Enrico Riboni, athée, libre-penseur.
"Croire en un Dieu
cruel rend l'homme cruel"- Thomas Paine
Préface
Il y a maintenant plus de 2000 ans, naissait en
Galilée un fondateur de secte, qui finira crucifié environ 30 ans plus tard.
Ses avant-derniers mots sur la croix furent "Donnez-moi à boire". Et
pourtant! La secte qu'il avait fondée deviendra ensuite la plus grande de tous
les temps. Elle prendra le pouvoir politique dans l'empire romain, abolira la
liberté de religion, puis amoncellera des montagnes de cadavres: ses membres
massacreront des millions d'"infidèles", "hérétiques",
"sorcières" et autres, puis se massacreront entre eux en donnant à
l'Europe les guerres les plus féroces qu'elle ait connu. Une telle histoire
pourrait inciter à la modestie, mais les chrétiens revendiquent, au contraire,
un monopole de l'éthique. Ils proclament qu'ils adorent le seul Dieu, dieu qui
est "amour", et se considèrent meilleurs que le reste de l'humanité,
qu'ils condamnent comme étant un ramassis d'adorateurs de faux dieux.
Seule idéologie à pouvoir partager
avec le communisme et le nazisme le podium dédié aux idéologies les plus
meurtrières de l'histoire humaine, le christianisme reste une idéologie
dominante dans nombre de pays occidentaux, dont le gendarme du monde, les USA.
Il est temps d'ouvrir le Livre Noir du Christianisme: 2000 ans de terreur,
persécutions, répression. Commençons, modestement, par cette Page Noire du
Christianisme, qui résume quelques-unes des pires atrocités commises au nom de
cette idéologie qui prétend promouvoir l'amour du prochain.
An un
"Les dieux n'étaient plus, et
Dieu n'était pas encore".
L'Empire Romain garantit la liberté
de culte. L'athéisme et la raison dominent dans les villes. Les dieux sont des
figures mythiques, des représentations allégoriques de forces de la nature.
C'est à cette époque que naît un type qui, disent certains juifs, perd la
raison car il lit
Le culte de la personnalité pour le
fondateur de la secte atteint, chez les chrétiens, un niveau que même le stalinisme
n'égalera pas: le fondateur est proclamé "vraiment homme et vraiment
Dieu" ("Homme-Dieu", dirait-on en langage normal). Ceux qui en
doutent sont proclamés sans ambages hérétiques, et subiront plus tard les
foudres de l'inquisition. Dès le IVème siècle de notre ère
commencera la mise à mort de non-croyants par des chrétiens.
50 -150
La secte chrétienne se développe.
Des textes grecs, écrits par les membres de la secte hors de Palestine
("Les évangiles") relatent de la vie du fondateur de la secte: né d'une
vierge, qui serait restée vierge malgré plusieurs autres enfants, il aurait
guéri des malades, mais aussi maudit un figuier qui se serait desséché
instantanément. Il aurait aussi fait précipiter des centaines de cochons qui ne
lui appartenaient pas dans un lac. Ce personnage, qui défend les pauvres, mais
affirme aussi "ceux qui ont tout seront comblés, et à ceux qui n'ont rien,
il sera enlevé le peu qu'ils ont", un peu pathétique lorsqu'il maudit un
figuier ou se laisse crucifier, est déclaré une incarnation du "Dieu
unique". Le fait que, d'après les évangiles "canoniques", ses
avant-dernières paroles sur la croix furent "Donnez-moi à boire" ne
semble point troubler les adeptes de la secte, qui se répand bientôt dans l'ensemble
de l'empire.
Aux environs de l'an 50 aurait eu lieu
le premier bûcher de livres: d'après Les Actes des Apôtres, un livre de
L'intolérance religieuse des chrétiens,
qui vise ouvertement, dès le début, à imposer une interdiction des cultes des
autres dieux que le leur, qui, insistent-ils, est le "seul Dieu",
leur attire bientôt les foudres de la justice romaine, qui défend la liberté de
culte, laquelle est l'un des piliers de cette société complexe et
multiculturelle qu'est l'empire romain des premiers siècles de notre ère. La
propagande chrétienne retourne habilement la situation. Ceux qui sont condamnés
par la justice romaine sont proclamés "martyrs", leurs restes sont
vénérés dans les églises, on invente la légende comme quoi ils ont étés
exécutés pour avoir "refusé de renier leur foi", ce qui bien sûr est
mieux que la vérité nue, qui est qu'ils ont étés condamnés pour avoir été des
fauteurs de troubles voulant imposer l'intolérance religieuse dans une société
multiculturelle.
Les chrétiens développeront au Moyen
Âge toute une série de légendes de Martyrs antiques qui choisirent la mort
plutôt que renier leur foi. Des morceaux d'ossements sont conservés dans des
églises et vénérés par des fidèles, fresques et tableaux racontent des
histoires aussi abominables qu'invraisemblables de vierges effarouchées
préférant des morts horribles plutôt que le péché de la chair, et de courageux
proto-chrétiens répondant non je ne renie pas ma foi au lion qui menace de les
dévorer au milieux des cris de la foule des païens en délire. Beaucoup de
chrétiens croient vraiment à ces mythes, même lorsqu'ils sont en contradiction
complète avec l'histoire connue. Par exemple, en Suisse, il y a un Monastère
Saint Maurice, dans la ville du même nom. Lorsqu'on visite ce monastère, l'on
vous raconte, en vous montrant des petits fragments d'os dans des beaux
reliquaires en appui du récit, que le monastère a été construit sur les lieux
du martyr de
300 (ou 303, ou 309, date incertaine)
Le premier concile et la
codification de l'antisémitisme chrétien: 19 évêques et 24 prêtres se
réunissent à Elvira, dans le Sud de l'Espagne, et fixent les premiers canons de
l'église qui soient parvenus jusqu'à nous. Ces canons prévoient des peines
sévères pour une série de "péchés". Pour certains, comme le divorce,
et l'adoration de dieux autres que le dieu chrétien (l'idolâtrie) l'expulsion
définitive de l'église est prévue. Pour les péchés moins graves, la punition
est l'exclusion de la communion pour des périodes allant jusqu'à 10 ans. Parmi
les délits punissables d'excommunications de plusieurs années, l'on trouve,
entre autre: laisser bénir sa récolte par un juif ou partager un repas avec un
juif. Le concile jette ainsi les bases dans le droit canon de l'antisémitisme
chrétien, dont les effets dévastateurs se déploieront en force dès le IVème
siècle et dureront jusqu'au XXème siècle.
C'est également à ce concile que les
prélats chrétiens décident officiellement que tout chrétien mis à mort pour
participation à des destructions de temples ou de statues de déités non
chrétiennes a droit au titre - évidemment posthume - de martyr.
Hors des conciles également, les
leaders chrétiens prendront très vite des positions très dures à l'égard des
Juifs. Origène, le fondateur du mouvement monastique égyptien, écrira que
"Le sang de Jésus retombe non seulement sur les Juifs de l'époque mais sur
toutes les générations de Juifs jusqu'à la fin du monde". Son contemporain
Saint Jean Chrysostome écrira lui pour sa part "La synagogue est un
bordel, une tanière de bêtes impures (...) jamais un juif n'a prié Dieu. (...)
Ils sont possédés des démons".
C'est dans cette période que
l'étrange obsession des chrétiens pour le sexe commence à déployer ses effets
dévastateurs. Le même Origène, incapable de contrôler ses obsessions, prend à
la lettre le bon mot de Jésus "car il y en a qui se font eunuques pour le
royaume des cieux" et commet un geste irréparable sur sa personne.
L'eunuque Origène fonde sur son
obsession du sexe un grand mouvement de masse: le mouvement monastique, qui
perdure encore aujourd'hui: des centaines, puis des milliers de fanatiques,
dont certains, au début, imiteront le geste tragique d'Origène sur leur
personne, quittent les villes d'Égypte pour s'installer dans des grottes, puis
des monastères dans le désert. Dés le début, ils accorderont refuge à leurs
coreligionnaires recherchés par la justice criminelle, et sortirons
périodiquement de leurs tanières pour porter la terreur en ville lorsque les
autorités religieuses le leur demandent. Ce sont ainsi des moines qui
assassineront Hypatia. On peut imaginer la terreur
des populations urbaines lorsqu'elles voyaient arriver, surgissant du désert,
ces hordes de moines hirsutes, sales, vêtus de lambeaux de peux de bêtes, et
prêts à tout et à toute violence pour accomplir la volonté de leur dieu.
La tradition d'utiliser les moines
pour des actions de terrorisme se maintiendra dans l'église catholique: au
Moyen Âge, elle fera appel aux Franciscains et Dominicains pour l'inquisition.
Pendant la deuxième guerre mondiale, les Franciscains croates sortiront de
leurs tanières pour travailler comme gardiens, bourreaux et, même, chefs de
camps de concentration. Cette tradition du moine revenant dans la civilisation
pour y semer la terreur du Christ prend ainsi ses racines au tout début de
l'histoire chrétienne et perdure aujourd'hui.
312
Prise de pouvoir par les chrétiens:
Au terme d'une guerre civile, Constantin prend le pouvoir. Peu après, il se
converti officiellement au christianisme, et "autorise" dans un
premier temps le culte du dieu unique chrétien par l'Édit de Milan: c'est le
début de la persécution religieuse en Europe. Peu à peu, les cultes de dieux
autres que ceux du dieu chrétien seront interdits. Les sanctuaires classiques
seront détruits, ou convertis en églises chrétiennes. A la fin du IVème
siècle, il n'y aura plus aucun temple païen dans tout le bassin méditerranéen.
315
Première loi antisémite dans
l'empire christianisé: le prosélytisme juif est interdit, sous peine de mise à
mort sur le bûcher. Les mises à mort sur le bûcher sont une passion que les
chrétiens cultiveront pendant plus de 1500 ans de leur histoire.
325
L'empereur chrétien Constantin
ordonne au premier Concile de Nicée de changer la date de Pâques: "Il
n'est pas seyant que, dans la plus sainte de nos fêtes, nous suivions les
coutumes des Juifs; dorénavant, nous ne devons plus rien à avoir de commun avec
cet odieux peuple". Les persécutions violentes des juifs par les
chrétiens, qui commenceront à la fin du IVème siècle, sont la
conséquence logique de la haine antisémite de l'église chrétienne des débuts.
L'antisémitisme chrétien restera
ancré dans les rites catholiques jusqu'aux années 1960 et le concile de Vatican
II. Jusqu'à cette date, l'on répétait à chaque messe, dans chaque église
catholique, la prière "Oremus et pro perfidis judaeis: ut Deus et
Dominus noster auferat velamen
de cordibus eorum; ut et ispi agnostant Jesum Christum Dominum nostrum" ("Nous
prions pour les perfides juifs notre Seigneur et notre Dieu de retirer le voile
de leur cœur, qu'ils puissent eux aussi connaître notre seigneur
Jésus-Christ")
326
La christianisation du droit romain:
dans les années qui suivent sa prise de pouvoir, Constantin entreprend de
modifier le droit romain pour le mettre en conformité avec les fondements de
l'idéologie chrétienne. Ainsi, la liste des délits pour lesquels la peine de
mort est prévue est fortement allongée. Par exemple, l'enlèvement (avec
consentement de l'enlevée) d'une jeune femme à sa famille par son amant, qui
était une affaire relevant du droit civil, devient passible de la peine de mort
pour l'enleveur, l'enlevée, et aussi tous les complices, y compris les esclaves
des familles de l'enleveur et de l'enlevée. Les relations sexuelles entre un
esclave et sa maîtresse sont désormais interdites et passibles de mort. Il faut
noter que par contre le premier empereur chrétien fait que la loi continue à
considérer comme licites les relations sexuelles entre un maître et une femme
esclave. Mettant en pratique les enseignements de
C'est aussi en cette année 326 que
le terme de "concubinage" fait son entrée dans le droit romain: les
concubins sont soumis à des tracasseries administratives sans précédents dans
l'histoire romaine: il leur est interdit d'acquérir des propriétés immobilières
et leur citoyenneté romaine leur est retirée.
D'autre part, mettant en pratique ce
que les chrétiens appellent volontiers la charité envers les pauvres,
Constantin fait voter une loi qui permet aux familles nécessiteuses de vendre
leurs enfants comme esclaves, ce qui était évidemment interdit.
363 - Un meurtre pour réaliser une prophétie
En
Peu après son arrivée au pouvoir, il
publie plusieurs livres à la gloire des vieux dieux ainsi que d'autres,
polémiques, contre diverses sectes philosophiques et, naturellement, contre le
christianisme.
Notons à ce sujet que son traité
"Contre les Galiléens" (= les Chrétiens) est à peu près totalement
perdu. Il n'en reste que des bribes difficilement exploitables. Même les
réfutations qu'en ont faites les Chrétiens contemporains ont disparu, ou ont
étés expurgées des citations de l'œuvre de Julien. Un des rares extraits qui nous
est parvenu dit: "Il me semble bon d'exposer à tous les hommes les raisons
qui m'ont persuadé que la machination des Galiléens n'est qu'une fiction
humaine, forgée par le vice. Bien que cette fourberie n'ait rien de divin, elle
a dupé la partie de notre âme qui aime les fables, qui est puérile et insensée,
et elle lui a fait ajouter foi à ces monstruosités" [Julien, Contre les
Galiléens, traduction de Christopher Gérard, éditions Ousia,
1995].
Bien sûr, les chrétiens se
mobilisent rapidement contre cette liberté religieuse qui leur est intolérable.
Ils se lancent donc dans des actions de provocation, espérant déclencher ces
"persécutions" dont ils sont si friands pour pouvoir avoir des
martyrs. Entre autres, les chrétiens
* profanent, puis détruisent, puis
incendient le temple de Daphné, près d'Antioche, où l'Empereur résidait
* sabotent des travaux de
reconstruction du Temple de Jérusalem
* détruisent le temple de
* détruisent, à Pessinonte,
sous les yeux de l'Empereur, l'autel de Cybèle, mère des dieux, une divinité à
la gloire de laquelle Julien avait composé un traité
Cependant, Julien ne se vengea de
ces crimes que par un pamphlet, intitulé "L'Ennemi de
Julien payera de sa vie ses excès de
mansuétude envers les chrétiens, en particulier contre Athanase, évêque
d'Alexandrie. Athanase était un individu au passé criminel, qui avait été
chassé de son siège épiscopal suite à des disputes entre les sectes
chrétiennes. L'édit de 361 lui permet de retourner à Alexandrie, Il y excite
une foule de fanatiques qui massacrent l'évêque arien de la ville Georges de
Cappadoce et jette les lambeaux de son corps dans le Nil. L'évêque Georges
était lui aussi un individu pour le moins discutable, qui avait pillé maints
temples de l'Égypte antique, mais ce meurtre attire l'attention de l'Empereur
sur le passé d'Athanase, et il ordonne son bannissement hors d'Égypte. Sans attendre
l'intervention de la force publique, Athanase se retire dans le désert, se
cache chez de moines, et prophétise la mort de l'Empereur: "Le Charpentier
(=Jésus) prépare un cercueil (pour Julien)" annonce-t-il aux foules de
fanatiques qui viennent l'écouter prêcher dans le désert. Mais Athanase est un
homme intelligent, qui sait qu'il faut parfois des actions concrètes pour aider
à réaliser des prophéties. Il promet la gloire éternelle, la rémission de tous
ses péchés et toutes les joies du Paradis à un soldat chrétien qui allait
accompagner l'empereur dans sa grande expédition en Mésopotamie. Le 26 juin
363, lors de la bataille décisive contre les Perses, il assassine Julien avec
une lance dans le dos. On dit que Julien, mourant, aurait lancé au ciel quelques
gouttes de son sang en s'écriant : "Tu as vaincu, Galiléen !". Sans
doute ces propos sont-ils légendaires, mais Julien a peut-être réellement eu
une telle pensée au moment où il s'effondrait et mourrait frappé dans le dos
par un traître, pour cause de tolérance religieuse.
380
L'empereur Théodose proclame
officiellement le christianisme comme seule "Religion d'état". Il
faudra attendre 12 ans avant que tous les autres cultes ne soient
définitivement interdits.
381
Théodose, empereur chrétien, lance
la chasse aux hérétiques: les hérétiques sont des chrétiens qui ne
reconnaissent pas dans certains points de détail de la doctrine chrétienne. A
ces chrétiens non catholiques l'on interdit de: se réunir, d'enseigner, de
discuter en public, d'ordonner des prêtres. Leurs églises sont confisquées au
profit des évêques catholiques. Les hérétiques sont aussi exclus de la fonction
publique. Pour certaines "hérésies", les mesures sont plus dures:
peine de mort pour les manichéens, et l'on arrache les yeux aux évêques marcionites (une secte gnostique chrétienne). Les livres
sacrés des ariens - une secte chrétienne qui considérait que Jésus avait été
crée par Dieu le Père - sont livrés aux flammes en de joyeux holocaustes. En 15
ans de règne, Théodose ne promulguera pas moins de 15 Édits de Persécution
contre l'un ou l'autre des groupes hérétiques chrétiens.
382
Théodose, empereur chrétien, lance
la chasse aux apostats: une série de lois promulguées en 381, 383 et 391,
prévoient bannissement social des apostats. Celui qui abandonne le
christianisme au profit de toute autre religion, y compris le judaïsme:
l'apostat sera exproprié, il lui sera interdit d'hériter, de participer à la
vie sociale et de déménager: la loi spécifie clairement que l'apostat doit
continuer à vivre au lieu où il vit, tout en étant exilé de la société, car
cela est plus dur qu'un exil dans des terres lointaines.
385
Théophile (aujourd'hui Saint
Théophile) est nommé patriarche d'Alexandrie. Il commence aussitôt une violente
campagne de destruction de tous les temples et sanctuaires non chrétiens. Il a
l'appui du pieux empereur Théodose. On doit à Théophile la destruction, à
Alexandrie, des temples de Mythriade et Dyonisius.
