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La théorie de la Relativité

Concepts fondamentaux

Corpus théorique (I)

Avant de poursuivre cette initiation à la relativité, il est indispensable d'introduire quelques rudiments de mathématiques afin de fourbir votre esprit avec la meilleure arme intellectuelle qui soit pour comprendre la suite du récit.

Il faut en effet à présent définir quelques notions fondamentales, quitte à devoir faire usage d’un peu de symbolique mathématique. Mais n'ayez pas d'inquiétudes, le sujet retiendra votre attention.

J’ai tout imaginé pour vous éviter cette partie “dure” du sujet , en tous cas sa partie nettement moins littéraire, c’est-à-dire les définitions du cadre relativiste; mais à mesure que je relisais ce passage tout en le rédigeant, je me suis  finalement rendu compte que s’il y avait une chose sur laquelle il fallait bien insister quand on apprend une nouvelle matière, c’était par définition les notions de bases. Sans elles nous survolerions notre sujet, nous serions capables d’expliquer les principes de la relativité à autrui mais sans vraiment comprendre le sens des expressions. Si je m’étais contenté de cela le chapitre consacré à la relativité générale s’arrêterait ici et vous pourriez sauter immédiatement à ses applications. Après avoir lu ce dossier vous pourriez par exemple discuter de tenseur ou de covariance mais je ne vous aurais jamais dit de quoi il s’agit... grave lacune !

Dans les pages qui suivent nous allons donc définir quelques notions qui vous permettront je l’espère, de mieux saisir les concepts relativistes d’événements, de référentiel et autre tenseur ainsi que les symboles qui les accompagnent et que l’on ne peut éviter de rencontrer si vous désirez approfondir le sujet.

1,2, 3, 4 dimensions

Il est toujours facile de reprendre les idées d’autrui, en l’occurrence celles d’Einstein, pour initier un néophyte à la relativité. Mais chacun comprend-il concrètement le sens du concept d’espace-temps ? Si vous me répondez par l’affirmative, je suis certain que vous avez le profil d’un physicien. Voyons justement comment ils définissent le concept d’espace-temps, une idée tellement galvaudé et pourtant très mystérieux pour l’homme de la rue.

Nous savons que l’Univers est une construction multidimensionnelle. Des expériences élémentaires de mécanique nous permettent d’avoir une bonne compréhension des trois dimensions spatiales et des actions qui s’y déroulent. Mais nous éprouvons quelques difficultés à percevoir plus de trois dimensions. Mais que cela ne nous conduise pas à conclure hâtivement que les autres dimensions sont totalement différentes des trois dimensions spatiales. La quatrième dimension ou dimension temporelle n’est en effet pas différente des trois autres dimensions.

Pour expliquer notre perception du temps, nous devons rechercher une action dans la dimension temporelle et non pas une différence fondamentale dans sa structure. Puisque les caractéristiques de toutes les dimensions sont les mêmes, les actions qui se déroulent dans le temps doivent avoir les mêmes contraintes que celles qui se déroulent dans l’espace. Ces actions ou transformations sont : le repos, le mouvement à vitesse constante, le mouvement accéléré et la rotation autour d’un axe par exemple. Lorsqu’on travaille avec la dimension temporelle, nous devons étendre notre perception du mouvement uniforme dans la dimension du déplacement.

Dans la physique newtonienne, la vitesse est définie comme l’espace parcouru au cours du temps, par exemple dx/dt. Mesurer des vitesses dans la dimension temporelle, par rapport au temps, dt/dt, n’a aucun sens. Aux yeux d’Einstein, si nous voulons mesurer des vitesses dans l’espace-temps, nous devons redéfinir ce rapport sur une base relationnelle plus étendue. L’évolution dans le temps n’est rien d’autre qu’un déplacement dans une quatrième dimension en tous points similaire aux dimensions x, y ou z. En effet, la vitesse de déplacement d’un photon est égale à “c”, elle s’effectue à la même vitesse que celle de la lumière dans le vide. Un point de l’espace-temps se définit par 4 coordonnées : x, y, z et ct. Si “c” s’exprime en mètres/sec et “t” en secondes, par simplification nous obtenons une mesure scalaire, un seul nombre non vectoriel, valable dans toutes les dimensions. Nous pouvons confirmer ceci par l'analyse dimensionnelle.

Comment visualiser un concept tel que la dimension spatiale du temps ? Abordons la question dans l'autre sens. Pour percevoir les dimensions spatiales à l’image de la dimension temporelle, nous devons observer des objets qui se déplacent à la vitesse de la lumière dans cette dimension. Cependant, si deux objets se déplacent dans le même sens et de façon uniforme, s’ils n’ont aucune référence extérieure, se regardant mutuellement ils ne constateront aucun mouvement apparent. C’est le cas dans la dimension temporelle.

A lire : Flatland, E.Abbott, 1884 (PDF)

Le temps est une dimension spatiale !

Comment démontrer que le temps peut-être assimilé à une dimension spatiale, comme le sont les axes de coordonnées X,Y,Z ? Imaginons un monde à deux dimensions, tel Flatland. Prenons un ballon et faisons-le traverser cet espace. Aux endroits d'intersection entre la sphère et le plan, le ballon va dessiner des cercles concentriques. Vu du plan le point devient un cercle, grossit puis il disparaît graduellement. On peut retourner la flèche du temps et filmer le phénomène inverse. Le ballon évolue donc dans le temps. En réalité les habitants de Flatland ne voient pas la troisième dimension du ballon parce que celle-ci évolue dans... un autre espace. Cliquer sur l'image pour lancer l'animation.

