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Les astéroïdes, une mine de ressources Les premières idées La première fois qu'on évoqua l'exploitation minière des astéroïdes remonte à 1898. En effet, dans son roman "Edison's Conquest of Mars", l'astronome et auteur américain Garrett P. Serviss (1851-1929) décrit comment des explorateurs spatiaux sur le point d'attaquer Mars découvrent un avant-poste sur un astéroïde sur lequel des hommes extraient des métaux précieux. A son tour, Jules Verne écrivit en 1901 "La chasse au météore" qui fut publié à titre posthume en 1908 dans lequel il évoque des "tubes de force gravitationnelle" pour ramener sur Terre un "météore" (astéroïde) en orbite autour de la Terre et exploiter ses ressources. Ces idées furent reprises par le président américain Lyndon Johnson lors de l'Exposition Universelle de Seattle en 1962 où il aurait déclaré : "Un jour, nous serons capables de ramener près de la Terre un astéroïde contenant pour des milliards de dollars de métaux critiquement nécessaires afin de fournir une énorme source de richesses minérales à nos usines." En 1981, le journal canadien "The Globe and Mail" décrivit un projet conjoint du MIT et de l'Université de Princeton de prototype d'un nouveau moyen de propulsion exotique qui pourrait être utilisé pour capturer et exploiter les astéroïdes. Ensuite, en août 1984 parmi ses projets la NASA proposa les concepts de "base lunaire habitée, l'extraction de l'oxygène des roches lunaires pour alimenter les fusées et l'exploitation minière des astéroïdes vers 2010." Enfin, le 10 novembre 2015, le Congrès américain vota une loi (S.1297 - U.S. Commercial Space Launch Competitiveness Act ou CSLCA) autorisant les entreprises américaines à posséder et vendre tout matériau extrait de la Lune, des astéroïdes ou de tout autre corps céleste afin de développer l'industrie minière spatiale. Pourtant, cette loi est en violation avec le droit spatial tel qu'approuvé par l'ONU comme l'explique cet article publié la revue "Science Daily". Mais dans les faits, personne ne s'en est offusqué. C'est la raison pour laquelle en 2017, la Russie entama des discussions avec l'ONU afin d'amender le droit spatial concernant l'exploitation des astéroïdes et de la Lune. Le ministère des Affaires étrangères et l'agence spatiale Roscosmos ont proposé d'interdire au niveau international l'exploitation des astres à des fins commerciales alors que les États-Unis et le Luxembourg ont déjà permis aux entreprises d'exploiter les astéroïdes sans droit de propriété. Selon le journal "Izvestia", ignorer une telle loi pourrait déclencher un conflit sur les ressources extraterrestres. L'exploitation des astéroïdes est donc dans l'air depuis plus d'un siècle mais une fois de plus la science est en retard sur la fiction faute de ressources essentiellement financières pour mener à bien un tel projet, la technologie existant, même s'il faut l'adapter aux conditions de l'espace. Pourquoi aller chercher ces minerais dans l'espace ? Nous avons besoin de minerais pour produire notre nourriture et assurer le progrès de nos industries sur les plans économique et technologique. A titre d'exemple, pour amléiorer ses performances et le rendre plus léger et résistant, un smartphone de dernière génération peut utiliser jusqu'à 40 métaux différents. Les réserves de minerais et de manière générale les ressources terrestres ne sont pas infinies et en fait certaines d'entre elles commencent à se raréfier. La ressource peut aussi un jour subir un embargo qui risque d'affecter durablement les industries occidentales. Les astéroïdes, les comètes dormantes et les autres planètes représentent donc des sources d'approvisonnements accessibles à notre technologie. Nous fournissant toute la matière première nécessaire à notre survie et notre développement technologique, à moyen terme (quelques générations) leur exploitation va devenir indispensable et plus encore à long terme (quelques siècles) si nous souhaitons étendre notre civilisation aux autres planètes du système solaire et ensuite explorer l'espace intersidéral. La valeur des astéroïdes Les astéroïdes renferment d'énormes quantités de minérais et de gaz que convoiteront certainement les industriels le jour où les vols spatiaux seront fiables et deviendront rentables. Si ces difficultés postposent cette perspective à quelques générations, il ne fait aucun doute qu'avant la fin du XXIe siècle l'homme construira des usines sur la Lune et sur les astéroïdes, en particulier sur les corps gravitant non loin de la Terre pour citer parmi les plus connus le fameux NEO Toutatis. A l'image de la future exploitation minière de la Lune, les astéroïdes apporteront à leur tour une solution à l'épuisement des ressources naturelles de la Terre. Transformés en véritables mines à ciel ouvert, ils offrent en effet des millions de tonnes et pour des milliers de milliards de dollars de matières premières, parmi lesquelles beaucoup de fer et des métaux du groupe des platines.
