Les Dentelles du Cygne


NGC 6960 au C 14,
© : Marc Salameh, SAF

Marc Salameh,

Les dentelles du cygne sont un des plus grands & brillants vestiges de supernova intervenue il y a plus de 20.000 ans dans le bras de la voie lactée du cygne.

Autre particularité, ce complexe nébulaire de la région du cygne* est un des objets du ciel profond à avoir le plus bénéficié de la «  technologie miracle » procurée par les filtres à bande passante de type OIII ou UHC.

Il y a une vingtaine d’années, les dentelles du cygne étaient un objet réservé aux observatoires bien équipés ou,  accessibles à la photographie de quelques happy few.

A présent, avec les filtres de type UHC ou OIII on  a l’impression de multiplier au moins par deux le diamètre de l’instrument, par rapport à l’observation sans filtre.

Ainsi par exemple, un T200 avec filtre donnera comme on le verra plus loin les mêmes résultats qu’un T400 utilisé sans ces filtres miracles, merci Dr Jack Marling**.

* Située en pleine voie lactée nord, la région du cygne offre aussi la possibilité d’observer des complexes nébulaires tels que North America (NGC 7000) & le pélican, mais aussi les nébulosités autour de gamma du cygne (IC 1318,  NGC 6888/ crescent nebula…).

** Fondateur (PhD Physics) de la firme Lumicon, qui a été la pionnière dans les années 80 de ce type de filtres, à présent malheureusement disparue.

Repérage


Repérage des Dentelles, d'après Project Pluto Guide 8.0

Contrairement à nombre d’objets du ciel profond,  NGC6960 est traversée en son milieu par l’étoile 52 Cygni visible à l’œil nu (magnitude 4,2), juste en dessous à gauche de la brillante Eta du  Cygne,  une des principales composantes de la constellation de magnitude de 2,5 (identique celle des étoiles de la grande ourse), avec laquelle elle forme deux des bases d’une petit triangle.

 

A  noter que 52 Cyg, est une étoile double méconnue, son écart plutôt serré (6’’deux fois moindre que celui de la polaire) y est pour quelque chose et nécessite au moins un T200 avec plus de 200 X de grossissement pour être observable dans de bonnes conditions.

Après avoir pris le temps d’observer la partie qui entoure 52 Cygni, il convient de diriger l’instrument à  plus d’un degré ouest pour tomber sur NGC6992/95.

La partie centrale des dentelles (NGC6979) qui est aussi la plus faible, est située à moins d’un demi degré de la partie nord de NGC6960.

Les dentelles du cygne sont visibles dans de bonnes conditions l’été en 2e partie de nuit, et en automne en milieu ou début de nuit.

Observations

Aux Jumelles

Sous le ciel noir du Berry de Marc Chapelet, NGC 6992  est visible sans filtres en vision latérale aux jumelles  7X50  et 8X30.

A la lunette de 120mm et 24 fois de grossissement, les deux principales parties des dentelles sont visibles à savoir NGC 6960 et NGC 6992.

Au  Télescope de 200 mm de diamètre

L’effet amplificateur des filtres est évident dans la mesure où sans filtre, la nébuleuse est quasiment invisible dans des conditions de transparences moyennes ; on pourra tout au plus observer d’une manière élusive la partie située au nord de 52 Cyg.

Les très bonnes nuits on remarquera un mince filament (6960) au nord de l’étoile jalon et, selon l’expérience des observateurs en vision latérale, une vague ligne incurvée (6992/95).

Avec l’utilisation d’un filtre OIII /UHC les détails observés n’ont plus rien à voir, les deux parties de la nébuleuse sortent du néant en devenant  bien visibles.

NGC 6960

La partie au nord de 52 Cyg  est la partie la plus brillante des dentelles mais aussi la plus fine, elle est visible comme un arc fin,  incurvé, observable sur près d’un demi degré soit presque 30 fois la taille de Jupiter à l’opposition.

La partie au sud de 52 Cyg qui, même si elle est la moins évidente, est plus large et visible parfois sous la forme d’une structure en éventail.

NGC 6992/95 apparaît avec un oculaire grand champs de type Nagler, comme un long arc incurvé qui, bien que moins brillante que NGC6960 apparaît plus large,  quelques filaments apparaissent à l’occasion.

