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Les robots au service des hommes

Les exosquelettes (III)

L'impressionnant exosquelette Caterpillar P5000 "Power loader" du film "Aliens 2" (1986) dont voici une vue de face. Précisons qu'il s'agit d'un pur produit du 7e art qui n'a jamais été en production. De toute façon, il est bien trop lourd, encombrant et énergivore. Depuis, la technologie a fait des progrès.

Le concept d'exosquelette est dérivé de la biologie. Alors que les vertébrés ont un endosquelette, une stucture interne rigide et articulée sur laquelle sont fixées les organes, les invertébrés n'ont pas cette stucture mais disposent d'une carapace ou d'une coquille, ce qu'on appelle un exosquelette. Cette solution très ingénieuse combine la solidité et la protection.

L'exosquelette des invertébrés leur permet de porter des objets pesant jusqu'à 50 fois leur poids tout en évitant de se blesser lors d'une chute. Mais ici s'arrête la comparaison car l'avantage des insectes par exemple est avant tout lié à leur petite taille; le poids de leurs muscles est faible comparé à leur surface. Aussi, même quand un insecte tombe de très haut, en général il ne subit aucune blessure alors qu'un homme meurt généralement des suites des lésions internes et de l'éclatement des organes et même des os.

Appliquée à l'homme, l'exosquelette se porte sur le corps. Historiquement ce concept est hérité de la guerre. Les soldats ont toujours porté des boucliers et des armures en guise d'exosquelette : les Vikings, les Troyens, les Romains, les Celtes, les chevaliers, les Samuraïs, etc.

Les exosquelettes ont été déclinés dans toutes leurs variantes dans les jeux-vidéos et les dessins animés tels que "Madox", "Halo", "Call of Duty: Advanced Warfare" ou la version hybride "Avatar", ainsi que dans les films de science-fiction parmi lesquels "The Ambushers", "Star Wars", "Aliens 2", "Predator", "Stargate", "Independance Day", "Spaceship Troopers", "Matrix Reloaded", "Iron Man", "Pacific Rim", "Elysium", "Edge of Tomorrow", "The Expanse", etc.

Ce n'est donc pas l'imagination et les applications potentielles qui manquent, mais bien l'argent et la technologie pour concrétiser ces concepts, rendre ces appareillages suffisamment compacts, pratiques et performants.

Notons que si l'exosquelette est dur et résistant, la science-fiction n'a pas hésité à concevoir une variante souple et biomécanique qu'on retrouve par exemple dans l'exosquelette des extraterrestres d' "Independance Day" ou "Avatar".

Pour l'heure, ces exosquelettes aux propriétés biologiques sont un bel effort intellectuel mais qu'il est impossible de concrétiser. Les chercheurs parviennent à peine à synthétiser quelques centimètres carrés de tissus vivants in vitro, ne leur demandons pas de fabriquer tout un uniforme NBC biomécanique !

Fonctions des exosquelettes

De nos jours, la fonction d'un exosquelette est d'assister l'homme grâce à des technologies issues de la robotique. Par extension, un véhicule habité (voiture, sous-marin de poche, avion, etc), une combinaison spatiale et un scaphandre de plongée rigide sont autant de formes d'exosquelettes, leurs fonctions variant selon les applications.

En pratique, comme un robot, un exosquelette doit aider l'homme dans des tâches difficiles, risquées, y compris lui permettre d'intervenir à distance dans des environnements inaccessibles, extrêmes, contaminés ou radioactifs, notamment sur des lieux sinistrés (après une explosion dans une centrale nucléaire ou dans une usine classée Seveso, après un tremblement de terre, etc).

Une autre tâche est d'aider les personnes handicapées ou âgées à se déplacer. Plutôt que de rester alité ou de se déplacer avec difficulté avec une tribune, l'exosquelette offre une aide précieuse à toutes les personnes dont les membres perdent leur motricité.

A terme, il faudra donc classer les exosquelettes en différentes familles en fonction de la manière dont ils sont construits et/ou de leur destination.

Hardiman

Le premier exosquelette moderne fut construit en 1966 par General Electric. Financé par l'armée américaine, "Hardiman", acronyme de "Human Augmentation Research and Development Investigation" et de "Man" pour "MANipulator", permettait à un seul homme de soulever une charge de 680 kg. Il devait servir à des fins logistiques sur les porte-avions, notamment pour transporter les tonnes de bombes et de missiles sur les canons et les avions de l'US Navy.