Que trouve-t-on sur les astéroïdes ? A part les rares sondages effectués in situ sur quelques astéroïdes (Eros, Itokawa, Ryugu, Bennu) et sur la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko, nos connaissances chimiques des astéroïdes se limitent à ce que nous révèlent l'analyse spectrale, la spectrométrie et leur réflectance. Ainsi que nous l'avons expliqué dans les premières pages, la population des petits corps contient de nombreux objets de compositions très différentes. Parmi ceux-ci il existe tout d'abord les comètes dormantes principalement constituées d'un mélange d'eau glacée et de grains de sable ou de poussière de roche. Les astéroïdes de type C (chondrites carbonées) contiennent un mélange plus ou moins uniforme de matériaux volatils (argiles, sels hydreux et eau), auxquels s'ajoute des silicates (silicium et oxygène) et des métaux comme le fer, le nickel et les platines (platine, iridium, osmium, palladium, etc). Un petit astéroïde de type S mesurant 10 mètres seulement pourrait contenir 650 tonnes de métaux dont 50 kg de métaux rares comme le platine (côté ~900 €/kg) et l'or (côté ~30000 €/kg). Un gros astéroïdes comme Cérès (950 km de diamètre, type C) contient des milliards de tonnes de minerais. Dans ses deux livres "Space Resources" (1987) et "Mining The Sky" (1997), le planétologue John S. Lewis[1] de l'Université d'Arizona décrit la meilleure manière d'exploiter les astéroïdes, en particulier les géocroiseurs (NEO et NEA) et les satellites naturels des planètes. Parmi ses exemples ("Mining the Sky", p112) Lewis cite le petit astéroïde Amon (3554 Amun) long de 2.48 km, une aérosidérolite de type M riche en métaux. Sur base de son analyse spectrale, de sa masse et l'estimation de la valeur marchande des métaux au cours d'alors, Lewis estima qu'Amon "contient 30 fois plus de métaux que l'humanité en a extrait tout au long de son histoire." Concrètement, Amon contiendrait pour plus de 6 trillions de dollars (~6000 milliards de dollars dans l'échelle courte) de platines et pour environ 8 trillions de dollars de fer et de nickel ! Ajoutés à 6 autres trillions de dollars de cobalt et aux 2 trillions de dollars de carbone, azote, soufre, phosphore, oxygène, hydrogène et gallium, selon Lewis Amon vaut à lui seul entre "$20 trillion and $30 trillion" soit entre 20000 milliards et 27000 milliards d'euros ! Quant à Cléopoâtre (216 Kleopatra) un astéroïde de type Xe mesurant 217 x 94 x 181 km, selon Lewis il vaudrait "1 milliard de fois plus cher [qu'Amon]" !
