Construction du coronographe
Premier Prototype
- Printemps 1998 -



La description suivante décrit étape par étape la construction du tube et des divers éléments de la première version du coronographe que nous avons construit. Elle ne prétend pas résoudre tous les problèmes de construction, mais proposer quelques solutions, plus ou moins judicieuses, et certainement améliorables.
Voir à ce sujet la description de la construction du second coronographe.
Pour toutes questions ou remarques, n'hésitez pas à nous contacter, mais allez aussi voir la seconde version du coronographe

Caractéristiques du coronographe :

Lentille O1 : ménisque de diamètre 50mm, focale 1500mm     Ref. Melles-Griot : 01LMP055

Lentille O2 : plan convexe de diamètre 30mm, focale 200mm     Ref. Melles-Griot : 01LPX268

Diaphragme : de 1 à 20mm de diamètre   Ref. Melles-Griot : 04IDC007

Filtre H-alpha : filtre interférentiel centré sur la raie H-Alpha (656 nm) de bande passante 10nm.
                            Ref. Melles-Griot : 03FIR006
                            Voir les remarques à propos du filtre dans les conclusions.

Objectif O3: objectif issu de jumelles (diam=50mm, f=240mm)
 

 13 Avril 1998

Fabrication du support de la lentille O2 (diamètre 30mm) selon le plan suivant :

    Les deux plaques sont en Duralumin d’épaisseur 4mm.
Il y a trois perçages à 120° pour assembler les deux plaques entre elles (une plaque taraudée à 4mm et l’autre percée à 4mm), et trois autres (de diamètre 4mm) pour fixer l’ensemble dans le tube.
    Le même jour, premiers essais de perçage d’un trou de 6mm de diamètre dans du verre. L’outil est constitué d’un petit tube de laiton creux de 6mm de diamètre au bout duquel ont été réalisées 6 encoches.

    L’outil est placé dans le mandrin de la perceuse sensitive et le bras de la perceuse a été lesté de façon à exercer une pression suffisante (mais pas trop !) sur le verre (environ 100 grammes pour un bras de levier de 30cm ; à évaluer suivant le cas…).

    Les échantillons d’essai, préalablement enduits de vernis à ongles ont été scotchés à une plaque de bois. Le perçage se fait avec du corindon 180 et assez d’eau (jamais à sec !). Le débouchage semble ne pas poser de problèmes, puisque les écailles ne dépassent pas le millimètre. Il est ensuite possible de biseauter le bord du trou avec du corindon et en prenant comme outil un écrou borgne (pris également dans la perceuse).

18 Avril 1998

Perçage de la lentille O2 :
    L’opération se fait d’abord dans l’une des rondelles du support, avec un jeton de duralumin percé au centre de manière à bien centrer le trou. Une fois le trou marqué, on enlève le support et le jeton et on perce directement le verre, sur une planchette de bois, en ajoutant souvent eau et abrasif (corindon 180) ; Il est tout à fait possible de relever l’outil pour remettre de l’abrasif en cours de perçage.
    On perçoit nettement le bruit de l’usure lorsque le corindon agit. L’opération prend en tout environ trois quarts d’heure (avec arrêts pour faire refroidir le moteur).
    Lorsque la pièce est percée, le trou est douci sur les bords à l’aide de l’outil hémisphérique, en tenant la lentille à la main.
    Une fois la pièce terminée, on la lave afin d’enlever tout reste d’abrasif. Le vernis s’est soulevé par endroits laissant rentrer du corindon (sans dommages apparents). Le vernis est enlevé au solvant et la lentille nettoyée à l’eau puis à l’alcool. Afin d’éviter le soulèvement du vernis, il faudrait peut être ne pas vernir la partie à percer (pour éviter de casser la couche), et ne pas faire trop sécher le vernis afin qu’il ne soit pas cassant.
    Le trou a un diamètre légèrement plus grand que 6 mm, sauf sur la face débouchante, où l’on a exactement 6 mm.

19 Avril 1998

Fabrication du système d’occultation :
Ce système est constitué de 3 éléments principaux:  Le cône, le disque occulteur  et la tige filetée du support.

Le cône : Il est réalisé dans un rondin d’aluminium de 12mm de diamètre, percé puis taraudé à 4mm de diamètre, puis tourné avec un angle au sommet de 90 degrés (attention à la profondeur du trou qui ne doit pas excéder dans ce cas 3mm); On laisse un petit tronçon cylindrique.

La tige : Elle est issue d’une tige filetée de 6mm de diamètre, tournée puis fileté à 4mm à son extrémité (en laissant une partie lisse au niveau du changement de diamètre). Après filetage, un écrou a été brasé à l’étain sur la tige de 6mm afin de servir d’appui pour l’ensemble occulteur. Ultérieurement, nous avons remplacé la tige filetée par une tige lisse que nous avons nous même filetée aux extrémités.

