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Le polymorphisme du monde

Quelques spécimens de la ménagérie de "Star Wars". Pourquoi pas, mais cela reste du domaine de la fiction.

Du système nerveux central à l'intelligence (IX)

Devant le fabuleux éventail des biotopes existant sur Terre et l'extraordinaire variété des organes sensoriels qu'ont développé les organismes, on comprend aisément qu'il est pratiquement impossible de dresser le portrait d'un modèle d'écosystème extraterrestre sans verser dans la science-fiction; c'est déjà parfois de la "science-fiction" sur Terre quand on voit les formes, les facultés de mimétisme ainsi que les moyens de détection et de défense active ou passive de certains créatures !

Des auteurs très imaginatifs ont exploré ce thème en inventant des créatures chimériques allant du "Nuage Noir" intelligent de Fred Hoyle (1957) au lac visqueux "Armus" de Gene Roddenberry (Star Trek TNG, 1988, saison 1, épisode 22 "The Skin of Evel") en passant par la carotte pensante d'Irwin Allen ("Lost in Space", 1968, épisode "The Great Vegetable Rebellion") sans oublier toute la ménagerie des aliens de "Star Wars" de George Lucas (1977-2005), "Doctor Who" de la BBC (1963/2017) et de "Men In Black" de Barry Sonnenfeld (1997-2019).

Ces auteurs n'ont jamais prétendu que ces créatures fantasques pouvaient exister. En fait comme c'est généralement le cas, la science-fiction est a des années-lumière du débat scientifique.

Nous avons toutefois un autre bel exemple, très instructif cette fois, avec tout le zoo animalier que nous ont ramené les marins au long cours et les premières expéditions explorant les continents africain, américain et l'Océanie. Personne ne croyait au calmar géant, à la girafe, au zèbre ou à l'ornithorynque... Et pourtant il fallait se rendre à l'évidence, ces créatures bizarres vivent sur Terre ! Les zoologistes furent encore plus surpris quand ils découvrirent le weta géant (sp. Deinacrida), les membracidae et furent vraiment mal à l'aise en voyant ce poisson Macropinna microstoma, le seul représentant connu de la famille des Opisthoproctidae (voir la vidéo sur YouTube).

Alors imaginez notre émotion si un jour nous découvrons des créatures fantasques sur une autre planète, où les chaînes d'ADN n'auraient probablement aucune relation avec celles existants sur Terre, où le métabolisme de ces créatures ne serait peut-être pas basé sur l'oxygène, ni le sang, ni sur le sucre, etc... C'est difficile à imaginer mais si vraiment certaines exoplanètes sont peuplées de créatures, il nous faudra peut-être d'abord nous calmer et absorber une bonne dose de relativisme pour accepter l'improbable. Et ne parlons même pas de l'existence même de ces créatures qui se grefferait sur cette éventuelle découverte comme un sacrilège face au dogme religieux... Mais dame Nature a toujours le dernier mot.

Les facultés sensorielles

Du point de vue biologique, si une vie complexe existe ailleurs dans l'Univers, aucune loi n'interdit que les organes de ces créatures développent des fonctionnalités monstrueuses ou proches des nôtres, présentant par exemple des organes moteurs dont les degrés de liberté seraient différents (mouvements télescopiques ou rotatifs par exemple) ou des fonctions cognitives décuplées, liées à un environnement hostile ou un développement génétique plus abouti. Des organites peuvent posséder de véritables organes sensoriels. Ces êtres seront forcément mobiles, vestige du temps où ils chassaient leur nourriture.

Rappelons également que le phénomène de convergence de l'évolution introduit précédemment peut donner naissance à des créatures fantasques selon nos critères biologiques mais dont les facultés sensorielles seraient en tous point identiques aux nôtres ou aux créatures équipées de sixième sens que nous cotoyons. Comme nous l'avons expliqué, sur Terre nous avons bien des animaux comme le poulpe dont les yeux ont été formés à partir d'une transformation de l'épiderme alors que chez l'être humain il s'agit d'une extension du cerveau. Dans les deux cas, deux créatures que tout différencie voient le monde de la même manière, en tirant profit d'un organe sensible à la lumière. Et vous conviendrez également que le poulpe est plutôt intelligent.

On peut donc imaginer rencontrer d'éventuels extraterrestres tout droit sortis d'un roman de science-fiction, muni d'antennes sur la tête ou d'autres appendices sensoriels dont le rôle serait identique à l'un de nos sens... Etonnante rencontre !

Les facultés sensorielles d'éventuelles créatures extraterrestres peuvent donc être aussi diversifiées et perfectionnées que les gadgets de James Bond. N'ayant malheureusement aucune preuve ni même le moindre indice allant dans ce sens, on peut s'intéresser au psychique de telles créatures et leurs facultés à appréhender la réalité. Verraient-elles le monde avec les mêmes yeux que nous et seraient-elles à même de comprendre notre questionnement sur la vie extraterrestre ? Difficile de répondre.