Malheureusement ces métaux et autres matières premières ne sont pas isolés et devront être séparés des silicates et des matériaux volatils auxquels ils sont mêlés au prix d'un traitement assez onéreux estimé à 1 trillion de dollars (900 milliards d'euros) pour un astre comme Amon, mais toujours meilleur marché que sur Terre. Le bénéfice qu'on peut tirer d'un astéroïde dépend de sa nature et des moyens qu'il faut mettre en oeuvre pour extraire la matière première. En moyenne, au cours actuel des métaux, le bénéfice représente entre 1/6 et 1/10 de la valeur brute d'un astéroïde, ce qui représente tout de même quelques dizaine ou centaines de milliards d'euros. Si on envisage l'exploitation de gros astéroïdes de 5 ou 10 km de diamètre voire même de Psyché, le bénéfice se chiffre en milliers de milliards d'euros ! Ainsi, sur plus de 600000 astéroïdes répertoriés, on a dénombré 289 astéroïdes dans la Ceinture principale (entre 2.2 et 3.9 UA) valant net, après traitement, plusieurs centaines de milliers de milliards d'euros ! La plupart sont des chondrites de type C. Il y a également quelques spécimens des types B, X, L, K, M et P. Parmi les plus proches et les plus rentables (bénéfice >100000 milliards d'euros) citons Lacadiera (2.2 UA, type Xk), Hedda (2.28 UA, type Ch), Zelinda (2.29 UA, type Ch) et Mathilde (2.6 UA, type Cb).
Certains astéroïdes de type M sont presque exclusivement constitués de fer à l'état pur. Le célèbre 1986 DA par exemple contient littéralement des montagnes constituées d'un mélange de fer, de nickel et de cobalt, en d'autre termes... d'acier trempé naturel ! Il contiendrait 100000 tonnes de platine et 10000 tonnes d'or. On estime qu'il représente une valeur marchande de 4000 milliards d'euros dont on pourrait retirer un bénéfice supérieur à 430 milliards d'euros ! A ce jour il existe plus de 2000 NEO de la même taille que 1986 DA et les astronomes en découvrent environ 50 chaque année. Un autre astéroïde très convoité est Psyché (16 Psyche), un astéroïde de type M mesurant environ 240 km qui évolue entre 378 et 497 millions de km du Soleil (2.5-3.3 UA). Il est principalement composé de fer métallique et de nickel dont on estime la masse de ferronickel à 1.7x1019 kg. Cela le distingue de la plupart des autres astéroïdes composés de roches ou de glace. Avec ce type d'astéroïde, nous disposons d'un stock d'acier trempé pour des millions d'années ! Psyche contient également de l'or et quantité d'autres métaux précieux tels que le platine. Sa valeur totale est estimée à 700 quintillions de dollars (7 x 1020 $). Ce n'est plus une pépite ni même un nugget d'or mais des montagnes d'or qui nous attendent là-haut ! Les chercheurs supposent que Psyché pourrait représenter le noyau d'une ancienne planète peut-être aussi grande que Mars, qui perdit sa couche rocheuse externe et son manteau suite à de violentes collisions survenues il y a des milliards d'années. Aujourd'hui sa composition ressemble à celle du noyau de la Terre, l'or et les autres métaux précieux ne représentant finalement que des éléments "traces" à cette échelle. Enfin, il y a également beaucoup d'eau congelée dans les astéroïdes. Cette eau peut être hydrolysée avec un courant électrique pour séparer l'hydrogène de l'oxygène et s'en servir comme carburant pour ravitailler les fusées et les sondes spatiales dans des stations-relais. Les réserves sont presque infinies. La seule difficulté est d'identifier les bons astéroïdes, mais ce qui n'est qu'une question de temps et de technologie. Sachant qu'environ 13000 NEO s'approchent de la Terre chaque année et qu'il existe des milliards d'astéroïdes et de comètes dormantes dans la région des TNO et autres KBO, à l'avenir nos industries ne risquent pas de manquer de matière première ! Encore faut-il disposer de vaisseaux spatiaux suffisamment rapides et en nombre suffisant (construire des véhicules d'extraction n'est pas un problème) pour les exploiter dans des temps raisonnables. Malheureusement, nous n'en sommes encore qu'aux balbutiements. Nos petits-enfants verront peut-être se rêve se concrétiser. Les entreprises Une poignée d'entreprises sont déjà en train de planifier timidement l'exploitation des premiers astéroïdes en complément des missions d'exploration de la NASA et de l'ESA vers les astéroïdes et les comètes.