Cette folie destructrice culminera en 391, avec la destruction du temple de
Sérapis et de sa bibliothèque. Les pierres des sanctuaires détruits seront
utilisées pour édifier des églises pour la nouvelle religion unique, le
christianisme.
Ensuite, sans doute pour montrer
qu'il est capable de persécuter aussi des chrétiens (dans la mesure où ils ne
sont pas 100% orthodoxes), Théophile commande personnellement les troupes qui
attaquent et détruisent les monastères qui adhéraient aux idées d'Origène, un
théologien chrétien qui fut déclaré hérétique car il soutenait que dieu était
purement immatériel.
C'est aussi en 385 que, pour la
première fois, un hérétique est condamné à être brûlé vif, après avoir subi la
torture. Cette pratique se généralisera à partir de 447.
389
Pour la première fois, un évêque
dicte à un empereur la politique à suivre: Saint Ambroise de Milan, en pleine
cathédrale, se lève et, avec ce sens de la charité si particulier que les
chrétiens ont, impose à l'empereur d'annuler l'ordre que ce dernier avait donné
à l'évêque de Callinicum sur l'Euphrate de reconstruire
une synagogue que l'évêque et sa congrégation avaient détruite. L'église prend
ainsi parti, dès ses débuts, pour les brûleurs de synagogues, parti qu'elle
continuera à soutenir jusqu'aux années 1940.
390
L'empereur Théodose, pieux
catholique, introduit la peine de mort pour toute personne qui fêterait Pâque à
une date autre que celle qu'avait imposée le concile de Nicée, et publie un
édit qui interdit définitivement le culte de dieux autres que le dieu chrétien
dans tout l'empire romain.
Début des années 390
Suite à l'édit de 390 du pieux
empereur chrétien Théodose, peu à peu, les temples non chrétiens sont fermés au
culte, les processions "païennes" sont interdites. Cette suppression
de la liberté de religion au profit exclusif du christianisme cause parfois des
émeutes, comme celles de 408 à Calama en Numidie. Dans le cadre de cette
campagne pour l'éradication de tout ce qui n'est pas chrétien dans l'empire,
l'empereur fait aussi, en 393, interdire les jeux olympiques.
Cette campagne d'interdiction est
l'occasion de violents pogroms antipaïens. C'est dans ce cadre que les
chrétiens abattent le temple de Sérapis à Alexandrie. En Gaule, le bon Saint
Martin, celui qui avait donné la moitié de son manteau à un pauvre en plein
hiver, parcourait les campagnes, accompagné d'une horde de moines fanatiques,
détruisant tous les symboles de l'ancienne religion et convertissant les païens
récalcitrants à coups de gourdin.
À Rome, Théodose imposa, à
l'instigation du pape Sirice, un serment solennel aux sénateurs romains. Ils
devaient solennellement renoncer au culte de Jupiter et jurer fidélité au
Christ. La statue de
C'est à la même époque qu'ont lieu
en Germanie les premières exécutions de non chrétiens, une belle tradition que
l'église développera avec l'inquisition et perpétuera ensuite jusqu'en 1826.
391
Une foule de chrétiens comprenant
grand nombre de moines fanatiques venus du désert, guidés par Saint Athanase et
Saint Théophile, abat le temple et la grande statue de Sérapis à Alexandrie,
deux chefs d'œuvre de l'Antiquité. La collection de littérature du temple est
également détruite. Plusieurs païens soient tués dans l'assaut du temple, les
statues d'or du temple sont fondues, et le précieux métal est incorporé dans le
trésor de l'épiscopat.
401
Saint Augustin, évêque de Carthage,
Docteur de l'Église, est considéré comme le plus grand penseur de l'église
antique, et sa Théorie de la guerre juste servira plus tard à justifier les
croisades. Mais l'église a soin aujourd'hui d'être très discrète sur l'œuvre de
destruction de temples et statues à laquelle le saint consacra de son vivant
tant d'énergie. Dès 399, on commence à Carthage à détruire temples et statues
païennes. Saint Augustin applaudit. Constatant que l'enthousiasme destructeur
de la populace catholique risque de faiblir, en juin 401, Saint Augustin
emploie l'humour (chose rare dans l'histoire chrétienne), au cours d'une messe
dominicale, pour relancer la folie destructrice: "Il est écrit Herculi Deo au pied d'une statue d'Hercule. Mais pourquoi
ne parle-t-il pas ? Il est aussi muet que son épitaphe". La foule des
croyants rigole. Saint Augustin lance alors "A Rome, les temples sont
fermés, les idoles détruites ! Comme à Rome, ainsi à Carthage". Des bandes
de catholiques enragés se lancent alors à l'assaut des statues et temples
encore debout en ville et les détruisent.
408
Les émeutes de Calama: enivré par
son succès à Carthage, Saint Augustin exige la destruction de temples et
statues aussi dans les villes de province. Peu à peu la parole du saint homme
se répand dans l'Afrique du Nord, et des hordes de chrétiens se lancent à
l'assaut des temples et des statues. A Calama (aujourd'hui Guelma en Algérie),
une émeute éclate lorsque les chrétiens s'attaquent au temple d'Hercule: 60
personnes, chrétiens et païens, meurent dans la bagarre.
412
Cyrille (aujourd'hui Saint Cyrille,
Docteur de l'Église), est nommé évêque d'Alexandrie et succède ainsi à son
oncle Théophile. Il excite les sentiments antisémites diffus parmi les
chrétiens de la ville, et, à la tète d'une foule de chrétiens, incendie les
synagogues de la ville et fait fuir les juifs. Il encourage ensuite les
chrétiens à se saisir des biens que les juifs ont dû laisser derrière eux.
415
Hypatia, la dernière grande mathématicienne
de l'école d'Alexandrie, par ailleurs fille de Théon
d'Alexandrie, directeur de la bibliothèque, est tuée par une foule de moines
chrétiens inspirés par Cyrille, patriarche d'Alexandrie, que l'église
canonisera. Après le lynchage par la foule, le corps de la mathématicienne est
traîné dans la cathédrale par un groupe de moines aux ordres de Cyrille, et est
mis en pièces à coups de fragments de tuiles. La motivation des chrétiens est
que Hypatia, brillante enseignante de mathématiques,
représentait une menace pour la diffusion du christianisme, en raison de son
enseignement des sciences et du Néoplatonisme. Le fait qu'elle était une femme,
de plus, dit-on, belle et charismatique, rendait son existence encore plus intolérable
aux yeux des chrétiens. Son assassinat marqua d'ailleurs un tournant: après sa
mort, de nombreux chercheurs et philosophes quittent Alexandrie pour l'Inde et
En reconnaissance de ses mérites en
matière de persécution de la communauté scientifique et des Juifs d'Alexandrie,
Cyrille sera d'abord canonisé, puis promu au rang enviable de "Docteur de l'Église" en
1882.
532
L'empereur Justinien fait fermer
l'école de philosophie d'Athènes, considérée comme le dernier bastion du
paganisme. Désormais, l'obscurantisme et l'ignorance règnent en maîtres dans
tout le bassin méditerranéen. Les maîtres de l'école doivent quand à eux
s'exiler en Perse.
590
Grégoire I, dit Le Grand,
aujourd'hui Saint Grégoire, devient Pape. Il est considéré comme l'inventeur de
la croisade. En effet, il envoie à Gennadius,
gouverneur d'Afrique pour l'Empire Romain d'Orient, une longue lettre
l'incitant à "engager de nombreuses guerres" ayant pour but de
convertir de force au christianisme les populations des terres conquises. Saint
Grégoire s'occupe aussi activement de la conversion des juifs au christianisme,
en leur offrant des avantages financiers, tout en approuvant la politique de
conversion forcée pratiquée à l'époque par le roi Wisigoth en Espagne. Ce saint
homme est aussi un farouche adversaire des sciences et de la connaissance
rationnelle. L'on connaît de lui une lettre à l'évêque de Vienne (France) où il
écrit: "Nous avons eu voix d'une information dont je ne peux référer sans
honte: il semble que dans ta congrégation l'on enseigne la grammaire".
Outre la grammaire, il décourage ou interdit l'enseignement de la culture
gréco-romaine en général, y compris les langues, la science, la philosophie et
la mythologie.
En raison de son action contre la
culture et son encouragement de la guerre sainte, Saint Grégoire Le Grand est
considéré comme le fondateur de la doctrine sociale chrétienne qui sera
réalisée pendant le Moyen Âge en Europe.
VIIème - XVème
siècle
Le "Moyen Âge Chrétien".
Profitant de la disparition des grandes bibliothèques romaines et de l'absence
quasi-totale d'activité d'édition en Europe, l'église obtient de fait un
monopole sur l'ensemble de l'écrit et de l'information. Le peuple est laissé
volontairement dans l'ignorance, on le décourage de lire la Bible au cas où il
aurait accès à un exemplaire. Dès le XIIIème siècle, l'inquisition
interdira même formellement la possession de livres de l'Ancien Testament. Peu
à peu, l'église impose sa grippe sur la société. L'inquisition, le célibat des
prêtres, le caractère obligatoire du mariage avant toute relation sexuelle,
sont toutes des institutions qui datent de cette époque.
C'est aussi à cette époque que se
développe ce qui deviendra une des plus riches traditions chrétiennes: brûler
vifs des gens. Environ 1 million de "sorcières" seront brûlées au
cours du Moyen Âge. Les villes rivalisent pour battre le record du nombre de
sorcières brûlées en un an. Un record durable est établi par la ville de
Bamberg, siège épiscopal, qui brûle 600 sorcières en un an.
Nombre de membres de la hiérarchie
ecclésiastique regrettent encore aujourd'hui cette époque où l'église dominait
la vie de la société: les clercs chrétiens regrettent la
"spiritualité" de l'époque, son art, qui laissait une large place à
la mort - sujet qui a toujours passionné les chrétiens - et à de la musique
envoûtante.
804
L'empereur chrétien Charlemagne
convertit nombre de Saxons, en leur proposant le choix suivant: se convertir au
catholicisme, ou avoir la tête coupée. Plusieurs dizaines de milliers de têtes
tombent, avec la bénédiction de l'église: les prêtres présents participent au
jeu de l'empereur.
897 - Un pape juge son prédécesseur
Étienne VI fait déterrer le cadavre
de son prédécesseur, le pape Formose, plusieurs mois après l'enterrement. Il
fait traîner le cadavre par les pieds devant un synode qu'il avait convoqué.
Là, ayant solennellement condamné le défunt, il ordonne de lui couper trois
doigts de la main droite, puis fait jeter le cadavre dans le Tibre. Son corps
sera récupéré et enterré de nouveau en cachette. Las, en 905, le nouveau pape,
Sergius III, le fait déterrer une seconde fois. Il le fait revêtir des
vêtements pontificaux et asseoir sur un trône et le fait juger encore une fois.
Ensuite, l'on décapita le cadavre, on lui coupa encore trois doigts, puis le
jeta de nouveau dans le Tibre. Cette fois-ci, personne ne prend la peine de
récupérer et d’enterrer le cadavre.
XIème siècle
Schisme d'orient. Le patriarche de
Constantinople prétend qu'il faut utiliser du pain avec levain pour
l'Eucharistie, le rite théophage au centre de la
messe chrétienne. Le Pape, évêque de Rome, affirme qu'il faut du pain sans
levain. Sur cette question d'importance capitale, la chrétienté se scinde, et
les deux patriarches, de Rome et Constantinople, s'excommunient mutuellement.
Le schisme provoquera des morts jusqu'aux années 1990 (guerres civiles en
Yougoslavie, catholiques contre orthodoxes).
XIème - XIIème
siècle
Face à la croissance de la
population en Europe, l'Église propose une méthode de contrôle de la population
"naturelle": les croisades. L'appel à la croisade est lancé en 1095.
En 1099 Jérusalem est "libérée": lorsque les troupes croisées entrent
dans la ville, le gouverneur musulman se rend contre la promesse que la
population civile sera épargnée. Bien sûr, l'ensemble de la population (qui
comprend essentiellement des juifs et des musulmans) est passée par les armes
dans les heures qui suivent, mais les croisés ont soin de violer femmes et enfants
avant de les égorger ou de leur ouvrir le ventre. On estime à 70000 le nombre
de civils massacrés. La dernière phase du massacre se joue dans les synagogues
et mosquées de la ville, où les habitants terrifiés se sont réfugiés: ils
espèrent que le caractère religieux des lieux pourrait inspirer les pieux
croisés à la clémence. Il n'en est bien sûr rien: les croisés entrent, et
transforment les lieux de cultes en de vastes charniers. Le massacre des
milliers de civils agglutinés dans la grande mosquée de l'esplanade du temple
durera plusieurs heures. "Tout ce qui respire" dans la ville a été
tué, reportent avec fierté les commandants des croisés.
1090 - 1153 Saint Bernard de Clairvaux, Docteur de l'Église, Doctor
Mellifluus
Saint Bernard de Clairvaux est canonisé
dès 1174, puis promu à Docteur de l'Église en 1830 avant d'être proclamé Doctor Mellifluus en 1953 par le
pape Pie XII. Il est donc un exemple intéressant de ce que l'église catholique
considère, au XXème siècle, comme un comportement exemplaire au Moyen
Âge. En effet, les mérites de Saint Bernard sont grands: ses prêches pour la
deuxième croisades convainquent maints jeunes européens d'aller exterminer les
hérétiques en Orient. Après avoir, en 1146, prêché pour la deuxième croisade
ensemble avec le roi de France en personne, il va en Allemagne prêcher la bonne
parole avec une formule simple: la participation à la croisade est une bonne
affaire, car elle donne automatiquement l'indulgence plénière pour tous les
péchés. Mais les allemands sont moins faciles à convaincre que les Français,
d'autant plus qu'à leurs frontières vivent des slaves non christianisés, que
l'on pourrait exterminer tout en s'épargnant le périlleux voyage jusqu'à
"La mort ou le baptême" -
Saint Bernard
Mais le saint homme a une crainte:
que les soldats allemands ne soient trop doux avec les slaves. Ses prêches
deviennent donc plus précis. Le but de l'entreprise est l'extermination (Vernichtung) des "Païens de l'autre côté de
l'Elbe". Il insiste: le but n'est pas la reconquête de terrains, comme en
Palestine, mais bien une œuvre d'extermination. Les armées des croisés doivent
offrir à tous les païens rencontrés le choix suivant: "Extermination ou
Conversion" (Vernichtung oder
Bekehrung). Ensuite, la formule deviendra, pour des
raisons de marketing & communication "La mort ou le baptême" (Tod
oder Taufe). Le message est
très bien compris par les slaves de l'Est de l'Elbe, qui accrochent tous à la
porte de leurs maison des croix et déclarent accepter la nouvelle religion avec
enthousiasme. Saint Bernard sera déçu du peu de sang versé pendant cette
croisade, alors que le Pape et la hiérarchie romaine se réjouiront de
l'extension des évêchés d'Allemagne du Nord. Un autre motif de satisfaction
sera que cette croisade portera à l'établissement durable d'ordres de
moines-guerriers qui continueront pendant plusieurs siècle à porter
Non content d'avoir réussi à exciter
nombre de catholiques à tuer des mécréants, Saint Bernard entre aussi en
conflit avec plusieurs théologiens de son temps, dont Gilbert de
1182
Les "pogroms latins" de
Constantinople. Dans la ville du pieux patriarche qui mange du pain avec levain,
s'établit, dans le début du XII siècle, une colonie de marchands
"latins", essentiellement originaires de Venise, Gène, Pise et
Amalfi. Mais ces gens ont tout pour déplaire aux prélats orthodoxes: non
seulement ils utilisent du pain sans levain pour le rite de la l'eucharistie,
mais ils font le signe de la croix dans le mauvais sens (de gauche à droite, et
non de droite à gauche comme les orthodoxes) ! Les popes orthodoxes excitent la
populace, et, enfin, en un jour radieux de mai 1182, la foule guidée par les
popes se jette sur les "latins": plusieurs milliers de
"latins", hommes, femmes, enfants sont tués.
1204
1208-1244
Croisade contre les Albigeois
Pendant la deuxième moitié du XIIème
siècle, l'immoralité des clercs chrétiens scandalise de plus en plus les
populations européennes. Un des résultats de ce scandale est le développement
d'églises chrétiennes alternatives à l'église catholique, bien sûr
immédiatement décrétées hérétiques par cette dernière. Les plus importantes de
ces hérésies sont l'hérésie vaudoise et l'hérésie cathare (ou des Albigeois).
Les vaudois sont des protestants avant la lettre qui décident que l'on peut se
passer des prêtres pour adorer dieu. Ils sont immédiatement pris en chasse par
les autorités civiles et ecclésiastiques et doivent se réfugier dans des
vallées alpines reculées. L'hérésie des Albigeois prend une importance bien
plus grande: une bonne partie de la population du Sud de
Le 21 juillet
A part le cas célèbre de Béziers,
cette guerre est le théâtre d'innombrables massacres de civils par les croisés.
On citera l'exemple de Marmande: la ville se rend, en juin 1219, à une armée
composée de 20 évêques, 600 chevaliers et 10000 archers: la population de 5000
personne est entièrement massacrée, y compris les femmes et les petits enfants.
Le plus grand bûcher de la croisade est semble-t-il celui érigé après la chute,
le 3 mai 1211, du château de Lavaur (près de Castres): 400 cathares sont brûles
sur un seul bûcher! La châtelaine est livrée aux soldats, qui, une fois qu'ils
ont fini de s'amuser, la jettent vivante dans un puits et ensuite la couvre de
pierres.
Cette guerre, qui se double d'un
génocide, ne s'arrêtera qu'avec la chute de Monségur, dernière place-forte
cathare, en février 1244. Le premier mars
C'est pendant le génocide des
cathares que l'église catholique crée l'institution de l'inquisition, qui
continuera à brûler des suspects de sympathies cathares bien après la fin de la
guerre. Par exemple, Guillaume Bélibaste, un parfait
cathare vécu caché en Catalogne pendant des décennies. Rattrapé par
l'inquisition, il sera brûlé vif en 1321 à Villerouge-Terménès
(Aude), dont le château appartenait à l'archevêque de Narbonne.
