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Météorologie élémentaire

La distribution de la vapeur d'eau dans la troposphère en mars 2010. Document EUMETSAT/DLR adapté par l'auteur.

L'eau de l'atmosphère

En moyenne, la proportion d'eau contenue dans l'air varie entre 0.1% à -42°C et 4.24% au point de rosée à 30°C. 99.13% de cette vapeur d'eau se situent dans la troposphère. Mais si on considère la concentration des gaz à effet serre (GES), la vapeur d'eau représente 95% du total contre 4.1% pour le gaz carbonique et à peine 1% pour les autres gaz.

Cette masse de vapeur d'eau représente 12000 milliards de tonnes soit 12900 km3 d'eau ! Si toute cette eau était condensée, elle couvrirait la surface du globe d'une épaisseur de 2.5 cm. Si nous la répartissions entre tous les habitants de la planète, chacun disposerait chaque jour d'un cube d'eau mesurant 46 mètres de côté ! Ainsi que nous le verrons à propos des océans, par comparaison toute l'eau potable disponible sur la Terre ne représente qu'un cube de 46.4 km de côté ou une "goutte" d'eau de 23 km de rayon.

A l'échelle de la planète, cette quantité reste toutefois infime et ne représente qu'environ 0.001% du volume total d'eau existant sur et dans la terre (l'hydrosphère) estimée à 1385 milliards de km3, ce qui représente un cube de seulement 1113 km de côté ou une "goutte" d'eau de 556 km de rayon (cf. cette illustration). Ce volume contient 97% des réserves d'eau de la planète.

Mais comparées aux quantités d'eau disponibles sur d'autres planètes ou lunes (par exemple sur les satellites glacés de Saturne), malgré une abondance relative, toute l'eau terrestre ne représente qu'une fine pellicule comparée aux véritables océans qui existent probablement sous la croûte glacée des lunes comme Europe et Encélade gravitant autour de Saturne, et bien entendu sur des "planètes océans" comme l'exoplanète Gliese 1214 b surnommée "Waterworld".

L'eau en chiffres

95

pourcents de vapeur d'eau dans l'atmosphère.

99

pourcents de vapeur d'eau se situe dans la troposphère.

4.24

pourcents de vapeur d'eau dans l'air à 30°C.

65

pourcents des précipitations s'évaporent.

24

pourcents des précipitations ruissellent.

11

pourcents des précipitations s'infiltrent.

1.38

milliard de km3 d'eau sont disponibles sur terre dont 3% sont constitués d'eau douce.

65

mille km3 d'eau s'évaporent chaque année au niveau des terres émergées.

1400

litres d'eau par an s'évaporent dans les zones tropicales contre 400 litres/an dans les zones tempérées.

12000

milliards de tonnes d'eau sont présents dans l'atmosphère.

4.2

J/g par degré Celsius sont nécessaires pour élever la température de 1 g d'eau de 1°C (chaleur spécifique).

10.5

g/kg ou 1.05% est la proportion d'air humide dans l'air sec dans le modèle Standard (rapport de mélange saturant).

En excluant la question astrophysique que nous aborderons dans un autre article, d'où provient l'eau terrestre ? La vapeur d'eau contenue dans l'atmosphère provient de l'évaporation des océans, des lacs, des rivières, etc., de la sublimation des glaces et de la neige, de l'évaporation des précipitations et de l'évapo-transpiration des animaux et des végétaux.

En étudiant le cycle de l'eau, on constate que le cycle complet suit l'évolution suivante :

- Diffusion de la vapeur d'eau dans l'atmosphère

- Condensation de la vapeur d'eau (formation des nuages)

- Formation des précipitations

- Répartition des précipitations (pluviométrie)

- Ecoulement des eaux et des glaces vers la mer (hydrologie).

A gauche, la forme la plus visible de vapeur d'eau condensée sous forme de couches nuageuses. Document Goodfon

Tous ces modes de transfert ne sont pas étudiés par la météorologie, aussi nous nous limiterons aux phénomènes se rattachant à ce dossier, à savoir les différents changements d'état, tandis que les précipitations seront abordées dans un chapitre séparé.

L'atmosphère contient de l'eau sous trois formes distinctes :

- Gazeuse : la vapeur d'eau qui, aux pressions ordinaires peut-être considérée comme un gaz parfait

- Liquide : dans les nuages et les précipitations

- Solide : les cristaux de glace et les précipitations solides (neige, grêle, ...)

La chaleur spécifique

La chaleur spécifique d'un corps représente l'énergie nécessaire pour élever la température de 1 gramme de cette matière de 1°C. Pour l'eau, la chaleur spécifique est de 4.2 J/g par degré Celsius, ce qui est une valeur presque deux fois plus élevée que celle de l'éthanol constituant les boissons alcoolisées.