Il y a tout d'abord la société Planetary Resources fondée en 2012 par les milliardaires américains Eric Anderson et Peter Diamandis avec des participations financières du secteur privé dont Larry Page, CEO de Google et de son président exécutif Eric Schmidt ainsi que du réalisateur et cinéaste James Cameron (cf. "Avatar"). Ils envisageaient d'installer un dépôt de carburant dans l'espace à l'horizon 2020 en hydrolisant l'eau extraite des astéroïdes grâce à une petite usine autonome. Le 3 février 2016, le vice-Premier ministre et ministre de l’Economie Etienne Schneider annonça lors d’une conférence de presse que le Luxembourg s’apprêtait à lancer une initiative pour tirer profit de l’exploitation minière des astéroïdes. On apprit que l'Agence Spatiale Luxembourgeoise (LSA) était actionnaire de Planetary Resources dans laquelle elle avait investi 13.7 millions d'euros (provenant de la SNCI). Parmi les sociétés partenaires de la LSA, citons Deep Space Industries, Luxinnovation et les responsables du Space Cluster qui est membre de l'ESA depuis 2005. Avec cette initiative, les entrepreneurs européens intéressés par l'exploitation des astéroïdes n'ont plus d'excuse pour aller aux Etats-Unis. Ceci dit, la bonne santé financière de Planetary Resources n'était pas encore garantie à long terme car son business model n'a évidemment pas encore été validé tant qu'une sonde spatiale ne se posera pas sur un astéroïde pour analyser sa composition en détail. Finalement, Planetary Resources fut rachetée par ConsenSys en octobre 2018 qui s'intéresse avant tout aux ressources en eau des astéroïdes et bien entendu à leurs métaux. Perte sèche pour le Luxembourg : 13.7 millions d'euros. La société Deep Space Industries (DSI) fut fondée en 2013. Sa succursale européenne est installée au Luxembourg et espérait prospecter des astéroïdes vers 2016 et débuter leur exploitation commerciale vers 2020. DSI est déjà l'un des partenaires de la NASA spécialisé dans les moyens de communication, d'alimentation, de pointage, de propulsion et autres systèmes opérationnels des sondes spatiales. DSI a notamment participé à la fabrication du satellite Firefly basé sur la plate-forme Nanosat (le concept de nano-satellite) et travaille un autre satellite (Dragonfly) capable de ramener d'un astéroïde jusqu'à 150 kg d'échantillons. Aujourd'hui DSI a été racheté par Bradford Space Inc. La société Kepler Energy & Space Engineering (KESE) fut fondée en 2014 par l'homme d'affaire et pilote Robert Frantz et bénéficie de l'expertise d'Edgard Michell, astronaute sur Apollo XIV et de deux anciens ingénieurs en aéronautique. KESE envisageait d'utiliser les technologies de guidage, de navigation et d'ancrage exploitées sur les sondes spatialer Rosetta/Philae et Dawn pour fabriquer d'ici 2020 une sonde spatiale automatique capable de récolter des roches de surface sur un petit astéroïde et de les ramener sur Terre. Comme on le contate, dans les trois cas les projets ne se sont pas concrétisés faute de ressources. A voir : DSI - Mining The Universe For The Future Un métier d'avenir à haut risque Le jour où les agences spatiales enverront non plus des robots mais des astronautes-mineurs sur la Lune et sur les astéroïdes, il ne fait aucun doute que les assureurs reverront à la hausse les primes d'assurance-vie des équipages. En effet, le métier d'astronaute-mineur ne sera pas sans danger. Déjà sur Terre où a posteriori l'environnement n'est pas hostile, selon la revue "The Economist", en 2014 l'exploitation minière représentait le 6e métier le plus dangereux aux Etats-Unis avec 27 morts pour 100000 ouvriers[2]. Les mineurs doivent non seulement supporter des conditions de chaleur élevée et de travail inconfortables, mais ils doivent également faire face à des dangers potentiellement mortels comme des éboulements, des explosions de gaz, des fuites de produit chimique et l'électrocution.
