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L'étrange matière de masse négative

Un champ scalaire de Higgs. Doc ASA.

La puissance de la masse négative

Existe-t-il de la matière ayant une masse négative quelque part dans l'Univers ? S'il s'avère qu'elle existe, son utilisation serait des plus intéressantes. Mais voyons d'abord de quoi il s'agit.

La physique moderne nous dit que la masse ou l'énergie de repos d'un corps est quantifiée. En effet, la masse est une constante expérimentale définie par la quantité de matière que contient un objet, ce que les physiciens appellent la masse réelle. Comme l'a démontré Einstein, cette quantité est invariable car elle n'est pas définie à partir de la théorie des champs qui détermine uniquement le champ de gravité de cette masse.

En termes physiques, la masse est un champ scalaire (non orienté) continu et le vide ordinaire représente l'état d'énergie minimum avec une valeur non nulle en chacun de ses points. Si la continuité de la masse ou de l'énergie de repos est un prérequis absolu, il est alors inconcevable que sa valeur puisse être négative en un quelconque point du champ. Comment alors expliquer le concept de matière négative ?

Ce que certains appellent pour simplifier la "matière négative" (en réalité la matière ayant une masse négative) est une propriété théorique et donc encore hypothétique de la matière. Comme la charge électrique peut être positive, négative ou même neutre (cf. proton, électron et neutron), la constante "masse" peut aussi être positive ou négative, augmenter ou diminuer. Ce n'est pas de l'antimatière qui n'a "d'anti" que les états de ses particules élémentaires, mais pas leur masse. En revanche, la force ou l'interaction se définit par rapport à la causalité : F=ma, nous apprit Newton. On en déduit qu'une masse négative engendre une force négative. Même si Newton ne l'a pas inventée et serait étonné par ce concept comme chacun de nous, il accepterait le principe car il ne viole pas les lois de la physique.

En présence de masse négative, la matière se comporterait d'une manière bien étrange. Prenons par exemple une balle de masse négative -m et plaçons-là sous un fusée traditionnelle de masse positive +m de même grandeur mais sans moyens de propulsions propres. On observe que la masse négative va pousser la masse positive tandis que cette dernière va attirer la masse négative. Selon la Loi du mouvement de Newton, la fusée et la balle de masse négative vont s'élever dans l'air dans la même direction et avec une accélération égale à la force de gravité qui les unit. Cet "effet sans réaction" fournit un moyen de propulsion miraculeux en offrant une accélération infinie et unidirectionnelle sans requérir la moindre source d'énergie ni masse de réaction (pergols). Autre exemple, une masse négative accélère vers vous quand vous la poussez ! Il n'y a plus qu'un pas à franchir pour inventer des machines à masse négative pour nous fournir gratuitement une quantité d'énergie infinie. Avis aux écologistes !

Recherches en la matière

L'effet runaway ou cours après moi...

Hermann Bondi (1919-2005) du Churchill College de Cambridge fut le premier scientifique à discuter de masse négative. En 1957, dans le journal "Reviews of Modern Physics", Bondi démontra qu'une masse négative repoussait une masse positive avec une vitesse continuellement croissance en accord avec la relativité générale.

William Bonner (1920-2015) du King's College de Londres développa l'idée de Bondi. Ensemble, ils découvrirent une solution exacte des équations relativistes du champ décrivant précisément le comportement de deux corps de masses opposées en accélération constante sous l'effet de leur propre champ gravitationnel. C'est ainsi que Bondi et Bonner découvrirent le phénomène "runaway" (la fuite) par lequel une masse positive est repoussée et "s'enfuit" sous l'effet d'une masse négative. Mais non seulement ce mouvement est uniformément accéléré mais l'énergie cinétique est conservée, digne des meilleurs scénarii de science-fiction, à la différence que c'est une réalité, du moins en théorie !

La seule différence entre la solution newtonienne et la solution de la relativité générale est que dans cette dernière les deux masses ne sont pas tout à fait égales ni opposées car elles sont mesurées dans des référentiels non galiléens, en accélération. Pour que les deux masses gardent une séparation constante dans un référentiel accéléré, la masse négative devait être légèrement plus grande que la masse positive.