1224 - La légalisation de l'exécution des hérétiques
L'empereur Frédéric II décrète que
l'hérésie doit être punie par la mort ou par la perte de la langue le choix
étant laissé à la discrétion du juge. Cette idée de légaliser une pratique en
vigueur depuis longtemps plaît aux seigneurs chrétiens, et une vague d'actes
législatifs allant dans ce sens traverse l'Europe. En 1231, la constitution
Sicilienne rend absolu le décret de brûler les hérétique, pour s'aligner à la
pratique alors en vigueur en Allemagne. A Venise, le serment ducal est modifié:
tout nouveau Doge doit, dès 1240, juger de brûler tous les hérétiques. En 1255,
Alphonse X le Sage, roi de Castille et de Léon, ordonne de brûler sur le bûcher
tous les chrétiens qui se convertiraient à l'Islam ou au judaïsme. En 1270, une
loi française rend obligatoire de punir les hérétiques par le bûcher, bien que
ce châtiment fût déjà habituel dans ce pays depuis des siècles. L'Angleterre,
qui avait déjà à l'époque une fâcheuse tendance à n'adopter que tardivement les
lois et coutumes européennes, n'adoptera une loi semblable que en 1401.
La pratique de la chasse aux
hérétiques reste disparate et plus ou moins sévère dans les différents pays.
Ainsi, alors qu'à Oxford, à partir de 1166 les hérétiques sont seulement
marqués au fer rouge sur le visage, ils sont déjà mis à mort en grand nombre
sur le continent. Par exemple, en 1199, à Strasbourg, on ne brûle pas moins de
90 hérétiques en un jour. Ce sont ces disparités maintes fois constatées des
pratiques qui pousseront l'église à créer l'inquisition.
1228 - Première loi antisémite espagnole
Le roi Jacques 1er
d'Aragon décide, après une réunion avec plusieurs évêques (les évêques de Vich, de Barcelone et de Gérone participèrent), d'interdire
aux juifs d'avoir des domestiques chrétiens.
1234 - L'invention de l'étoile jaune
Le concile d'Arles décide
d'introduire l'"obligation pour les juifs de porter sur eux des signes
distinctifs". Avec une avance de plus de 500 ans sur les administrations
douanières suisses et suédoises (qui demanderont en 1938 aux allemands
d'apposer un "J" sur le passeport des juifs allemands), et sur l'administration
nazie (qui fera sienne l'invention de l'étoile jaune obligatoire), l'église
catholique invente ainsi le concept d'apposer une marque sur les personnes à
persécuter. Il faut dire que cette invention chrétienne sera peu appliquée.
Mais elle permet de relancer l'antisémitisme en Europe, dont les conséquences
seront dès 1391 tragiques.
1226-1270
Louis IX Roi de France. Enfin un
catholique réputé pieu et intègre accède à la couronne de France. L'église le
canonise dès 1290, en reconnaissant ses mérites, qui, nul ne doute, sont
exceptionnels. En effet, pendant son règne, Saint Louis lance deux croisades,
qui se terminent toutes deux de manière catastrophique: peu importe, c'est
intention (de tuer et de piller) qui compte aux yeux de la miséricordieuse église
catholique! Sur le plan intérieur, Saint Louis fait en sorte que la justice
punisse de manière systématique les blasphémateurs: ils seront mis au pilori,
et auront la langue percée au fer rouge.
1225-1274 - Saint Thomas, Docteur de l'Église, théoricien de l'extermination des
hérétiques et Docteur angélique
Saint Thomas est encore considéré
aujourd'hui comme le grand philosophe catholique. En particuliers, sa Summa Teologica est l'œuvre de
référence de la scolastique catholique et est amplement et souvent cité par le
pape Jean-Paul II dans ses encycliques. Saint Thomas justifie entre autre, dans
En ce qui concerne les hérétiques,
il y a deux choses à considérer, une de leur côté, une autre du côté de
l'Église. De leur côté il y a péché. Celui par lequel ils ont mérité non
seulement d'être séparés de l'Église par l'excommunication, mais aussi d'être
retranchés du monde par la mort. En effet, il est beaucoup plus grave de
corrompre la foi qui assure la vie de l'âme que de falsifier la monnaie qui
sert à la vie temporelle. Par conséquent, si les faux monnayeurs ou autres
malfaiteurs sont immédiatement mis à mort en bonne justice par les princes
séculiers, bien davantage les hérétiques, aussitôt qu'ils sont convaincus
d'hérésie, peuvent-ils être non seulement excommuniés mais très justement mis à
mort.
[Summa Teologica, Secunda Secundae Pars, Question
Saint Thomas traite en détail la
question dans quand faut-il tuer un hérétique: s’il renie l'hérésie, il ne faut
pas le tuer, mais s’il récidive, il faut impérativement le tuer:
Mais, quand ceux qu'on a accueillis
retombent de nouveau, il semble que ce soit le signe de leur inconstance en
matière de foi. C'est pourquoi, s'ils reviennent ultérieurement, ils sont bien
admis à la pénitence, non pas cependant au point d'éviter la sentence de mort.
[Summa
Teologica, Secunda Secundae Pars, Question
Cette pratique sera
institutionnalisée par l'inquisition. Au moment de monter sur le bûcher,
l'hérétique aura la possibilité de se repentir, et de "mourir en bon
chrétien". L'inquisition portera sa grande charité au point que celui qui
se repent sur le bûcher sera tué par étranglement et non par les flammes.
St Thomas jette aussi les bases
doctrinales de la persécution dont les juifs convertis seront victimes: Les
Juifs, s'ils n'ont nullement reçu la foi, ne doivent nullement y être forcés.
Mais, s'ils ont reçu la foi, il faut qu'on les mette de force dans la nécessité
de la garder [Summa Teologica,
Secunda Secundae Pars,
Question
Le Docteur angélique explique qu'il
faut tolérer les rites des juifs, et c'est tout à son honneur, avant d'écrire:
Quant aux rites des autres
infidèles, comme ils n'apportent aucun élément de vérité ni d'utilité, il n'y a
pas de raison que ces rites soient tolérés.
[Summa Teologica, Secunda Secundae Pars, Question
Saint Thomas est considéré
aujourd'hui par l’église comme le grand philosophe catholique par excellence.
Le Thomisme est la philosophie officielle de l'église catholique. Pour s'en
convaincre, il suffit de lire l'encyclique de Jean-Paul II "Foi et
raison" (qui date de 1998, disponible sur le site du Vatican), consacrée
au rapport entre philosophie et religion: le pape y cite à maintes reprises le
Docteur angélique et aucun autre philosophe catholique.
1231
Fondation de l'inquisition. Jusqu'en
1231, la tâche de découvrir, démasquer et punir les hérétiques était du ressort
des évêques. Mais avec le temps, cette tâche devient trop lourde pour ces
bergers du bon peuple chrétien, qui ont tant d'autres lourdes tâches à assumer.
Le pape décide donc de créer une institution séparée, qui aura le temps et les
moyens de se consacrer uniquement à l'éradication de l'hérésie et de la
sorcellerie: l'inquisition. L'inquisition, au cours de son histoire, brûle plus
de un million de personnes, essentiellement des hérétiques, des juifs et des
musulmans convertis au christianisme et des "sorcières". La dernière
sorcière sera brûlée en 1788. Le dernier "hérétique" devra attendre
son tour jusqu'en
L'église ne reniera jamais
l'inquisition, et garantira la continuité historique de l'institution jusqu'à
nos jours, en se limitant à en modifier le nom: il faudra attendre Pie X, en
1906, pour que le "Saint office de l'inquisition" soit renommé "Saint
Office", et 1965 pour que le dit office soit rebaptisé "Congrégation
pour la doctrine de la foi". Enfin, en 1997, le pape ouvre les archives du
Saint Office, et des historiens triés sur le volet sont autorisés à y mener des
recherches. Les estimations du nombre total de victimes de l'inquisition sont
fortement revues à la hausse, le consensus tourne aujourd'hui autour du million
de personnes exécutées, auxquelles il faut ajouter d'innombrables personnes
torturées et dont les biens ont étés saisis.
Souvent, les chrétiens d'aujourd'hui
tendent à argumenter que l'inquisition ne serait qu'une erreur n'ayant rien à
voir avec le christianisme véritable. Ils oublient que l'institution existe
toujours, bien que sous un autre nom. Ils oublient aussi que les pratiques de
l'inquisition (torture et exécution d'hérétiques) avaient commencé déjà peu
après l'arrivée des chrétiens au pouvoir dans
Verset 18: Tu ne laisseras point
vivre la magicienne ("la sorcière" dans d'autres traductions).
Verset 20: Celui qui offre des
sacrifices à d'autres dieux qu'à l'Éternel seul sera voué à l'extermination.
Quand au mode d'exécution, le
bûcher, il est aussi le résultat d'une lecture attentive de
"Il immola sur les autels tous
les prêtres des hauts lieux, qui étaient là, et il y brûla des ossements
d'hommes. Puis il retourna à Jérusalem".
Le même bon roi Josias s'était
d'ailleurs lui aussi, comme l'inquisition, occupé aussi des
"sorcières" de son temps: (Ch. 23 verset 24):
"De plus, Josias fit disparaître
ceux qui évoquaient les esprits et ceux qui prédisaient l'avenir, et les théraphim, et les idoles, et toutes les abominations qui se
voyaient dans le pays de Juda et à Jérusalem, afin de mettre en pratique les
paroles de la loi, écrites dans le livre que le sacrificateur Hilkija avait trouvé dans la maison de l'Éternel".
Aujourd'hui, certains catholiques
modérés et des protestants voudraient se distancer des agissements de
l'inquisition et des chasseurs de sorcières protestants, et affirment que l'exécution
par le feu d'hérétiques et de sorcières n'a rien de chrétien. Hélas, force est
de constater que les inquisiteurs et leur imitateurs protestants agissaient
conformément aux enseignements des textes fondateurs de leur religion, et
beaucoup, sans doute la vaste majorité mais en tout cas les plus célèbres comme
Bernard Gui, Torquemada, et plus tard le Cardinal Bellarmin, étaient des hommes
d'une grande intégrité et certainement de bonne foi, sincèrement convaincus
d'agir pour le bien, même si ce bien était la volonté cruelle de leur dieu
cruel.
Les chrétiens qui essayent
aujourd'hui de dissocier christianisme et inquisition oublient aussi que le
personnel de l'inquisition fut fourni essentiellement par deux ordres religieux
qui existent encore de nos jours, et qui restent généralement très populaires
dans les milieux chrétiens de l'Occident à l'aube du XXIème siècle:
les Franciscains et les Dominicains. Ces deux ordres pauvres, fondés au début
du XIIIème siècle, avaient déjà plusieurs milliers de membres en
1231. Ces deux ordres étaient aussi irréprochables l'un que l'autre, menant une
vie pure, pleine de zèle religieux, à l'abri de toute corruption. Leurs
principes fondamentaux sont: la pauvreté, le travail, l'humilité et la charité.
Il est donc naturel que le Pape se tourne vers ces chrétiens intègres pour
combattre l'hérésie et la sorcellerie. Dès 1244, les deux ordres dépendent
uniquement de Rome. Les évêques étaient obligés de donner l'absolution à tout
Dominicain ou Franciscain qui la demandait, sauf en cas de telles énormités que
le pape seul pouvait être juge. Les prieurs des deux ordres mendiants sont eux
autorisés à absoudre leurs frères de toutes les censures qui auraient pu leur
être infligées et même de relever les ordres d'excommunication. En 1296, cette
autonomie des ordres mendiants fut renforcée par une bulle papale qui libérait
formellement les Dominicains et Franciscains de toute juridiction épiscopale et
les statuts des ordres furent déclarés être les seules lois par lesquelles ils
pouvaient êtres jugés. L'église avait ainsi à son service une véritable armée
d'hommes entièrement dévoués à sa cause. Les premiers inquisiteurs furent tous
Dominicains, mais dans les décennies qui suivirent, les postes d'inquisiteurs
furent, dans de plus en plus de pays, répartis entre les deux ordres.
Dès qu'elle obtient l'autorisation
de pratiquer la torture, l'inquisition est en droit de juger et de torturer les
hommes dès 14 ans, et les femmes dès 12. Plus tard, l'Inquisition Espagnole
supprimera cette discrimination, et, dans un souci d'égalité des sexes qui est
tout à son honneur, s'autorisa à juger et à soumettre à la torture les enfants
des deux sexes dès 10 ans. Pour torturer et juger des enfants plus jeunes,
l'inquisition élabora des stratagèmes légaux, le plus courant était celui de
nommer un "curateur" qui avait la tutelle de l'enfant, et qui ensuite
"assistait" l'enfant au cours de son procès. Il y a eu des cas
d'enfants de 7 ans accusés, torturés et condamnés comme hérétiques. Les enfants
d'hérétiques étaient généralement considérés comme hérétiques eux-mêmes. Si
leur âge ne leur permettait pas d'êtres torturés et jugés, ils étaient
"endormis": on les plaçait dans un bassin d'eau tiède, on les
ligotait, et on leur coupait les artères aux poignets. Cette méthode était
considérée comme particulièrement "miséricordieuse" par les
inquisiteurs.
1237 - On déterre et brûle des cadavres
A Toulouse, alors que la guerre
contre l'hérésie cathare est encore en cours, l'inquisition veut montrer que
même la mort ne mets pas l'hérétique à l'abri de l'inquisition. On fait exhumer
les corps de plusieurs personnes, dont des nobles, puis, après avoir déclaré
qu'ils sont morts en état d'hérésie, on les fait traîner sur la place du
Marché, où ils sont brûlés.
L'idée de déterrer des cadavres pour
les brûler aura un franc succès, et continuera à être pratiquée tant par
l'inquisition médiévale que, plus tard, par l'inquisition espagnole.
1251
Le pape Innocent IV autorise enfin
l'inquisition à pratiquer la torture. L'obtention d'aveux de culpabilité en est
grandement facilitée. L'inquisition peut prononcer, sur la base d'aveux
arrachés par la torture, des peines allant d'une simple prière ou un jeûne
jusqu'à la confiscation des biens et même la prison à vie. Par contre, elle ne
peut prononcer de condamnation à mort. Avec une subtilité tellement
caractéristique de l'église catholique, l'inquisition peut par contre
"passer" un hérétique au bras séculier de la justice pour une
condamnation à mort sur la base des aveux obtenus sous la torture par
l'inquisition. Cette subtilité de procédure permettra à l'église d'affirmer,
par la suite, qu'elle n'a tué personne.
Il faut bien noter que la mise à
mort d'hérétiques date de bien avant l'inquisition: elle commença dès
l'Antiquité. La nouveauté de 1231, est la fondation d'une institution
spécialisée, chargée spécifiquement de la persécution des hérétiques. Il faut
aussi prendre garde à la confusion qu'entretient volontiers l'église catholique
entre "les trois inquisitions": la médiévale, l'espagnole, et la
"moderne" ou "romaine", cette dernière existant encore
aujourd'hui: il s'agit en effet fondamentalement du même principe: l'on
identifie les hérétiques, on les fait avouer par la torture, puis on les
"abandonne" au bras séculier pour l'emprisonnement à vie ou la mort.
Les différences entre les trois inquisitions sont essentiellement des détails
de procédure et de hiérarchie: l'inquisition "médiévale" répond aux
évêques et au pape, celle "espagnole" principalement aux Rois Très
Catholiques, l'inquisition "romaine", qui date de la contre-réforme,
uniquement et directement au Pape. Il faut noter que l'inquisition espagnole et
celle "médiévale" coexisteront avec l'inquisition "romaine"
pendant plusieurs siècles après la contre-réforme.
1310 - Le Grand Autodafé de Toulouse
L'inquisiteur Bernard Gui préside un
spectacle des plus impressionnants: pendant 4 terribles journées, 18 personnes
sont brûlées sur un bûcher devant leurs concitoyens. 65 sont emprisonnées à
vie, dont 3 avec des chaînes, tandis que 20 sont condamnées à de terribles
pèlerinages vers des terres lointaines d'où ils n'ont que peu de chances de
revenir vivants.
Deux ans plus tard, le même Bernard
Gui offre à Toulouse un nouveau grand spectacle, avec une innovation notable:
les os de 36 morts sont exhumés et brûlés. Pour compléter le spectacle, 50
personnes sont condamnées à porter des croix et à des pèlerinages périlleux, 86
sont emprisonnées à vie. L'innovation consiste bien sûr à brûler, dans un même
spectacle, les os d'hérétiques morts et des hérétiques vivants. En effet, le
fait de déterrer des ossements pour les brûler était une pratique toulousaine
depuis 1237.
Quelques chiffres sur les
condamnations de l'inquisition
Les chrétiens du XXème et
du XXIème siècle ont fait de grands efforts pour relativiser les
crimes de l'inquisition. Ils insistent sur le fait que les condamnations à mort
ne représentaient qu'une minorité des condamnations. Cela est vrai, mais il
faut avoir à l'esprit quelles étaient les autres condamnations:
* Le port des croix consistait à
devoir porter à vie, ou pour plusieurs années, le Sanbenito:
un vêtement sur lequel des croix étaient cousues. Le condamné ne pouvait
enlever cette marque d'infamie que dans l'intimité de son logement, et tous ses
biens lui étaient confisqués. Le port des croix était donc une condamnation à
la honte et à l'exclusion sociale.
* L'emprisonnement était en général
un emprisonnement à vie. Une vie très courte, étant donné les conditions des
prisons de l'époque, de l'ordre de quelques semaines pour la vaste majorité des
cas. Souvent, des accusés mourraient en prison pendant la procédure. Ce fut le
cas par exemple de 10 prisonniers qui, dans le grand autodafé de Toulouse de
1310, moururent en prison entre le moment où ils avaient confessé leur hérésie
sous la torture et avant même d'avoir étés condamnés.
* Les pèlerinages, en ces époques où
les voyages étaient très périlleux, équivalaient en pratique à des condamnations
à mort: les retours d'un pèlerin condamné par l'inquisition étaient des
évènements rares.