Cette chaleur spécifique élevée explique le rôle thermorégulateur de l'eau. En effet, cette propriété lui permet d'absorber ou de dégager plus d'énergie que d'autres substances. C'est ce phénomène qui explique qu'en se réchauffant de quelques degrés seulement, les océans emmagasinent une grande quantité de chaleur qu'ils restituent sur une très longue période. Ce phénomène a des conséquences directes sur les changements d'état de l'eau.

A voir : 3D molecular visualisation - Water turning into ice CSIRO's Data61, 2019

Molecular dynamics simulation of ice crystal melting

Changements d'état de l'eau

Au cours de physique nous avons tous appris que l'eau existait sous différentes formes caractérisées par des états physiques différents : solide, liquide ou gazeux en fonction de la température et de la pression. Il existe un quatrième état, celui de plasma que nous n'aborderons pas ici (mais plutôt en physique quantique et en cosmologie).

Ces états n'altèrent que superficiellement les propriétés de l'eau. Liquide, gazeuse ou solide, si vous la buvez elle présentera toujours le même goût et conservera plus ou moins ses propriétés. En aucun cas ces différents états altèrent la structure physique de la molécule d'eau; seul l'agencement de sa structure atomique est modifiée en fonction de la température et de la pression ambiante.

1. La fusion

Il s'agit du passage de l'état solide à l'état liquide. La fusion s'effectue à température constante et nécessite une certaine quantité de chaleur appelée "chaleur latente de fusion". Cette chaleur latente de fusion se définit comme la quantité de chaleur nécessaire pour faire passer un gramme d'un corps de l'état solide à l'état liquide sans variation de température. La valeur latente de fusion de la glace est de 80 calories/g.

2. La congélation

Il s'agit du passage de l'état liquide à l'état solide, c'est la solidification. Ce phénomène, inverse du précédent, s'effectue avec libération d'une quantité de chaleur égale à la chaleur latente de fusion.

Ce phénomène a des conséquences importantes : il est la cause, lors des hivers rigoureux, de l'éclatement des roches poreuses (d'où l'expression "geler à pierre fendre").

Lorsqu'on refroidit l'eau jusqu'à une température inférieure à sa température de solidification, elle peut encore rester liquide. Dans ce cas on dit qu'il y a surfusion. Ce phénomène est très fréquent dans l'atmosphère. L'état de surfusion cesse parfois par simple agitation et toujours par introduction d'un cristal dans le liquide surfondu ou par choc avec un corps étranger.

A voir : Les plus belles photos de givre, Pinterest

A gauche, des gouttes de rosée sur une pétale de fleur. C'est la tension superficielle de l'eau qui lui donne cette forme sphérique caractéristique. Au centre, l'une des nombreuses formes que peut prendre le givre sur une fenêtre. A droite, de l'eau sous forme de cristaux de glace.

3. La vaporisation

Il s'agit du passage de l'état liquide à l'état gazeux. La vaporisation d'un liquide nécessite une certaine quantité de chaleur appelée "chaleur latente de vaporisation". La chaleur latente de vaporisation est la quantité de chaleur nécessaire pour faire passer un gramme d'un corps de l'état liquide à l'état gazeux sans variation de température. La chaleur latente de vaporisation de l'eau est de 537 calories/g. Cela correspond à peu près à la quantité de chaleur nécessaire pour élever la température d'un demi-litre d'eau de 1°C.

Lorsqu'on provoque la vaporisation d'un liquide dans un milieu clos, on remarque qu'à un moment donné le cycle de vaporisation s'interrompt. Il se manifeste lorsque l'espace clos renferme la quantité maximale de vapeur qu'il peut contenir en fonction de la température et de la pression. La vapeur en contact avec ces excès de liquide est appelée valeur saturante. La pression excercée par cette vapeur saturante est dénommée "pression maxima de vapeur" ou encore "pression de vapeur saturante".

La pression ou tension de vapeur saturante :

- est indépendante du volume offert au système

- augmente avec la température

- est indépendante de la présence d'un autre gaz.

Evaporation ou ébullition ?

L'évaporation est une vaporisation lente. Elle se produit à toute température et uniquement à la surface libre du liquide. La vitesse d'évaporation d'un liquide donné est proportionnelle à la surface du liquide et à la différence entre la pression de vapeur saturante et la pression actuelle de la vapeur au-dessus du liquide. L'évaporation se produit donc lorque la pression ambiante (celle de l'air) est supérieure à la pression de vapeur saturante du liquide et cesse lorsque pression de la vapeur devient égale la pression de vapeur saturante.

On parle d'ébullition d'un liquide lorque la pression ambiante (celle de l'air) est inférieure à la pression de vapeur saturante du liquide. Le processus est généralement plus rapide.

