LA MESURE DES IMAGES PLANETAIRES AVEC WINJUPOS

Un tutoriel

Christophe Pellier, Marc Delcroix, Frédéric Brion

WinJupos est un logiciel extrêmement performant pour l'observation des planètes, le traitement et l'analyse de leurs images. L'outil de base du traitement des images du logiciel est la mesure d'images. Elle permet d'enregistrer dans un fichier les paramètres d'une image de façon à la travailler de différentes façons.

Après avoir choisi, dans le menu "programme" la planète dont on veut s'occuper - ici Jupiter - il faut ouvrir le module de mesure d'images dans "Enregistrement - Mesures d'images".

Ensuite, on charge une image choisie dans le module de mesure, onglet "Img".

Les données suivantes sont indispensables : date et heure en Temps Universel (TU), au dixième de minute près (entre 0 et 9). Les éventuelles erreurs peuvent être corrigées lors de l'étape suivante. Attention, l'heure de l'image doit être celle du milieu de film ; la plupart du temps, l'heure indiquée par les logiciels de capture est celle du début de la capture. Si l'image est issue d'une dérotation de vidéo (voir le tuto correspondant), pas de souci l'heure est la bonne...

Les données suivantes ne sont pas indispensables, mais s'avèrent fort utiles sur le long terme pour l'identification des fichiers mesurés, car elles sont conservées dans le nom du fichier de mesure :
- Observateur : ce code permet de gérer des données provenant de plusieurs observateurs. Inutile si l'on est sûr de n'avoir jamais à utiliser que ses propres images... Sinon un code à 3 lettres (international) peut être utilisé, ou le nom tout simplement.
- Informations sur l'image : on peut y écrire ce que l'on veut. Par exemple, le type de filtrage utilisé : LRGB pour une image traitée avec cette méthode, IR74 pour une image réalisée avec l'Astronomik IR 742, R pour le filtre R... A chacun de trouver au besoin les codes qui lui sont utiles.

A noter qu'il existe un nom de fichier d'image qui déclenche tous ces règlages automatiquement s'il est respecté : AAAA-MM-JJ-HHMM[.][M][-Observateur][-Informations image]. Il s'agit également du nom de fichier crée automatiquement par le logiciel lors des opérations de dérotation.

A l'étape suivante, il faut positionner le contour de la planète, dans l'onglet "Aju". C'est l'étape la plus importante, et la plus subtile ; de sa précision va dépendre la qualité de tous les travaux réalisés ensuite à partir de l'image mesurée, c'est pourquoi il est nécessaire de la soigner.

Sur Jupiter, WinJupos dispose d'une fonctionnalité très pratique : le positionnement automatique. En cliquant sur le le choix du menu, le logiciel déclenche tout seul une série de calculs basés sur l'orientation des bandes, et la position des lunes ou leur ombre si elles sont présentes, pour trouver la bonne position. D'expérience, le positionnement automatique est très performant pour trouver le contour du limbe, mais un peu moins pour l'orientation de l'équateur par rapport aux bandes. Il ne faut pas hésiter à retoucher cette orientation manuellement ensuite, si l'on trouve qu'il y a un problème. Les touches du clavier permettant de changer l'orientation du contour sont :

- les flèches pour déplacer le contour,
- [page-haut] et [page-bas] pour agrandir ou diminuer le contour,
- [N] rotation horaire, et [P] rotation antihoraire,
- La touche [Ctrl] permet de multiplier par 10 l'ampleur des déplacements, au besoin
- La touche [
◄──] (Effacer) permet quant à elle de tourner le contour de 180° d'un seul coup.

Les informations sur la taille du contour en pixels, l'échantillonnage en arcsec/pixel et l'angle d'inclinaison du contour sont indiqués en bas à gauche.

L'orientation originale de l'image n'a aucune importance dans WinJupos. Cependant, elle doit être connue. WinJupos prend en charge y compris les orientations en miroir (est/ouest inversé) même s'il vaut mieux éviter de jouer avec ce type d'orientation qui peut être piégeant (surtout sur Saturne). Sur le contour la lettre N désigne le pôle nord de la planète ; la lettre P désigne le bord précédent, c'est à dire l'est.

A noter que le positionnement automatique semble avoir du mal à reconnaître l'orientation nord en haut ou sud en haut de l'image. Si le pôle "haut" de l'image chargée n'est pas celui du contour, il faut faire tourner ce dernier avec la touche Backsp avant de déclencher le positionnement automatique.

Si le contour n'est pas visible dans la fenêtre, cliquer sur "centrer le contour". La couleur du contour peut également être choisie dans plusieurs niveaux de gris, de façon à ce qu'il soit toujours bien discernable.

