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L'effet de serre

La fonte des glaces en Arctique. Doc Alamy.

Le déréglement du thermostat planétaire (III)

3. Le méthane

Le méthane (CH4) ou "gaz des marais", contribue à raison de 20% des gaz à effet de serre de longue durée d'origine anthropique. La moitié des émissions de méthane sont artificielles.

Comme le gaz carbonique, le méthane peut être d'origine naturelle (émission des zones humides naturelles), animale (fermentation entérique) ou bien humaine, lorsqu'il provient de l'agriculture (rizières), de l'extraction de gaz ou des prairies. 65% du méthane provient de sources naturelles et 30% des océans. Notons qu'en Occident et notamment au Royaume-Uni, le méthane émis par l'élevage intensif des vaches produit 3% des gaz à effet de serre.

En 2000, les émissions de méthane en Russie représentaient 465548.50 kT d'équivalent CO2. En 2010, on dépassa les 533546 kT et cela augmente entre 16000-28000 kT chaque année. C'est la Chine qui détient le record d'émission de méthane avec 1.64 million de kT d'équivalent CO2 en 2010, suivi par les Etats-Unis avec 635108.20 kT.

Selon une étude publiée dans la revue "Science" en 2022, sur base des mesures effectuées par l'instrument TROPOMI du satellite Copernicus Sentinel-5 de l'ESA et des modélisations, les chercheurs ont constaté que les industries des hydrocarbures libèrent jusqu'à 12% des émissions globales de méthane, ce qui représentent 8 millions de tonnes de méthane par an, bien plus que les précédentes estimations

Depuis les débuts de l'ère industrielle, la concentration de méthane atmosphérique est passée de 0.65 à 1.75 ppm (parties par million en volume) et présente aujourd'hui une valeur qui n'a jamais été atteinte au cours des 420000 années précédentes. On estime que d'ici 2100 la concentration de méthane devrait doubler (3 ppm). En effet, il existerait un risque de dégagement important de méthane piégé sous forme d'hydrates dans les sédiments sous-marins comme dans le permafrost alors que ce gaz possède un potentiel d'effet de serre de 20 à 80 fois plus puissant que le CO2 selon l'échelle de temps. Sa libération dans l'atmosphère représente donc une véritable bombe climatique à retardement.

A voir : Underground methane bubbles (Russia)

Emissions de méthane dans le monde, Actualitix

A lire : L'Arctique: une bombe à retardement de méthane (sur le blog, 2008)

4. L'ozone

L'ozone (O3) est le résultat d'un processus photochimique. On estime que 10% de l'ozone troposphérique provient de la stratosphère. Cette couche d'ozone se situe vers 20 km d'altitude et protège le monde vivant contre les particules énergétiques et notamment les UV solaires. Les 90% restants se forment à proximité du sol à partir des émissions d'oxyde d'azote, du monoxyde de carbone et du radical OH qui jouent tous un rôle important dans le processus de formation liant l'eau ou l'oxygène et le rayonnement ultraviolet solaire. Sa formation dans les basses couches dépend également des sources de composés volatils (hydrocarbures, composés organiques, solvants, etc). L'abondance de l'ozone est donc étroitement liée aux activités industrielles et agricoles ainsi qu'à la circulation automobile.

Mécanisme de destruction de la couche d'ozone sous l'effet du chlore composant les CFC et des UV solaires.

Notons qu'il existe également une couche d'ozone mésophérique située juste au-dessus de la stratosphère et qui s'étend entre 60 et 100 km d'altitude. Sa densité et son évolution dépendent du vent solaire mais également des rayons cosmiques (cf. les aurores à protons).

De nos jours, durant les périodes caniculaires ou lorsqu'un anticyclone stagne au-dessus des grandes villes, la pollution par l'ozone ou par les oxydes d'azote (NOX) dépasse régulièrement les seuils de tolérance et peut incommoder les personnes sensibles.

L'ozone possède des effets différents selon qu'il se situe dans la stratosphère ou dans la troposphère. Dans la stratosphère, l'ozone agit à la fois sur le rayonnement ultraviolet solaire et sur le rayonnement infrarouge, provoquant un refroidissement de la surface du globe. A l'inverse, dans la troposphère, il contribue à l'effet de serre en réchauffement l'atmosphère supérieure.

