le processus de l'érosion qui a donné naissance aux vallées radiales que l'on trouve en bordure des mers, ainsi qu'aux failles sinueuses, autant de reliefs sur lesquels nous allons nous attarder dans les pages suivantes.

Un visage éternel

Ainsi que nous l'avons expliqué dans le chapitre consacré à l'histoire géologique de la Lune, le visage de la Lune ne s'est pas formé en un seul jour. Grâce à des techniques de géologie comparée et de stratigraphie les scientifiques ont pu établir une chronologie relativement précise de l'évolution de la Lune avant même que les premiers échantillons de sol ne soient disponibles.

Le visage actuel de notre satelllite ne s'est guère modifié depuis l'ère des dinosaures; ses "yeux" symbolisés par Mare Imbrium et Mare Serenitatis ont été formés il y a environ 3.8 milliards d'années et la plupart des autres mers remontent à plus de 4 milliards d'années. Quant aux cratères d'impacts ils ont eu lieu de tout temps avec des intensités diverses pour se calmer il y a quelques centaines de millions d'années. Depuis grosso-modo 100 millions d'années, aucun évènement majeur ne s'est manifesté sur la Lune.

Nous avons donc du temps devant nous pour discuter en détails des différentes formations que l'on peut observer à la surface de la Lune et qui, en l'absence d'érosion visible, devraient perdurer quelques dizaines de milliards d'années. Ce sera l'objet des prochains chapitres.

Prochain chapitre

Les mers

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