Les disques occulteurs : Ils ont été tournées dans…des pièces de 10 centimes ! Nous les avons percés en leur centre à 4mm, puis planés à la lime et installés sur un boulon de 4mm afin de les tourner à différents diamètres. Nous en réalisons trois : 13.75mm, 13.98mm et 14.22mm. Ils sont biseautés de manière à ce que le diamètre utile soit épais de quelques dixièmes. Nous planons préalablement la face interne (celle du côté de la lentille O2). A cause du boulon de serrage, cette face possède près du centre une ‘marche d’escalier’, dont la hauteur varie suivant le disque. Afin de ne pas être gêné ultérieurement par celle-ci, nous réalisons une petite gorge sur l’écrou de la tige support, de façon que ce soit la face planée du disque qui repose sur l’écrou.

Le tout peut être assemblé, en plaçant en plus une rondelle entre le cône et le disque.

Le même jour, je découpe des rondelles (pas très rondes toutefois !) dans du mica, fraisé au centre et coupé au ciseau à l’extérieur. En principe, elle sont bonnes, mais plutôt irrégulières (on doit pouvoir trouver du meilleur mica, ou bien faire des rondelles de plomb ou de téflon).
Photo des disques (10 centimes pièce !…) et de la tige (sans disque occulteur).

 
 
 
 
 
 

26 Avril 1998

Réalisation de plusieurs pièces mécaniques :

Support du filtre H-alpha :

Il est réalisé dans des rondelles en Duralumin suivant le plan suivant :

Les trous sont réalisés  avec un espacement de 120° ;
Les trois trous extérieurs serviront à fixer le porte filtre sur une plaque de contreplaqué à l’intérieur du tube optique.

Support de l’objectif O1 :

Il est également réalisé dans des plaques de dural ; l’objectif est pris en sandwich entre une plaque de 4mm d’épaisseur (fixé sur support de contreplaqué) et une plaque de 2mm.

Support de la lentille O3 :

Cette lentille est issue de l’un des objectifs d’une paire de jumelles (f=240mm) ; On profite du support fileté de l’objectif pour réaliser une simple plaque filetée sur laquelle il vient se visser.

1er Mai 1998

Fabrication du support du diaphragme

Il est composé également de 2 plaques prenant le diaphragme en sandwich, en laissant une place à la commande d'ouverture de celui-ci (latitude de réglage de 120°).
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

2 Mai 1998

Nous avons fait découper dans du contreplaqué de 10mm :
11 plaques de 130x130mm
2 Plaques de 130x2500mm
2 Plaques de 150x2500mm
qui constitueront le tube et les différentes parois servant à supporter les éléments optiques et mécaniques.
Les 11 plaques ont été trouées à un diamètre allant de 40mm à 60mm, suivant leur utilisation.

Puis nous avons placé 3 des 4 longues planches de façon à former un U, en plaçant à chaque extrémité 2 plaques carrées et 2 autres entre les lentilles O1 et O2, de manière à rigidifier l’ensemble. Les autres plaques ont ensuite été fixées.

Voici l’ordre et la fonction des 11 plaques (échelle non exacte):

1. Du côté de la lentille principale, une plaque servant à rigidifier l’extrémité, et qui pourra supporter ultérieurement un diaphragme ou un filtre ou rien du tout…
2. La plaque supportant la lentille O1 ; cette plaque est amovible, puisque elle est maintenue entre 2 carrelets en bois de 10mm de côté (nous avons ensuite ajouté d’autre carrelets en avant et en arrière pour pouvoir déplacer légèrement la lentille si nécessaire.
 
 
 
 

3. Une plaque servant à rigidifier le tube (et tenant lieu de diaphragme), à environ 50cm de la précédente.
 
 
 
 
 

4. Une plaque identique à environ 1m de celle de la lentille O1.
 
 
 
 
 

5. Une plaque vissée au tube qui servira à régler la position de l’ensemble O2-cône occulteur grâce à des tiges filetées (voir schémas plus loin) ; Cette plaque à été bien sûr trouée, mais aussi fendue de manière à pouvoir enlever la tige porte–cône si nécessaire plus facilement.

6. La plaque supportant la lentille O2 et le porte-cône (mobile, tenue à la précédente par tiges filetées).

7. Une plaque fixe, identique à la n°5, servant à régler la position du diaphragme.

8. La plaque supportant le diaphragme, reliée à la précédente par des tiges filetées.

9. La plaque supportant le filtre H-alpha ; cette plaque est amovible (même système de carrelets que pour la lentille O1).

