AstroDessin

Astronomie Amateur & Observation Visuelle

Eclipses de Soleil

Les films

Les éclipses totales de Soleil offrent les spectacles de la nature parmi les plus puissants qu'il soit possible de vivre. L'observateur devient un " terrien " en totale osmose avec le phénomène dont nul ne peut rester insensible, faisant remonter des émotions quasi primitives au regard de ce " Soleil mort ", monstre noir auréolé d'une folle chevelure. Pour avoir le privilège de les observer, il est nécessaire de se situer exactement au moment prévu sur son passage avec un ciel dégagé. Ces trois paramètres (calendrier, accessibilité, météo) imposent l'organisation de voyages aventureux plus ou moins lointains dont le phénomène lui-même devient la cerise sur le gâteau d'un périple inoubliable à la découverte de pays, de nature, de peuples et de cultures.
Ces films relatent quelques-unes de ces aventures.

Eclipse 2024

Formidable périple mexicain avec les copains, dont le prétexte était cette éclipse prometteuse du 8 avril. Prometteuse car de longue durée, 4mn27s à l'endroit choisi, qui plus est avec une activité solaire bien musclée et des statistiques météo en ces contrées tout autant prometteuses - mais qui ne se concrétisa pas à l'optimum, comme on va le voir. Voyage organisé de longue date avec comme approche sur la ligne de centralité de fuir le Texas, de ne pas tenter le nord de l'Amérique dont les prévisions n'étaient pas folichonnes, et d'envisager un périple hors des sentiers battu en Basse Californie où l'on observerait le phénomène de l'autre côté de la Mer de Cortes à Mazatlan - ou dans l'arrière pays si nécessaire - site quasi au maximum de durée avec les meilleurs statistiques météo.
Quinze jours auparavant, les premières prévisions météo montraient une dépression sur l'Amérique du Nord d'où s'enroulait une large trainée nuageuse se superposant diaboliquement avec la trajectoire de l'éclipse sur le continent. Celles-ci se confrimèrent jusqu'au jour J - à notre grand dam. C'est ainsi que la veille au soir, nous n'étions toujours pas déterminés à savoir où nous irons observer. Deux solution se présentaient, excluant la troisième qui était de rester sur la ville de Mazatlan : (A) aller vers le sud, le long du littoral pile sur la ligne de centralité, ce qui faisant gagner 10 secondes de totalité et nous écartait un peu de cette bande coquine de nuages d'altitude, (B) ou entrer dans les terres et gagner en altitude un peu avant Durango où une trouée semblait se dessiner - ce qui fut le cas. Aussi à l'aube faute d'avoir choisi, nous allâmes d'abord en A, découvrant un environnement de lagunes sauvages, mais avec un ciel perfectible qui nous fit prendre la décision de partir illico en B. C'est ainsi que par une route rapide, nous nous enfonçâmes dans l'arrière pays montagneux, jusqu'à être bloqués par une interminable queue de gros bahuts à l'arrêt pour cause d'accident et incendie dans un tunnel à quelques dizaines de kilomètres de là. Après un instant de sidération, nous la jouâmes à la mode mexicaine, à savoir remonter la file de camion à contresens jusqu'à l'une des rares bretelles d'accès, elle aussi prise à contre-sens, pour se sortir de ce pétrin. Mais de là, la route alternative pour se rendre à destination était bien plus longue et ne nous permettait plus d'arriver à temps, d'où la sage décision de rester sur place et s'installer tranquillement. Ainsi, dans un joli paysage montagneux planté de conifères, nous regardâmes avec quelques autres spectateurs le ciel se faire envahir de cirrus échevelés, mâtinés d'autres d'aspect pommelés, toutefois pas suffisamment denses pour masquer le Soleil, mais juste un peu chiants pour une observation optimale.
Pile à C1, soit 9h52mn38s, l'on observe la première morsure de la Lune sur la Soleil, l'émotion devient palpable, le tension monte, les commentaires vont bon train. A l'oculaire de la L80, je fais un dessin toutes les 20mn de l'avancé du phénomène, note la présence de deux groupes de tâches qui inexorablement se feront grignoter par l'avancée de la Lune. A T-10mn, l'on sent physiquement un changement de température, de luminosité et à l'oculaire, le Soleil n'est déjà plus qu'une jolie griffe. A T-5mn, on entre dans le vif du sujet où le temps semble s'emballer, ou être suspendu, ou en tout cas se déroule de façon étrange dans nos esprits totalement perturbés. L'on devient des animaux, on regarde hébétés de toute part les changements envahir l'espace, les couleurs, l'assombrissement progressif qui se fait de plus en plus intense, preuve d'une éclipse de longue durée. Le crépuscule s'affirme fortement comme je ne l'ai encore jamais perçu. T-1mn, l'on perçoit les premiers grains de Bailly, le découpage en petits tronçons aux extrémités de la très fine griffe du aux reliefs lunaires. Ça vacille, on perçoit déjà Vénus à droite, Jupiter plus loin à gauche, à T-30s on à la sensation de la présence de la couronne à l'opposé de la disparition éminente du Soleil, à T-10s je retire le filtre et regarde le monde environnant se faire engloutir par cette nuit si particulière, 9-8-7-6-5-4-3-2-1 TOPPPPPPPP !!!!! Hop punaise de-diou, quel spectacle !!!! Ça fuse de toute part, ça irradie, c'est fort, contrasté, étendu, magnifié par ces nuées d'altitude. En mode automatique, je trace les principales lignes de la couronne, le trait est bien tremblotant, il faut se faire violence, s'appliquer. Délicate besogne car l'assombrissement est tel que je ne vois pas bien mon travail sur le papier. L'observation à l'oculaire n'est pas aisée car le contraste est tout de même atténué par ces voiles d'altitude. Je note les nombreuses protus du côté où le Soleil vient de disparaitre quand déjà quelques coquines énormes pointent leur nez à l'opposé. Ces 4mn27s sont un vrai luxe pour le dessin et quelque part, je m'apercevrais par la suite qu'elle ne m'obligea pas à une concentration maximale, on peut dire que j'étais davantage en dilettante. Je prends mon temps, reviens sur un détail, repasse autre part, affirme un contour, une lueur. Déjà la sortie s'annonce avec comme fleurons deux magnifiques protus d'un rose électrique incomparable, 5-4-3-2-1 FINI !!!!! Une sortie grandiose avec quelques diamants joliment répartis entre ces deux flammes, un régal !