Au  Télescope de 280 mm de diamètre

Sans l’utilisation de filtres, la partie nord de NGC 6960 est visible sous forme de mince faisceau légèrement ondulé, argenté surtout dans la partie nord de 52 Cygni.

NGC 6992/95 n’apparaît également que vers le milieu de l’arc nébulaire  légèrement effiloché.

Avec l’utilisation de filtres NGC6960 est bien vue du nord au sud sur près d’un degré, grâce à  un oculaire grand champs (60° et plus) et à faible grossissement.

La nébuleuse s’étend alors comme un cours d’eau cheminement du nord au sud avec quelques inflexions, la partie en delta au sud de la nébuleuse commence à devenir bien visible.

NGC6992/95, belle nébuleuse visible sur plusieurs champs ; elle s’étend comme une grande arche parcourue par des marbrures et quelques filaments diffus.

Il est à noter que 6995 est le prolongement sud de 6992, là où la nébuleuse devient plus large et discontinue.

Au  Télescope de 460 mm de diamètre

Sans l’utilisation de filtres, la partie  nord de 52 Cyg est bien visible mais avec des filaments plus fins 

La partie au sud est moins bien visible, on devine le mouvement général de la nébuleuse mais on ne distingue presque plus la fin qui se sépare en deux branches comme on le verra plus loin.

Pour 6992/95, les choses sont assez semblables : aspect général (de type boomerang) visible mais avec moins de marbrures et déchirures dans la nébuleuse.

La partie centrale des dentelles (NGC 6979) est à peine visible, ce qui n’est pas étonnant compte tenu du fait que c’est la partie la moins brillante du complexe nébulaire.

Avec l’utilisation de filtres, la nébuleuse devient spectaculaire.

NGC 6960 avec un Panoptic (Nagler) 35mm* et filtre OIII, s’étend sur plus d’un degré ; la partie au nord est bien brillante, fine avec des ondulations qui la fait ressembler… à un voile de mariée, ce qualificatif est celui d’une (charmante) observatrice qui découvrait les dentelles…

 * 65 X de grossissement, 1° de champs.

On aperçoit de la matière noire dans le filament, qui rappelle la bande d’absorption de certaines galaxies vues par la tranche de type NGC 4565 (ciel de printemps) ou NGC891 (région d’Andromède).

Le sud de la nébuleuse se sépare clairement en deux filaments espacés d’un angle de près de 45°, chacun des filaments ayant une longueur de 10 à 15’.

L’utilisation d’un Nagler 20mm*+ filtre OIII apporte des améliorations : la partie nord par exemple devient plus large elle est traversée en trois endroits par des marbrures.

Le double filament de la partie sud ressemble à deux cornes de taureau, à tel point qu’un soir  m’était venu le rapprochement  avec la constellation hivernale du même nom ; les deux filaments s’étendent encore plus loin, sans doute en rapport avec le grossissement et la résolution .

La partie gauche des deux cornes semble légèrement plus longue et  dense que celle l’autre partie.

* 115 X et un demi degré de champs.

NGC 6979 est la partie centrale et la plus faible des dentelles elle devrait être visible à partir d’un T250 avec filtres.

Au T460+filtres la différence d’éclat avec les autres dentelles est visible, elle n’en demeure pas moins aussi brillante que NGC 6992 telle que vue au T280 avec filtres.

Au 35mm + filtres, on remarque dès la fin de la partie nord de 6960 des nébulosités fines et effilées.

Au 20mm+ OIII, on remarque que NGC 6979 est en fait composée de deux nébulosités : une près du nord de 6960 et l’autre, plus grande (sur près d’un degré) à mi distance avec NGC 6992, elles apparaissent bien visibles tels des nuages ondulés flottants dans un arrière plan très étoilé (nous sommes en pleine voie lactée).

Quel filtre ?

Les filtres 0III ou UHC donnent de bons résultats sur les dentelles toutes fois, il semblerait que le filtre OIII donne d’encore meilleurs résultats que le filtre UHC.

Ainsi, sur 6960 on observe mieux les deux fourches en fin de la nébuleuse, la partie nord apparaît légèrement plus dense.

NGC 6979 occupe trois plus de place lorsque vue en OIII par rapport à l’observation avec l’UHC.