A lire : Les facultés sensorielles

Quelle attitude adopter face au comportement inattendu voire hostile de nos éventuels visiteurs ? Sommes-nous prêts à toute éventualité ? Certainement pas. Faut-il s'en inquiéter ? Compte tenu de la faible probabilité d'un contact et de l'éloignement, ce risque est négligeable et de toute façon purement spéculatif. Dormez en paix... Documents extraits de "E.T." (1982), la statue du "Dinoman" (un descendant imaginaire du Stenonychosaurus ou "Troodon" créé par le géologue et paléontologue Dale Russell et le taxidermiste Ron Seguin en 1982. Elle est exposée au Canadian Museum of Nature à Ottawa, au Canada et est reprise dans le livre de Dickinson et Schaller "Extraterrestrials: A Field Guide for Earthlings"), "Legend" (1985) et un Borg de "Star Trek TNG" (1989-1990).

En attendant, nous pouvons déjà mesurer nos capacités de déduction et d'apprentissage face au monde qui nous entoure. L'étude comportementale des mammifères marins, des langues conceptuelles mortes des civilisations antérieures ou des fonctions de nos organes sensoriels rencontre déjà des difficultés d'analyse pour les personnes les plus intelligentes de notre planète, dont la structure biologique est pourtant identique à celle des êtres dont ils étudient les messages ! Comment imaginer dans ce cas notre premier contact avec une civilisation née en dehors du berceau de la Terre ? Quel sera notre comportement ? S'il n'est pas offensif, une attitude défensive ou bienveillante sera-t-elle comprise à sa juste valeur par nos visiteurs ? Nous mêmes, comprendrons-nous leurs intentions ?

En étudiant les mammifères, nous savons par exemple que le regard à un rôle social et transmet beaucoup de messages. Fixer un chien, un chat ou un chimpanzé dans les yeux, s'il ne vous connaît pas il y a des chances qu'il prenne ce regard pour une menace et réagisse en conséquence. Même si vous ne l'avez pas menacé, dans son "langage" sensoriel le congénère qui soutient son regard signifie qu'il veut le dominer et donc prendre sa place dans le groupe avec tous les privilèges dû à son rang. Dans ce contexte on comprend mieux que son attitude ait été agressive...

Et comment un éventuel visiteur extraterrestre interprétera nos photographies, nos images d'art, nos sculptures...? Un dicton chinois dit qu'"une image vaut mille mots. Certainement et bien plus encore. Une image contient des informations que nous avons appris à reconnaître. Notre expérience et l'apprentissage, liés à nos facultés cognitives peuvent différencier les sujets ou les intégrer dans des structures symboliques. On peut même quasiment instantanément identifier un homme et une femme qui seraient androgynes, même en supprimant les caractères sexués comme les cheveux longs, le maquillage et la barbe. Portant les différences sont très subtiles (cf. ces photos de célébrités en ligne).

Mais ce que voit un être humain, tout être vivant le perçoit-il ? Nous savons que certains animaux sont plus habiles dans l'écholocalisation que l'observation visuelle (dauphins, chauves-souris), d'autres dans la détection des vibrations et du rayonnement infrarouge (serpents) ou ont une sensibilité rétinienne qui s'étend jusqu'aux ultraviolets (papillons, abeilles). La plupart ont une moins bonne vue que la nôtre dans le spectre visible mais ils les compensent largement par d'autres facultés. Cela a-t-il donc un sens de proposer des images à un extraterrestre dont on ignore tout des facultés sensorielles et du mode de communication ?

Nous savons qu’un homme ayant subi un traumatisme crânien ou une séparation physique de ses hémisphères cérébraux peut voir ses facultés profondément altérées. Un animal conditionné dès sa naissance à ne voir que des lignes horizontales est incapable de discerner des traits verticaux[4] alors que la rétine de ses yeux perçoit ces signaux et son cortex cérébral dispose des cellules d'analyse adéquates... A plus forte raison, il se pourrait que la Joconde dont les contours sont naturels mais présentés à plat et l'image peu contrastée soit tout sauf un portrait pour un extraterrestre. Peut-être éprouvera-t-il une émotion... Mais est-on certain qu'il verra le monde comme nous ? Comment peut-on dialoguer ? Comment procéder ?

Il y a bien sûr de fortes chances que notre visiteur sera capable d'appréhender les choses aussi bien si pas mieux que nous. L'entité qui nous fera face sera intelligente, quelle que soit la forme de sa pensée, naturelle ou artificielle, elle aura organisé sa mission, elle sera probalement dotée de multiples sens et ressentira peut-être des émotions.

En dépit des apparences

Dans tous les cas il sera prudent de ne pas sous-estimer les facultés de notre visiteur malgré les apparences qu'il pourrait revêtir. Un androïde ou un cybord docile est a priori inoffensif mais mal utilisé il peut tuer et rien ne nous dit que son créateur ne construit pas d'armes. Mais n'ayons pas la paranoïa des extraterrestres belliqueux, tous ne ressemblent certainement pas aux créatures de Tim Burton réalisateur de "Mars Attacks !", au Terminateur T-1000 en métal liquide et autre Alien.