dessin eclipse de soleil 2024 dessin eclipse de soleil 2024

Eclipses 2023

L'éclipse du 14 octobre, observée au T250x50 de Pierre avec filtre Astrosolar ® lors du périple à La Palma avec les copains (voir Galaxies). Au coucher du Soleil, l'ombre grandissante passe de droite à gauche, montrant l'aspect irrégulier du relief Sélène. De belles tâches avec quelques facules, ici juste avant immersion dans les brumes lointaines proches de l'horizon.
Le spectacle continue de fort belle façon au fur et à mesure de la descente de l'astre. Aux jumelles 10x40, on note un très fort aplatissement du disque solaire et l'apparition d'un limbe très fortement altéré, présage d'un rayon vert. Las, les brumes lointaines sont bigrement opaques et Phébus ne disparaitra pas dans les flots, mais dans cette mélasse. Mais de cela, alors qu'il vire au rouge, qu'il se déforme d'incroyable façon, que sa base s'amenuise au point de le faire ressembler à un champignon atomique (il aurait fallu un troisième dessin des toutes dernières secondes pour mieux illustrer cela), voilà qu'apparait un très fin liseré d'un vert franc sur la quasi demie périphérie du limbe, truc que je n'avais encore jamais vu, et attesté par une photo de Pierre, quoique de façon bien plus ténue qu'en visuel. Au final, quoique partielle ici et annulaire en Amérique, charmante éclipse bien atypique !