Tout déplacement dans le temps peut également produire des effets mesurables. Nous venons de voir qu’Einstein mit en évidence une relation à trois composantes : la vitesse de la lumière dans le vide, l’énergie et la masse. C’est la fameuse équation d’équivalence E = mc². Le fait d’utiliser une théorie alliant la vitesse dans la dimension temporelle (voir ci-dessus) aux dimensions spatiales a permis aux cosmologistes de prédire l’âge, la dimension et le volume de l’univers. La mesure du décalage Doppler des galaxies et son interprétation en terme de distance (d’expansion de l’univers) compte parmi les résultats des travaux d’Einstein. Comprenez-vous mieux maintenant le sens des mots “continuum espace-temps” ? Dans l’infirmative d’autres explications vont suivre.

Vecteur, champ et tenseur

La physique d’Einstein est l’une des quelques rares sciences où l’on parle de “tenseur” en lieu et place de “vecteur”[1]. L’homme de la rue le classe parmi les néologismes dont la signification déborde de ses préoccupations habituelles. Plus d’une dactylo se sont déjà fait impressionnées par ce terme, au point de remplacer toutes les itérations qu’elles trouvaient dans les manuscrits par le mot “senseur”...! Il n’est donc pas inutile de rappeler quelques définitions car nous allons utiliser ces notions dans les pages qui suivent quand nous détaillerons la méthode d’approche du champ gravitationnel total par Einstein.

Un vecteur est un élément de l’espace décrit par une intensité et une direction. Il est symbolisé par une flèche plus ou moins longue orientée dans n’importe quelle direction. Je lance par exemple un objet en l’air. Il se déplace à 10 km/h, ralentit puis change de direction et tombe. Si je lâche le même objet au-dessus du sol, il se déplacera à la même vitesse sans changer de direction.

Un vecteur est représenté par des séries de nombres appelés matrices dont les valeurs se transforment selon certaines lois (opérations), telle la rotation. Ainsi la rotation d’une flèche de 90° vers le haut provoque une augmentation de la valeur des nombres pointant vers le haut et de ceux pointant dans les autres directions (si la flèche est sur l'axe XY et monte sur l'axe Z).

Les lois du mouvement de Newton sont des lois vectorielles. Mais le déplacement de l’objet dépend également de sa masse qui est une grandeur non vectorielle, mesurable in situ. Cette quantité est un nombre dit scalaire.

A toute fin utile, mais nous en aurons besoin, précisons que le moment est un vecteur représentant une force. Le moment cinétique d’un mobile par exemple représente l’impulsion ou quantité de mouvement, le produit de sa masse par sa vitesse. Cette impulsion est une grandeur vectorielle qui a le même sens que le vecteur vitesse du corps en mécanique de Newton (deuxième loi du mouvement : a = f/m). En électrodynamisme le moment magnétique d’un électron par exemple est le produit de la charge magnétique par sa distance au noyau.

Les mathématiciens disent que le vecteur se résout en ses composantes. Dans l’espace tridimensionnel, la position d’une particule au cours du temps requiert trois nombres. L’espace-temps de la relativité requiert quatre composantes, on parle de quadrivecteur.

Vecteur (ou tenseur d'ordre 1)

Champ scalaire et champ vectoriel

Le champ vectoriel est l’espace dans lequel les vecteurs sont orientés. L'exemple le plus simple et bien connu est celui du champ de force d'un aimant (cf. Alloprof). Les relations mathématiques qui relient la charge électrique et le champ magnétique ont permis d’unifier les lois de l’électricité et celles du magnétisme au XIXe siècle à travers les équations de Maxwell. On ne parle plus de vecteur simple mais de champs de vecteurs, qu’il soit électrique, magnétique ou gravitationnel. On parle de champ électromagnétique parce que les forces électriques et magnétiques remplissent tout l’espace autour de certaines charges.

Enfin, le tenseur définit l'état de contrainte et de déformation d'un espace soumis à des forces (tensions). Il est représenté par une matrice de nombres (une sorte de déterminant), des opérateurs mathématiques capables de subir des transformations de manière propre. Il s'agit d'une application multilinéaire sur un espace de dimension donnée dont le résultat est un scalaire, un objet.

 En relativité générale, les tenseurs sont nécessaires pour tenir compte de toutes les composantes de la gravité : non seulement les nombres indiquant les directions dans l’espace-temps, mais également les nombres mesurant les déformations de l’espace-temps lui-même. 

Les tenseurs de l’énergie, de l’impulsion et autres pressions décrivent les propriétés intrinsèques de l’espace-temps en fonction de repères choisis (Minkowskien, accéléré, etc) tandis que le tenseur de courbure construit la métrique de l’espace-temps. Ensemble ils définissent les équations d’Einstein.

Einstein découvrit que l’énergie était une valeur scalaire, un nombre non orienté dans l’espace-temps tout comme la masse. En calculant le produit scalaire des deux grandeurs (énergie-impulsion) il pouvait concevoir le concept de courbure de l’espace-temps et mesurer physiquement ses conséquences. Cette petite phrase anodine représente l'essentiel de la théorie d'Einstein.

Prochain chapitre

Les référentiels

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[1] Un autre domaine qui fait usage du concept de tenseur est la physiologie. La transformation d’informations sensorielles et musculaires en ordres moteurs exprimés par les muscles du corps ayant de nombreuses solutions, certains chercheurs pensent que le cerveau fonctionne tel un tenseur, manipulant des matrices pour effectuer ces transformations entre vecteurs. Lire P.Churchland, “Neurophilosophy”.


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