Sur les traces de Bernard Lyot

Gaston & Raymond Porret

Texte de Roland Oudin

Deux amis disparus il y a quelques années, qui m'ont fait connaître la Société Astronomique de France en 1953 lorsque j'avais 17 ans, font partie de l'histoire de notre société. Ils méritent un hommage pour leur contribution à l'étude de l'activité solaire par les amateurs.

Des anciens sociétiares se souviennent peut-être des communications écrites publiées dans l'astronomie" de Gaston Porret (1902-1997) et de Raymond Porret (1925-1998), père et fils qui étaient horlogers opticiens à Créteil dans le Val-de-Marne.

Bernard Lyot en 1930 observa pour la première fois la couronne solaire en dehors des éclipses, avec un instrument construit de ses propres mains, un coronographe.
Gaston et Raymond Porret inspirés par la technique de Bernard Lyot construisirent 20 ans plus tard leur coronographe.
Ce furent certainement les premiers amateurs à l'époque à n'avoir pas été découragés par les difficultés techniques et les nombreux essais infructueux mais nécessaires avant de voir, puis après des modifications et des améliorations et de nombreux essais, de pouvoir enfin photographier des protubérances.

Quelques données techniques de leur instrument:
L'objectif principal de 80 millimètres de diamètre et de 1m50 de distance focale, achromatique, est composé de deux lentilles collées au baume. Le poli des faces extérieures, sans piqûre ni rayure, est poussé au maximum.
Au moment des observations la poussière est éliminée au mieux. L'image du Soleil se forme sur un disque opaque nickelé et incliné à 45° pour renvoyer les rayons lumineux à l'extérieur de la lunette. Des disques de différents diamètres permettent de masquer exactement le Soleil, suivant son diamètre apparent. Une lentille achromatique, de 10 centimètres de distance focale, joue le rôle de collimateur et renvoie l'image du champ entourant le Soleil à l'infini. Cette lentille forme à 106 millimètres d'elle même, une image de l'objectif, soigneusement diaphragmée au moyen d'un iris, de façon à éliminer la lumière diffractée par les bords de ce dernier.
Derrière le diaphragme, une petite lunette composée d'un objectif de lunette et d'un oculaire de longue vue; montée sur une rotule, permet d'examiner les contours du Soleil. Le contraste est augmenté par l'interposition d'un écran absorbant le bleu du fond du ciel.
Le coronoscope a un grossissement de 70 fois.
Un fil d'un centième de millimètre en platine, soudé sur chaque disque opaque, permet de repérer la hauteur des protubérances. La longueur du fil correspond à une hauteur de 100000 kilomètres. Un index mobile, visible dans l'oculaire est amené par rotation en face de la protubèrance observée, et permet d'en déterminer les coordonnées grâce à un cercle gradué de 5 en 5 degrés monté sur le corps de la lunette principale.
Avec l'adjonction d'une petite chambre noire photographique le coronoscope est devenu un coronographe. La visée se fait en renvoyant momentanément l'image sur le côté, au moyen d'un petit miroir formé par une lame de microscope (suivant le principe des appareils réflex).

Au cours de l'année 1950 Gaston et Raymond Porret firent la présentation de leur coronographe à l'Académie des Sciences. Ils reçurent aussi les félicitations de notre société. L'Astronomie de mars 1951 leur consacra 2 pages.

Observer, photographier les protubérances n'étaient pas leur unique préoccupation dans l'étude de l'activité solaire, ils photographiaient aussi les taches. raymond reportazit pour chaque rotation sur des cartes planisphères (qu'il avait fait imprimer) les taches et les facules observées. Ces cartes étaient régulièrement adressées à Madame G.Flamarion jusqu'à son décés en 1962, et après au secrétariat de notre société.

Gaston et Raymond Porret observaient et photographiaient aussi la Lune et les planètes.

En 1950, il n'y avait aucun ouvrage pour aider les amateurs à construire un coronographe. En 1985, Pascal Mazereau et Pierre Bourges éditèrent un livre, préfacé par Audoin Dollfus " A la poursuite du Soleil: la construction du coronographe d'amateur".

 

Ce texte m'a aimablement été communiqué par Monsieur Roland OUDIN, de MONTALIVET sur MER.
Correspondant de la Commission du Soleil de la SAF (Soc. Astronomique de France), membre du GFOES (Gpment Français pour l'Observation et l'Etude du Soleil), Roland OUDIN est un observateur assidu du Soleil (lunette de 60mm, T90 et filtre à l'ouverture) et du ciel nocturne. Il est également climatologue amateur et membre de la Société Météorologique de France.

Merci à lui d'avoir porté à la connaissance de tous l'existence de ce qui est certainement le tout premier coronographe amateur.