dessin eclipse de soleil octobre 2023 dessin eclipse de soleil octobre 2023

Eclipse du 20 avril. Un formidable périple de quatre semaines sur la cote ouest australienne, de Perth jusqu'à Exmouth, seule terre où passera cette éclipse mixte, ici totale d'une durée de 62 secondes. Bien que très courte, celle-ci promet du très grand spectacle avec une activité solaire au maximum et une configuration avec des disques solaire et lunaire quasi de taille apparente identique, ce qui permettra une vision totale de la chromosphère. Ces promesses furent tenues au-delà des plus folles espérances : deux protubérances majeures, une basse couronne échevelée particulièrement texturée.
J'observe le premier contact à la seconde près,c'est parti, c'est le bonheur, que la fête commence ! Observation à la L80.
A dix minutes de la totalité, on commence à sentir que quelque chose se passe, l'étrange crépuscule s'invite timidement.
A T-3 minutes, je déclenche le compte à rebours, il est temps de gagner le poste d'observation pour le grand rendez-vous cosmique, on entre dans le vif du sujet comme on se met à table pour un fin diner. On note que le crépuscule s'installant n'est pas très profond, témoignage visible de cette éclipse de courte durée, dont la bande de totalité ne fait que quarante kilomètres de diamètre. Le croissant diminue et ne devient qu'un mince filet de lumière, puis il s'étiole de part et d'autre en chapelets de grains de Bailly. Le filtre est ôté, la lueur vacille dans l'oculaire et PAF ! Le grand interrupteur céleste bascule brutalement, la totalité commence ! A l'oculaire, je n'ai jamais vu un tel spectacle : généralement, la chromosphère et les détails apparaissent en premier lieu sur le côté du limbe où le Soleil vient de disparaitre. Et là c'est le contraire, ou disons que c'est totalement différent : la chromosphère parée de ce rose électrique si particulier orne l'intégralité de la périphérie et le spectacle est hors norme à l'opposé avec deux protubérances majeures, l'une comme un gros jet vertical, l'autre évoquant une queue de baleine dont l'une des extrémités se prolonge en une vaste arche. La basse couronne n'est pas en reste, complexe et toute fofolle avec de nombreux plumets irradiant de toutes parts. Ca dépasse toutes mes espérances et il me faut un certain temps avant de revenir sur la planche à dessin, le compte à rebours annonçant implacablement dix secondes écoulées -déjà... En vingt secondes, j'esquisse au crayon vert cette chromosphère sophistiqué. Trente secondes, changement de crayon pour le HB, il est temps de passer à la basse couronne et ses trop nombreux plumets, plumets s'exacerbant au fil du temps avec la sortie prochaine du Soleil. Dans le quart haut à gauche, voilà qu'ils prennent une texture particulièrement filamenteuse. Dix-neuf-huit... Punaise, je n'aurais pas le temps d'en faire le tour, j'abandonne définitivement les crayons et m'absorbe dans la mémorisation de cette extraordinaire fleur céleste... quatre- trois- deux et va fanculo - c'est terminé, le temps de beugler ma joie, de contempler cette ombre fuyant dans l'océan, remarquer la présence de Vénus et de Jupiter toute proche, et de replonger illico sur le papier, couchant l'esquisse des choses fraichement en mémoire, puis apportant le rendu dans un travail de finition.
A noter la rotation de champ du Soleil durant le phénomène, particulièrement visible avec ce dernier dessin proche du dernier contact. Le dessin suivant a été réalisé 48h avant, histoire de prendre ses repères.
Une vidéo de cette aventure est disponible ici.

dessin eclipse de soleil 2023 dessin eclipse de soleil 2023
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Eclipse 2021