Il faut ajouter à ces considérations
un commentaire sur le sort de ceux qui n'étaient pas condamnés. Un pourcentage
qui n'est pas connu avec précision, mais de l'ordre de 10% des accusés
échappaient à la condamnation. Cela impliquait de résister à la torture sans
confesser. Ces survivants étaient donc des estropiés graves, qui survivaient
mais étaient incapables de travailler ou d'avoir une vie plus ou moins normale.
Le Registre des Sentences de Bernard
Gui, inquisiteur à Toulouse, couvrant une période de 1308 à 1322, révèle les
chiffres suivants concernant les condamnations:
Remis au bras séculier et brûlés: 40
Emprisonnés: 300
Condamnés à porter des croix: 138
Condamnés à des pèlerinages: 16
Bannis en terre Sainte: 1
Maisons détruites: 16
Condamnation du Talmud: 1
Fugitifs: 36
Os exhumés et brûlés: 67
Os Exhumés de ceux qui auraient dû
êtres emprisonnés: 21
On voit donc que sur un total
d'accusés vivants de 548, pas moins de 356 (soit 65%) sont condamnés à mort ou
à une peine équivalente à la peine de mort. Le chiffre de 40 condamnés à mort
(7%) est donc fortement trompeur.
1314 - Le premier Autodafé en Espagne
Contrairement à ce que l'on croit
parfois, l'inquisition ne fut pas une invention espagnole. Mais ce pays, parti
en retard, mets les bouchées doubles pour rattraper, puis dépasser les autres
pays européen. En Aragon le 12 mai 1314, 6 hérétiques vivants et plusieurs
cadavres exhumés sont brûlés devant la foule en délire. L'autodafé espagnol est
un spectacle complexe: D'abord, une cérémonie religieuse a lieu dans une
église, au cours de laquelle on "réconciliait" les hérétiques (ceux
vivants, pas les morts!) avec l'Église. Puis, les hérétiques étaient
"abandonnés au bras séculier" qui s'occupait de leur exécution. Pour
parfaire l'hypocrisie, les fonctionnaires séculiers ne participaient pas à la
cérémonie religieuse. 40 jours d'indulgence étaient promis à tout fidèle qui
assistait à l'autodafé. Très rapidement, l'Espagne devient le pays des grands
autodafés: ainsi, en 1360, à Valence, on ne brûle pas moins de 80 hérétiques en
un seul autodafé. Le record espagnol, jamais battu à ce jour, est de 107
hérétiques exécutées en un autodafé, en 1499 à Cordoue.
Autodafé - 400 ans avant les nazis,
des chrétiens brûlent des livres qui ont l'heur de leur déplaire.
En Espagne, l'inquisition brûle des
centaines de milliers de livres au cours de son histoire, essentiellement des
Anciens Testaments et des livres de prières juives pris à des conversos.
Brûler des livres est une tradition
plurimillénaire des chrétiens. Saint Paul déjà brûlait des livres avec ses
disciples. Les proto-chrétiens, déjà, avaient la fort mauvaise habitude
d'incendier des bibliothèques, surtout lorsqu'elles étaient rattachées à des
temples. Saint Grégoire le Grand inaugura son pontificat en mettant le feu à
une grande bibliothèque sur le Palatin. Actuellement, les catholiques ont
certes renoncé à cet usage, mais pas les protestants Nord-Américains. A l'aube
du IIIème millénaire, les Southern Baptists, une des plus grandes églises protestantes
américaines, s'adonnent à de fréquents bûchers de livres. Les Harry Potter sont
parmi leurs favoris pour ces exercices.
1347-54
Dans toute l'Europe sévit
1391 - Les débuts de la violence contre les Juifs en Espagne
Pendant la domination des Maures en
Espagne, les 3 monothéismes méditerranéens (Islam, Judaïsme, christianisme)
avaient coexisté pacifiquement pendant plusieurs siècles. Mais cette
coexistence de plusieurs religions sur un sol désormais contrôlé par des rois
chrétiens déplaît aux prélats catholiques, qui n'ont de cesse de répandre
l'antisémitisme dans la populace et aussi dans les plus hautes sphères du
pouvoir. En 1391, la populace excitée par les prélats détruit les ghettos juifs
de Séville, Barcelone, Valence, Tolède et d'autres centres importants. La furie
destructrice de cette année culmine en juin à Séville, où la foule, excitée par
l'archidiacre Martinez, tue plus de 4000 juifs.
1415
Dans les années 1390, un prêtre de
Prague commence à prêcher en tchèque plutôt que en latin: pour cette idée
saugrenue de parler une langue que les fidèles comprennent, Jan Hus est accusé
d'hérésie. Il fuit Prague. Lorsque le concile de Constance est convoqué,
l’empereur d'Allemagne propose à Hus un sauf-conduit pour lui permettre d'aller
exposer son point de vue au concile, mais ce qui est évidemment un piège: peu
après son arrivée, il est emprisonné et mis au secret en novembre 1414. Suit un
classique procès d'inquisition, qui conclut à la culpabilité de Jan Hus,
hérétique obstiné et impénitent: il est mis à mort sur le bûcher le 6 juillet
1415.
1478 - Fondation de l'Inquisition Espagnole
L'Espagne, désormais unifiée par le
mariage d'Isabelle de Castille et Ferdinand d'Aragon, est un pays qui se
définit, à cette époque, essentiellement dans son opposition aux musulmans, qui
dominent encore à cette date le Sud de la péninsule. Afin de combattre plus
efficacement l'hérésie dans leur pays, Isabelle et Ferdinand obtiennent du pape
Sixte IV, le pouvoir de nommer les Grands inquisiteurs en Castille et en
Aragon. La décision a surtout des implications financières, puisque l'inquisition
confisque les biens des condamnés. Mais le pape accepte, entre autre parce
qu’il croit à la promesse des souverains espagnols, lesquels se sont engagés à
utiliser les fonds pour financer la guerre contre les arabes, alors que, depuis
Saint Grégoire Le Grand, les papes sont devenus friands de guerres contre les
infidèles.
1483
Tomás de Torquemada est nommé Grand Inquisiteur de Castille.
Ce moine dominicain fait un ample usage de la torture et de la confiscation des
biens de ses victimes. Les estimations du nombre de personnes brûlées pendant
son mandat varient, selon les historiens d’environ 2000 à 8800 brûlées vifs
auxquels il convient d'ajouter 9654 torturés ou emprisonnés à vie.
Torquemada deviendra le symbole
vivant de l'inquisition. Le pape Eugène IV le nommera "défenseur de la
foi". L'historien catholique espagnol Sebastian
de Olmeda l'appellera "Lumière de l'Espagne,
sauveur de son pays, honneur de son ordre". Certains catholiques, désireux
de débarrasser l'histoire de leur église de cet encombrant personnage, ont
inventé et décrit un Torquemada désireux de s'enrichir et violant des femmes.
Or, la réalité est autre. L'homme est incontestablement d'une grande intégrité.
Il refusera systématiquement des promotions hiérarchiques dans l'église et dans
son ordre. Il ne cherchera jamais à obtenir un avantage financier pour son
ordre. Il aurait pu devenir évêque et même cardinal avec facilité. Ses biens
personnels ne s'accrurent pas d'un centime au cours de ses longues années comme
inquisiteur. Il n'utilisait que des vêtements simples de toile de chanvres et
de coton, refusant ceux en lin. Patriote et chrétien, il participe à la
politique de christianisation de l'Espagne en mettant en œuvre deux préceptes
qui figurent dans le chapitre 22 de l'Exode, un des textes fondamentaux de
Verset 18: Tu ne laisseras point
vivre la magicienne ("la sorcière" dans d'autres traductions).
Verset 20: Celui qui offre des
sacrifices à d'autres dieux qu'à l'Éternel seul sera voué à l'extermination.
Torquemada considérait sa mission
comme sacrée. Son bagage culturel était imposant, son esprit large et son
intelligence ouverte. Il n'était pas un fou ou un criminel au sens classique du
terme, mais un chrétien sincère, instruit, et en même temps un Espagnol
patriote, convaincu que les conversos et les
hérétiques étaient un danger pour l'Espagne et la foi, et donc qu'il devait les
combattre.
Dans les dernières années de sa vie,
Torquemada investira toute son intelligence dans la rédaction d'un code
inquisitorial, qu'il continuera à affiner jusqu'à une dernière édition en 1498,
quelques mois avant sa mort. Ce code contient nombre de sages dispositions,
comme le fait qu'il faut qu'au moins un, mais de préférence deux inquisiteurs
doivent toujours être présent pendant les tortures des accusés.
La torture sous Torquemada:
Sous Torquemada, la torture est
standardisée, laissant peu de place aux fantaisies perverses de bourreaux et
inquisiteurs. Une procédure précise sera désormais suivie: dans un premier
temps, les bourreaux, habillés de longues tuniques noires, des capuchons
baissés sur la tête avec deux trous pour les yeux, un pour le nez et un pour la
bouche, saisissent l'hérétique et le déshabillaient jusqu'à la ceinture. Alors
les inquisiteurs se placent devant l'hérétique et, à plusieurs reprises, le
supplie de confesser ses fautes. Si l'hérétique s'obstine à nier, alors les
inquisiteurs ordonnent qu'il soit torturé, en avertissant tout d'abord
l'hérétique qui va être torturé que, en cas de lésion, de fracture des membres
ou de mort, la responsabilité doit être rejetée uniquement sur l'hérétique
lui-même, car les tortures ne sont que la suite de sont entêtement
récalcitrant.
La première phase du supplice était
celle de la corde: les mains liées derrière le dos avec une corde qui glissait
dans une poulie attachée au plafond, l'hérétique était soulevé et maintenu en
suspension pendant un certain temps. Puis à l'improviste le bourreau lâchait la
corde et le corps retombait alors brusquement jusqu'à environ
La torture à l'eau constituait la
deuxième phase: on liait étroitement la personne après l'avoir étendue sur une
sorte de chevalet en bois n'ayant comme support qu'une barre transversale, sur
laquelle le corps, retombant en arrière, se courbait, amenant le patient en
position renversée, les pieds vers le haut et la tête en bas. A cause de cette
position, la respiration devenait extrêmement difficile et les mouvements que
l'hérétique faisait automatiquement pour trouver un peu d'air provoquaient la
torsion des mains et des pieds liés, et les cordes blessaient les tissus. On
introduisait alors dans la bouche, en le faisant arriver jusqu'au fond de la
gorge, un linge fin imbibé d'eau qui était disposé de façon à recouvrir
entièrement les narines. C'est alors que l'on versait de l'eau dans bouche,
goutte à goutte, si lentement que l'hérétique torturé en buvait environ un
litre par heure. Le malheureux n'avait à aucun moment la possibilité de
respirer librement. Dans ses efforts pour aspirer de l'air, il engloutissait de
l'eau, et il en résultait une rupture des vaisseaux sanguins de la gorge: le
chiffon était généralement retiré imbibé de sang.
Le troisième degré de la torture, le
feu, était pratiqué en liant les mains et les pieds de façon à rendre
impossible au prisonnier tout changement de position. Puis on frottait ses
pieds avec de l'huile, du lard ou une autre matière graisseuse et on les
exposait devant un feu jusqu'à ce que la peau se gerce et que les os et les
nerfs se découvrent complètement.
Il faut préciser que les
inquisiteurs savaient qu'ils torturaient parfois des catholiques
irréprochables. L'on sait que la chose a du être discutée à l'intérieur de
l'église, car le Cardinal Jiménes de Cisneros a écrit
que les catholiques, s’ils étaient injustement torturés, selon les lois de
l'inquisition, s'envolaient directement au paradis.
La torture pouvait être, dans
l'inquisition espagnole, appliquée aux enfants à partir de 10 ans et aux vieux
jusqu'à seulement 60 ans.
1485 - Le Martyr de Saint Pedro Arbuès
La nuit du 15 septembre
Aussitôt l'inquisition se déchaîne:
on accuse les conversos d'être derrière le crime, Dès
décembre 1485, et jusqu'en
Le pauvre Pedro Arbuès
sera béatifié par Alexandre VII en 1664, puis canonisé par le pape Pie IX le 29
juin 1867.
1486 (ou 1487) - Publication d'un manuel de la chasse aux sorcières
Deux dominicains allemands, Jakob Sprenger, Doyen de l'université de Cologne, et Heinrich Institoris (Kraemer de son vrai
nom), professeur de théologie à l'université de Salzburg, publient le Malleus Maleficarum: il s'agit
d'un épais volume de plus de 400 pages qui est un "guide" (bien sûr
approuvé par la hiérarchie ecclésiastique) de la chasse aux sorcières: on y
apprend comment les identifier (p. ex., une femme qui a caressé un chat noir
alors qu'une personne s'est sentie mal à une distance de quelques centaines de
mètres), les torturer pour les faire avouer, et comment les inquisiteurs
peuvent s'absoudre mutuellement après la séance de torture. L'ouvrage affirme
aussi que nier l'existence de la sorcellerie est en soi une hérésie très grave
(passible de la mort sur le bûcher). Pendant plus de deux siècles et demi en
Allemagne, après la publication du Malleus Malleficarum nier l'existence de la sorcellerie sera
passible de la peine de mort. Le manuel devient un Best Seller. Le Malleus fera l'objet de pas moins de 26 éditions entre 1486
et 1600. il deviendra l'ouvrage de référence pour les chasseurs de sorcières
catholiques, et aussi protestants. L'action des deux doctes universitaires
dominicains est approuvée par le Pape Innocent VIII, qui les charge déjà en
1484, par la bulle Summis desiderantes
affectibus, d'extirper la sorcellerie de l'Allemagne.
Le texte de la bulle de Sa Sainteté le souverain pontife est inclus dans la
préface des éditions catholique du livre.
1492 - Expulsion des juifs d'Espagne
Le pieu Ferdinand d'Aragon et sa
très pieuse épouse Isabelle de Castille, rois d'Espagne, expulsent les juifs de
leur royaume. Les juifs ont le choix entre se convertir, pour subir les foudres
de l'inquisition (qui brûlera nombre d'entre eux en les accusant d'être des
"faux convertis"), ou partir. Plus de 160000 juifs quittent
l'Espagne. La hiérarchie catholique ne reste pas indifférente à cette mesure
d'une cruauté effarante: elle approuve la mesure, le pape encourage les autres
souverains européens à s'inspirer de l'exemple espagnol. Dans toute l'Europe,
les évêques se mobilisent pour pousser les gouvernements à empêcher l'entrée
sur leur territoire aux juifs expulsés. En 1494, le pape accorde le titre de
Rois Catholiques à Isabelle et Ferdinand pour les remercier.
Les juifs qui choisissent de se
convertir seront persécutés par l'inquisition avec une détermination
impressionnante: jusqu'au XVIIIème siècle, l'on fera le "Test
du Lard" aux convertis juifs et à leurs descendants: une salade aux
lardons est proposée au "converti": si l'on constate qu'il a écarté
les lardons en mangeant, on le brûle comme "faux converti". La
méthode sera aussi appliquée aux musulmans convertis et à leurs descendants.
Si l'expulsion des juifs d'Espagne
est la plus grande expulsion du genre que l'histoire ait enregistré, elle ne
fut pas la première. En France, les prélats catholiques avaient déjà obtenu une
expulsion des juifs en 1306, qui fut ensuite révoquée, avant d'être confirmée
en
1493 - Le premier indien d'Amérique au paradis
Lorsque Christophe Colomb, qui a
pris soin d'emmener un moine dans ses bagages, arrive en Amérique, il rencontre
des indiens, qui, écrira-t-il, sont des gens amicaux et serviables. Sans doute
pour leur montrer comment l'Europe chrétienne traite les étrangers amicaux et
serviables, il enlève douze d'entre eux qu'il amène en Espagne. A l'arrivée,
l'un d'entre eux tombe malade: avant sa mort, il est baptisé en vitesse, ce qui
permet à la cour des Rois Très Catholiques d'exulter, car un indigène du
Nouveau Monde a pu entrer au paradis chrétien. Cette triste histoire marquera
le début de la tragique christianisation des indiens d'Amérique, dont l'épisode
des réductions du Paraguay et les persécutions des indiens Pueblo ne seront que
deux épisodes parmi les plus tragiques.
1499
C'est en cette année qu'a lieu le
plus grand autodafé ("acte de foi") que l'histoire espagnole ait
enregistré: en un seul autodafé, l'inquisiteur Diego Rodrigues Lucero brûle vifs pas moins de 107 juifs convertis au
christianisme à Cordoue.
XVIème siècle
Le drame des castrats. L'église
ayant décidé que les femmes ne peuvent entrer dans le chœur des églises, un
problème tragique se pose: comment ne pas torturer les oreilles des pieux
prélats du Christ en les privant des voix hautes, si importantes dans les
chœurs pour louer l'amour de dieu? Une solution barbare est trouvée: l'on
privera d'organes sexuels de jeunes garçons dont la voix aura été reconnue
comme belle. Les chœurs de
Cette pratique barbare ne cessera
qu'en 1878, sur ordre du Pape Léon XIII. La pratique est encore très répandue
pendant le XIXème siècle, au point que Rossini, lorsqu'il compose sa
"Petite Messe Solennelle" écrit, tout naturellement, qu'il suffira,
pour exécuter celle-ci, "d'un piano et d'une douzaine de chanteurs des
trois sexes, hommes, femmes et castrats".