Quel est le lien encore la couche d'ozone et les CFC ? Les chlorofluorocarbures ou CFC-11 (dont le trichlorofluorométhane CCl3F ou fréon 11) sont des molécules composées d'atomes de carbone liés à des atomes de chlore (à ne pas confondre avec la chlorine qui est une molécule aromatique) et de fluor, des éléments halogènes qui rendent la molécule volatile mais très peu réactive. De tels produits chimiques qui s'évaporent facilement sont très pratiques et souvent utilisés dans les sprays (aérosols) moussants comme les extincteurs et les appareils de refroidissement comme les réfrigérateurs et les climatiseurs.

A l'origine les appareils utilisaient de l'ammoniac qui était très toxique. Il fut remplacé par le butane mais qui a l'inconvénient d'être très inflammable. Pour remédier à ces deux problèmes, les ingénieurs chimistes proposèrent d'utiliser les CFC qui ne sont ni inflammables et trop peu peu réactifs pour être toxiques. Ils furent même populaires après la Seconde guerre mondiale car ils permirent de fabriquer les premiers insecticides en spray (1941) puis furent appliqués à toute l'industrie y compris les parfums et cosmétiques.

Un trou d'ozone au-dessus de l'Antarctique

Dans les années 1970, les scientifiques découvrirent que les CFC et notamment le chlore libéré dans l'atmosphère était en train de détruire la couche d'ozone au dessus de l'Antarctique. Or cette couche d'ozone nous protège des ultraviolets solaires. En effet, les CFC ont une durée de vie d'environ 100 ans voire largement supérieure pour les HCFC. Les CFC furent donc bannis de l'industrie en 1987 lors du Protocole de Montréal signé par les représentants de 24 pays puis finalement de 196 pays en 2009 où les CFC furent définitivement interdits.

Le remplacement des CFC fut un défi y compris sur le plan sanitaire car certaines molécules de substitution étaient cancérogènes ou provoquaient d'autres problèmes. Aujourd'hui, il existe des centaines de solutions alternatives et en théorie plus personne n'utilise de CFC.

A voir : Ozone Layer recoverering Slowly (1979-2013), NASA, 2016

Big ozone holes headed for extinction by 2040, NASA, 2015

Variation mensuelle moyenne du trou d'ozone au-dessus de l'Antarctique entre 1979 et 2014. Cliquez sur l'image pour lancer l'animation sur 35 ans. Selon cette tendance, il faudrait patienter jusqu'au milieu du XXIe siècle pour qu'il disparaisse. Mais pour une raison inconnue et malgré l'interdiction des CFC, depuis 2010 le trou d'ozone recommence à s'étendre. Document NASA/GSFC/TOMS et Climate Central.

Depuis 1987, le trou d'ozone au-dessus du pôle Sud a graduellement diminué puis la concentration de CFC s'est stabilisée à partir de 2000 et entre ~2004 et 2013 le trou d'ozone ne s'est plus résorbé mais la concentration d'ozone augmenta comme le montre l'animation ci-dessus préparée par la NASA résumant son évolution entre 1979 et 2013. Toutefois, pendant cette période on constata que le trou d'ozone se reformait saisonnièrement.

En 2015, comme le montre la vidéo ci-dessus, on pensait que le trou d'ozone se résorbait mais les données du satellite Copernicus Sentinel-5P de l'ESA recueillies en 2020 indiquent qu'il est plus grand que jamais. Au 2 octobre 2020, il occupait 25 millions de km2 soit autant qu'en 2018 et 2015.

A voir : Ozone Hole 2020, ESA

 

Un trou d'ozone au pôle Nord

En 2004, dans un article publié dans la revue "Geophysical Research Letters", l'équipe de Markus Rex de l'Institut Wegener en Allemagne avertit la communauté scientifique qu'un trou d'ozone s'était également formé au pôle Nord, information qui ne sera médiatisée qu'en 2011 dans la revue "Nature" et le blog du National Geographic parmi d'autres. Depuis, comme on le voit ci-dessous, les mesures de la NOAA ont confirmé qu'en 2011 entre 18 et 20 km d'altitude, 80% de l'ozone stratosphérique de l'Arctique furent détruits vers la fin de l'hiver (en mars). L'effet serait plus marqué à cette époque de l'année en raison du froid et de la présence des nuages stratosphériques.

A gauche, évolution du trou  d'ozone au-dessus de l'Arctique entre janvier et mars 2011. Cartographie basées sur les données UV et IR TOAST de la NOAA. A droite, le trou d'ozone arctique le 9 avril 2020. Il s'est accentué. Cliquez ici pour visualier l'animation publiée sur Twitter. Documents Dan Pisut/NOAA et Copernicus/ECMWF.