En vadrouille dans le Cotentin, je me réveille près du cap de la Hague dans un brouillard à couper à la tronçonneuse bien affutée. Il faut délaisser ce lieux idéal pour prendre la route du retour à la maison, espérant quelques trouées bienvenues. C'est à proximité de Carentan que, parfois, timidement le Soleil se laisse deviner à travers les nuages, Soleil déjà bien écorné par une Lune vorace. Il est temps de se garer sur le premier bas-côté venu, de sortir la L80 Swaro munie d'un filtre Astrosolar et de suivre le phénomène à G 60x. Première contemplation à 11h24 pétante. Dommage, je ne distingue aucune tâche alors qu'il y en avait de belles quelques jours auparavant,, peut être une facule vers 7h et rien d'autre qui puisse agrémenter le disque solaire. Je vais tenter de m'appliquer à réaliser un dessin toutes les dix minutes, les nuages jouant les troubles-fête dans ce programme qui se voulait joliment cadencé. Je note la visibilité du relief lunaire sur le disque solaire. J'attrape le maximum à 12h05 (pour 10h07 théorique). Puis, ayant raté le début et pour la première fois de mes observations d'éclipses, je vais suivre le phénomène jusqu'au dernier contact. Je réserve ici la dernière demie-heure et note la fin à très exactement 13h13'35'' (pour 13h13'28'' théorique) ce dont je me réjouis !

dessin eclipse de soleil 2021 dessin eclipse de soleil 2021

Eclipse 2019

Une aventure exceptionnelle avec les copains du club dans la Puna Argentine pour l'éclipse totale de Soleil du 2 juillet. 3 semaines d'un périple aventureux autant que passionnant, des paysages grandioses, un peuple chaleureux, des campements bien râpeux, un passage à presque 5000m, et en point d'orgue, cette magnifique éclipse en fin de journée, à 10° au-dessus de l'horizon façonné par les proches sommets andins. Des conditions météo parfaites pour cette observation réalisée avec la Swarosky 80ED. Bien moins explosive que les précédentes, moins étendue et moins structurée, elle n'en offrait pas moins deux superbes éventails de jets polaires et un festival de protubérances à l'approche du 3° contact. Le spectacle s'acheva avec la disparition de l'astre cornu derrière les sommets où tourbillonnaient des embruns neigeux.

Une vidéo de cette aventure est disponible ici.

dessin eclipse de soleil 2019 totalite
dessin eclipse de soleil 2019
dessin eclipse de soleil 2019

Eclipse 2017

Avec le club, nous avons observé cette éclipse dans l'état de l'Oregon à la fameuse OSP, la star party de l'Oregon.
Cependant, l'excentrement du site nous fait perdre trente secondes d'observation. C'est pourquoi la veille au soir, nous quittons les lieux avec Pierre, Cyrillounet et Elyane et remontons vers la ligne de centralité et nous installons sur un flanc de colline désert au bord d'une piste. Alors que nous nous attendions à une déferlante humaine, nous sommes ici seuls au monde.
La nuit est magique, on dort à la belle étoile, l'oeil scotché sur une voûte céleste enchanteresse. Réveillé dès l'aube, tout semble m'échapper, comme si j'étais passé en mode automatique. Pierre égrène : cinq... quatre... trois... deux... un... zéro... moins un... moins deux... moins trois... top, premier contact vu ! Premier dessin, celui du Soleil tout juste touché, avec deux chapelets de belles taches et quelques facules. J'entame le second dessin illustrant les collines boisées alentours. Les suivants témoignent de l'avancée de Séléné dont on perçoit nettement le relief au niveau du limbe.
Je veux jouir pleinement de la totalité avec une vision préparée aux basses lumières. Pour cela, je délaisse l'observation directe du Soleil et je chausse mes lunettes " oeil-de-chat " un quart d'heure avant la conjonction. Elles sont bricolées avec des caches en forme de fente étroite ne laissant passer que le strict minimum de lumière.
Je me jette à la dernière fraction seconde sur la lunette pour saisir fugacement le dernier grain de Bailly, sublime : alors qu'il étincelle, la couronne diffuse déjà ses lueurs, magnifiée d'une protubérance et d'un liseré irrégulier de chromosphère rose électrique.
Deux panaches principaux d'un côté, un de l'autre dessinent une pointe de flèche - ou la tête du renard du Petit Prince. Des plumets évanescents s'enchevêtrent dans cette structure vif-argent délicatement diaphane. Les jets polaires en larges queues de paon sont d'une complexité remarquable. Je saute de la lunette L80x25 au télescope T250x125, ce dernier offrant une vision détaillée avec une texture filandreuse affirmée. Vaste et complexe à la fois, elle surpasse les autres éclipses que j'ai pu contempler.
Les secondes s'égrainent et, machinale, la main trace sur le papier des lignes tremblotantes et imprécises : je n'y arrive pas et ça m'échappe ! Il faut se ressaisir. Tant bien que mal, l'esquisse prend forme et se précise. Le chronomètre défile et je ne me polarise que sur la couronne, cherchant à noter et mémoriser le maximum de détails. Cent vingt et une secondes, pas une de plus...
Au troisième contact, je jette sur le papier avec frénésie cette vision mémorisée avant qu'elle ne se dilue de mon esprit.
C'est fini, je suis vidé mais radieux. J'imagine qu'au même instant, des millions de photos ont été prises, mais nous sommes probablement bien peu à avoir immortalisé cette éclipse à la pointe du crayon. On se donne rendez-vous pour celle de juillet 2019 au Chili !