1506 Le Pogrom de Lisbonne
Un nombre important de juifs
expulsés d'Espagne en 1492 avaient trouvé refuge au Portugal. Les historiens
citent des chiffres allant de 90000 à 150000. Ce fut une chance inouïe pour ce
pays, car ces réfugiés étaient en bonne partie des personnes instruites,
médecins, banquiers, commerçants, et certains arrivèrent au Portugal avec une
partie de leur fortune. Les sentiments à leur égard de la population étaient
donc, au départ, plutôt positifs. Mais cette population nouvelle déplaît à une
partie du clergé, et suscite les convoitises de l'inquisition espagnole. Cette
dernière soudoie donc des prélats portugais pour répandre l'antisémitisme. En
quelques années, un succès important est obtenu: à Lisbonne, au cours d'une
journée de folie meurtrière qui passera à l'histoire sous le nom de Pogrom de
Lisbonne, 3000 juifs sont tués par de pieux catholiques excités par les
prélats. Mais le clergé portugais ne s'arrête pas en si bon chemin. Il demande
la création d'une inquisition portugaise, sur le modèle de celle que leurs
voisins espagnols ont la chance d'avoir. 1536 marque la date officielle de la
création de l'inquisition portugaise. Dans ce pays où il fait bon vivre,
l'inquisition entre lentement en action, et le premier Autodafé n'est célébré
qu’en 1540. De 1540 à 1580 (date de l'invasion du Portugal par l'Espagne),
l'inquisition portugaise célébrera environ 40 Autodafés, avec un total de 2500
condamnations dont 170 au bûcher. L'arrivée de Philippe II, roi d'Espagne, au
pouvoir en 1580 accélère enfin les choses: les autodafés se multiplient, et en
20 ans il y aura 3200 condamnations dont 160 au bûcher, soit une augmentation
du rythme annuel de près de 100%.
XVIème siècle
Jules II Della
Rovere pape. Habile chef militaire, il porte l'armure pendant une messe,
lorsqu'un moine insolent lui fait remarquer que l'habit n'est pas approprié.
"Quand il s'agit de conquérir des terres, Dieu ne regarde pas l'habit,
mais la foi de son serviteur", lui répond-il, et passe ainsi à l'histoire.
Dieu lui permet effectivement de conquérir Bologne, qui est, comme il se doit,
mise à sac.
1521
Inspiré par l'Esprit Saint, qui
n'avait apparemment rien d'autre à faire, un moine allemand, Martin Luther
traduit le "Nouveau Testament" en quelques semaines. Le diable vient
le tenter pendant qu'il travaille: Luther ne trouve rien de mieux à faire que
de lui lancer un encrier qui tache le mur! La tache est depuis religieusement
préservée pour les touristes (château de Wartburg), dans le Land de Thüringen.
L'événement pourrait sembler insignifiant.
Il n'en est rien, car il inaugure le plus grand schisme de la chrétienté: dans
les siècles qui suivront les chrétiens se massacreront entre eux avec encore
plus d'enthousiasme qu'ils n'ont massacré et brûlé les non-chrétiens, les
hérétiques, les sorcières, les juifs et musulmans convertis, etc.
Luther écrira et dira à plusieurs
reprises qu'il faudrait brûler les synagogues et chasser les juifs des villes:
il se situe ainsi dans la tradition initiée par les pères de l'église
catholique, et qui sera perpétrée jusqu'au XIXème siècle par
l'inquisition, et même jusqu'au XXème par ses imitateurs en chemise
brune.
En 1543, ce bon moine publie un
pamphlet antisémite intitulé "Les juifs et leurs mensonges". Les
brèves citations ci-dessous donnent une impression générale du niveau d'amour
pour le prochain pratiqué par Luther:
"Leur [des juifs, note de
traduction] haleine pue de l'or et de l'argent des païens; car il n'y a jamais
eu sous le soleil, et il n'y a pas et il n'y aura jamais plus avare qu'eux, comme
cela peut être constaté dans leur usure malhonnête. Donc sachez, mes chers
chrétiens, que, après le diable, vous n'avez point plus venimeux, plus véhément
et plus ennemi qu'un véritable juif qui désire sincèrement être un juif ...
Est-ce que leur Talmud et leurs rabbins n'enseignent-ils pas que ce n'est pas
un péché que de tuer si un juif tue un païen, mais que c'est par contre un
péché si il tue un frère en Israël ? Ce n'est pas un péché pour lui de ne pas
tenir une promesse envers un païen. Donc, voler - comme ils le font en prêtant
de l'argent - d'un païen est un service divin ...maintenant, qu'allons-nous
faire avec ces juifs, rejetés et condamnés ?"
Luther donne son conseil sincère sur
quoi faire avec les juifs:
Brûler leurs synagogues, écoles,
enterrer et couvrir avec de la saleté tout ce qui ne brûle pas (...) Je
recommande de raser et détruire leurs maisons (...) Je recommande qu'on leur
prenne leurs livres de prière, qui contiennent de telles idolâtries, mensonges,
insultes et blasphèmes (...) Que l'on interdise à leurs rabbins d'enseigner
sous peine de mort (...) Que l'on leur prenne leurs trésors d'or et d'argent
(...) Mais si les autorités civiles sont réticentes à user de la force pour
restreindre leur vice diabolique, alors les juifs devraient êtres expulsés de
leur pays et renvoyés à Jérusalem ou ils pourront mentir, injurier, diffamer,
assassiner, voler, pratiquer l'usure et la moquerie, et se laisser aller à
toutes ces infâmes abominations qu'ils pratiquent parmi nous.
[Traduit de l'anglais par le
soussigné: je n'ai pas réussi à me procurer une version allemande ou française
du livre]
Il faut préciser que les églises
protestantes allemandes continuent à ce jour à considérer Luther comme un grand
homme, à utiliser sa traduction de la Bible, et à se référer à ses écrits.
1524 - Une année ordinaire de chasse aux sorcières
Sans doute pour battre le record
détenu par Bamberg de 600 sorcières brûlées en un an, l'on met à mort dans la
province de Côme pas moins de 1000 sorcières en un an. Ensuite, pendant
plusieurs années, l'on continue à en brûler un peu plus d'une centaine par
année dans cette charmante petite ville. Ces chiffres peuvent impressionner,
mais il faut se souvenir qu’à l'époque Cologne brûlait régulièrement environ
300 sorcières par an, et plusieurs villes européennes arrivent à maintenir un
rythme tout à fait honorable de 200 exécutions de sorcières par an.
1527
Sac de Rome: des soldats protestants
massacrent la totalité de la population de Rome, soit environ 40000 personnes,
et pillent la ville. Le Pape est sauvé par les gardes suisses. Il s'enferme
avec eux à Castel Saint-Ange pendant que la population est massacrée. Lui-même
s'en tire avec une grosse frayeur. Les Suisses catholiques y gagnent un
débouché professionnel à l'étranger, qui se perpétue aujourd'hui.
1547 -
On a vu que l'Espagne fut, sous la
domination Maure, un société multiculturelle où les trois monothéismes
méditerranéens coexistaient. Lorsque les chrétiens reprirent le pouvoir dans la
péninsule ibérique, ils eurent hâte de mettre fin à cette coexistence pacifique
par une série de mesures poussant Maures et Juifs à se convertir. Mais cela ne
suffisait pas aux prélats catholiques, car ils suspectaient toujours que sous
tout converti, et même sous tout descendant de converti, se cache en fait un
faux chrétien qui continuait à pratiquer sa religion d'origine en cachette. Les
ecclésiastiques catholiques inventent donc la notion de Limpieza,
ou pureté raciale. Peu à peu des voix montent du clergé pour que les charges
ecclésiastiques et étatiques soient réservées à ceux qui sont descendants de
chrétiens et non de Maures ou de conversos. D'abord,
l'Athénée (la future université) de Salamanque commence à exiger un certificat
de limpieza de ses étudiants. Ces certificats sont
délivrés par l'inquisition. Puis, en
Il faudra attendre 1835 pour
l'abolition des Statuts de Limpieza, mais le
certificat de limpieza continuera à être exigé aux
aspirants officiers de l'armée et aux candidats à certaines hautes charges de
l'état jusqu'en 1865. Moins d'un siècle sépare la fin de la pratique de
1553
Calvin, qui condamne les excès de
l'Église Catholique, fait décapiter le libre penseur et médecin Michel Servet,
qui avait découvert la circulation du sang. Il n'est jamais que l'un des plus
de 15 hérétiques que le réformateur fait exécuter pendant sa dictature sur
Genève.
Calvin joue un rôle très actif dans
l'arrestation, puis la condamnation à mort de Michel Servet. Il échangea
d'abord une correspondance avec lui, puis, lorsque, fuyant l'inquisition,
Servet arriva à Genève, Calvin le fit arrêter. Calvin avait dit à son ami le
réformateur Farel que si Michel Servet devait venir à Genève, il ne le
laisserait pas repartir vivant. Il tient donc sa promesse en intervenant
personnellement au procès en plaidant pour l'exécution. La seule clémence qu'il
veut bien concéder à Servet est l'exécution par décapitation plutôt que par le
bûcher. Après l'exécution, le corps de Michel Servet est brûlé, avec un
exemplaire de l'un de ses livres.
1559
L'invention de l'imprimerie
permettant à un nombre croissant de personnes de s'informer, l'église réagit en
publiant l'Index (Index Additus Librorum
Prohibitorum). Pour que cette publication soit tenue
à jours avec soin,
1566 -1572
Pie V pape. Ce Saint de l'Église
catholique se vante publiquement plusieurs fois d'avoir, pendant sa carrière
d'inquisiteur, allumé de ses propres mains plus de 100 bûchers d'hérétiques
qu'il avait lui-même accusés, confondus et condamnés.
En 1569, il ordonne l'expulsion des
juifs des États de l'église. Toutefois, avec un pragmatisme tout catholique, il
permettra à certains commerçants juifs de rester à Rome et à Ancône, dans des
conditions humiliantes.
Les juifs romains sont désormais
enfermés dans un ghetto, et en plus, une coutume, qui restera en vigueur
jusqu'à la chute des États de l'Église, est instaurée: pour humilier
publiquement les juifs, chaque nouveau pape passe devant le ghetto, où le Grand
Rabbin de Rome lui tend une copie du Pentateuque (une partie de l'Ancien
Testament). Après quoi le pape lui restitue le texte accompagné de plusieurs pièces
d'or, en déclarant que, s’il respecte la loi de Moïse, il désapprouve le cœur
dur des juifs. Cette cérémonie voulait marquer la conviction chrétienne que les
juifs devraient reconnaître leur erreur et se convertir au christianisme.
Pie V publie aussi une nouvelle
édition du catéchisme officiel de l'église, dans lequel l'amour du prochain et
la miséricorde ont bien sûr une place importante.
A la fin de sa vie, ce pieu
dominicain dira regretter surtout d'avoir été trop indulgent.
1568 - Le premier ordre de génocide des Temps Modernes
Le 16 février 1568, le Saint pape
Pie V signe le premier ordre de génocide des Temps Modernes. Depuis quelques
années, les habitants des Pays-Bas ont adhéré en majorité aux doctrines de
Luther. Plus grave encore pour Saint Pie V, il semble que des actes
d'iconoclastie se soient produits. Le Saint pape donne donc l'ordre à Philippe
II, Roi d'Espagne et des Pays-Bas, de procéder à l'extermination de l'ensemble
de la population, soit environ trois millions d'habitants, sauf quelques
personnes qu'ils nomment expressément dans son ordre. Le pieux Philippe II
demande 10 jours plus tard au Duc D'Albe d'exécuter la sentence. Cet habile
général est, depuis l'été 1567, au Pays-Bas, avec une petite armée de 10000
fantassins, 1200 cavaliers et pas moins de 2000 courtisanes. Il se met vite à
la tâche, malgré ses moyens limités. Dans une lettre à Philippe II il affirme
avoir déjà éliminé "800 têtes" au cours de la seule Semaine Sainte de
l'an 1568. Rapidement, la population se révolte en arme contre la petite armée
chargée de l'exterminer. Combien de personnes mourront suite à la sentence
papale ? Il est difficile de l'estimer. Selon le Duc D'Albe lui-même, il
parviendra à exterminer 18600 personnes en 6 ans de génocide. Après avoir
échoué dans sa tentative de génocide aux Pays-Bas, le Duc sera rappelé en
Espagne, et, après une brève période de disgrâce, il se verra confier de
nouvelles missions lors de l'invasion du Portugal. Il mourra finalement dans
son lit, sans ne jamais avoir regretté aucun de ses gestes aux Pays-Bas.
1547-1593
Guerres de religion en France
Les sous-sectes chrétiennes se
livrent en France à une guerre civile sans merci, interrompue par plusieurs paix
et trêves temporaires. Pendant une de celles-ci a lieu le massacre de 20000
protestants, hommes, femmes et enfants, en une nuit (Nuit de
1591 - Une deuxième série d'Autodafés en Espagne
Ayant pris le pouvoir au Portugal en
1580, Philippe II, pieux souverain catholique espagnol, a assuré aux juifs et conversos de ce pays qu'ils pourraient désormais librement
se déplacer en Espagne et Portugal. Hélas, de nombreux juifs et conversos, voyant le nouvel activisme de l'inquisition
depuis l'arrivée de Philippe II au Portugal, pensent qu'ils seront plus
tranquilles en Espagne. Mal leur en prend! Les inquisiteurs espagnols, qui
n'ont eu, depuis des décennies, pratiquement que des sorcières et quelques
blasphémateurs à se mettre sous la dent, voient cette arrivée de juifs et conversos comme une manne tombée du ciel. Immédiatement les
dénonciations s'accumulent chez les inquisiteurs, qui saisissent l'opportunité
de relancer leurs activités. En 1591, le premier autodafé de conversos, "nouvelle série", a lieu à Tolède: un
seul malheureux monte sur le bûcher, alors qu'une trentaine de condamnés voient
leurs biens saisis et doivent, pour certains, finir leur existence en prison,
et pour d'autres entreprendre de périlleux pèlerinages en portant le Sanbenito. De nombreux Autodafés se succèdent, mais ici
encore on remarque que le nombre de bûchers est faible par rapport à celui des
condamnations à la prisons à vie. Cette retenue de l'inquisition disparaîtra à
la mort de Philippe II en 1598, et les choses ne se calmeront pour les conversos en Espagne qu’à partir de l'expulsion des Maures
en 1609.
Fin du XVIème
- début du XVIIIème siècle
La conversion forcée des Indiens
Pueblo.
Remontant depuis la côte du Golfe du
Mexique, les explorateurs Espagnols, toujours accompagnés de moines et de
prêtres, entrent en 1598 en contact avec les Indiens "Pueblo" dans le
territoire qui est aujourd'hui l'état US du Nouveau Mexique: différents des
indiens nomades des plaines du Nord, et aussi des indiens plus combatifs que
les Espagnols ont rencontré au Mexique et en Amérique du Sud, les Indiens
Pueblo vivent dans des villages (les "Pueblos") de maisons de brique
à 2-3 étages, sont pacifiques et pratiquent l'agriculture. Ils pratiquent une
religion dans laquelle ils vénèrent le "Père Ciel" et la "Terre
Mère", craignent des démons (les Skinnwalkers)
qui marchent au soleil couchant sur la crête des montagnes, vénèrent les
corbeaux comme étant des réincarnations de leurs ancêtres. Ils ont aussi un
riche panthéon de dieux assez semblables aux dieux grecs, leur dieu principal
étant la femme-araignée. Les cérémonies sont célébrées dans des petites églises
familiales, les Kivas. Ces agriculteurs pacifiques deviennent immédiatement
l'objet de l'attention des prêtres Espagnols, impatients de remplacer le culte
de Père Ciel et Terre Mère par celui du dieu dont on boit le sang au cours des
cérémonies: les chamanes indiens sont accusés de "sorcellerie" et
exécutés. Les Kivas sont détruites par les militaires espagnols. Les cérémonies
religieuses traditionnelles sont interdites, sous peine de mutilations. Les
indiens surpris en train de célébrer une cérémonie traditionnelle auront un
bras ou un pied coupé. Malgré tout, des indiens continuerons à pratiquer leurs
cérémonies, en cachette, la nuit. Les prêtres catholiques utiliseront ce fait
dans des sermons, que les indiens Pueblo citent encore aujourd'hui avec
amertume: les prêtres déclareront que la religion indienne est celle des
ténèbres, puisque les cérémonies se font de nuit, alors que le christianisme
est la religion de la lumière, puisque l'on mange la chair et l'on boit le sang
du dieu chrétien en plein jour. Plusieurs révoltes sanglantes jalonnent
l'histoire de la christianisation des Pueblos. La persécution religieuse des
indiens Pueblos ne cessera qu'après l'annexion du territoire par les USA en
1847.
1600
Giordano Bruno est brûlé vif à Rome,
condamné pour hérésie. Il avait osé définir l'univers comme étant
"infini", et émis l'hypothèse de l'existence de formes de vie hors de
la terre. C'en était trop pour l'église. Au bout de huit ans de procès, au
cours duquel des aveux lui sont arrachés par la torture, il est condamné à mort
comme "hérétique obstiné et impénitent". Il se défend en essayant de
montrer que ses idées ne sont pas en contradiction avec les doctrines
chrétiennes, en vain. Il est brûlé en public à Rome, au Campo dei Fiori. On
aura soin de le bâillonner avant de l'amener au lieu d'exécution, pour éviter
tout risque que ses paroles ne troublent la foule venue assister au spectacle. Son
principal accusateur, le Cardinal Bellarmin, un pieux et docte Jésuite, qui
donnera tous ses biens aux pauvres, sera plus tard canonisé, et, en 1930,
proclamé "Docteur de l'église".
Il est intéressant de noter que, si,
dans le cas de Galilée, l'église catholique exprimera quelques regrets à la fin
du XXème siècle, et le réhabilitera même partiellement en 1992, elle
ne se repentira jamais de l'exécution de Bruno. Bien au contraire, elle
s'opposera avec véhémence à l'installation d'une statue de Giordano Bruno à
Rome en 1889. En 1929, le pape demandera à Mussolini de détruire cette statue,
avant de canoniser, puis de nommer "Docteur de l'Église" le Cardinal
Robert Bellarmin, accusateur de Giordano Bruno. Plus récemment, en février
2000, lorsque se tient à la faculté théologique de Naples une conférence sur
Giordano Bruno, le Saint Siège fait envoyer au président de la conférence un
"message", signé par le Cardinal Angelo Sodano,
secrétaire d'état au Vatican, ou il est écrit que "Le cheminement de sa
pensée [de Giordano Bruno, note de l'éditeur] (...) l'a porté à des choix
intellectuels qui se révélèrent progressivement, sur certains points décisifs,
incompatibles avec la doctrine chrétienne.". Le message attribue ensuite
"l'issue violente" au "pouvoir civil" : autrement dit la
faute n'est pas du commanditaire, l'inquisition, mais du pouvoir civil, qui
exécuta la sentence demandée par l'inquisition (on rappelle que c'était le
"bras séculier" qui exécutait les sentences de l'inquisition). Pour
apprécier à sa juste valeur ce subtil distinguo des prélats de l'an 2000
défendant leurs collègues de 1600, il faut se souvenir que Rome était en 1600
une monarchie absolue ayant à sa tête le Pape, soit le chef de l'église
catholique. Le document du Vatican continue sur le même ton en affirmant que
"Ce qui émerge historiquement laisse penser que les juges du penseur
étaient animés par le désir de servir la vérité et de promouvoir le bien
commun, tout en faisant ce qui était possible pour lui sauver la vie". Il
faut bien prendre conscience de ce fait que ce texte est une communication
officielle et publique du Vatican datée du 17 février 2000, disponible sur
Internet (site officiel du Vatican), et pas un obscur texte moyenâgeux.