Mais comme on le voit ci-dessous, les résultats d'une nouvelle étude publiée dans la revue "Nature" en 2018 par Stephen A. Montzka de la NOAA et ses collègues montra que les CFC-11 ont à nouveau augmenté dans la haute atmosphère de l'hémisphère sud et le trou d'ozone s'agrandit de nouveau. Début 2020, ce trou d'ozone arctique s'était agrandi. Mais en raison de la scission du vortex polaire, de l'air riche en ozone pu en partie combler cette perte.

L'amincement de la couche d'ozone est plus important aux latitudes moyennes (sous les tropiques), là où la population est la plus nombreuse. Selon les chercheurs, depuis 2012 quelque 13000 tonnes de CFC ont été émises dans l'atmosphère. C'est une quantité énorme qu'une seule entreprise ne peut pas produire bien que ce soit la source la plus probable.

Les chercheurs soupçonnent que les substances dites à très courte durée de vie ou VSLS contenant du chlore et du brome seraient responsables de la diminution de la concentration d'ozone. Mais actuellement, malgré tous les satellites de télédétection, la source de cette émission n'a pas été identifiée mais le mal persiste et le docteur répond aux abonnés absents.

A consulter : Ozone Watch, NASA/GSFC

A gauche, étendue du trou d'ozone antarctique en 2020 comparée à 2017 et 1988. Entre 2005 et 2016, le trou d'ozone s'est réduit de 20% et semblait disparaître à certaines saisons. Mais depuis quelques années les émissions de CFC ont réaugmenté pour une raison inconnue, agrandissant de nouveau le trou d'ozone. A droite, les éléments chimiques (en jaune) pris dans la circulation du vortex polaire sont à l'origine de l'amincissement de la couche d'ozone aux latitudes tropicales et au-dessus de l'Antarctique. Depuis 2011, un trou d'ozone a également été observé au-dessus du pôle Nord. Documents NASA/GSFC.

Un trou d'ozone dans la zone tropicale

En 2022, Qing-Bin Lu de l'Université de Waterloo au Canada a découvert un trou d'ozone dans la zone tropicale (30°N-30°S) qui est sept fois plus grand que celui existant au-dessus de l'Antarctique qui nous inquiète depuis des décennies. Lu fut surpris de constater qu'il existe depuis les années 1980.

En utilisant la définition conventionnelle de 80% d'appauvrissement de l'ozone, aucun trou ne serait apparu sous les tropiques, même si les valeurs tombaient à 60-65%. Ainsi, Lu modifia la définition et appelle un "trou" une perte de 25% ou plus d'ozone atmosphérique. Selon cette nouvelle définition, il existe également un trou dans la couche d'ozone au-dessus de l'Arctique au printemps.

Selon Lu, "Il faut également remarquer que la distribution de l'ozone au-dessus des tropiques est très inégale en altitude. Cela signifie que les changements dans les valeurs absolues de l'ozone ne reflètent pas simplement le degré d'appauvrissement de l'ozone par un mécanisme physique ; il y a des pertes d'ozone plus importantes en valeur absolue à des altitudes plus élevées dans la stratosphère tropicale."

Les variations annuelles moyennes décennales de l'ozone dans la zone tropicale (gauche), les différences climatologiques annuelles de l'ozone (centre) et les distributions décennales moyennes de la température dans la zone tropicale (droite) révèlent l'étendue du "nouveau" trou d'ozone. Document Q.-B.Lu (2022).

En 2021, Lu suggéra que le mécanisme de réaction des électrons induite par les rayons cosmiques (CRE) qui est responsable de l'appauvrissement de la couche d'ozone pourrait complètement détruire l'ozone dans la basse stratosphère (cf. Q.-B. Lu, 1999). Parallèlement à d'autres observations telles que la présence d'un "trou de température" dans la région et la distribution spatiale de produits chimiques comme les CFC, Lu a émis l'hypothèse qu'il y avait un appauvrissement plus efficace de la couche d'ozone sous les tropiques.

Lu a comparé les changements des niveaux d'ozone des années 2000 à ceux des années 1960 et 1980 et découvrit qu'il s'agissait d'un trou d'ozone permanent et important sous les tropiques qui peut impacter 50% de la population mondiale. Selon Lu, "L'appauvrissement de la couche d'ozone peut entraîner une augmentation du rayonnement UV au niveau du sol, ce qui peut augmenter le risque de cancer de la peau et de cataractes chez l'être humain, ainsi qu'affaiblir le système immunitaire humain, diminuer la productivité agricole et affecter négativement les organismes et les écosystèmes aquatiques sensibles."