Epilogue : Sur le vol du retour vers la France, on contemple par le hublot la féérie d'une nuit électrique où dansent et virevoltent les aurores boréales.

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Eclipse 2012

L'éclipse totale de Soleil de 2012 fut un bon prétexte pour aller courir l'aventure en Australie avec les copains du club, sur un parcours de 4500km reliant Sydney à Cairns.
Craignant une affluence (qui n'aura pas lieu), nous décidons d'investir les lieux l'avant-veille de l'évènement. Sur la base d'images d'archives météo, Jean Marc Lecleire que nous retrouvons sur place a jugé opportun de quitter le littoral de Port Douglas préférant l'arrière-pays - ce qui s'est avéré judicieux. Nous prenons le temps de dénicher un lieu d'observation idéal, avec un horizon bien dégagé à l'est et en hauteur, où l'on peut vivre pépère le temps de l'attente, dans ce foutu pays où le rhum est autant hors de prix que peu goûtu.
Réveil en fanfare dès 3 heures du matin pour monter les instruments, les régler, profiter quelques instants des merveilles australes quand déjà pointe l'aube. Sauf quelques cirrus, le ciel est dégagé et seule une fine bande nuageuse s'accroche au loin sur les collines. L'horizon s'éclaircit, rosit puis jaunit et de derrière ces nuées, émerge un Soleil déjà entammé, les bords bien cabossés par la turbulence.
A intervalles pifométriquement réguliers, je dessine l'avancée de la Lune devant le Soleil, masquant progressivement des groupes de tâches solaires, bien visibles à la L80x40 et filtre polyamide. La gorge se serre davantage avec l'évolution du phénomène. L'ambiance devient magique, la lumière du jour naissant s'accoquinant à merveille avec les facéties lumineuses de l'éclipse. C'est blafard, électrique, mais avec des teintes un peu chaudes. Ca s'accélère, ça bascule, les ombres volantes s'agitent follement. Le paysage se fait décor de théâtre, la couronne devient visible, l'ombre se jette sur nous, j'arrache le filtre, saisis les grains de Bailly, la chromosphère rose fuchsia s'affirme sur ces formidables perles de lumières et l'image sublime du Soleil noir irradié s'étale sur cette portion de nuit circumsolaire au même instant où crépite dans mon cul les appareils photos de Jean-Marc dans une cadence inimaginable.
Je déguste cette éclipse explosive, violente, très dense et contrastée, la basse couronne étant particulièrement lumineuse et les panaches partant de toutes parts. La chromosphère et de nombreuses protubérances sont très visibles. Le dessin est périlleux car les 120 secondes de totalité sont comptées, la perception du phénomène évolue rapidement selon la position des deux astres entre eux et en fonction de l'adaptation en vision crépusculaire. Je prends 15 secondes pour observer la basse couronne et la chromosphère au T400-cx80. La vision est extraordinaire, d'une intensité incomparable, avec des détails aussi évidents que surprenants. De suite, je constate que je me suis trompé de programme : je n'aurais du dessiner qu'une portion de Soleil avec le maximum de résolution en privilégiant le gros télescope, car ce genre d'observation est rare. Je note une légère lumière cendrée. Je mémorise deux formations turbulentes au voisinage des deux protubérances les plus remarquables, ainsi qu'une sensation de voiles filamenteux enchevêtrés de façon assez complexe.
Je me délecte quelques poignées de secondes sur le tableau surréaliste du paysage qu'on embrasse d'un large regard quand déjà on annonce le troisième contact dans moins de quinze secondes. Je me replonge dans l'oculaire de la lunette et tente de mémoriser le maximum d'informations, de noter avec le plus de précision les trop nombreuses caractéristiques que je découvre quand déjà la chromosphère s'affirme davantage et le flash insupportable du retour du Soleil annonce la fin du phénomène, accompagnée d'une clameur collective comparable à celle d'un troupeau de bestiaux ravis.
Très vite, je dessine et tente de reproduire au mieux la vision fugitive qui déjà s'évanouit dans mon esprit. En quelques minutes, j'aurai épuisé mon souvenir et il faut s'en tenir là au risque de s'égarer. Le reste n'est que fignolage et peaufinage.
C'est fini, je suis vidé, ce fut extraordinaire. J'ai vraiment apprécié cette belle éclipse si particulière (elles le sont toutes !)
Décidemment, 2012 aura été marqué par les jeux de cache-cache qu'offre la mécanique planétaire : une occultation de Jupiter, une éclipse partielle de Lune, le transit de Vénus et la totale du Soleil, la besace est bien pleine !