S'il existe une grande quantité de particules de masses négatives dans l'univers, les corps positifs comme notre Soleil doivent attirer ces particules de matière de masse négative. Certains chercheurs russes ont calculé que lorsque des particules de masse négative frappent les particules de matière positive du Soleil, elles ne ralentissent pas mais accélèrent continuellement. Au cours de ce processus, elles gagnent de l'énergie cinétique et apportent de l'énergie cinétique au Soleil, qui doit donc se réchauffer. Or le Soleil ne se réchauffe visiblement pas plus que le modèle classique le prévoit. Aussi, certains chercheurs en concluent que soit il existe très peu de particules de masse négative dans l'univers, soit qu'elles interagissent peu avec la matière positive.

D'autres chercheurs ont également tenté d'appliquer le concept de masse négative au phénomène de Big Bang, à celui de l'expansion accélérée de l'univers ou aux propriétés de la matière et de l'énergie sombre dont Hyoyoung Choi. Aujourd'hui, ces théories restent des hypothèses et sont peu supportées par la communauté scientifique faute de preuves observationnelles.

En fait, l'analyse peu intuitive de Bondi et Bonner eut pour conséquence de littéralement bannir les masses négatives des études et des expériences pendant plus de 50 ans. Il y a bien eu quelques articles isolés dans les revues spécialisées dont ceux de J.P.Petit, mais ils n'ont intéressé personne et n'ont fait l'objet d'aucune citation. En revanche, d'autres auteurs ont eu plus de chances dont Robert L.Froward et Lawrence H. Ford qui s'intéressèrent aux moyens de propulsions et aux trous de ver.

Première observation

Nous sommes bien d'accord que dans le monde de tous les jours, les chercheurs n'ont pas encore trouvé ni créé de matière ayant une masse négative. Mais des chercheurs ont réalisé une expérience avec des condensats de Bose-Einstein qui va dans le bon sens.

Ce type d'appareil électromagnétique cryogénique utilisé dans le Laboratoire Kastler Brossel du CNRS permet aux physiciens de créer des condensats de Bose-Einstein (BEC) afin d'étudier les propriétés fondamentales de la matière. Document Science Photo Library.

Le physicien Peter Engels du département de Physique et d'Astronomie de l'Université d'État de Washington (WSU) et ses collègues ont publié en avril 2017 les résultats d'une expérience dans le journal "Physical Review Letters" (et en PDF sur ArXiv) expliquant de quelle manière ils ont créé un fluide bosonique se comportant comme s'il présentait une masse négative.

Pour réaliser cette expérience, les chercheurs ont refroidi environ dix mille atomes de rubidium près du zéro absolu (-273 °C) pour créer un condensat de Bose-Einstein ou BEC, une forme particulière de boson. A cette température, les particules changent d'état et se comportent comme un superfluide; elles se déplacent de manière synchronisée sans perdre d'énergie. Elles se déplacent également très lentement et comme des ondes en accord avec les lois de la physique quantique.

Pour créer les conditions de l'expérience, les chercheurs ont utilisé un faisceau laser d'électrons pour piéger les atomes et forcer leurs électrons périphériques à se déplacer plus près du noyau ou à entrer dans les protons pour former des neutrons, formant ainsi un neutron constitué d'antiprotons et de gluons, les prémices d'une certaine forme d'antimatière. Grâce au laser, en agissant sur l'état de rotation des atomes, les chercheurs sont parvenus à modifier leur état de spin. Ensuite, en retirant les atomes du piège de potentiel qui les maintenait ensemble, les atomes se sont dispersés et certains présentaient temporairement une masse négative jusqu'à ce qu'ils reprennent leur état normal.

Le langage de la physique

Toutefois il faut bien comprendre le principe de l'expérience pour interpréter les résultats afin de ne pas conclure prématurément comme certains journalistes l'ont titré dans les journaux et sur Internet qu'on avait créé de la masse négative. En effet, pris comme un tout, le BEC conserve sa masse positive. Il se produit juste qu'une région particulière de sa configuration spatiale s'est comportée comme une masse négative. Car, si l'ensemble présentait une masse négative, ce phénomène serait en violation avec plusieurs lois de conservations. Or ce n'est pas ce qui a été observé dans cette expérience.