Etant donné que les régions tropicales constituent la moitié de la surface de la planète et abritent la moitié de la population mondiale, ce trou d'ozone est assez inquiétant. Le qualifiant de "grande préoccupation mondiale", Lu a appelé à "des études approfondies sur l'appauvrissement de la couche d'ozone, le changement du rayonnement UV, l'augmentation des risques de cancer et d'autres effets négatifs sur la santé et les écosystèmes dans les régions tropicales."

5. Le monoxyde de carbone

Le monoxyde de carbone (CO) provient de la combustion des énergies fossiles. Sa présence est liée à l'industrialisation et la croissance démographique. Il est deux fois plus concentré dans l'hémisphère nord que dans l'hémisphère sud. On le retrouve à des concentrations toxiques dans les tunnels lors des embouteillages et dans les parkings souterrains.

Son influence sur l'effet de serre est indirect. Il faut 20 fois plus de monoxyde de carbone que de méthane pour produire un effet de serre similaire. Il n'est pas surprenant de constater que sa concentration a augmenté depuis la seconde moitié du XXe siècle.

6. Les oxydes d'azote

Les oxydes d'azote (NOX) ont également une influence indirecte sur l'effet de serre et se forment à partir de deux gaz nitreux : le NO et le NO2, du monoxyde de carbone (CO) et des composés organiques volatils (COV).

L'OMS recommande de ne pas dépasser 40 microgrammes d'oxyde d'azote/litre. Or dans les fumées d'échappement des véhicules on mesure régulièrement des taux supérieurs à 100 microgrammes/litre et même plus de 300 microgrammes/litre dans certaines voitures diesel au démarrage. Par comparaison, on mesure des taux compris entre 40-100 microgrammes/litre dans la fumée d'échappement de la plupart des camions.

Sachant que cette substance est à l'origine de nombreuses maladies y compris des cancers, certaines ONG ont suggéré à l'OMS de baisser ce taux d'oxyde d'azote à 20 microgrammes/litre, ce qui forcera l'industrie automobile à soit installer des systèmes de filtration plus efficaces (Renault par exemple reconnaît que son système catalytique ne fonctionne correctement qu'entre 18 et 30°C) soit forcera les clients à changer de véhicule et de carburant (on revient à l'essence ou on passe à l'hybride ou au tout électrique).

Polluants atmosphériques : European Air Quality Index

Concentration atmosphérique : SO2 - PM2.5 - CO - NO2, Windy

Global

(NOAA)

Etats-Unis

(Inter-agences)

France

(Airparif)

Québec

(Gouv.du Québec)

7. Le dioxyde d'azote

Le dioxyde d'azote (NO2) est autant un polluant qu'un poison violent. De couleur brun-orangé, il présente une odeur âcre et piquante. Dérivé de la production industrielle de l'acide nitrique (HNO3) il est également produit par les moteurs à explosion et les centrales thermiques. Combiné à l'ozone troposphérique, il forme des nitrates qui se dissolvent dans l'eau, conduisant à l'eutrophisation (l'excès de nutriments) des eaux.

Ces polluants affectent la durée de vie du méthane et d'autres gaz à effet de serre et leur concentration fait l'objet d'une surveillance quotidienne. Comme le montre l'image présentée ci-dessous, le dioxyde d'azote se concentre dans les grandes villes industrielles (> 1 million d'habitants). Ce gaz est l'une des principales sources de mortalité dans nos pays et contribue aux pics d'ozone. L'utilisation des pots d'échappements catalytiques devrait réduire ses émissions.

A voir : FM15 Press Conference Global air quality - The impacts of people and cities

Concentration du dioxyde d'azote troposphérique (NO2) entre 2005 et 2014 mesuré par le satellite AURA de la NASA autour de 195 villes à travers le monde. Document NASA-AURA.

A propos du "dieselgate"

Rappelons que Volkswagen fit l'objet d'un scandale en septembre 2015 car son directeur de l'époque Martin Winterkorn (qui démissionna suite à ce scandale) prétendait que ses moteurs diesel étaient propres alors qu'en réalité ils émettaient 30 fois plus de dioxyde d'azote que le seuil toléré aux Etats-Unis (seuls les modèles ne respectant pas la norme Euro 6 étaient concernés comme la Passat 1.6 TD. A l'inverse, la Golf VII de 2 litres est "propre").