dessin eclipse de soleil 2012 chapelet dessin eclipse de soleil 2012 totalite

Eclipse 2009

De retour en Chine pour l'éclipse du siècle, celle du 22 juillet 2009 et encore une fois, un formidable périple organisé par la SAF. En fin de période de mousson, le lieu d'observation est très délicat à choisir. Les statistiques météo nous font préférer la proche région de Shanghai. Fort judicieusement, nous avons prévu un bus pour disposer d'une certaine latitude de mobilité afin d'ajuster notre position au dernier moment. La veille de l'éclipse, un violent orage éclate comme l'annoncent les prévisions. Il est impératif de bouger vers le Sud-ouest à 300 km de là. Une couverture nuageuse nous prive du lever de soleil mais en montant dans le ciel, il apparait enfin dans une zone épargnée. Le premier contact est détecté à la seconde près mais à 30 mn du 2ème contact, des voiles d'altitude pommelés filtrent un soleil déjà bien entamé par la Lune. La lumière baisse et l'allumage de l'éclairage au sodium de l'aire d'autoroute où nous sommes nous prive de l'ambiance si particulière de cette lumière blafarde caractéristique avant la totalité. Les planètes et les étoiles sont invisibles. En revanche, les 2ème et 3éme contacts sont magnifiques, atténués tout en douceur par ces nuages. J'ai pu observer sans filtre à la L80x20 le dernier rai de lumière et la fabuleuse apparition de la chromosphère rose. Seule la très basse couronne transperce et irradie les proches nuées, attestant d'un flux lumineux certain. Il est quasi impossible d'en deviner la forme générale et les extensions des divers plumets, se noyant, se modifiant et s'emmêlant au gré de l'évolution rapide des nuages. Au moment du maximum, l'envie de tout arrêter me prend devant cette esquisse qui m'échappe. C'est alors qu'apparait une magnifique protubérance sur une chromosphère qui ne fait que s'étendre à l'approche du 3ème contact, me redonnant l'envie de poursuivre ce travail et retranscrire cette vision peu banale. Le diamant est splendide, suivit d'un beau chapelet de grains de Bailly, facile à suivre sans filtre pendant de nombreuses secondes. Bien que sur le coup, j'ai ressenti une certaine déception devant ce spectacle gâché par les nuages, je le savoure d'avantage à postériori, heureux d'avoir été parmi les rares privilégiés à l'avoir vu dans son intégralité.