Pour réduire ces risques, les sociétés ASI, Caterpillar et TORC Robotics étudient des systèmes d'excavatrices robotisés et contrôlés à distance. Cette technologie qui fonctionne déjà au Japon notamment pourrait être exportée sur les astéroïdes à condition que ces systèmes supportent les contraintes du vide et notamment les grands écarts de température. Avant d'envisager un scénario à la "Outland" (où les astéroïdes seraient transformés en prison minière), au moins deux solutions sont envisageables à petite échelle : 1°. Envoyer une équipe de mineurs-astronautes sur un astéroïde proche de type C, le plus commun. Au cours de leur mission qui s'étendrait sur quelques années, les matériaux volatils seraient extraits de la roche et chauffés dans un fourneau à 600°C. John S. Lewis propose même d'utiliser des chondrites carbonées ou les satellites de Mars (Phobos et Deimos) dont les roches peu denses pourraient être chauffées à 400°C. Toute les matières volatiles, y compris la vapeur d'eau et des combustibles comme l'azote, le carbone, le soufre et le phosphore alimenteraient séparément les fours servant à séparer les métaux des autres substances qui seraient finalement catapultées sur orbite (orbite LEO) pour un second traitement plus affiné. 2°. Remorquer un astéroïde proche d'une taille inférieure à 10 m jusqu'à la Lune ou une base spatiale minière où il sera exploité (on évite de le ramener jusqu'en orbite basse terrestre pour éviter toute catastrophe). Toutefois cette solution n'est envisageable que si les systèmes de capture des astéroïdes sont efficaces et les stations d'exploitation soient déjà installées sur la Lune ou sur un autre corps céleste. A long terme, ce système pourrait même être confié à des robots. On estime que l'extraction de la moitié de la masse d'un astéroïde d'un million de tonnes représenterait quelque 10000 tonnes de matière qu'il faudrait raffiner sur orbite. En 1977, on estimait que cela coûterait 240$/kg (~1180$ en 2022). Le coût d'une telle mission reviendrait à 31 milliards de dollars (152 milliards de dollars en 2022), y compris la recherche et le développement. Par comparaison, sur Terre la même opération et en tenant compte du transport reviendrait au prix exorbitant de... 663 milliards de dollars (3260 milliards de dollars en 2022) ! Comme on le voit, l'exploitation des astéroïdes à grande échelle est très rentable. On en reparlera dans quelques décennies. Vers la création de réserves naturelles dans le système solaire ? Nous avons décrits dans d'autres articles consacrés à l'écologie et au développement durable quelques-uns des impacts souvent négatifs des activités humaines sur la biosphère et notamment les conséquences de l'exploitation inconsidérée des ressources naturelles pour le profit immédiat de quelques-uns. Même des réserves naturelles, lorsqu'elles sont mal gérées peuvent subir une trop forte pression touristique ou faire l'objet d'exploitations clandestines ou de braconnage qui menacent la survie des espèces et de leurs biotopes (les biocénoses). D'un point de vue général, on constate donc que depuis des milliers d'années, chaque fois que l'homme découvre une terre vierge, il l'exploite jusqu'au dernier filon avec le risque qu'un jour ou l'autre elle soit polluée, laissant des terres stériles ou toxiques derrière lui ou que la ressource disparaisse au détriment des générations futures.