1609
Expulsion des Maures d'Espagne
Après l'expulsion des juifs
d'Espagne, l'inquisition s'ennuyait un peu dans ce beau pays. Elle lance donc
la chasse aux Morescos, les arabes convertis au
christianisme. Sont suspectés d'être des faux convertis et exécutés tous ceux
qui refusent de boire du vin ou de manger du porc, ou qui sont trop propres: en
effet, l'Islam, contrairement au christianisme, prescrit des lavages
périodiques. La propreté n'a jamais été aussi dangereuse qu'au XVI siècle en
Espagne! Enfin, en 1609, craignant sans doute d'avoir raté des "Faux
convertis", l'inquisition obtient du roi l'expulsion des Morescos vers l'Afrique du Nord. Le nombre d'expulsés est
mal connu: les estimations varient entre 300000 et 3 millions. Des régions
rurales furent dépeuplées. Les expulsés arrivent en terre islamique, et l'Islam
prévoit la peine de mort pour toute personne qui renie l'Islam.
L'inquisiteur général Diego de
Spinoza proclama après l'expulsion que "L'Espagne respire enfin avec
soulagement", et salua l'opération comme le triomphe "de la propreté
sur la pourriture".
1619
Le philosophe italien Lucilio Vanini est brûlé vif par l'inquisition. Ses fautes:
il a donné des explications "naturelles" à des miracles, et émis
l'hypothèse que l'homme pourrait descendre des grands singes, et, encore plus
grave, il aurait nié l'immortalité de l'âme. Il doit fuir l'Italie, mais
l'inquisition le rattrape à Toulouse. Il comparaît devant le Tribunal
Ecclésiastique où il est reconnu coupable d'athéisme, et condamné à avoir la
langue coupée avant d'être brûlé vif.
1615
Les protestants à la chasse des
sorcières
L'on croit souvent que la chasse aux
sorcières serait une spécialité catholique. Hélas, les protestants partagent,
dès
Pour donner une idée de l'étendue,
sur la durée, de la chasse aux sorcières pratiquée par les protestants, en
absence de chiffre globaux, nous prendrons l'exemple du Pays de Vaud, colonie
Bernoise en Suisse Romande, dont le territoire correspond approximativement à
l'actuel canton de Vaud en Suisse. Dans cette province rurale, la chasse aux
sorcières tue, dans les 200 ans qui suivent
Supplice de la corde, détail du
tableau "Le Procès" de Alessandro Magnasco, environ 1710-1720
Comme cela est usuel en pays
protestant, les aveux sont obtenus par la corde: l'accusé a les bras liés
derrières le dos, après quoi le bourreau le soulève par la corde qui lui tient
les bras, et diverses fractures en résultent. Si l'accusé est récalcitrant et
hésite à passer aux aveux, l'on utilise la corde avec les poids: des poids sont
attachés aux pieds de l'accusé, puis l'on procède à de nouveaux levages,
jusqu'aux aveux. Comme les aveux ne sont considérés complets que si l'accusé a
dénoncé d'autres sorcières, l'alimentation du système répressif protestant en
matériel humain à torturer puis à brûler est assurée, et les fréquentes
exécutions permettent de maintenir dans la population une saine crainte des
diables. Il faudra attendre le siècle des lumières pour que la chasse aux
sorcières cesse enfin en Suisse.
1633
Procès à Galilée. Pour avoir douté
de la théorie géocentrique de Ptolémée (qui, soit dit en passant, n'était pas
chrétien!), Galileo Galilei est forcé à se rétracter:
on lui montre les instruments de torture, qui seraient employés si il insiste.
Ses œuvres avaient déjà été mises à
l'index en 1616. Il passera le reste de sa vie confiné dans sa villa (arrêts
domiciliaires). Sa réputation internationale de scientifique lui permet
d'éviter des conséquences plus graves, et seule sa rétractation lui évite la
torture.
L'Église catholique sera très lente
à admettre le fait que
Il faudra attendre le pape Jean-Paul
II pour que l'église catholique reparle de Galilée. En 1979, il promet la
formation d'une commission de l'Académie pontificale des sciences, chargée
d'approfondir "l'examen du cas Galilée (...) dans une reconnaissance
loyale des torts de quelque côté qu'ils viennent". La commission est
effectivement mise en place en 1981. En 1992, elle rendra ses conclusions au
pape, qui émet de nombreuses réserves: tout en admettant les erreurs de juges
de l'époque, le pape indique que ni Galilée, ni ses juges, ne surent faire la
distinction qui s'impose entre "l'approche scientifique de phénomènes
naturels" et "la réflexion sur la nature de l'ordre
philosophique". Galilée aurait, d'après le pape, fait une grave erreur en
refusant la suggestion qui lui était faite de "présenter comme hypothèse
le système de Copernic, tant qu'il n'était pas confirmé par des preuves
irréfutables". La commission et le pape s'accordent pour laisser une large
part de responsabilité à Galilée, car celui-ci a commis aussi une autre erreur:
il avait cru que les marées étaient la preuve irréfutable du mouvement de la
terre. L'église absout donc finalement Galilée, tout en insistant sur le fait
qu'il est au moins aussi responsable qu'elle-même de sa condamnation.
1618 à 1648
Guerre de trente ans. Les très
catholiques souverains Habsbourg forcent à la conversion leurs sujets
protestants de Bohème, déclenchant la plus grande guerre que le continent
européen ait connu jusqu'alors. La population de l'Allemagne est réduite de
moitié. De nombreuses villes sont dévastées. Des épidémies de peste dévastent
toute l'Europe centrale, de
Il s'agit bien d'une guerre de
religion, même si les églises ont par la suite essayé de faire croire qu'il
s'agissait d'un conflit politique: la guerre est déclenchée par un conflit
religieux, par la suite des rois étrangers, comme Gustave II de Suède,
interviennent sur la base de leurs convictions religieuses. Le cas de Gustave
II de Suède est particulièrement significatif. il oblige ses soldats à chanter
des cantiques chrétiens chaque soir, mais ceux-ci sont d'autre part de
redoutables pilleurs: l'armée suédoise se verra conférer le titre de "Schrecken des Krieges" par
la population allemande, qui craint les pillages (c'est à dire les cas où une
armée entre dans une ville, égorge les hommes adultes, viole femmes et enfants
avant d'égorger aussi tout ou partie de ces derniers et de mettre le feu à la
ville) suédois encore plus que ceux de l'armée Habsbourg.
Lorsque les négociations de paix
s'ouvrent enfin en Westphalie en 1644, le légat du Pape, Fabio Chigi, ancien
Grand Inquisiteur de Malte et futur Pape Alexandre VII, a pour instruction de
faire en sorte que le conflit entre puissances catholiques (France contre
Espagne et Empire) cesse, et que par contre la guerre continue contre les
protestants. Chigi échoue: épuisés par la guerre, l'Empire conclut la paix avec
les protestants. Le pape Innocent X condamne alors la paix, la déclarant nulle
et non avenue dans la bulle Zelo Domus
Dei (1648). Heureusement pour ce qui reste de la population allemande, la bulle
est ignorée par tous les signataires, et la guerre de trente ans sera la
dernière grande guerre de religion en Allemagne.
1650
L'archevêque d'Irlande James Ussher utilise
1652 - La dernière sorcière exécutée à Genève
Il faut le reconnaître, l'Esprit de
Genève, cet esprit tant vanté des nombreux maîtres du monde qui ont négocié des
paix et des accords de désarmement à Genève, puise ses racines loin dans
l'histoire. Genève cesse en effet les exécutions de sorcières des décennies
avant les autres grandes villes européennes. La dernière malheureuse à mourir à
Genève pour cause de pacte avec le diable est une dénommée Michée Chauderon, lavandière de son état, originaire de Boège en Faucigny. L'accusation provient d'une femme
hystérique, qui se prétend possédée par le diable. Traditionnellement à Genève,
le tribunal demandait un rapport médical, qui fournissait des preuves sous la
forme de marques diaboliques sur le corps: une cicatrice, un grain de beauté, un
mélanome, étaient vite reconnus comme tels, et l'on peut dire qu'à cette époque
le cancer de la peau pouvait tuer très vite, indirectement. Mais en 1652 le
corps médical se rebiffe: les deux experts médicaux déposent, avec un courage
qui force l'admiration, un rapport disculpant la malheureuse. Poussé par des
théologiens, le tribunal demanda un second rapport médical. Comme l'on ne
trouvait pas à Genève de médecins disposés à contredire leurs confrères, on
alla chercher à Nyon des médecins plus malléables: des médecins de cette petite
ville des bords du
1664
Première exécution de sorcières dans
le nouveau monde. Les européens exportent cette tradition si importante pour
les chrétiens. En Amérique, cette tradition culminera en 1692, par l'affaire
des sorcières de Salem, qui se termine par l'exécution de 19 personnes (18
femmes, un homme), accusées d'être en liaison avec le diable.
XVIIIème
siècle - L'Espagne et le Siècle des Lumières
Alors que l'Europe sort lentement de
l'obscurantisme, en Espagne, l'inquisition termine son travail d'éradication
des conversos. Il est difficile d'estimer le nombre
de victimes au cours de tout le siècle, mais l'on sait que, au cours du seul
règne de Philippe V (1700-1746), l'on célébrera environ 60 Autodafés, avec un
total d'environ 1000 condamnés, parmi lesquels 100 furent exécutés et plusieurs
centaines finirent leur vie en prison. Les condamnés ne sont pas seulement des conversos, mais aussi des blasphémateurs, des possédés et
des sorciers et sorcières.
1750-1767
"Affaire des réductions"
au Paraguay. Cette affaire est particulièrement intéressante, les catholiques
se massacrant et s'excommuniant entre eux. Les Jésuites, arrivés au Paraguay en
1604, avaient établi au XVIIème un petit empire privé, fait de
"réductions", c'est à dire des petits villages fortifiés dans la
forêt, ou vivent des indiens convertis au catholicisme. A partir de 1640, ces
indiens sont munis d'armes fournies par les Jésuites, qui sont, dans ces
village, tout à la fois curés, maires et administrateurs. Hélas, une correction
de la frontière porte plusieurs de ces réductions dans le territoire portugais:
or le Portugal, pays chrétien et catholique, perpétue à l'époque la tradition
de l'esclavage: les portugais pensent prendre aux Jésuites leurs indiens pour
les vendre comme esclaves.
Le pape intervient, excommunie les
Jésuites des "réductions". Puis une armée, dont les canons et épées
sont bénis par les prêtres de service, attaque les réductions. La guerre se
prolongera: en 1756, les indiens obtiennent même une victoire décisive contre
les portugais. La guerre se terminera en 1767: une armée commune des portugais
en des espagnols massacre les Jésuites et prend les indiens comme esclaves. Un
Te Deum est célébré pour la victoire, comme il se doit, et les Jésuites sont
expulsés des territoires espagnols.
Peu après, en 1773, le pape Clément
XIV interdira l'ordre des Jésuites, coupable d'être trop intelligent et
rationnel, et surtout de n'avoir pas assez loyalement servis la famille de
Bourbon, rois de France et d'Espagne, monarques absolus et grands amis de
l'église catholique. Il fait emprisonner le Père Général des Jésuites, qui
mourra prisonnier au Château Saint-Ange à Rome.
1766
En plein siècle des lumières, un
jeune homme de 19 ans, le Chevalier de
1788
Dans le canton de Glaris, en Suisse,
la dernière sorcière est brûlée.
Cette exécution n'est pas la
dernière de l'inquisition, qui continuera à brûler des hérétiques jusqu'en
1826.
1793
Kant, professeur de philosophie à
Königsberg et "star" internationale de la philosophie moderne depuis
la publication de "Kritik der reinen Vernunft" publie
"Die Religion innerhalb der Grenzen
der bloßen Vernuft"
("La religion dans les limites de la seule raison"), où il met les
doctrines chrétiennes à l'épreuve de la raison et du "kategorische
Imperativ". C'en est trop pour le pieux roi de
Prusse. Poussé par des prélats protestants, il intervient et Kant est forcé de
se rétracter publiquement sous peine de licenciement immédiat de son poste de
professeur de l'université de Königsberg. Un à un, les autres professeurs de
l'université doivent signer, sous peine de licenciement immédiat, un document
où ils s'engagent à ne pas citer dans leur enseignement des écrits de Kant
ayant trait à la religion. Comme dans le cas de Galilée, la renommée
internationale de Kant le sauve de conséquences plus sévères. Kant songera à
s'exiler, mais il est en cette fin de siècle peu de cieux cléments pour les
penseurs qui osent critiquer des aspects de l'idéologie chrétienne: il finira
donc la vie à Königsberg.
1826
Le dernier hérétique est brûlé vif
par l'inquisition en Espagne. Une riche tradition chrétienne prend fin.
Désormais, l'église va recourir à des moyens plus subtils pour tuer, comme par
exemple en interdisant l'assistance aux femmes qui doivent avorter, en sabotant
la planification familiale dans les pays pauvres, en interdisant le préservatif
comme moyen d'endiguer l'épidémie du SIDA, etc.
1832 - la liberté de conscience condamnée
En
De cette source empoisonnée de
l'indifférentisme, découle cette maxime fausse et absurde ou plutôt ce délire :
qu'on doit procurer et garantir à chacun la liberté de conscience ; erreur des
plus contagieuses, à laquelle aplanit la voie cette liberté absolue et sans
frein des opinions qui, pour la ruine de l'Église et de l'État, va se répandant
de toutes parts, et que certains hommes, par un excès d'impudence, ne craignent
pas de représenter comme avantageuse à la religion. Eh ! " Quelle mort
plus funeste pour les âmes, que la liberté de l'erreur ! " disait saint Augustin
(S. Aug. Ep. CLXVI).
Le pontife condamne également
nommément la liberté de la presse, la liberté d'association, la liberté
d'enseignement, la souveraineté du peuple et le suffrage universel. Dans la
lutte entre progrès et réaction, entre liberté et obscurantisme, l'église
catholique choisit ainsi clairement son camp.
1847
Guerre du Sonderbund:
Les protestants se livrent pour leur
part à des féroces "Chasses aux catholiques" dans les campagnes
genevoises.
Les Jésuites, considérés comme
responsables de la guerre, sont expulsés de Suisse, et leur expulsion restera
en vigueur jusqu'aux années 1970.
1848
La population de Rome se révolte
contre la dictature papale. Le pape Pie IX est chassé. Une république est
proclamée et les murs du ghetto de Rome sont abattus. Le Pape sera est remis au
pouvoir en 1849 par les troupes françaises dépêchées sur place par Louis -
Napoléon Bonaparte, président de la république française. Les opposants sont fusillés.
L'Etat de l'Église redevient une monarchie absolue dont le souverain est le
pape. Le ghetto est refermé: les juifs de Rome devront attendre la chute du
régime papal en 1871 pour pouvoir enfin circuler librement dans la ville
éternelle. En 1849, à l'occasion d'un débat au parlement français, Victor Hugo
décrira de manière poignante la réalité de l'Etat de l'Église catholique:
"Pour toute législation, un chaos de lois féodales et monacales, qui
produit la barbarie des juges criminels et vénalité des juges civils. Quatorze
tribunaux d'exception qui fonctionnent en permanence; devant ces tribunaux,
aucune garantie. Les débats sont secrets. La défense orale est interdite. Des
juges ecclésiastiques jugent les causes et les personnes laïques. Les juifs sont
parqués et enfermés tous les soirs comme au XVème siècle; le clergé
est mêlé à tout, même à la police. Les gens de finance ne rendent compte qu'à
Dieu, Deux censurent pèsent sur la pensée: la censure politique et la censure
cléricale. L'une garrotte l'opinion, l'autre bâillonne la conscience. On vient
en outre de rétablir l'inquisition".
Le pape Pie IX sera béatifié en
septembre 2000.
1858
La police pontificale enlève un
enfant juif sur ordre du Pape: Une bonne (catholique) a fait secrètement
baptiser un enfant juif dont elle avait la garde. Sa motivation était que
l'enfant était malade, et il fallait le sauver avant qu'il n'aille aux enfers
en mourant. Hélas, cela se passe dans les états de l'Église: dès qu'elle est
informée du baptême, la police pontificale enlève de force l'enfant à la
famille. L'enfant, Edgardo Mortara, est adopté par le
bienheureux Pape Pie IX (béatifié par Jean-Paul II en septembre 2000), qui
l'élève pour qu'il devienne un prêtre.
1863
Le bienheureux Pape Pie IX publie le
Syllabus. Ce document est un recensement des "erreurs" de la pensée
moderne, que le pape condamne sans appel. Sont entre autres condamnées:
Le mariage civil, la tolérance en
pays catholique de rites d'autres religions, la liberté de religion, le
panthéisme, le libéralisme, le socialisme, la rébellion contre un souverain
"légitime", la critique au pouvoir temporel du pape, la possibilité
de progresser par la raison, la non-intervention du religieux dans les sciences
et la philosophie. En 1870, il fera voter par le concile Vatican I
l'infaillibilité du pape avec effet rétroactif, pour s'assurer que ses
condamnations ne soient plus remises en question.