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Eclipse 2008

Eclipse du 2 août 2008, observée en Chine lors d'un mémorable périple organisé par la SAF sur la route de la soie. Une éclipse d'une rare beauté tant par l'étendue de sa couronne légèrement dissymétrique, que par cette remarquable protubérance, ces superbes couleurs crépusculaires dans le désert de Gobi.
J'ai tenté durant ces trop rapides 120 secondes, un dessin à la L80x20 qui ne peut être qu'une pâle évocation et non une reproduction fidèle du phénomène.
Installé depuis le matin sous un soleil de plomb, je scrute avec angoisse un petit nuage qui petit à petit, ne fait que grossir durant la journée. A 10 mn de la totalité, le fin croisant est masqué. Je prends la décision de courir vers une zone encore ensoleillée située à 1000 mètres de là. Mais la totalité approchant, ce coquin se dégonfle et la zone que je viens de quitter est à présent dégagée alors que je suis toujours sous le couvert ! Instant d'abattement total car il n'est plus temps de revenir. Mais enfin, à quelques poignées de secondes de la totalité, le ciel se dégage aussi pour moi. Il est impossible de décrire l'émotion ressentie en ce moment précis et je crois avoir perdu une bonne dizaine de secondes à m'en remettre, avant de me jeter fébrilement sur la feuille de papier blanc. Avec frénésie, je note la forme générale de la couronne joliment dissymétrique, mémorise les contours des diverses extensions, apprécie la différence entre les plumets au nord plus courbés que ceux du sud. Je note une étoile du Cancer vers l'ouest. Au fil du temps, la vision s'améliore sensiblement. Aux derniers instants, une magnifique protubérance et une fine chromosphère rose vif m'apparaissent franchement.

dessin eclipse de soleil 2008 totalite

Eclipse 2006

Eclipse totale du 26 mars 2006, dans le désert Libyen, au sud est du volcan Waw Enamous. Une aventure exceptionnelle que nous avons vécue avec 14 copains(es) du club. Découverte d'un pays, du Sahara, d'un autre mode de vie. Course effrénée des 4x4 dans la poussière pour être présent sur le site au bon moment. Une ambiance indescriptible, assombrissement du ciel, apparition de Vénus, des ombres volantes partout, les premiers grains de Bailly, arrachage des filtres et ça y est ! Couronne solaire énorme, nombreuses protubérances dont la visibilité évoluera au fil du phénomène selon de déplacement de la lune.
J'ai tenté ce croquis, évoquant à l'ère du numérique une astronomie d'une autre époque, ambiance 1900, à l'oculaire de la longue vue L80 pour la couronne et de l'ETX x100 pour les protubérances. Les 4 minutes sont passées comme un éclair. Je n'ai eu le temps que de marquer au mieux le contour des différents panaches. Tout de suite après la totalité, l'image encore en mémoire, j'ai apporté la texture particulière et les finitions pour ce résultat étrange...
Une vidéo de cette aventure est disponible ici.

dessin eclipse de soleil 2006 totalite

Eclipse 2005

Eclipse annulaire du 3 octobre 2005, à Alcala del Jucar en Espagne sur la ligne de centralité. Photomontage réalisé à partir de 3 clichés pour couvrir l'intégralité du chapelet et d'un pour le paysage. Canon EOS 10, zoom 100-300 calé sur 135 mm à F/D 8, filtre Astrosolar. Programmé pour 9 surimpressions par image à 6 minutes d'intervalle. Dommage que ma montre n'était pas précisément à l'heure pour saisir le moment exact de la centralité.