10. La plaque supportant l’objectif O3, vissée au tube (l’emplacement de cette lentille n’a pas à être précis au mm près, dans notre montage).

11. La plaque (la dernière !) sur laquelle sera vissé le porte oculaire ou tout autre système d’observation.

Après placement des différentes plaques et réglage des distances théoriques, nous avons mis les éléments optiques afin de vérifier le bon fonctionnement (test sur des peupliers à 400m de distance) : tout semble correct et conforme à ce que l’on attendait…Ouf !
Le tube peut maintenant être terminé ; on enlève les éléments optiques, on ponce légèrement les 11 plaques de manière à ce que le couvercle se plaque bien ; le couvercle est découpé en 2 morceaux (séparation au niveau de la plaque n°4) munis de taquets de positionnements et de fermoirs.
Puis c’est le passage en peinture : le tube est enduit de noir mat à l’intérieur, au pinceau, et les supports de Duralumin des divers éléments optiques et mécaniques sont démontés et peints à la bombe noire.
Une journée bien remplie !…

3 Mai 1998

Aujourd’hui, peinture de l’extérieur du tube avec une première couche de peinture blanche (à poncer avant deuxième couche), et fabrication d’un couvercle rabattant muni d’un filtre (vitre de soudeur) à l’avant du tube. Il servira lors du pointage sur le Soleil.
Deuxième couche les jours suivants.
Egalement fabrication du support du filtre de densité (filtre de soudeur rectangulaire) réalisé en fraisant une plaque de bois pour l’y inclure ; il est maintenu par 2 morceaux plats d’aluminium vissés à la plaque. Nous réalisons également un levier permettant d’assurer l’ouverture et la fermeture de cette plaque depuis l’autre extrémité du tube grâce à une cordelette.

Essais et premieres observations

15 Novembre 1998
Nous avions effectué deux essais au cours de l'été, qui nous avaient permi de regler les distances des optiques, nottament du bloc O2+Cône occulteur, mais nous n'avions pas reussi a voir de protubérances; nous avons attribué cela à la qualite mediocre du ciel d'été et à l'activité moyenne du soleil a cette période.
Nous avons donc retenté quelques mois plus tard, et en reglant correctement l'ouverture du diaphragme, l'image est apparue. Voir à l'oculaire pour la première fois un tel spectacle est vraiment fascinant et c'est un spectacle qui mérite à lui seul de se lancer dans cette aventure! L'activité solaire n'était pas à son comble, mais plusieurs protubérances étaient alors visibles et présentaient des details bien visibles dans leur structure.
J'ai également ressorti l'instrument le lendemain, et j'ai pu observer une protu assez importante qui s'étendait le long du bord solaire. J'ai également assisté à une éruption assez rapide: en quelques minutes, une colonne s'est élevée pour finalement se détacher et former un point lumineux séparé du bord solaire, comme suspendu dans le ciel.

Premieres conclusions

Tout d'abord, je dois dire que cette aventure est extremement motivante: arriver à recréer cet instrument et faire ses premières observations est véritablement jubilatoire!
Au niveau du filtre, son emploi est indispensable dans le cas d'un ciel de plaine, cependant, il peut y avoir plusieurs "écoles" quand au type de filtre à utiliser:
-Il est inutile de prendre un filtre tres resséré, de moins de 1 Angstrom de bande passante, car alors, les protubérances apparaitront sans coronographe...et finiront par disparaitre si le filtre est trop serré. De plus ces filtres sont très chers (plus de 10000F...) et s'usent assez rapidement.
-Nous avons utilisé un filtre interférentiel de 10nm (100Ä), ce qui semble un bon choix d'apres nos premières observations. Il est bien moins cher (un peu plus de 1000F).
-Pierre Bourge recommande dans son livre un filtre compris entre 30Ä et 5 Ä, c'est mieux, mais c'est plus cher.
-Enfin, on peut signaler que J-M Roques avait fabriqué en 1960 un coronographe muni d'un simple filtre rouge Wratten n°70 (environ 100nm de B.P., et près de 100F) avec des résultats tout à fait bons (voir l'Astronomie, 1961 p.67-72)
Il sera également tres interessant de réaliser des photos et de perfectionner l'appareil par l'ajout de diaphragmes ou l'utilisations de meilleures optiques.
C'est pour cela que la seconde version du coronographe utilise un doublet achromatique (diamètre 90mm), dont la focale est plus courte (1000mm). Nous avons réalisé quelques améliorations dans les diverses parties du coro, décrites dans la page suivante:
 

Notre seconde version definitive

Voir aussi les pages d'observations des protubérances solaires: photos fixes et animations


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