Note sur le positionnement du contour sur le limbe

Au cas où il y aurait un problème à ce niveau, ou bien si on cherche à mesurer une autre planète que Jupiter (auquel cas le positionnement automatique n'est pas fonctionnel), l'aspect et la visibilité du limbe de l'image est un point critique. Pour ajuster manuellement le contour, il faut que le limbe soit entièrement visible. Or, selon le traitement appliqué à l'image, il peut ne pas l'être clairement. Dans ce cas, il faut ajuster la visualisation de l'image à l'aide du Gamma, du Contraste, de la Luminosité, disponibles à gauche. L'augmentation du Gamma est surtout utile pour voir le limbe. Attention: les valeurs G, C et L sont conservées lors de l'enregistrement du fichier de mesure. Une fois le positionnement réalisé, il faut les remettre à leurs valeurs d'origine. Les touches [page haut] et [page bas] permettent d'agrandir ou de rétrécir le contour. Le cas échéant, un zoom sur l'image est conseillé car il permet d'affiner les mouvements du contour avec les touches.

Note sur la position des satellites et leurs ombres

Les lunes et leurs ombres sont également simulées dans le contour théorique et peuvent donc être utilisées pour son ajustement. La première étape est de vérifier que l'heure de capture saisie dans l'onglet "Img"est exacte : un décalage de la simulation du satellite ou son ombre par rapport à l'image réelle indique une erreur. Il faut alors retoucher la valeur horaire indiquée dans le premier onglet jusqu'à ce que les deux coïncide. La deuxième étape permet d'ajuster le contour à l'aide de la position des lunes : un décalage vertical indique que l'équateur n'est pas correctement orienté.

Afin d'éviter autant que possible ce genre de problème, il est quand même plus intéressant de procéder à une vérification du réglage de l'heure de l'ordinateur avant les observations !

Lors de la mesure d'images de Saturne, il peut être utile de faire monter fortement la luminosité afin de faire apparaître les satellites, qui sont nombreux mais en général très peu lumineux.

Note sur la correction AB

La correction AB est prévue pour effectuer une correction du gradient de luminosité de l'image. Nous réserverons son étude à une autre étape (durant la cartographie ou la dérotation).

Ensuite, il ne reste plus qu'à revenir sur l'onglet "Img" et à cliquer sur "enregistrer". Cela génère un fichier .ims que nous allons pouvoir réutiliser à l'envie pour d'autres opérations ! (note : de façon évidente, le fichier de mesure peut être rechargé après enregistrement en cliquant sur "charger").

Le cas des images de Mars

Comme écrit plus haut, la fonctionnalité de positionnement automatique du contour n'est pas disponible pour les autres planètes et il doit donc être ajusté de manière entièrement manuelle. Le cas de la planète Mars est complexe, car les repères de positionnement sont beaucoup moins évidents...

Le contour (commes sur les autres planètes) tient compte de la phase en vigueur. La difficulté va venir de l'orientation de l'axe polaire et de l'équateur. Sur cette image prise par Emil Kraaikamp le 16 janvier 2012, on a du faire appel à toutes les aides disponibles dans le logiciel...

1) Agrandissement de l'image +273 %. Les images de Mars sont en général assez petites. Ne pas hésiter à bien grossir, sauf si cela ruine le contraste des détails (l'agrandissement n'est pas conservé par l'enregistrement)
2) Augmentation du gamma, pour bien voir le contour de l'image réelle
3) Ajustement de la taille du contour, de façon encore grossière
4) Augmentation du contraste, car certains détails de la surface vont nous servir de repères
5) Temporairement, affichage du canal rouge seulement, pour mieux visualiser les taches d'albédo de repère ("Canal F9" en haut à gauche)
6) Ajustement de l'équateur en tenant compte de deux repères d'albédo situés à 0° de latitude : les deux "cornes" de Sinus Merdiani, et Juventae Fons, à droite, petit cratère sombre. A d'autres longitudes, on peut se servir de Pavonis Mons (situé pile sur l'équateur), ou bien de Gomer Sinus (un peu au sud), Syrtis Major offre également des repères comme le cratère Huygens, dont le centre est sombre et généralement bien visible sur les images amateur. De façon évidente, les longitudes autour d'Elysium et Tharsis sont les plus pauvres en repères sur l'équateur et sont donc difficiles à ajuster. Il est également possible de s'aider de coordonnées géographiques de détails situés loin de l'équateur, mais attention aussi car la turbulence et le traitement d'image peuvent générer des écarts dans la position des détails...

Attention le bord des calottes polaires est trompeur : il n'est que rarement parallèle à l'équateur, comme on le voit bien sur l'image d'Emil ci-dessous ! Elles ne sont pas exactement centrées sur les pôles...