La température d'ébullition dépend de la valeur de la pression extérieure (atmosphérique) car elle se manifeste lorsque la pression de vapeur saturante est égale à la pression ambiante. Ainsi, au niveau de la mer, la pression atmosphérique vaut 1 HPa et la pression de vapeur saturante ne devient égale à 1 HPa qu'à la température de 100°C. L'eau bout donc à 100°C au niveau de la mer.

Calcul de la pression ou de la température d'ébullition

On calcule la pression ou la température d'ébullition de l'eau à partir de l'équation de Clausius-Clapeyron qui détermine l'état d'équilibre entre deux phases d'une substance pure (l'eau) :

dps / dT = (Lv ps / (Rv / T2)

avec ps la pression de vapeur saturante, T la température en degré Celsius, Lv la chaleur latente d'évaporation et Rv la constante de la vapeur d'eau. On peut exprimer cette relation de manière plus simple :

ps(T) = 6.112 [(17.67 T) / (T+243.5)]

dans laquelle ps(T) s'exprime en hPa et T en degré Celsius.

Notons qu'on peut également utiliser la formule simplifiée de Duperray : ps = (T/100)4  mais elle ne fonctionne qu'entre 1-40 bars et uniquement pour l'eau. ps est la pression de vapeur saturante exprimée en bar et T la température exprimée en degrés Celsius.

4. La condensation

Il s'agit du passage de l'état gazeux à l'état liquide ou solide (cas du givrage). Ce phénomène, inverse du précédent, s'effectue avec libération d'une quantité de chaleur égale à la chaleur latente de vaporisation dans le cas d'un liquide.

La condensation peut intervenir par diminution de température, par augmentation de la tension de vapeur ou les deux simultanément.

Dans l'atmosphère, la transformation de la vapeur en eau liquide ne peut s'effectuer qu'en présence de noyaux de condensations, des impuretés qui permettent de précipiter la réaction. Expliquons ce phénomène.

Une gouttelette d'eau élémentaire est composée d'un nombre considérable de molécules (plusieurs centaines). Il est nécessaire que le milieu air-vapeur contienne un individu capable de fixer les molécules rapidement et en grand nombre; c'est le noyau de condensation.

En produisant en laboratoire des détentes adiabatiques successives, on peut observer un brouillard de moins en moins dense. En filtrant au préalable l'air à travers un coton, on obtient de fortes sursaturations sans aucune condensation. On démontre ainsi que le noyau de condensation est nécessaire comme support de la goutte d'eau. On est en revanche encore mal renseigné sur sa nature.

Nous savons qu'il existe plusieurs facteurs capables de produire ce type de noyaux :

- Ceux ayant une origine terrestre :

- le sol et le sous-sol (origine continentale)

- la surface de la mer (sels marins)

- les incendies et les foyers de combustion industriels

- l'activité volcanique

- Ceux ayant une origine extraterrestre :

- le bombardement cosmique et le rayonnement solaire

On pense que les noyaux peuvent être soit des corpuscules solides (sels et autres poussières), éventuellement électrisés, soit des ions atmosphériques. Cette deuxième explication a l'avantage de justifier l'absence de fortes sursaturations dans la haute troposphère où les noyaux de condensation d'origine terrestre pénètrent difficilement.

5. La sublimation

Il s'agit du passage de l'état gazeux à l'état solide et inversement. Ce phénomène s'observe aux températures négatives pour de très faibles tensions de vapeur. Il s'effectue sans passage par l'état liquide.

En météorologie, le passage de l'état solide à l'état gazeux est souvent appelé l'évaporation.

En résumé, en fonction de la température et de la pression, on peut tracer les courbes obtenues expérimentalement et séparer les différents états de l'eau dans la phase pure; c'est le diagramme ou courbe d'état. Le point d'intersection des trois courbes est dénommé le "point triple".

A lire : L'eau, source de vie

Cours de Mécanique des Fluides (PDF), Pr. Henri Broch

Diagramme de phase Pression/Température des différents changements d'état de l'eau. En pratique, si nous analysons le bilan énergétique de la Terre, on découvre que chaque année à peu près 400000 km3 de l'eau des océans passent dans l'atmosphère sous forme de vapeur. A l'altitude et au lieu où les nuages se condensent, chaque gramme de cette vapeur libère 537 calories. On comprend mieux ainsi comment l'immense réservoir thermodynamique de l'atmosphère commande le climat.

Pour être complet, précisons qu'il faut environ 8 fois plus d'énergie pour que 1 kg d'eau s'évapore ou se condense (2.5 x 106 J à 20°C) que pour se liquéfier (entrer en fusion) ou se solidifier (0.334 x 106 J à 20°C). Ce phénomène est particulier aux liaisons hydrogène.