A l’inverse, la différence entre les deux filtres est moins sensible sur NGC 6992 qui donneront d’aussi bons résultats l’un que l’autre.

 

NGC 6992 & 95

Sans filtres, cette partie des dentelles est, comme on peut s’en douter plus faible on distingue relativement bien le nord de la nébuleuse (NGC 6992) ; vers son milieu elle est à peine perceptible, elle redevient visible dans sa partie sud (NGC 6995) mais sans le foisonnement de détails dont il sera question plus loin.

Avec filtres, elle devient un objet très gratifiant qui fait régir les observateurs les plus blasés : une arche argentée bien visible qui s’étend sur près de deux degrés, parcourue d’irrégularités sur toute sa longueur.

Au 35mm, on peut la suivre sur deux champs d’optique son trajet et irrégularités.

Au 20mm + filtres on peut compter jusqu’à 9 cassures dans la nébuleuse avec une partie sud qui se termine en torsades, NGC 6995 qui occupe alors un demi degré de champs n’est plus continue, on remarque une dispersion aléatoire de taches claires souvent en marge du chemin principal apparent de la nébuleuse.

Au  Télescope de 915 mm de diamètre

Au 35mm* avec filtre OIII : même avec le souvenir des nombreuses observations au T460, je n’étais pas préparé à voir cela , la nébuleuse était tellement brillante qu’elle semblait avoir un aspect tri –dimensionnel, elle flottait dans l’espace avec un arrière plan très sombre & étoilé.

Il est tout à fait vraisemblable que même sans l’utilisation de filtres, les dentelles auraient été aussi spectaculaires au T915 qu’au T460 avec filtres.

*  130X, compte tenu de la focale de plus de 4.500 mm

NGC 6960

La partie nord est très brillante ressortant nettement par rapport à l’arrière plan couleur noir d’encre ; elle est suffisamment longue pour s’étendre sur plus de deux champs, nous n’avons plus l’aspect voile de mariée puisque cette partie apparaît aussi large que 6992.

La partie sud également visible sur deux champs se dédouble en deux autres dentelles  avec de minces filaments qui semblent s’en échapper à angle droit.

NGC 6979

Cette partie de la nébuleuse est également mieux visible, même si elle à une forme plus diffuse que celle des deux autres dentelles.

Elle occupe une bonne partie de l’espace, qu’on croyait vide dans les autres télescopes, situé entre le nord de 6960 et 6992.

NGC6992

En largeur, elle occupe au minimum la moitié du champs, en la suivant en on l’impression de la parcourir à l’infini : 4 champs oculaires avec un 35mm coulant 50, et plus de 6 avec un Nagler 20mm ; son éclat est voisin de celui de la nébuleuse d’Orion visible dans un T300 +

Les irrégularités, bandes d’absorptions sont très nombreuses elles  parcourent toute la nébuleuse, donnant un spectacle avec presque trop de détails pour une description exhaustive ;

On descend  à regret de l’échelle (à plus de 5 mètres du sol) pour laisser à la personne suivante le plaisir d’admirer ce spectacle.

Photographie


NGC 6960 et NGC 6992 au C 14,
© : Marc Salameh, SAF

L’extension sur plusieurs degrés des dentelles du cygne en font  un des rares objets du ciel profond (par rapport aux nébuleuses planétaires, amas globulaires, et la plupart des galaxies) accessibles à un téléobjectif de 300 à 500mm.

De plus, l’installation du téléobjectif en parallèle du télescope permet un guidage de qualité et une marge d’erreur de corrections puisque le guidage se fait avec 3 à 10 fois la focale photographique et ce, sans voir besoin d’équiper son télescope des méthodes sophistiquées de guidage automatique.

En Photographie argentique, une pellicule de 800 ou 1000 Asa sensible dans le rouge mais aussi dans le bleu, compte tenu des différentes longueur d’ondes dans lesquelles émet la nébuleuse, est préférable avec un temps de pose de 40mn et plus.

La photo numérique donnera un résultat encore plus satisfaisant avec une dizaine à une trentaine de poses de 2mn.

Une focale de un mètre et plus, permettra de détailler d’avantage chacune des dentelles, sachant que la plus facile à repérer et photographier est, comme on l’a vu, NGC 6960  grâce à 52 Cyg qui forme une des bases du triangle avec notamment Eta Cygni.

 

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