Le projet fut clôturé en 1971 car ce système comprenait 28 joints qui avaient une fâcheuse tendance à devenir instables et incontrôlables au point de menacer la vie de son opérateur. Aussi, pour évité tout risque d'accident, la photo de l'exosquelette Hardiman présentée ci-dessous été prise l'alimentation débranchée.

Ce projet a toutefois donnée des idées aux ingénieurs de General Electric qui ont développé des bras dits manipulateurs ou robotisés pour l'industrie capables de soulever des charges de 500 kg qui sont encore utilisés de nos jours dans les industries de la forge et de la fonderie (cf. Western Space and Marine). D'autres bras manipulateurs ont été développés pour la recherche sous-marine dont une version "light" fut adaptée en 1964 sur le sous-marin Aluminaut de Reynolds Metals Company.

Hardiman fut le premier exosquelette. Il fut fabriqué par General Electric en 1966 pour l'US Navy.

C'est en 2001 que les projets de fabrication d'exosquelettes ont vraiment vu le jour à l'initiative du DARPA qui proposa de financer les meilleurs projets à concurrence de 50 millions de dollars répartis sur 5 ans dans le cadre du programme "Exoskeletons for Human Performance Augmentation programme".

C'est ainsi que sont apparus toutes une série d'exosquelettes permettant d'augmenter la force de son utilisateur. Des industriels mais également des universités étrangères, notamment japonaises, se sont lancés dans la course.

De manière générale, les exosquelettes permettent de résoudre le problème de la logistique. Une étude de Raytheon estime qu'un seul exosquelette pourrait déplacer 8 tonnes de charge par jour.

Concrètement, dans le domaine militaire, ils permettront aux soldats de transporter des objets lourds et encombrants (container, bombe, etc) sans risquer de se blesser ou devoir faire appel à des grues ou des camions.

En outre, un soldat doit souvent porter des charges qui peuvent dépasser 60 kg, y compris du matériel électronique et des batteries supplémentaires afin d'être opérationnel sur le terrain plusieurs jours de suite.

BLEEX et HULC

Parmi les projets d'exosquelettes militaires citons le prototype BLEEX développé par l'Université de Berkeley en 2004.

Cet exosquelette est basée sur le projet HULC (Human Universal Load Carrier) de l'équipe du Dr Kazerooni de la société Ekso Bionics remontant à 2000. C'est l'un des projets les plus chers avec un investissement d'environ 50 millions de dollars.

Le cahier des charges consistait à proposer à l'armée un système portable permettant aux soldats de transporter 90 kg de matériel de combat sans fatigue durant 8 heures. Le système devait seconder le soldat en l'aidant à transporter les éléments les plus lourds, notamment les batteries de ses appareils électroniques ou des obus.

Le projet fut repris par Lockheed Martin en 2009 qui développa l'HULC, une version plus légère de l'exosquelette pesant moins de 25 kg que l'armée évualua.

L'objectif était clairement de ne pas réduire l'efficacité du soldat tout en lui permettant de transporter des charges lourdes à travers tous les terrains.

A voir : Les exosquelettes BLEEX - HULC - HAL

Des soldats américains portant l'exosquelette HULC de Lockheed Martin capable de supporter une charge de 90 kg. A droite, ce soldat porte sans difficulté un obus de 155 mm pesant environ 45 kg dont 12.5 kg d'explosif. Documents Lockheed Martin.

C'est la société Protonex qui apporta son expertise en fabriquant des batteries plus légères et à haute capacité au Lithium-polymère (Li-PO) capables de délivrer une puissance de 100 à 1000 watts durant 96 heures que peut durer une opération militaire.

HULC est un système autonome, anthropomorphique et électro-hydraulique alimenté sur batteries. Un ordinateur intégré contrôle les actions du soldat et s'assure que l'exosquelette suit les mouvements de l'opérateur.

Grâce à HULC le soldat se voit alléger artificiellement de plusieurs dizaines de kilos. Il conserve ainsi son autonomie, son agilité et sa souplesse, notamment celle de pouvoir s'accroupir, ramper, faire des contorsions et même de marcher rapidement et sauter des obstacles, des actions qui ne sont plus possibles quand il porte des dizaines de kilos sur le dos.

XOS, XOS2 et XO de Raytheon et Sarcos

Un autre projet militaire supporté par le DARPA est l'exosquelette XOS, développé en 2007 par Raytheon Company et Sarcos. Il fut suivi par XOS2 en 2010.

L'exosquelette XOS2 développé pour l'armée en 2010 par Raytheon et Sarcos.

Le projet XOS est intéressant à plus d'un titre. Cet exosquelette vise à augmenter la force de son opérateur, son endurance et lui permettre de soulever des poids qui, sans l'aide de la robotique, nécessiteraient l'intervention de trois hommes ou devraient faire appel à des machines encombrantes.