Ainsi que nous l'avons expliqué à propos des différents biotopes, il est en revanche raisonnable de penser que nos visiteurs feront partie d'une civilisation technologiquement avancée. Ils auront les "pieds sur terre" si l'on peut dire, ils seront munis de membres préhensiles (ou de tentacules, de pattes, de pinces, etc), et seront sans doute capables de manipuler avec précision les objets et de se déplacer de manière autonome.

Dans l'infirmative on voit mal comment ils pourraient développer une technologie; il leur sera difficile de piloter leur vaisseau spatial, à moins de le faire par télépathie ou par le truchement d'une interface adaptée. Mais ici encore, il a bien fallut construire le vaisseau ou cette interface. Et si ce n'est pas par lévitation ou d'autres facultés extrasensorielles, des équipes de techniciens ou des machines-outils ont bien dû s'occuper d'assembler les différents éléments et les tester.

Une blatte alien sortie de MIB (1997); une monstruosité viable mais invivable. Voici une autre image et la version animée (GIF de 5 MB).

Si on se tourne vers les organismes terrestres vivant ou non en société, mis à par l'homme rappelons que les fourmis, les termites, nos oiseaux tisserants, les poulpes ou certains mammifères, s'ils sont capables de fabriquer des nids douillets parfois sophistiqués et même ventilés, ils n'ont jamais construit autre chose que ce que leur dictait leur instinct.

La technologie se développe de consert avec l'évolution du cerveau mais également avec le développement des membres préhensiles. Et cela s'acquiert au cours du développement sur la terre ferme. Un poulpe ou un dauphin est très intelligent mais ils ont tous deux des facultés d'apprentissages limitées. Un chimpanzé nous ressemble plus mais il ne s'en sort pas mieux.

Il est donc peu probable que nos visiteurs habitent une planète gazeuse sans surface solide ou soient des créatures marines. Ils peuvent cependant être amphibies ou être munis d'ailes à condition qu'ils disposent en complément de membres préhensiles et d'un cerveau très développé. Ici encore la science-fiction regorge d'idées.

En nous basant sur la biodiversité terrestre, on peut imaginer que toutes les créatures extraterrestres évoluées auront des membres locomoteurs et de préhension développés et ne ressembleront pas à des masses gélatineuses informes privées de membres et ressemblant à des slimes ou des limaces.

Toutefois, rien ne les empêche de développer des facultés biologiques extraordinaires (mimétisme, métamorphose, hermaphrodisme, etc), des pouvoirs extrasensoriels ou extralucides. Les plus évoluées et les plus complexes peuvent tirer avantage de leur technologie pour améliorer leurs conditions de vie (greffes biomécaniques basées sur la nanotechnologie, intelligence artificielle, etc). Le sujet étant très intéressant mais très vaste également, nous reparlerons de tout cela dans d'autres articles, notamment celui consacré aux technologies du futur.

Nous pouvons être heureux d'apprendre que même les chefs d'Etat abordent également ces thèmes : en 1987, MM.Reagan et Gorbatchev[5] se sont posés la question de savoir quelle serait leur attitude dans une telle situation, chacun en effet partageant des opinions variés sur la vie extraterrestre. Mais avant de connaître leur réponse et qu’un nouveau projet SETI ne soit envisagé, les astronomes se sont permis d'envoyer leurs premiers messages codés. Ecrits dans la langue de notre temps, illustrés d'images commentées en anglais, ils peuvent sembler en contradiction avec les propos émis ci-dessus. Le problème est qu'il faut choisir un support conceptuel. Parler javanais luxuriant, le langage binaire ou anglais, celui qui peut sonder l'espace peut traduire cette pierre de Rosette.

Pour plus d'informations

Sur ce site

Existe-t-il une vie complexe ailleurs dans l'univers ?

La vie sous toutes ses formes

La faculté d'adaptation

Les facultés sensorielles

Les modèles informatiques de l'évolution

L'eau, l'or bleu

Sur Internet

Darwin's aliens, Samuel R. Levin et al., International Journal of Astrobiology, 2017

Ten tiny but terrifying micro-monsters, Cosmos magazine

Science et Fiction, les dossiers du magazine "Pour la Science"

Société Française d'Exobiologie (SFE)

Ressources en biochimie (CHH-PS)

Darwin Centre at NHM

Vidéos et animations

Emission sur la vie extraterrestre Partie 1, Partie 2, Partie 3, Partie 4 (diffusée sur Geographic Channel puis en français sur Arte)

Extraterrestrial (Animations sur le site du National Geographic)

Illustrations

Aliens (sur ce site)

Graham Conrad - Bob Eggleton - Marilynn Flynn - David A.Hardy - Mark Riddell

Nate Ryan - Gary Tonge - Keoma - MikeGX - SkyBlueHope.

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[4] D.Hubel, “Eye, brain and vision”, Scientific American Library Series #22, 1988.

[5] Discours officiel de Gorbatchev au Kremlin diffusé le 16/2/1987. Un second discours similaire fut diffusé en 1988.


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