1871
Le pape, qui est officiellement
infaillible avec effet rétroactif depuis 1870, excommunie toute personne qui participerait
à une quelconque élection de l'état italien, qui est défini comme étant
"diabolique", car il avait privé les papes de leur état séculier.
Cette sentence d'excommunication automatique n'empêchera pas le pape de bénir
quelques années après un nouvellement fondé "Partito
populare", d'inspiration catholique, fondé et
dirigé par un prêtre.
1881
Les Pogroms russes commencent.
Excités par des prélats orthodoxes, qui répandent une fausse rumeur comme quoi
le Tzar Alexandre II aurait été assassiné par un juif, des foules se
rassemblent dans plus de 200 villes russes, et détruisent les biens des juifs.
Les Pogroms deviendront communs dans la pieuse Russie tsariste, surtout entre
1900 et 1907. Le plus violent d'entre eux à lieu à Kishinev
en 1903: les autorités civiles et religieuses de la ville excitent la foule,
qui s'en prend violemment au juifs: pendant deux jours, la foule tue 45 juifs,
en blesse environ 600, et pille 1500 maisons. Bien sûr, les responsables (Popes
et politiciens) ne seront jamais inquiétés par la justice.
1881-1882
Civiltà Cattolica,
journal romain contrôlé par des Jésuites, qui continuera à publier des articles
sur la culpabilité de Dreyfuss des années après la
réhabilitation de ce dernier, publie une série d'articles accusant les juifs de
crucifier des enfants chrétiens. Le père Giuseppe Oreglia
de San Stefano, Jésuite, remet sur la place publique une vieille accusation:
les juifs pratiqueraient des meurtres rituels d'enfants chrétiens. Cela est
trop fréquent, écrit le bon père jésuite. En Europe de l'Est, dit savoir le bon
père, l'emploi de sang chrétien est une loi générale pesant sur la conscience
de tous les hébreux. Chaque année, poursuit-il, les juifs crucifient un enfant
chrétien en le faisant mourir dans les tourments. Le ton et le contenu de ces
articles sont malheureusement assez typiques pour la presse catholique de
l'époque.
Pour évaluer à sa juste mesure le
poids de ces mots, il faut rappeler que ces articles paraissent alors que les
personnes qui seront au pouvoir dans les années 30-40 du XXème
siècle (dont le pape Pie XII) sont alors des enfants: ils grandiront baignés
dans la haine des juifs, et pourront mettre en pratique au cours de la deuxième
guerre mondiale ce qu'ils auront appris en tant qu’enfants.
1889
Dans une Rome libérée du joug papal,
le 9 juin, est inaugurée une statue de Giordano Bruno au Campo dei Fiori, le
lieu même où le penseur fut exécuté. Le Pape Léon XIII, très peiné, passera la
journée entière en jeune aux pieds de la statue de Saint Pierre. La presse
catholique se déchaîne: elle parlera d'"orgie satanique" en décrivant
la manifestation d'inauguration, de "triomphe de la synagogue, des archimbandrites, de la maçonnerie, des chefs du libéralisme
démagogique", de "tintamarre de l'ignorance et de la malignité
anticléricale". Au XXème siècle, l'église déploiera toute son
influence pour faire abattre la statue.
1918-1945
Le parti pris pour les dictatures.
L'église soutient activement la montée des totalitarismes en Europe, puis
défend leurs crimes dans plusieurs cas, et renonce à les dénoncer dans
d'autres.
En Autriche, le soutient de l'église
catholique pour l'Austro fascisme est total.
En Italie, le Vatican signe avec le
régime fasciste un concordat, qui fait du catholicisme la religion d'état: les
italiens peuvent à nouveau voter sans être excommuniés, dommage que cela serve
peu en période de dictature. L'église sacrifie en grande partie ses propres
associations: toutes, sauf l'Action Catholique, doivent intégrer des
organisations fascistes. Le Vatican promet à Mussolini de faire en sorte que
l'Action Catholique ne se laisse pas tenter par des actions antifascistes.
En 1929, Mussolini ayant signé le
concordat dit "Patti Lateranensi", il est
qualifié par le pape d'homme de la providence ("Uomo
della provvidenza").
En
Cette belle harmonie résistera même
à un moment de tension causée par la statue de Giordano Bruno. Le pape profite
du concordat pour demander à son ami dictateur de détruire la statue de cette
célèbre victime de l'inquisition, érigée en 1889 par le gouvernement libéral.
Le dictateur, dont un des fils se prénomme Bruno, en honneur du penseur victime
de l'inquisition, prend la défense, une fois n'est pas coutume, du libre
penseur, et déclarera à la chambre des députés "La statue de Giordano
Bruno, mélancolique comme le destin de ce moine, restera où elle est. J'ai
l'impression que ce serait s'acharner contre ce philosophe qui, s'il s'est
trompé et a persisté dans l'erreur, a cependant payé". Pour montrer
qu'elle ne regrette rien, l'église canonisera alors Robert Bellarmin,
accusateur de Giordano Bruno, et le nommera même "Docteur de
l'Église". Jamais l'église ne reconnaîtra une quelconque erreur de sa part
concernant Bruno, ou n'exprimera une quelconque intention de le réhabiliter.
En Allemagne, en janvier 1933, le Zentrum, parti catholique, dont le leader est un prélat
catholique (Prälat Kaas), vote les pleins pouvoirs à
Hitler: ce dernier peut ainsi atteindre la majorité des 2/3 au Reichstag pour
suspendre les droits garantis par la constitution. Avec une charité toute
chrétienne, le bon prélat et ses ouailles du Zentrum
accepte aussi de fermer un œil sur les détails procéduriers discutables des
nazis, comme l'arrestation des députés communistes avant le vote. Puis l'église
commence à négocier un nouveau concordat avec l'Allemagne: dans ce cadre, elle
"sacrifie" le Zentrum, alors seul parti
significatif que les nazis n'ont pas interdit: en effet, il les a aidés à
arriver au pouvoir. Le 5 juillet 1933, le Zentrum
s'auto-dissout sur demande de la hiérarchie catholique, laissant le champ libre
au NSDAP de Hitler, désormais parti unique. Le prélat Kaas laisse les
compatriotes se débrouiller avec la dictature qu'il a aidé à installer, et s'installe
au Vatican, ou il entame une nouvelle carrière: alors que le monde s'embrase,
Monseigneur Kaas, désormais évêque, dirigera des fouilles sous
Hitler se proclame catholique dans
"Mein Kampf", l'ouvrage où il annonce son programme politique. Il y
affirme aussi qu'il est convaincu qu'il est un "instrument de Dieu".
L'Eglise catholique ne mettra jamais "Mein Kampf" à l'Index, même
avant l'accession d’Hitler au pouvoir. Il faut croire que le programme
antisémite du futur chancelier ne déplaisait pas à l'église. Hitler montrera sa
reconnaissance en rendant obligatoire la prière à Jésus dans l'école publique
allemande, et en réintroduisant la phrase "Gott
mit uns" sur les uniformes de l'armée allemande.
En 1938, les SS et SA organisent la
"Nuit de Cristal": déguisés en civils, les miliciens nazis attaquent
synagogues et magasins appartenant à des juifs. La population allemande est à
la fois horrifiée et terrifiée. L'évêque de Freiburg, Monseigneur Gröber, déclare alors, en réponse à des questions sur les
lois raciales et les pogroms de la nuit de cristal: « On ne peut refuser à
quiconque le droit de sauvegarder la pureté de sa race et d'élaborer les
mesures nécessaires à cette fin.»
En Espagne, la république est
établie en avril 1931, suite à la faillite de la dictature conservatrice de
Miguel Primo de Riviera. Tout de suite, l'église catholique déclare la guerre à
la démocratie: le 7 mai
Dans le monde entier, l'église
catholique se mobilise pour soutenir Franco contre la république. Les évêques
allemands publient le 19 août 1936 une pastorale collective qui approuve l'aide
apportée par Hitler à Franco. Aux USA, les catholiques réussissent à bloquer
toute aide à la république. Roosevelt renonce à soutenir la république pour ne
pas perdre les votes des catholiques. Le Pape proclame officiellement
"martyr" toute personne tuée par les républicains, et reconnaît Franco
dès 1937 (la guerre est alors en cours, et se prolongera jusqu'en 1939), en
envoyant un délégué apostolique auprès de Franco, puis le 18 mai 1938 en
nommant l'archevêque Gaetano Cicognani Nonce Apostolique, alors que Franco
envoie un ambassadeur au Vatican. L'archevêque de Westminster écrit à Franco en
1938 "Vous êtes à mes yeux le plus grand défenseur de la vraie Espagne, le
pays du catholicisme". Le Pape Pie XII salue la victoire finale de Franco
en publiant un message intitulé "Avec immense joie".
Franco se montrera reconnaissant
envers ses pieux alliés, en confiant l'éducation nationale à l'église
catholique. Chaque citoyen est muni d'un "livret", où sont annotés
ses options politiques et religieuses: il se crée un système avec deux classes
de citoyens, et l'église a le mot de la fin quand à la classe de chacun. Puis,
Franco nomme plusieurs membres de l'Opus Dei au gouvernement. L'influence de
l'Opus Dei croîtra, au cours de la dictature Franquiste, au point où, dans le
dernier gouvernement Franquiste, plus de la moitié des ministres seront membres
de cette vénérable institution catholique.
Beaucoup plus tard, en mars 2001, le
pape Jean-Paul II béatifiera 233 religieux martyrs des la guerre civile
espagnole, en les pressentant comme des victimes du terrorisme, faisant un
parallèle explicite entre le gouvernement Espagnol de 1936-1939 et l'ETA de
l'an 2001.
En France, l'église déclare dès 1940
que "Pétain, c'est
Au cours de la deuxième guerre
mondiale, le Vatican est au courant des exterminations de juifs par les nazis.
On saura après la guerre que le pape a hésité à lancer un appel public, à
plusieurs reprises, mais s'est finalement abstenu de le faire, essentiellement
car il est communistophobe, et pense qu'une victoire
russe serait "pire". En 1942, il pleure par contre parmi les ruines
de Rome bombardée et condamne les bombardements alliés. Hélas, il oublie de
mentionner que son allié politique Mussolini avait sollicité auprès d'Hitler
"l'honneur de participer aux bombardements sur Londres" - il est vrai
que le pape n'habite pas à Londres ...
En avril 1941, les allemands
envahissent
En été 1941, lorsque les armées de
l'Axe progressent dans les steppes russes, le Vatican demande officiellement au
commandement de
Il faut préciser que le pape
persiste dans son parti pris pour les nazis très longtemps pendant la guerre.
En septembre 1943, suite à la capitulation de l'Italie face aux alliés, les
allemands occupent Rome, et les rafles de juifs romains commencent. Le
gouvernement allemand est inquiet des réactions possibles du Pape, et envoie à
Rome le secrétaire d'état von Weizsäcker pour
examiner la situation. Le 28 octobre 1943, il communique au ministère des
affaires étrangères: "Malgré les pressions exercées sur lui de plusieurs
côtés, le Pape ne s'est laissé pousser à faire aucune déclaration de
protestation contre la déportation des juifs de Rome". Ensuite, le Pape
prend ouvertement parti pour l'occupant contre les résistants: le 12 mars 1944,
pendant la fête de son ascension sur le trône, il lance un appel contre
l'insurrection populaire contre l'occupant. Le 23 mars 1944, alors que l'on
entend, la nuit, dans le lointain, les artilleries alliées qui pilonnent les
lignes allemandes, des résistants tuent 32 soldats allemands. Le lendemain, 335
italiens sont exécutés: des prisonniers politiques et de droit commun, ainsi
que des civils. L'exécution a lieu dans le plus grand secret, dans une grotte
dont on dynamite ensuite l'entrée. Lorsque, le lendemain, le massacre est connu
et les cadavres sont découverts, les allemands répandent le bruit qu'ils
avaient offert aux résistants de se livrer pour éviter le massacre. Cela est
faux, bien sûr (l'exécution des 335 civils a eu lieu le lendemain de
l'attentat, entourée du plus grand secret), mais cela n'empêche pas le journal
officiel du Saint Siège, l'Osservatore Romano, de
publier un éditorial (non signé), intitulé Carità
civile ("charité civile"), qui attribue textuellement la
responsabilité des 335 personnes assassinées par les SS allemands aux
résistants. L'article en appelle ensuite aux "irresponsables"
dirigeants de la résistance, leur demandant de ne plus sacrifier de vies
humaines, et lance un vague appel de modération aux "responsables de
l'ordre public" (les autorités fascistes et national-socialiste).
Les églises protestantes européennes
ne se comportent guère mieux que l'église catholique face à la persécution des
juifs par les nazis. Seules des rares voix s'élèvent, pas pour défendre les
juifs, mais seulement les juifs convertis au christianisme. En
1948
Le pape déclare que toute personne
qui voterait communiste ou qui aiderait ce parti politique, de quelque manière
que ce soit, sera automatiquement excommuniée. La mesure divise des familles,
provoque des exclusions socialement intolérables pour beaucoup, et contraint à
la clandestinité nombre de communistes de zones rurales.
Les curés italiens s'empressent de
traduire cette décision dans les faits, et appellent leurs ouailles à voter
pour le grand parti anticommuniste (DC - Democrazia Cristiana). Le régime DC s'effondrera ensuite dans la
corruption généralisée au milieu des années 1990.
1961
Dernière édition de l'index (Index Additus Librorum Prohibitorum), qui cite comme auteurs dont l'ensemble de
l'œuvre est interdite de lecture pour les catholiques, entre autres: Jean-Paul
Sartre, Alberto Moravia, André Gide. Ce n'est qu’en 1966 que l'index sera
officiellement abrogé par l'église catholique.
Années 1980
Après une période d'apparente
libéralisation, le pape Jean-Paul II arrive à la tête de la plus grande secte
du monde et renoue avec les traditions les plus terribles de l'église.
Sa condamnation du préservatif comme
moyen d'endiguer la lutte contre le Sida provoque un nombre de morts difficile
à estimer. Il pratique une politique active de sabotage des mesures de contrôle
des naissances dans le tiers monde: les conséquences de cette action sont
difficiles à chiffrer, mais se mesurent en termes de famine, misère, manque de
soins médicaux au niveau des continents les plus pauvres (Amérique du Sud,
Afrique).
Dans la chasse aux hérétiques, il
suspend "A Divinis" deux théologiens
allemands qui avaient osé douter, l'un de l'infaillibilité papale, l'autre de
l'immaculée conception de Marie.
1985:
Au début des années 1980, des
théologiens catholiques brésiliens développent le concept de théologie de la
libération: ils affirment que le christianisme est censé être un défenseur des
pauvres et des opprimés, et que l'église devrait défendre les droits de
l'homme. Cette interprétation des évangiles ne plaît pas, bien sûr, aux
instances dirigeantes de l'église catholique, mais elle est plus ou moins
tolérée jusqu'au jour ou l'un de ces théologiens, le père franciscain Leonardo
Boff, se permets d'écrire que l'Église devrait elle aussi respecter les droits
de l'homme.
La réaction ne se fait point
attendre.
L'histoire est intéressante, car
elle montre que l'église, et son Saint Office, continuent à opérer avec la même
dureté que par le passé. Si Boff n'a pas été menacé de torture comme Galilée,
cela est dû uniquement au fait que l'église n'en avait point la possibilité.
Elle avait par contre la possibilité de le faire taire ou de le forcer à
quitter sa profession, et elle a fait plein usage de cette possibilité. Elle
montre aussi que le christianisme n’est pas compatible avec les droits de
l'homme, tels que nous les comprenons depuis la déclaration des droits de
l'homme et du citoyen, et que ces derniers sont officiellement et activement
combattus par l'église catholique.
Ce souriant personnage au chapeau
bizarre est le Cardinal Ratzinger, président de
1987 - Le combat contre la procréation médicalement assistée
Les années 1980 voient des progrès
importants en matière de procréation médicalement assistée. Les couples sans
enfants peuvent désormais recourir a l'insémination
par sperme de donneur et à la fécondation In-Vitro (FIV). Las, ces méthodes
sont de nature à diminuer la souffrance - dans ce cas, des couples stériles -
et ne peuvent donc plaire à l'église, qui sait malheur et désespoir sont des
terreaux fertiles pour le christianisme, religion eschatologique qui promet le
bonheur après la mort à ceux qui souffrent dans la vie.
Le combat contre la procréation
assistée devient un des grands combats de l'église à la fin du XXème
siècle. Elle se bat, généralement avec succès, pour que l'insémination avec
sperme de donneurs soit interdite aux couples de femmes homosexuelles. En
Suisse, elle obtient que
Années 1990: Guerres de religion en Yougoslavie
Hélas, la religion sépare Croates et
Serbes: les "Croates" ont étés christianisés par Rome, et sont
catholiques. Les Serbes, qui écrivent le Serbo-Croate en caractères
cyrilliques, ont étés christianisés par les Byzantins et sont donc orthodoxes.
Lorsque Milosevitch, le dictateur serbe, commence à
agiter le spectre de la "Grande Serbie",
A guerre finie, le Pape béatifiera
le Cardinal Stepinac, qui avait qualifié Ante Palevitc, le dictateur Oustachi de 1940-1944, de "don
de dieu" pour
La guerre de Yougoslavie continue
ensuite en Bosnie, où les membres des 3 groupes religieux (catholiques,
orthodoxes, musulmans) s'affrontent dans une série de combats triangulaires
dont les populations civiles sont les principales victimes. A l'heure où
j'écris ces lignes, la guerre est encore en cours au Kosovo, province agricole
sans intérêt stratégique, avec velléités d'autonomie, que Belgrade ne veut pas
lâcher car il s'y trouve nombre de monastères orthodoxes. Il va de soi que
l'église orthodoxe s'active pour soutenir par prières et sermons la lutte des
serbes contre les Kosovars musulmans.
Les guerres de Yougoslavie sont un
cas emblématique de la catastrophe de l'intolérance qui est inhérente aux
religions "révélées": des communautés religieuses s'affrontent, au XXème
siècle, au nom de religions qu'elles ont reçu au hasard de l'expansion de
divers empires (Romain, Byzantin, Ottoman) entre l’Antiquité classique et le
Moyen Âge.