Sachant cela, dans un article publié dans la revue "Acta Astronautica" en 2019, Martin Elvis du CfA Harvard-Smithonian et Tony Milligan du King's College de Londres, ont tenté de répondre à la question : "Quelle part du système solaire devrions-nous réserver à la nature sauvage ?" Autrement dit, pour éviter ce qui est arrivé à notre planète et mettre en danger la survie des générations futures, avant même de commencer à exploitation les astéroïdes et les autres astres du système solaire, ne faudrait-il pas fixer des règles d'exploitation avant qu'il ne soit trop tard ? Les chercheurs ont calculé que "de manière générale, le développement devrait être limité à un huitième du système solaire, le reste étant réservé." Selon les auteurs, le "principe du huitième" à l'échelle du système solaire est beaucoup moins restrictif qu'il paraît. Un huitième du fer contenu dans la Ceinture d'astéroïdes représente plus d'un million de fois toutes les réserves[3] de minerai de fer actuellement estimées sur la Terre et pourrait suffire pendant plusieurs siècles. Mais une certaine limite est nécessaire en raison des problèmes liés à la croissance exponentielle.
La difficulté est que personne n'est en mesure d'estimer le rythme d'une croissance économique future. Il est donc impossible d'estimer les limites d'une ressource et difficile de prévoir celles d'une réserve minière par exemple avant les trois dernières périodes durant lesquelles le taux d'exploitation double. Ces trois doublement font passer l'utilisation successivement du huitième au quart, puis au demi pour finalement atteindre le seuil d'épuisement. La croissance démographique et le changement du climat sont des exemples de croissance exponentielle non contrôlée. Chacun de nous excerce une pression sur les réserves disponibles et donc sur les ressources. Chacun de ces problèmes est un problème reconnu que nous souhaiterions contrôler, mais les tentatives d'accord au sommet pour y parvenir ont toujours montré que même à un stade relativement avancé de leur développement, personne n'a pris de décision encourageante, la disparition de la forêt primaire par exemple subissant les tristes conséquences du désintérêt de la plupart des chefs d'États (cf. les rapports du GIEC et autres ONG et le peu de résultats des conférences COP). Les chercheurs proposent donc le "principe du huitième" : "notre capacité limitée à anticiper les problèmes jusqu'à un stade avancé suggère que nous devrions nous fixer un "déclencheur" qui nous laisse au moins trois fois le temps de marge de manœuvre. Ce système d'alarme serait déclenché lorsque 1/8e des réserves du système solaire serait sur le point d'être exploité. A partir de plusieurs taux de croissance présumés, l'échelle de temps sur laquelle nous pourrions nous aventurer est longue. Avec un taux de croissance de l’économie de l'espace de 3.5%, comparable à celui de l’utilisation du fer depuis le début de la révolution industrielle jusqu’à présent, le seuil du 1/8e serait atteint après 400 ans. À ce stade, le temps de doublement de 20 ans associé à un taux de croissance de 3.5% signifierait qu'il ne resterait que 60 ans pour permettre au système économique de passer à de nouvelles conditions de "régime stable"." Les auteurs soulignent que la raison pour laquelle ils ont adopté le principe du huitième est qu'il peut être beaucoup plus facile de mettre en œuvre les restrictions de principe dès le début, plutôt que plus tard, lorsque des intérêts acquis et divergents sont apparus dans des conditions de négociations réduites. Ceci dit, il reste beaucoup de questions éthiques et pratiques à résoudre avant d'envisager un amendement du Traité de l'Espace et de l'Accord de l'Espace (ce dernier décrivant l'exploitation des astéroïdes). Vu la lenteur des progrès technologiques et des décisions législatives, il n'est pas certain que les générations actuelles verront la transcription de ces règles éthiques dans la législation spatiale et mieux encore si les instances gouvernementales les respecteront car la vie dans l'espace est tout de même loin des préoccupations des "Terriens". Mais on peut rêver. Pour plus d'informations Sur Internet Imagegallery of asteroids, comets, KBOs and other small bodies, The Planetary Society Asterank (la valeur des astéroïdes) Fxtop (conversion de devises et actualisation) Mining The Sky, John S. Lewis, Basic Books, 1997 Space Resources, John S. Lewis, Columbia University Press, 1987. Retour aux astéroïdes et autres petits corps
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