La première version de XOS coûta 15 millions de dollars. Le système était alimenté par un petit moteur à essence. Afin que le système soit autonome et exploitable sur le théâtre des opérations, son alimentation fut remplacée par des piles à combustible, des batteries au lithium-polymère (Li-PO).

XOS2 tire sa puissance de moteurs électriques qui alimentent des actuateurs hydrauliques. Différens types de capteurs sont placés dans tout le système pour déterminer la position et la force requise. Chaque articulation (joint) est contrôlée par des plusieurs microprocesseurs. Les capteurs envoient leurs signaux aux processeurs par Internet. Grâce à la pression hydraulique, les actuateurs peuvent développer une force de pression d'environ 200 kg par centimètre carré. Sur le terrain, XOS2 permet à un soldat de soulever une charge de 22 kg avec chaque bras.

Sarcos a annoncé qu'ils espéraient produire une version militaire opérationnelle vers 2015. Toutefois le système dépendra toujours d'un câble pour son alimentation hydraulique. La version autonome n'est pas planifiée avant 2020.

Un nouveau modèle nommé Guardian XO fonctionne sur batteries et présente une autonomie de 8 heures. Le Guardian XO peut porter une charge de 90 kg durant de longues périodes et divise par 20 le poids porté par l'opérateur. Selon Sarcos, "La combinaison possède une série de capteurs intégrés dans l'exosquelette, permettant à l'opérateur d'actionner intuitivement le robot d'une manière qui tire parti de ses instincts et de ses réflexes, et qui minimise le besoin de formation humaine." Le Guardian XO fut présenté au Consumer Electronics Show en 2020. Sa commercialisation débuta en 2021.

Le Guardian XO s'adresse à de nombreux secteurs : aviation, fabrication, logistique, pétrolier, gazier, construction, défense, etc. L'US Army (les Marines) et la compagnie aérienne américaine Delta Air Lines ont déjà testé ce modèle.

Les analystes estiment que ce type d'exosquelette représentera un marché supérieur à 11.5 milliards de dollars en 2030.

A voir : Sarcos Guardian® XO® Full-Body Powered Exoskeleton: Overview & Demonstration, 2020

T.A.L.O.S.

T.A.L.O.S. rend le fantassin américain plus fort, plus rapide et invulnérable aux balles. Document US.Army CCDC.

L'US Army en collaboration avec le secteur privé étudient également un concept de combinaison ou plutôt de cuirasse pour ses fantassins nommé T.A.L.O.S. (Tactical Assault Light Operator Suit) présente à droite. L'idée est de rendre le soldat parfait : plus fort, plus rapide et invulnérable aux balles.

Ce concept est une combinaison articulée qui dispose d'un panneau biométrique pour surveiller les indicateurs vitaux du soldat tels que le pouls, la température du corps et de la peau ainsi que le niveau d'hydratation. Mais le but principal de la combinaison est de protéger le soldat contre les balles. Elle utilisera ce qu'on appelle une "armure liquide" développée par le MIT. Sa particularité est que le liquide se transforme en matériau solide en quelques millisecondes. La seule condition est d'appliquer au liquide un courant électrique ou un champ magnétique (cf. R.Egres et al., 2004; US Army, 2013; How Stuff Works).

T.A.L.O.S. comprendra également des lunettes de vision nocturne et un ordinateur de bord qui fourniront des informations et des analyses tactiques importantes pour le soldat. Le prix de cette combinaison n'est pas encore connu.

S'il est encore loin du costume de "Iron man" (Robert Downey), qui sait à quoi il ressemblera demain ?

De son côté, les chercheurs japonais ne sont pas restés inactifs. Citons l'exosquelette Power Assist Suit développé en 1990, le Muscle Suit développé en 2007 par l'Université de Tokyo, HAL et quantité d'autres projets.

HAL de Cyberdyne

L'exosquelette H.A.L (Hybrid Assistive Limb) est particulièrement intéressant. Il fut développé en 2002 par le Pr. Yoshisuki Sankai de l'Université de Tsukuba en collaboration avec la société Cyberdyne. HAL est aujourd'hui à la version 5.

HAL exploite une technologie très avancée. Comme le coeur ou le cortex, les muscles du corps produisent naturellement des signaux bioélectriques (BES pour Bio-Electric Signals) qu'on peut visualiser sur un électromyogramme (EMG). Grâce à des électrodes fixés sur la peau du porteur, HAL détecte et lit ces biosignaux et les combinent à diverses autres informations pour déterminer les mouvements souhaités par le porteur.