A propos du cavum

Nous connaissons très bien les phénomènes de transformation de l'air à travers la condensation, les précipitations, les aérosols et les nuages plus ou moins glacés. Il existe un phénomène météo particulier qui illustre très joliment la surfusion et la congélation, c'est le cavum.

Selon sa forme, un cavum (une cavité) se traduit en français par une trouée en traînée (fallstreak), un nuage en poinçon (hole punch cloud) ou encore un nuage labouré (ploughing cloud) quand il forme une longue traînée similaire à un sillon. On peut le qualifier de cavum homomutatus quand il résulte de l'activité humaine.

Le cavum se forme généralement dans une couche d'altocumulus, parfois dans une couche de cirrocumulus et plus rarement dans des stratocumulus.

L'altocumulus est un nuage de l'étage moyen composé de gouttelettes d'eau en surfusion; elles demeurent liquides malgré les températures négatives. Suite à un évènement extérieur, généralement les turbulences aérodynamiques générées par le passage d'un avion, l'eau se congèle subitement et se transforme en cristaux de glace. Sous l'effet de leur poids, ces cristaux forment des précipitations mais qui n'atteignent pas le sol (virgas). Comme le montrent les photos présentées ci-dessous, toute la zone nuageuse perturbée est précipitée, d'où la disparition du nuage à la verticale du phénomène.

Le cavum s'aligne le plus souvent le long des lignes aériennes commerciales.

Ci-dessus à gauche, un cavum dans un banc d'altocumulus laissant entrevoir des cirrus irisés photographié par David Burton près de Melbourne en Australie. Voici d'autres photos du phénomène. A droite, un cavum photographié par H.Raab en Autriche en 2008. Voici des photos similaires : photo 1, photo 2. Ci-dessous, des cavums homomutatus laissés après le passage d'un avion. A gauche, une photographie prise par Ian Jacobs en 2011 de cavums ou trouées en traînées (fallstreaks) laissées par des avions en approche de l'aéroport Suvarnabhumi de Bangkok, en Thailande. A droite, un cavum ou nuage laboureur (ploughing cloud) laissé par le passage d'un A380 au-dessus de Amersham près de Londres photographié par Alan Rolfe le 26 mars 2024.

Représentation de l'état de l'air

Aux pressions régnant dans l'atmosphère, l'air humide peut-être considéré comme un gaz parfait. Son état est alors défini par trois variables : la pression, la température et le rapport de mélange. Cette dernière variable fixe la composition de l'air humide tandis que les deux premières en déterminent l'état.

Il en résulte que :

- Si l'air a une composition constante, le rapport de mélange reste constant et l'état de l'air ne dépend que de sa pression et de sa température (p = ρRT).

- Si l'air est saturé, sa composition peut varier par condensation d'une partie de la vapeur d'eau. Le rapport de mélange est toujours égal au rapport de mélange saturant qui n'est fonction que de la pression et de la température.

En conséquence, la représentation de l'air nécessite un diagramme sur lequel figurent trois réseaux de courbes : le premier représentant la pression, le second la température et le troisième le rapport de mélange.

Sur un tel diagramme dit thermodynamique, l'état de l'air peut se représenter par deux points : le premier donnant la pression et la température (T); le second, le rapport de mélange pour la même pression; l'isotherme passant par ce deuxième point représente la température du point de rosée (Td).

Les météorologistes représentent l'état de l'air dans un diagramme thermodynamique représentant un sondage vertical de l'atmosphère sur lequel figure trois réseaux de courbes (en noir) : le premier représente la pression, le second la température et le troisième le rapport de mélange. Y figure également les isothermes et les isobares calculés pour l'atmosphère standard et certaines valeurs limites. C'est sur ce diagramme que sont reportés les courbes des points de rosée et la courbe d'état de la masse d'air (en bleu). Plus les courbes sont rapprochées plus la masse d'air est humide. Plus les courbes sont inclinées vers la gauche plus la masse d'air est instable. A partir de ces courbes les météorologistes peuvent déterminer les critères de stabilité, le taux d'humidité, les niveaux de condensation et les autres paramètres qui déterminent les prévisions. Consultez le chapitre consacré à la stabilité et l'instabilité pour plus de détails.

Nous verrons dans le chapitre consacré aux phénomènes de stabilité et d'instabilité, comment utiliser et interpréter les valeurs reportées dans ce diagramme de base pour élaborer une prévision météorologique.

Vous trouverez un complément d'information sur l'humidité de l'air et des abaques sur le site Energie Plus.

En attendant, nous devons encore définir les différents types de transformations que peut subir l'air.

Prochain chapitre

Les transformations de l'air

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