En résumé, les chercheurs n'ont pas encore réellement créé une matière de masse négative mais "les conditions d'une masse négative"; autrement dit le rubidium "s'est comporté" comme s'il avait une masse négative. C'est très différent mais c'est aussi subtil que la différence entre le virtuel et la réalité, la masse effective et la masse réelle.

En fait la masse effective dont parlent les physiciens n'a pas directement de rapport avec la masse réelle ordinaire (bien que les deux types de masses peuvent être identiques en valeurs). C'est un concept mathématique qui permet de décrire le comportement du condensat de Bose-Einstein. Notons qu'on retrouve un concept similaire en astronomie avec la notion de température effective d'une étoile ou le diamètre effectif d'une galaxie.

Représentation schématique de l'expansion contenue d'un BEC en raison de la variation de sa masse effective (ligne pointillée dans la zone grisée). Le gradient de couleurs indique la polarisation de l'état de spin pour trois temps d'expansion. Voir le texte pour l'explication. Doc P.Engels et al. (2017).

Si on consulte un livre de physique, on apprend qu'on dérive la masse effective à partir de la relation de dispersion (la relation entre l'énergie et l'impulsion, E =p2/m) des constituants du BEC. On prend les dérivées secondes de l'énergie par rapport à l'impulsion, ce qu'en jargon technique on appelle le tenseur d'ordre 2 des dérivées secondes de l'énergie par rapport au vecteur d'état, et on obtient l'inverse de la masse effective, (1/m).

Autrement dit, la notion de masse effective vient de sa formulation mathématique et non d'une mesure expérimentale. Notons que si on utilise cette définition, on peut réécrire les équations du mouvement d'un fluide; elles ressemblent aux équations classiques de l'hydrodynamique mais avec la particularité d'avoir un terme contenant l'inverse de la masse effective multipliée par une force.

Concrètement, comme on le voit sur les illustrations présentées à gauche, si on représente graphiquement l'évolution de l'énergie par rapport à l'impulsion, on observe que la courbe passe par des régions de masse effective négative (échelle droite du graphique du haut). De plus, au cours du temps, le condensat maintient sa cohésion spatiale et sa cohérence jusqu'à plus de 300 microns de distance (schéma du bas en couleur).

Maintenant aller dire ça à un journaliste... Si on veut vulgariser le sujet comme le font les médias, il est plus simple de parler de "création de masse négative" que de "conditions d'une masse effective négative" mais cette façon de parler reste néanmoins fausse et sème la confusion chez le lecteur.

En résumé, cette expérience a donc permis de mesurer la masse effective et non la masse réelle. Pour les physiciens, il s'agit de mesurer les états d'excitation d'un système quantique considéré par simplicité comme des "quasiparticules". Ce concept permet d'étudier les effets de particules réelles combinées de manière complexe. C'est ainsi qu'il est apparu des conditions expérimentales dans lesquelles cette excitation (considérée théoriquement comme une particule) s'est comportée comme une masse négative.

Ceci dit, cela ne veut pas dire que cette expérience n'est pas intéressante, au contraire ! Il est très intéressant de constater qu'un fluide bosonique est capable de contenir son expansion grâce à des corrélations à longue distance qui s'expliquent par des effets quantiques. Et le fait de penser que ce fluide se comporte comme s'il avait une masse négative reste une interprétation séduisante que ne peuvent pas refuser les physiciens. Mais cela ne signifie nullement que les physiciens ont créé une matière de masse négative.

Enfin, notons que ce que les physiciens et Einstein notamment appellent la "masse gravitationnelle" illustrée par le fameux puits gravitationnel qui est aussi une représentation statique et donc imagée, c'est la masse réelle et non la masse effective d'un corps. Selon cette représentation, une masse négative ne génère pas un "puits" mais une "bosse" semblable à une colline dans l'espace-temps. C'est effectivement une notion peu intuitive car ce type de masse, si elle existe réellement, est visiblement très rare dans la nature.