HAL contrôle l'unité de puissance en fonction des mouvements pour aider le porteur à se déplacer selon ses intentions ou même à exercer plus de force que d'habitude. HAL dispose de deux types de systèmes de contrôle qui peuvent être utilisés ensemble selon le choix du porteur. Le "Cybernics Voluntary Control System" utilise les biosignaux pour effectuer les mouvements souhaités par le porteur. L'autre est le "Cybernics Autonomous Control System" pour réaliser des mouvements spécifiques même en l'absence de biosignal.

A voir : Robotic 'Wearable ExoSkeleton Hand', Festo

The Next Iron Man is YOU - Maxod - 01 (Dessin animé)

A gauche, l'exosquelette HAL-5 de Cyberdyne (2002-2013) qui est aujourd'hui utilisé dans dix hôpitaux du Japon. Au centre, la version allégée de l'exosquelette HAL assistance présentée en 2012. A droite, l'exomain développée par Festo en 2012. Certains de les exosquelettes peuvent être adaptés sur un robot afin de piloter leur homologue à distance. Documents constructeurs.

En 2012, Cyberdyne dévoila une version allégée de son exosquelette présentée ci-dessus au centre lors de l'exposition Japan Robot Week de Tokyo. Selon Yoshiyuki Sankai, professeur d'ingénierie à l'Université de Tsukuba, la couche externe de HAL bloque les rayonnements nocifs, tandis que les ventilateurs placés à l'intérieur de la combinaison font circuler l'air pour garder le porteur au frais. Un ordinateur surveille la fréquence cardiaque et la respiration de l'utilisateur en permanence pour détecter les signes de fatigue.

L'inventeur Eiji Koyanagi de l'Institut de technologie de Chiba a déclaré que ces combinaisons seraient déployées très près du cœur endommagé du réacteur de Fukushima pour protéger les travailleurs du nucléaire.

En mars 2013, HAL fut mis en test dans dix hôpitaux du Japon afin d'assister les personnes ayant des difficultés motrices.

Proposé en location pour quelques milliers de dollars par mois, HAL est également vendu au prix de 4200$. Cyberdyne espère vendre au moins 400 exemplaires de HAL au Japon. Si le succès est au rendez-vous, ils sont prêts à augmenter la production jusqu'à 10000 exemplaires par an.

Certains modèles de dernière génération tel l'exomain de Festo développé en 2012 peut même servir à télécommander un robot articulé à distance. Il peut trouver des applications en chirurgie, dans les laboratoires et dans tous les environnements hostiles où l'homme ne peut pas s'aventurer.

Quant à proposer ce type d'exosquelette à des patients handicapés moteurs, actuellement cela coûte encore très cher. En effet, en 2018 un exosquelette léger de type tubulaire comme le modèle HULC utilisé par les militaires revient à 120000 € et n'est pas remboursé par la sécurité sociale. Heureusement, avec le temps de nouvelles entreprises proposent des exosquelettes meilleur marché comme l'israélienne ARGO Medical Technologie qui propose son exosquelette ReWalk à 50000 € (cf. cette vidéo sur YouTube). L'entreprise dispose d'une succursale en Allemagne.

Et les inventions se succèdent. Que nous réserve l'avenir ? De surprenantes choses que nous ne soupçonnons même pas !

Pour plus d'informations

Quand les robots inventent un langage qui leur est propre : article, blog de Facebook, VF, 2017

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Vidéos sur les exosquelettes robotisés

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BLEEX, HULC, HAL

ExoHand, Festo

Maxod - 01

Magazine

Planète Robots

Vidéos sur les robots

How Robots Will Change the World, BBC/NHK

Future is Today - Humanoids Robots 2014, NHK

Technology of the Future, M.Kaku,  BBC

Robot Evolution (revue générale des projets)

P3 de Honda

Asimo de Honda

Repliee Q2 (et sur YouTube)

DER2 de Kokoro Androids

Nao d'Aldebaran Robotics

HRP-4C et HRP-2 de AIST

CB2

Hubo

iRobi Q

Films

I, Robot, 20th Century Fox, 2004

IA Trailer, (VF avec critique) Steven Spielberg, 2001

Matrix, Larry et Andy Wachowski, 1999

Robocop, MGM/Orion Films, 1987

D.A.R.Y.L, Paramount Pictures, 1985

Terminator, James Cameron, 1984

Tron, Walt Disney Pictures, 1982

Blade Runner, Ridley Scott, 1982

Six Million Dollar Man, Universal Studios, 1974-78

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