photo chapelet eclipse annulaire de soleil 2005

Eclipse 1999

11 Aout 1999, ma première éclipse totale avec les copains du club, celle qui déclenchera l'envie d'en voir bien d'autres. Nous partîmes la veille au soir sous une météo d'apocalypse pour camper directement sur place, près de Beauvais au petit hameau de la Houssoye, quasiment sur la ligne de centralité.
A dix heures du matin, le ciel est toujours bouché. On aperçoit vers l'ouest une minuscule trouée bleue. Il y a déjà beaucoup de monde le long des routes. On trouve un champ fraîchement moissonné où nous nous installons. A travers une bonne couche de nuages, on voit le soleil se faire écorner. Çà y est, c'est parti. La tension monte, elle est palpable. Le coin de ciel bleu s'élargit de plus en plus. Puis çà y est, çà bouge, Le soleil est dans le grand bleu à T - 40 minutes ... A quelle joie ! MAGNITUDE 78 verra l'éclipse 1999 !
La tension accumulée depuis plusieurs jours crève d'un coup laisse place à une autre bien plus intense et profonde : celle d'être à quelques minutes de voir le prodigieux spectacle d'une éclipse totale. Dans les télescopes, on peut voir le relief lunaire et sur le croissant de lumière, quelques belles tâches, témoins d'une grande activité solaire. La lumière change d'abord de façon imperceptible. Elle devient différente, indescriptible. Vénus est visible comme un fin croissant. Puis, tout s'accélère, la luminosité s'effondre, les teintes deviennent blafardes, verdâtres, irréelles, comme si on était éclairé par une petite lampe à arc qui s'éloignerait. Il ne reste plus dans le ciel de plus en plus sombre qu'une griffe de lumière éblouissante.
Tout est paré : autour du cou, les jumelles, à ma gauche la longue vue avec filtre pour suivre les dernières secondes, à ma droite l'ETX 90 grossissement de cent fois pour voir la chromosphère et les protubérances. Le cône d'ombre arrive, obscurcissant brutalement le ciel à l'Ouest. Il ne reste qu'un filet de lumière dans la longue vue. Au télescope, l'oculaire est embrasé. Puis, la lumière semble vaciller dans celui-ci, comme s'il contenait une formidable chandelle que l'on soufflerait. Je peux enfin m'en approcher graduellement. Dernier flash! Quelques grains de Baily, et, instant magique, tout est là ! C'est gigantesque ! Le soleil noir est en feux ! Des arcs, des jets, des tarabiscotages en tout genre, des formes étranges et colorées d'un rose électrique se détachent sur le fond rayonnant de la couronne. Tout cela est diaphane, transparent, comme une fumée de cigarette teintée, mais net, contrasté, parfaitement dessiné et figé devant moi. Le temps passe, impalpable. Un coup dans la longue vue où j'arrache d'un coup le filtre. Là, j'ai du champ visuel et je peux voir s'étendre la couronne sur plusieurs diamètres solaires. Mais déjà, la couronne semble ondoyer quand soudain, une prodigieuse lumière déchire le disque au bord supérieur droit et oblige instantanément à se retirer des instruments et remettre les filtres. C'est fini ! Cet incroyable spectacle a débuté sous les nuages, il s'achève de même, sous d'épais cumulus. Décidément, nous avons eu une sacrée chance. Nous étions à l'extrême limite Est pour voir l'intégralité de l'éclipse.
Moralité, il FAUT voir la prochaine éclipse totale de soleil...
Chiche?

photo chapelet eclipse annulaire de soleil 1999

Eclipse 1994

Eclipse de mai 1994, sur la colline de la Revanche à Elancourt dans la lumière du couchant. Ce chapelet est réalisé à partir de 2 clichés pris avec un Canon EOS 10 et zoom 100-300 USM calé sur 300 mm, simplement filtré avec 2 polarisants. Ce Boîtier programmable bien pratique permet d'effectuer automatiquement 9 surimpressions par image selon un intervalle préalablement défini.

photo chapelet eclipse partielle de soleil 1994