En fait, selon le rapport du 14 septembre 2015 de la fédération européenne Transport & Environnement, 90% des véhicules diesel ne respectent pas la norme Euro 6 ! Selon un bilan établi en 2021 (cf. RTBF), parmi les marques concernées par le "dieselgate" il y a Audi, BMW, Citroën, Daimler (Mercedes), Fiat-Chrysler, Jeep, Mitsubishi, Hyundai, Nissan, Opel, Peugeot, Porsche, Renault, Seat, Skoda et Volvo (même Bosch qui n'était pas directement inculpé s'est senti obligé de payer sa part de dédommagement). Selon les "experts", BMW était l'entreprise européenne qui faisait le plus d'efforts dans ce domaine... pour frauder ! Face à ces difficultés techniques, l'intérêt des véhicules "verts" s'en trouve renforcé.

8. Le protoxyde d'azote

Le protoxyde d'azote (N2O) ou oxyde nitreux contribue à raison d'environ 6% du total des gaz à effet de serre. Environ 40% de ce gaz est d'origine anthropique et représente actuellement selon l'OMS une pollution concentrée à raison de 323 ppm (parties par milliard en volume).

9. Les aérosols FC

Les aérosols, fréon et autres halocarbures (hydrocarbure contenant au moins un halogène comme les CFC et PFC) contribuent à raison de 14% de l'effet de serre d'origine anthropique et affectent également l'effet de serre.

Leur effet n'est pas fonction de leur abondance dans l'atmosphère, mais de l'importance des transformations physico-chimiques qu'ils subissent. Ainsi les aérosols provoquent un refroidissement de la troposphère soit par réfléchissement du rayonnement solaire (effet direct), soit en favorisant la réflectivité des nuageux en y augmentant le nombre de gouttelettes d'eau (effet indirect). C'est l'emploi des CFC notamment qui détruit la couche d'ozone stratosphérique et avec elle notre protection naturelle contre les rayonnements UV.

10. Le chloroforme

Il s'agit d'un gaz incolore et inodore, de formule chimique CHCl3, notamment produit lors de la fabrication du Téflon et utilisé comme désinfectant pour la peau (on ne l'utilise plus comme anesthésiant). Selon une étude publiée en 2018 par Xuekun Fang du MIT et ses collègues dans la revue "Nature geoscience", le chloroforme est connu pour son effet de serre mais jusqu'à présent ses émissions étaient trop faibles pour avoir un impact significatif. En effet, si les CFC peuvent avoir une durée de vie de 100 ans, le chloroforme est détruit en ~150 jours. Il a donc été exclu du Protocole de Montréal comme toutes les autres substances à très courte vie (VSLS). Toutefois, selon les chercheurs en raison d'une augmentation du taux d'émission du chloroforme, la reconstitution de la couche d'ozone pourrait être retardée de 4 à 8 ans par les VSLS.

A gauche, évolution du nuage de chloroforme au-dessus de l'est de l'Asie en 2011. Cliquez sur l'image pour lancer l'animation (.GIF de 1.8 MB). Documents X.Fang et al./MIT. A droite, représentation schématique des anneaux tropicaux d'halogènes atomiques (VSLS dérivés du brome et de l'iode) à deux heures différentes de la journée. Notez que les anneaux Br et I sont imbriqués en altitude (11–17 km pour l’iode et 15–19 km pour le brome) mais ont été intentionnellement séparés par clarté. Document A.Saiz-Lopez et R.P.Fernandez (2015).

Selon les chercheurs, entre 2010 et 2015, les émissions de chloroforme sont passées de 270 kilotonnes à 324 kilotonnes soit une augmentation de près de 17%. Deux régions sont particulièrement affectées, Hateruma au Japon et Gosan en Corée du Sud. La source responsable de ces émissions serait située dans l'est de la Chine fortement industrialisée. La dispersion de ce gaz est accentuée par la mousson et le passage des typhons qui favorisent sa dispersion jusqu'à la stratosphère où il se dégrade en chlore et détruit l'ozone sous l'effet des UV solaires.

Tôt ou tard et le plus tôt sera le mieux, il sera nécessaire d'interdire tous les VSLS, y compris le dichlorométhane (CH2Cl2) ou R30, un solvant industriel qui détériore également la couche d'ozone.