En conclusion, cette expérience très riche d'enseignements n'est qu'un début et cette technique de piégage des atomes va permettre aux physiciens de mieux comprendre ce phénomène et la nature de la masse négative. A terme, grâce à ces outils théoriques et pratiques, il est possible qu'on découvre des relations entre la masse négative et certains phénomènes cosmiques, notamment ceux qui se développent dans des conditions extrêmes comme dans les étoiles neutrons, les trous noirs ou même de comprendre la nature de l'énergie sombre omniprésente dans l'Univers.

Trou noir et énergie négative

Voyons à présent le concept d'énergie négative. Le concept d'énergie est familier à tous les scientifiques. En fait on traite en général de différences d'énergie, par exemple de l'énergie dépensée en soulevant un poids sans nous préoccuper de la quantité d'énergie contenue dans l'objet. En cosmologie cette notion intervient par exemple dès qu'on aborde la thermodynamique ainsi que les théories de jauge à l'époque de l'univers primordial.

Il n'y a qu'une seule exception à cette règle, c'est concernant la gravitation. La célèbre loi d'équivalence d'Einstein, E = mc2, stipule que l'énergie représente une masse.

L'expérience de la double fente de Young révèle le phénomène d'interférences.

Du fait que la masse est source de gravitation, on peut imaginer un état d'énergie de "zéro absolu" comme il en existe un pour la température. Tout ce dont on a besoin pour y parvenir c'est un objet, plus exactement un état, sans champ gravitationnel, par exemple un espace complètement vide de matière. Un état d'énergie négative serait alors tout simplement celui ayant moins d'énergie que celle d'un champ gravitationnel nul. C'est dans ce contexte qu'interviennent les particules virtuelles.

Cet état de vide quantique ne peut pas être dépouillé de ses entités et ces dernières ne peuvent pas en être extraites sauf si quelque chose vient perturber l'état de vide (une interférence, une attraction gravitationnelle ou électromagnétique, etc). Il est donc plutôt difficile de concevoir un objet constitué d'énergie ou de matière négative; il appartient tout au plus à l'univers virtuel.

C'est dans toutes ces particules virtuelles que réside en fait la clé de l'énergie négative. Prenons par exemple la célèbre expérience de la double fente de Young. Des ondes lumineuses traversent deux fentes pratiquées dans un écran opaque et créent derrière celui-ci une série d'ondes alternativement brillantes et sombres comme l'illustre image présentée à droite. Les régions brillantes représentent les endroits où les ondes sont renforcées; on parle d'interférence constructive. Inversement, les régions sombres matérialisent les endroits où les ondes s'annulent car elles sont en opposition de phase, ce sont des interférences destructives.

Prenons maintenant les photons virtuels du vide quantique. De la même manière que leurs confrères réels, vous pouvez créer des états dans lesquels les "véritables" photons (réels) émis par un laser interfèrent avec les photons virtuels du vide quantique. Dans ce cas, les interférences destructives se forment dans les régions où le niveau d'énergie est inférieur à celui du vide quantique ordinaire, en d'autres mots, où il est négatif. S'il n'y aucun obstacle pour arrêter la lumière, vous obtenez un faisceau d'énergie négative ! Cette forme d'énergie exotique n'appartient donc pas à la science-fiction mais fait partie de l'arsenal aujourd'hui accessible aux physiciens des particules élémentaires.

Entropie et rayonnement de Hawking

On connaissait l'essentiel de cette théorie de l'énergie négative depuis les années 1970, lorsque plusieurs physiciens dont Stephen Fulling de l'Université A&M du Texas ont essayé de créer une source d'énergie négative pour alimenter le rayonnement de Hawking émis par les trous noirs. Ainsi que nous l'avons expliqué, vu de l'extérieur ce rayonnement représente une énergie positive émise par le trou noir. Mais il est impossible de tracer cette énergie jusque dans la singularité sans violer le principe même du trou noir qui stipule que rien ne peut en sortir. En revanche, selon Fulling, de l'énergie négative prise au monde extérieur est continuellement engloutie par le trou noir. Cette énergie négative s'accumule parce que la courbure de l'espace-temps générée par l'intense champ gravitationnel perturbe en permanence les particules virtuelles du vide quantique et provoque la matérialisation de certaines d'entre elles qui se voient séparées de leur contrepartie positive.