1994 - Sexe, mensonges et répression
L'église catholique oblige
depuis le Moyen Âge ses prêtres à renoncer à toute vie sexuelle au moment de
leur ordination. Et, de tout temps, elle entretien des monastères de femmes, où
vivent des nonnes qui ont elles aussi renoncé à toute vie sexuelle et se
déclarent épouses du Christ. Les contacts entre prêtres et religieuses sont
inévitables, entres autres car les prêtres confessent régulièrement les
religieuses. De cette situation explosive naissent inévitablement des
problèmes. La gravité du problème potentiel et ses causes sont connus depuis
des lustres, mais l'église catholique s'acharne longtemps à le nier et aucune
étude n'est faite sur la fréquence et l'extension du problème. Cette situation
de je ne vois pas - je ne n'entends pas - je ne sais pas commence à s'effriter
en 1994: une religieuse, qui est aussi médecin, sœur Maura
O'Donohue, chargée de la coordination de la campagne
contre le SIDA d'une organisation basée en Angleterre, remet un rapport qui
recense des cas d'abus sexuels et de viols répétés de la part de prêtres sur
des religieuses dans pas moins de 23 pays. La plupart des cas concernent
l'Afrique, mais sont aussi cités des cas de viols et abus sexuels au Brésil, en
Colombie, aux Philippines aux USA, en Irlande et en Italie. Le rapport est
accablant. Parmi les cas les plus choquant qu'il cite, il y a celui d'une mère
supérieure, relevée de ses fonction parce que elle avait signalé à son évêque
la grossesse simultanée de 29 de ses sœurs, et le cas d'un prêtre qui a célébré
la messe de requiem d'une religieuse qu'il avait contrainte à avorter après
qu'elle fut devenue enceinte de lui, et qui est morte au cours de l'opération.
La méthode que l'église catholique utilise pour "résoudre" ce genre
des cas est exposée: généralement, la sœur enceinte est chassée du couvent,
alors que le prêtre reste bien sûr en fonction.
D'après l'auteur du rapport, 2
raisons expliquent l'ampleur du phénomène en Afrique: d'une part, les prêtres
considèrent les religieuses des partenaires "sûres", alors qu'ils
craignent de contracter le SIDA auprès des prostituées. D'autre part, relève Maura O'Donohue, en Afrique,
"il est impossible à une femme de dire non à un homme, spécialement à un
ancien et à un prêtre".
Bien sûr, l'église garde le rapport
dans le plus grand secret, et une partie de son contenu ne sera révélé au public
qu’en mars 2001 par un journal catholique américain, le National Catholic Reporter.
Le rapport de Maura
O'Donohue n'est pas le seul que
Le Vatican niera en bloc tout
problème jusqu'à la publication du National Catholic
Reporter. Ne pouvant plus nier, il s'emploie à minimiser, et son porte-parole
déclare suite à cette publication qu'il ne faut pas oublier "la foi
souvent héroïque manifestée par la grande majorité des hommes et des femmes des
ordres religieux et du clergé". Il ne précise pas si l'héroïsme manifesté
par les religieuses violées acceptant de garder le silence une fois chassées de
leur communauté fait partie de cet héroïsme à admirer.
On retrouve ainsi, en 2001, les
méthodes que l'église emploie depuis toujours. L'abus des faibles par les forts
- dans ces cas les prêtres - est toléré, les victimes sont punies - dans ce cas
par expulsion du monastère ou par des pressions pour avorter - et ceux qui
osent dénoncer l'affaire, même à l'intérieur de la hiérarchie de l'église, sont
également punis durement, comme
1994 - Assistance aux génocidaires du Rwanda
A tout seigneur tout honneur, il
faut reconnaître à l'église catholique le mérite de savoir pardonner à ceux qui
ont fait du mal à autrui (surtout si ce sont des membres de son clergé qui ont
fait le mal), et de savoir tendre la main au prochain dans le besoin, de préférence
si le prochain est à la fois un criminel et un religieux. En
On estime à 800000 le nombre de
Tutsi et Hutus modérés massacrés par les partisans du parti Hutu Power dès
avril 1994. Les religieux catholiques, semble-t-ils, ne se comportent pas
différemment que le reste de la population: certains religieux participent aux
massacres, d'autres au contraire essayent de cacher ou défendre des victimes.
En juillet, les troupes du FRP Front Populaire pour le Rwanda (Tutsi) entre à
Kigali et met fin au massacre. Les génocidaires fuient en masse vers le pays
voisins. Les conditions de vie de ces réfugiés sont très dures.
C'est donc avec une charité
bien comprise commençant par soi-même que l'église catholique met en place un
vaste réseau pour permettre à ses membres qui ont participé au génocide de
retrouver des cieux plus clément et d'échapper à la justice internationale.
L'affaire ne deviendra publique qu’en avril 2001, lorsque l'Europe stupéfiée
découvre sur ses écrans de télévision deux religieuses Rwandaises accusées de
participation à un génocide devant un tribunal belge. Sœur Gertrude et sœur Kisito étaient en avril 1994 respectivement Mère supérieure
et Intendante de leur couvent lorsque des centaines de réfugiés cachés dans un
hangar près de leur couvent et dans leur couvent sont massacrée et en partie
brûlés vifs. Les deux sœurs auraient livré les réfugiés cachés dans leur
couvent aux génocidaires, et apporté elles-mêmes des bidons d'essence pour
enflammer le hangar plein de réfugiés. Sœur Kisito
aurait même alimenté les flammes avec de l'herbe sèche. La cours reconnaîtra
d'ailleurs la culpabilité des deux bonnes sœurs et les condamnera à de lourdes
peines de prison. Dès août
Comme d'habitude, l'Église nie
l'évidence jusqu'au bout. Le cas des deux sœurs avait déjà été dénoncé par
l'organisation des Droits de l'homme Africa Watch en
1995.
1996 - Autodafés de préservatifs
Le 31 août 1996, le cardinal de
Nairobi, Monseigneur le Cardinal Maurice Otunga,
remet au goût du jour une vénérable tradition chrétienne: l'Autodafé. Mais le
Cardinal est un homme de son temps. L'Afrique étant ravagée par l'épidémie du
SIDA, le saint homme ne livre pas aux flammes des hérétiques, mais des boîtes
de préservatifs et des petits livres sur le SIDA et comment s'en protéger. Une
petite foule de 250 fidèles assiste à cette cérémonie.
Mais le Cardinal n'en est pas à son
coup d'essai. Un an avant, il avait déjà fait preuve d'un esprit œcuménique peu
banal en procédant à un premier Autodafé de préservatifs en compagnie de l'Imam
de la mosquée de Jamia en août 1995.
Le Cardinal Maurice Otunga n'est pas un personnage insignifiant dans l'église
catholique: il était considéré comme un papable à l'époque de l'élection du
pape Jean-Paul II, et ses Autodafés ne lui attirent aucun reproche du Vatican.
Les œuvres que le Cardinal jette aux
flammes ne sont pas de banals manuels sur l'usage du préservatifs, mais des
livrets développés par des ONG locales au cours d'un long travail sur deux ans
financé par le Programme for Appropriate Technology in Health du Kenya.
Ces livrets proposaient L'ABC de la protection contre le SIDA: "A for
abstinence, B for being faithful
and C for condom use". Le C ayant eu l'heur de déplaire aux prélats
catholiques, les livres finirent dans les flammes. D'autres évêques Africains
participent aussi à la lutte contre le préservatif. Par exemple Monseigneur
Jean-Marie Untaoni Compaoré, archevêque de Ougadougou au Burkina-Faso lance en 1996 le slogan:
"Pour combattre le sida, luttons d'abord contre le préservatif car
celui-ci empêche d'avoir une conception globale de la relation sexuelle".
Pour saisir toute la gravité
du geste du Cardinal kenyan, il faut rappeler que au moment de l'Autodafé de
1999 - Contre les victimes de viols collectifs
En 1999, la situation depuis
longtemps tendue au Kosovo, province de
La réaction de l'église, qui voit là
une opportunité unique de s'en prendre à des personnes en détresse, est
immédiate: le 13 avril 1999, le théologien moraliste du Vatican, Mgr Elio Sgreccia, vice-président de l'Académie pontificale pour la
vie, condamne publiquement la distribution de pilules du lendemain aux femmes
et aux jeunes filles violées au Kosovo. Le prélat souligne que cette pilule a
une action abortive et donc elle est inacceptable pour la morale catholique.
2001 - Prêtres pervers et petits enfants
Depuis un millénaire, l'église
catholique impose le célibat à ses prêtres. Cette obligation attire bien sûr
les personnes à sexualité "déviante", dont les pédophiles. Ils
suivent souvent inconsciemment - et seulement spirituellement - le mot de
Jésus, qui avait dit qu'il y a des croyants qui se font eunuques pour entrer
dans le royaume de Dieu.
Hélas, l'église catholique fait de
grands efforts pour endoctriner les enfants, et les prêtres sont impliqués dans
ces actions de propagande pour mineurs que l'on nomme le catéchisme. Une
situation explosive est donc crée: l'on attire, par la possibilité de "se
faire eunuque", des pédophiles, puis on les soumet quotidiennement ou
presque à la tentation.
Le problème est ancien, connu. Déjà
au Siècle des Lumières, l'Abbé Bernier, baron d'Holbach, écrivait dans son
Dictionnaire abrégé de la religion chrétienne, en parlant de la "compagnie
de Jésus" :"(...) communément elle n’en veut point aux femmes, les
petits garçons ne s’en tirent pas à si bon marché.". Mais ce n'est qu'à la
fin du XXème siècle que toute la gravité et l'extension du problème
deviennent visibles et médiatisés par de nombreuses affaires sordides au cours
de la deuxième moitié des années 1990. Ce qui frappe le public, dans toutes ces
affaires, ce n'est pas tant le délit en soi que la réaction de l'église
catholique: systématiquement, celle ci s'active pour protéger ses clercs des
foudres du bras séculier de la justice. Une première affaire retentissante de
ces années est celle de l'ancien cardinal archevêque de Vienne, un ami
personnel de Jean-Paul II: l'église catholique lui permet d'aller passer sa
retraite dans un monastère de nonnes en Allemagne, échappant ainsi à la justice
autrichienne. Le 9 avril 1998, alors que plusieurs affaires de prêtres pédophiles
secouent l'opinion publique belge, la justice traite enfin, pour la première
fois de mémoire d'homme, l'église catholique comme une personne morale soumise
aux même lois que le reste de la société: la 34ème chambre du
tribunal correctionnel de Bruxelles non seulement condamne un prêtre pédophile,
l'abbé André Vanderlyn, ancien curé de la paroisse
bruxelloise de Jésus Travailleur à Saint- Gilles, coupable de plusieurs abus
sexuels commis sur plusieurs enfants au catéchisme, à une peine de prison
ferme, mais reconnaît aussi la responsabilité civile du Cardinal Danneels et son évêque auxiliaire, Mgr Paul Lanneau. Les deux hauts prélats étaient en effet au courant
des agissements du prêtre pédophile, mais non seulement ils avaient gardé le
silence, mais en outre ils n'avaient pris aucune mesure pour éviter le contact
entre le pervers et ses victimes potentielles. A l'époque, les belges pensent
que ce jugement fera jurisprudence, et que cela portera l'église à refréner les
pulsions de ses prêtres pervers. Tous les regards se tournent vers Gand, où une
autre affaire sordide est jugée: un prêtre a reconnu une relation homosexuelle
avec un jeune paroissien, mais affirme qu'elle n'a commencé que lorsque la
victime était majeure. Faux, accusent les parents de la victime, qui portent
plainte: la 14ème chambre correctionnelle du tribunal de Gand juge
le 10 juin 1998 que la relation a bien commencé alors que la victime était
mineure, avec la circonstance aggravante que le prêtre pédophile a abusé de sa
position d'autorité. Le prêtre est condamné, mais par contre le tribunal refuse
de reconnaître la responsabilité civile de l'évêque, son supérieur direct, au
prétexte que l'autonomie du prêtre dans son travail est supérieure à celle d'un
employé de son supérieur dans une autre société.
Les cas de prêtres pédophiles
dénoncés se multipliant, l'épiscopat français, le dos au mur, proclame début
2001 qu'il ne couvrira plus les agissements des prêtres pédophiles. Hélas, en
mars 2001, une nouvelle affaire de pédophilie d'un prêtre secoue la
francophonie, cette fois en Suisse: à Vevey, l'on apprend que le curé est sous
accusation pénale pour détournement de mineurs: il a eu des rapports sexuels
avec un jeune de 15 ans à l'époque des faits. Le conseil de paroisse apprend
les faits, et, immédiatement, lui pardonne et décide de cacher l'affaire aux
paroissiens qui confient leurs enfants à cet individu lors du catéchisme. Mais
les catholiques sont ainsi, ils sont toujours très prompts à se pardonner le
mal fait à autrui. L'évêque ordonne de garder le secret sur l'affaire car les
faits sont sans doute prescrits: ils datent des années 1980. Hélas pour
l'église, la paroisse où le curé est accusé et n'échappera à la prison que
grâce à la prescription et a un deuxième prêtre. Celui-ci s'indigne que l'on
n'informe pas les paroissiens, et il semblerait qu'il ait passé à des tiers un
"communiqué" que le conseil de paroisse avait préparé puis, après le
pardon accordé au pédophile et l'ordre de silence de l'évêque, prudemment rangé
dans un tiroir. Cette fois-ci, la réaction de l'église est immédiate: le prêtre
dénonciateur est licencié: comme il avait un statut de fonctionnaire, il n'a
pas de droit à l'assurance chômage, et, en raison de son expérience
professionnelle et de son âge, sa réinsertion professionnelle s'annonce
difficile. L'église justifie sa punition par le fait que non seulement le
prêtre a informé des tiers du passé criminel de son collègue, mais en plus il
vit avec une femme! Le prêtre pédophile est réconforté et protégé. La hiérarchie
lui confie une nouvelle affectation pour ne pas lui imposer de devoir soutenir
des regards hostiles, et lui renouvelle sa confiance, justifiée par le fait que
les faits reprochés sont sans doute prescrits. Nous retrouvons donc le schéma
classique: le pédophile est protégé par la hiérarchie et reste prêtre, il
continuera à s'occuper de l'éducation religieuse des enfants, il est
"pardonné pour le moment d'égarement" (par l'église, pas par la
victime), le dénonciateur est, lui, sévèrement puni.
Pour compléter le tableau, le
Présidium de
Une fois que la tempête
médiatique est enfin retombée, l'évêque responsable du diocèse où ont eu lieu les
faits, Monseigneur Genoud, évêque de
Lausanne-Genève-Fribourg, donne le 19 juin une conférence de presse pour
condamner ... la masturbation ! Du haut de son autorité morale de protecteur de
pédophiles, il explique la gravité extrême du geste. L'on ne peut qu’en
conclure que pour l'évêque, il est plus grave qu'un adolescent se masturbe que
ne soit abusé sexuellement par un prêtre.
2001-2002 - La
conspiration du silence
10 millions de Dollars! Telle est la
somme que l'archidiocèse de Boston a investi discrètement entre 1997 et 2001
pour faire taire les victimes d'un prêtre pédophile actif, qui a agi dans le
cadre de ses fonctions pendant plusieurs décennies, jusqu'en
Cette nouvelle affaire a un goût de
déjà vu. Le prêtre a molesté plus de 130 enfants en près de 30 ans. Il gardera
ses fonctions, et changera plusieurs fois de poste, jusqu'en 1998, alors que
dès
Le 24 juillet 2004, le State
Attorney General (ministre de la justice de l'état) du Massachussetts publie un
rapport d'enquête sur les abus sexuels d'enfants par les prêtres dans l'archevêché
de Boston: on y apprend que plus de 1000 enfants auraient étés abusés
sexuellement. Que l'abus d'enfants était accepté et couvert par la hiérarchie
pendant au moins 6 décennies, et que les abus ont étés "tellement massifs
qu'ils sont presque incroyables". Le rapport indique aussi que
l'archevêché n'a pas pris et ne prévoit pas de prendre des mesures adéquates
pour (1) déterminer les "causes systémiques" des abus sexuels par les
prêtres (2) éliminer de l'organisation les prêtres ayant commis des actes
pédophiles (3) prendre des mesures suite à son échec à prévenir les abus
sexuels d'enfants (4) donner les informations à la justice civile et (5)
prendre des mesures pour prévenir de futurs cas d'abus sexuels.
Il faut dire que la politique du
maintient du secret à tout prix que l'Archidiocèse de Boston a suivi dans le
cas du père Geoghan est conforme aux règles de
l'Église Catholique. En effet, dans une lettre datant de 2001, approuvée par le
Pape Jean-Paul II,
A l'aube du troisième
millénaire, l'Église Catholique est ainsi encore un nid de pédophiles: les
clercs coupables d'abus sexuels contre des enfants continuent apparemment à
êtres protégés: protégés de la justice, puisque toute affaire doit être tenue
secrète et traitée uniquement en interne. Et protégés de la vindicte populaire,
puisque l'église reste prête à investir des millions de Dollars pour imposer le
silence aux victimes de chaque clerc pédophile.
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Remarque :
Dans ce long texte, l’auteur oublie
certaines exactions cruelles des chrétiens, en particulier les nombreux
massacres dus aux conquistadors espagnols, tout d’abord au sein de l’empire
aztèque (Mexique actuel), puis au sein de l’empire inca (Pérou, Equateur,
Bolivie, nord du Chili). Des dizaines de millions de morts en un siècle et
l’usage généralisé de l’esclavage, plus une épidémie de variole qui tua de
nombreux indiens. Qui dit mieux ? Par ailleurs, la croisade actuelle et
l’acharnement du Vatican contre le droit à l’avortement et l’usage des
préservatifs n’est certes pas le plus grand titre de gloire des successeurs les
plus récents de Saint Pierre (oui, celui qui avait deux crânes !) et
montre seulement l’obsolescence de leur doctrine.