Sans mesure de contrôle, dans les 50 à 100 prochaines années, ces gaz anthropiques devraient avoir un effet de rétention de la chaleur des plus néfastes. Dans le pire scénario, en termes de forçage radiatif, autrement dit de rayonnement d'énergie de la Terre, celui-ci augmenterait de 8 W/m2 en 2100. Dans un scénario optimiste, si la concentration des gaz à effet de serre est stabilisée dans les années à venir, avec une concentration de gaz carbonique de 500 ppm et en tenant compte de l’ensemble des composés, le forçage radiatif supplémentaire serait de 3 W/m2, portant le rayonnement radiatif moyen de la Terre à 393 W/m2.

L'impact des appareils connectés

Vous possédez quasi certainement un smartphone, peut-être une TV connectée, un ordinateur, un GPS et peut-être des appareils électroménagers (frigo, aspirateur, etc), des appareils domestiques (radio-réveil, APN, etc), des accessoires (casque, montre, etc) et même une voiture ou une moto connectée. Selon le Gardner Group, en 2013 on dénombrait 9 milliards d'appareils connectés dont 6 milliards de mobiles. En 2019, 4.1 milliards d'habitants possédaient 39 milliards d'appareils connectés. En 2025, il y aura 48 milliards d'appareils connectés.

Selon une étude publiée en 2019 par GreenIT, en 2010 l'ensemble des appareils connectés contribuaient à 2.5% de l'effet de serre. En 2025, ils contribueront à 5.5% de l'effet de serre. A court terme, il faudra donc également lutter contre cette "pollution numérique". Plusieurs solutions permettent sinon de réduire du moins de limiter l'augmentation de cette pollution : il faut par exemple éviter de se suréquiper inutilement, améliorer l'autonomie des batteries, allonger la durée de la garantie légale, allonger la durée de vie des appareils, bannir l'obsolescence programmée, reconditionner les appareils usagés, améliorer le processus de recyclage, etc.

Conséquences d'un emballement de l'effet de serre

L'idée d'un emballement de l'effet de serre n'est pas nouvelle. Nous connaissons l'effet que cela peut produire sur une planète en regardant le climat de Vénus dont la surface est devenue stérile, brûlante, sous haute pression et l'atmosphère lourde et opaque chargée de gaz toxiques.

Une planète peut évoluer d'un état tempéré comme sur Terre à un véritable enfer, avec des températures en surface supérieures à 1000°C. Comment ? Par la seule augmentation de la vapeur d'eau décrite précédemment. La vapeur d'eau empêche le rayonnement solaire absorbé par la Terre d'être réémis vers l'espace sous forme de rayonnement thermique; elle retient la chaleur comme une couverture imperméable.

Sur Terre, jusqu'à présent l'effet de serre a trouvé un juste équilibre propice à la vie. Sans effet de serre, la Terre aurait une température moyenne négative, ressemblant à une boule de glace hostile à la vie. A l'inverse, un effet de serre trop important augmente l'évaporation des océans, et donc la quantité de vapeur d'eau dans l'atmosphère. Il existe un seuil critique pour la quantité de vapeur d'eau, au-delà duquel la planète ne peut plus se refroidir. A partir de là, c'est l'emballement jusqu'à ce que les océans finissent par s'évaporer complètement. Selon des simulations, cette vapeur d'eau formerait une atmosphère 270 fois plus massive que notre atmosphère actuelle, alors que les océans ne représentent que 0.02% de la masse de la Terre (cf. F.Seslis et al., 2023). Arrivé à ce stade, la température moyenne du globe atteindrait plusieurs centaines de degrés !

Dans un article publié dans la revue "Astronomy & Astrophysics" en 2023, l'équipe de Guillaume Chaverot de l'Université de Genève (UNIGE) et membre du Centre National de Compétence en Recherche (NCCR) PlanetS, avec le soutien du CNRS, réussit à simuler pour la première fois l'intégralité du processus d'un effet de serre incontrôlable pouvant transformer le climat d'une planète idyllique et parfaite pour la vie, en un endroit inhopitalier et hostile.

Pour cet exercice, les auteurs ont simulé le climat de deux planètes hypothétiques habitables, un monde aquatique et un monde avec des continents, tous deux avec des pressions partielles variables d'azote (entre 0.1 et 10 bars) et avec et sans dioxyde de carbone dans leur atmosphère. Ils ont ensuite suivi l'évolution de l'émission thermique lors de l'apparition de l'effet de serre. Les résultats sont présentés ci-dessous.