Un mini trou-noir.

Un faisceau d'énergie négative n'apporte pas seulement de solution, il crée aussi quelques problèmes. Imaginons que vous orientiez un tel faisceau vers un objet chaud, un four, dont l'ouverture est protégée par un volet. Le contenu du four perdra de l'énergie et se refroidira. Mais ce phénomène constitue une sérieuse entorse à la Seconde loi de la thermodynamique concernant la fameuse propriété appelée l'entropie, le degré de désordre du système.

Si le four se refroidit, son entropie va décroître. Habituellement, ce processus est accompagné par une augmentation d'entropie partout ailleurs. Or l'énergie négative n'est pas associée à l'entropie et elle ne provoque aucun changement dans le monde entourant le four. Cela signifie que l'entropie totale de l'Univers pourrait diminuer, violant le Seconde principe de la thermodynamique. Etant donné qu'il s'agit de la loi pivot de la thermodynamique, toute violation de ce principe ouvre la voie à de très sérieux problèmes, comme la possibilité de créer des machines à mouvement perpétuel qui pourraient fonctionner sans que le travail fournit ne coûte rien à personne. Si ce serait très intéressant, c'est surtout irréaliste.

L'énergie négative crée également d'autres difficultés dans une situation assez différente. Si vous jetez un objet dans un trou noir, vous perdez temporairement (jusqu'à son évaporation) toutes ses propriétés physiques à l'exception de sa charge électrique qui demeure et forme un champ électrique autour de lui. Ce champ électrique présente de l'énergie, laquelle modifie le champ gravitationnel du trou noir. Si un trou noir présente une charge électrique capable de rivaliser avec la force gravitationnelle, alors vous vous exposez à un vrai problème. Selon la relativité générale, si le rapport entre la charge et la masse dépasse un seuil critique, le trou noir disparaît brutalement. Ce phénomène a alarmé les physiciens parce nous savons tous que le coeur d'un trou noir abrite une singularité, la limite de l'espace-temps Si cette limite était exposée de la sorte, une "singularité nue" pourrait émerger et envahir l'univers.

Heureusement, tant que la singularité est précieusement contenue dans un trou noir, notre vaste univers est sauvegardé. Mais si le trou noir pouvait être retiré de l'univers, laissant la singularité seule, physiquement parlant (en terme d'effets thermodynamique et gravito-quantique) personne n'oserait plus parier sur rien, mis à part Hawking. Or, un faisceau d'énergie négative pourrait créer cette situation en réduisant la masse d'un trou noir sans affecter sa charge électrique jusqu'à ce que la limite critique soit atteinte. Ce jour là nous pourrions dire adieu à notre univers car tous ces singularités exploseront comme des milliards de bombes atomiques.

Le flash cosmique

Le physicien Lawrence H.Ford de l'Université Tufts de Boston au Massachusetts a étudié ces scénarios perturbés et découvert quelque chose de curieux. Bien qu'on puisse trouver différentes manières d'envoyer de l'énergie négative dans des fours et des trous noirs, en pratique cela ne fonctionnerait pas suffisamment longtemps pour créer un véritable désastre. Ford a utilisé l'exemple des interférences entre des photons réels et les photons virtuels du vide quantique. Leurs interactions créent bien des interférences constructives lorsque de l'énergie positive entre en jeu et destructives quand il s'agit d'énergie négative. Mais dans un tel faisceau mixte, chaque impulsion d'énergie négative est immédiatement suivie d'une impulsion d'énergie positive.

L'expérience du four et du faisceau d'énergie mixte, négative et positive. Document HKU adapté par l'auteur.

S'il est vrai que l'impulsion d'énergie négative va temporairement réduire l'entropie du four, à l'impulsion suivante l'entropie va à nouveau augmenter et ainsi de suite tant que le processus n'est pas interrompu. Bien que le faisceau créera une fluctuation de l'entropie totale, la Seconde loi de la thermodynamique est une loi statique qui n'autorise que de petites fluctuations.

Pour résoudre ce problème, on a essayé d'abaisser l'obturateur chaque fois qu'une impulsion d'énergie positive était émise. On constate malheureusement que si cela bloque effectivement l'onde positive à l'entrée du four, il s'en forme une autre juste derrière l'obturateur, à l'intérieur du four. Rien que le fait d'utiliser l'obturateur crée une perturbation du vide quantique et un calcul rapide montre que la perturbation génère une explosion de photons à partir du vide. En sommant toutes leurs énergies on constate que l'entropie des nouveaux photons dépasse largement la réduction d'entropie produite par la seule énergie négative.

Des stratégies plus élaborées pour extraire les parties négatives du flux d'énergie et les stocker n'aboutissent qu'à des résultats similaires. Une fois encore, dame Nature semble trouver les moyens de confondre l'expérimentateur qui essaye d'utiliser l'énergie négative pour autre chose que réduire l'entropie...

Ford a essayé de prouver, pour les états qu'il a étudié, que l'intensité et la durée des fluctuations de l'entropie restaient dans les limites statistiques permises. Dans le scénario du trou noir, la situation est littéralement beaucoup moins claire. Il semble que si la singularité peut momentanément être visible, il se produit ce que Ford appelle un "flash cosmique". Le fait que ces flashes compromettent ou non l'avenir du cosmos reste incertain.

Une approche différente consiste à placer le four près de la surface du trou noir dans l'espoir de ramasser un peu d'énergie négative avant qu'elle ne soit happée. Cette fois, un autre effet préserve la Seconde loi de la thermodynamique.

L'attraction gravitationnelle au voisinage d'un trou noir est énorme et si vous voulez éviter que le four ne tombe dans l'ergosphère, vous devez lui fournir une immense force d'accélération vers l'extérieur. William Unruh de l'Université de Colombie Britannique a montré que si vous êtes en accélération, les photons virtuels du vide quantique vous donneront l'impression d'être immergé dans un bain de chaleur et plus vous irez vite plus la chaleur semblera intense. Il apparaît donc que le four laissera entrer plus de chaleur de l'extérieur que d'énergie négative et de ce fait l'entropie ne va pas diminuer mais bien augmenter.

Les trous de ver

Mais il n'y a pas que les flux d'énergie négative qui peuvent provoquer des paradoxes, de l'énergie négative statique en provoque quelques-uns également. Parmi ces entités, il y a les trous de ver. S'ils existent, nous savons qu'il peuvent servir de machine à voyager dans le temps et créer certains paradoxes si le principe de cohérence n'intervient pas pour limiter ces risques.

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Pour plus d'informations

Les principes de la thermodynamique (sur ce site)

Fabrication d'un trou de ver (sur ce site)

Negative-Mass Hydrodynamics in a Spin-Orbit–Coupled Bose-Einstein Condensate (et PDF), P.Engels et al., Physical Review Letters, 118, 155301, 10 April 2017

Negative Energy, Wormholes and Warp Drive, Lawrence H. Ford et Thomas A. Roman, Scientific American, January 2000

Time machines : time travel in Physics, metaphysics and science fiction, Paul J. Nahin, AIP Press, Springer-Verlag, 1999

The quantum interest conjecture, Lawrence H. Ford et T. A. Roma, Physical Review D, Vol.60, No.10, Article No.104018, 15 November 1999

The Unphysical Nature of warp drive, Lawrence H. Ford et M.J. Pfenning, Classical and Quantum Gravity, Vol.14, No.7, p1743-1751, July 1997

Quantum Field Theory constrains traversable wormhole geometries, Lawrence H. Ford et T. A. Roman, Physical Review D, Vol.53, No.10, p5496-5507, 15 May 1996

Lorentian wormholes; from Einstein to Hawking, Matt Visser, American Institute of Physics Press, 1996

Negative matter propulsion, Robert L.Froward, Journal of Propulsion and Power, Vol.6, No.1, pp.28-37, 1990

Negative mass in general relativity, William Bonner, General Relativity and Gravitation, Vol.21, 11, pp.1143-1157, November 1989

Negative Mass in General Relativity, Hermann Bondi,  Reviews of Modern Physics, Vol. 29, 423, 1 July 1957.

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