A gauche, évolution de l'émission thermique lors de l'apparition de l'effet de serre. OLR = Outgoing Longwave Radiation (Rayonnement sortant d'ondes longues), ASR = Absorbed Stellar Radiation (Rayonnement Stellaire Absorbé) et 300 K = 27°C. Au centre, émission thermique et flux absorbé en fonction de la température moyenne de surface. Les points noirs sont les états stables et la ligne continue bleue est l'effet de serre incontrôlable pour une insolation de 400 W/m². A droite, carte de l'évolution du profil vertical moyen de la teneur totale en nuage d'eau (liquide + glace) en fonction de la température globale de surface pendant la phase d'évaporation. La configuration de la simulation est un monde aquatique avec 1 bar d'azote sans dioxyde de carbone. Consultez l'article académique de G.Chaverot et al. (2023) pour plus de détails.

Selon Martin Turbet du CNRS et coauteur de cet article, "Jusqu'à présent, d'autres études clés en climatologie se sont concentrées uniquement soit sur l'état tempéré avant l'emballement, soit sur l'état habitable après l'emballement. C'est la première fois qu'une équipe étudie la transition elle-même avec un modèle climatique global en 3D et vérifie comment le climat et l'atmosphère évoluent au cours de ce processus."

L'un des objectifs climatiques actuels est de limiter le réchauffement du climat induit par les gaz à effet de serre, à seulement 1.5° d'ici 2050. L'une des questions étudiées par les auteurs est de déterminer si les gaz à effet de serre peuvent déclencher le processus d'emballement, comme pourrait le faire une légère augmentation de la luminosité du Soleil. Si tel est le cas, la prochaine question sera de déterminer si les températures seuils sont les mêmes pour les deux processus.

A l'aide de leurs nouveaux modèles climatiques, les auteurs ont calculé qu'une très faible augmentation du rayonnement solaire - conduisant à une augmentation de la température globale de la Terre de quelques dizaines de degrés seulement - suffirait à déclencher ce processus d'emballement irréversible et rendre la Terre aussi inhospitalière que Vénus.

L'un des points clés de l'étude décrit l'apparition d'une configuration nuageuse très particulière, augmentant l'effet d'emballement et rendant le processus irréversible comme illustré ci-dessous. Selon Chavrerot, "Dès le début de la transition, on peut observer des nuages très denses se développer dans la haute atmosphère. En effet, cette dernière ne présente plus l'inversion de température caractéristique de l'atmosphère terrestre et séparant ses deux couches principales : la troposphère et la stratosphère. La structure de l'atmosphère est profondément altérée." Ces changements importants conduisent à un effet de serre incontrôlable et très difficile à inverser.

Ci-dessus, carte latitude-longitude de la répartition des nuages (liquide + glace) pendant la phase d'évaporation. Les cartes ont été calculées dans le cadre héliocentrique pour un monde aquatique avec 1 bar d'azote sans dioxyde de carbone. Ci-dessous, évolution de la circulation des vents zonaux lors de l'emballement de l'effet de serre. Les valeurs positives représentent les vents d'est et les flèches représentent les vents verticaux et méridionaux moyennés sur 1 an. La première rangée représente l’évolution des vents pour la configuration du monde aquatique et la rangée du bas considère les continents terrestres, tous deux sans dioxyde de carbone. Le premier panneau de chaque rangée représente l’état stable le plus chaud obtenu pour les deux configurations considérées avec une insolation de 375 W/m². Les autres panneaux montrent l'évolution lors de l'emballement de l'effet de serre pour différentes températures. Les vitesses du vent correspondant à la longueur des flèches varient avec la température. Documents G.Chaverot et al. (2023).

En prenant un peu de recul et en examinant l'évolution de la température moyenne du globe et du niveau des océans, il faut bien constater que la Terre ne semble pas si loin de ce scénario apocalyptique. Selon Chavrerot, "En supposant que ce processus incontrôlable démarre sur Terre, une évaporation de seulement 10 mètres de la surface des océans entraînerait une augmentation de 1 bar de la pression atmosphérique au niveau du sol. En quelques centaines d’années seulement, nous atteindrions une température au sol supérieure à 500°C. Plus tard, on atteindrait même 273 bars de pression de surface et plus de 1500°C, alors que tous les océans finiraient par s'évaporer totalement."

Mais ne nous alarmons pas, même si la crise climatique que nous connaissons doit absolument être endiguée ! Pour atteindre le régime infernal décrit dans cette étude, il faut des éléments déclencheurs dont une hausse importante de la température moyenne du globe de plusieurs dizaines de degrés. Cela n'arrive pas en un siècle. En revanche, à présent que nous sommes informés des conséquences possibles, à travers nos actions nous avons encore la possibilité d'éviter le pire.

Notons que cette découverte est un élément clé pour l'étude du climat sur d'autres planètes, et en particulier sur les exoplanètes habitables afin d'évaluer leur potentiel à accueillir la vie. Pour Martin Tutbet du Laboratoire d'astrophysique de Bordeaux et coauteur de cet article, "Nous avons également étudié en parallèle comment cette configuration nuageuse pourrait créer une signature spécifique, ou "empreinte digitale", détectable lors de l'observation de l'atmosphère des exoplanètes. La prochaine génération d'instruments devrait pouvoir la détecter."

Le prochain objectif des auteurs est d'appliquer ce modèle à la Terre pour vérifier si cette tendance catastrophique se vérifie.

En guide de conclusion

Cela fait plus d'un siècle que nos dirigeants et les industriels connaissent les effets de la pollution de l'air mais ils ont préféré se voiler la face jusqu'aux années 2000, laissant leurs descendants résoudre les problèmes qu'ils avaient créés ! Si nous continuons à polluer l'air au taux actuel, il va de soi qu'en 2100 il est probable que la physionomie et le climat du monde ainsi que les écosystèmes marins seront très différents d'aujourd'hui.

Les jeunes ont donc de très bonnes raisons d'en vouloir aux politiciens et aux industriels qui ne prennent toujours pas les mesures nécessaires pour diminuer la pollution de l'air. Bien sûr quelques villes prennent des mesures mais elles sont soit appliquées à une toute petite échelle soit dans 10 ou 15 ans, histoire que tous les acteurs aient le temps de se préparer au changement, y compris financièrement.

Le XXe comme le XXIe siècle n'auront décidément pas apporté que de bonnes choses à l'humanité et seront probablement connus non pas pour les progrès technologiques mais pour avoir été à l'origine des plus grandes catastrophes écologiques et climatiques que connut l'humanité. Essayons de laisser à nos descendants une meilleure image de nous-mêmes. C'est dans ce contexte que l'Accord de Paris (COP21) est une avancée positive quoique théorique. Reste à confirmer cette bonne volonté des participants dans des actions concrètes et contraignantes. L'avenir sera juge.

Aux dernières nouvelles, si on en juge par les résultats des différentes COP (Conference of Parties) sur le changement climatique, la biodiversité et les systèmes alimentaires, parmi les 196 pays représentés certains n'ont pas la volonté de protéger la planète et de ce fait les avancées sont insuffisantes pour réduire l'effet de serre comme espéré... On reviendra sur les impacts climatiques d'ici 2050.

Pour plus d'informations

Sur ce site

L'après-Kyoto et les conférences sur le climat

Les impacts climatiques d'ici 2050

Recyclage et transformation du CO2

Les changements climatiques (les régions polaires)

La Terre, une planète fragile

Plaidoyer : quand la Terre tourne à l'envers

La météorologie

Sur Internet

Accord de Paris (COP21), UN, 2015

Le Protocole de Kyoto, Europa, 2002

European Air Quality Index

CO2 Daily

Concentration atmosphérique : SO2, CO, NO2, PM2.5, Poussière, Windy

Courbe de Keeling (Scripps)

Emissions de CO2 des transports en Europe, Planetoscope

Consommations et émissions des véhicules particuliers (PDF), ADEME, 2015

Conversion de litres de carburant en kilos et volume de CO2 (caculette) (caculette)

Consommation et émissions des véhicules, ADEME

État provisionnel sur le climat mondial 2022, OMM, 2022

Rapport sur le Climat 2018, OMM, 2019

Climate Change 2014 Synthesis Report Summary for Policymakers (PDF), IPCC

Ozone-Depleting Substances (ODSs) and Related Chemicals (PDF), WMO, 2010

Emissions de méthane dans le monde, Actualitix

Le dioxyde de carbone (PDF), J.Amouroux et al., 2012

What's Really Warming the World ?, Bloomberg

Global Carbon Project

Impacts of a Warming Arctic, ACIA

Ozone Watch, NASA/GSFC.

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