HARPS

High Accuracy Radial velocity for Planetary Search

Résumé/Abstract

Introduction

1) État de l’art de la détection des exoplanètes au sol

2) Le projet HARPS

3) Étude du spectrographe

Conclusion

Bibliographie/Contacts

Le rapport au format .PDF, zippé (1.3Mo)
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PREAMBULE: Ce document a été réalisé dans le cadre du DESS Outils & Systèmes de l'Astronomie et de l'Espace - Observatoire de Paris-Meudon - Année 2001-2002.
Il ne s'agit pas de la page officielle du projet HARPS!
La majorité des données et informations y figurant sont issues des sources mentionnées dans la Bibliographie.

Pour obtenir des informations réactualisées sur HARPS, nous vous invitons à consulter la page officielle.

X.Vanhaecke & S.Rondi


Résumé

La recherche de planètes extrasolaires a connu une évolution décisive au cours des dix dernières années. Après les premiers projets au sol, et la première découverte en 1995, de grands projets spatiaux tels que COROT ou DARWIN sont en développement. Mais il était d’abord nécessaire de pouvoir étudier une grande étendue du ciel au cours de longues campagnes d’observation, avec la précision la plus importante disponible au sol. C’est ainsi qu’a été initié le projet HARPS. Il reprend les concepts de CORALIE et ELODIE, deux instruments qui ont permis de découvrir nombre d’exoplanètes. HARPS, prévu pour fonctionner à l’horizon 2002-2003, se distingue par une maîtrise poussée des technologies actuelles afin de minimiser les sources d’erreurs et de bruit dans la mesure. Ce rapport expose les techniques utilisées pour cela et leurs limitations.

Abstract

A decisive evolution has been made over the ten past years concerning the search for exoplanets. After the first ground-based instruments, and the first discover in 1995, new great space missions, such as COROT or DARWIN are in development. But a first step was to study with a high precision, a wide part of the sky from the Earth during long observation campaigns. That is the way the HARPS project was born. It is highly inspired from CORALIE and ELODIE, two instruments that made possible many exoplanets discovers. HARPS, which would be operating within 2002-2003, is aimed to minimise errors and noise from the measures, using high modern technologies. This report shows these technologies and the limits of the project.

Introduction

Nous commencerons notre étude en évoquant les méthodes utilisées en recherche d’exoplanètes ainsi que des instruments existants. Puis nous procéderons à une analyse du projet HARPS (High Accuracy Radial velocity for Planetary Search) pour mieux appréhender les choix technologiques faits. Enfin, nous étudierons plus précisément le spectrographe et ses innovations du point de vue stabilité, ainsi que ses améliorations par rapport aux instrumentations existantes.

1) État de l’art sur la détection des exoplanètes au sol

1-1) Différentes méthodes de détection

La méthode la plus évidente pour détecter des exoplanètes serait de les observer directement. Toutefois, la luminosité d’une étoile est très supérieure à celle d’une planète. La résolution nécessaire pour de telles observations ne peut être atteinte par des télescopes classiques. Et même en utilisant des systèmes correctifs comme l’optique adaptative, aucune planète n’a été observée à ce jour par cette méthode. De ce fait, les méthodes indirectes d’observation s’imposent.

Méthodes des transits planétaires
La méthode indirecte la plus intuitive est la méthode des transits planétaires. Mise au point par Charbonneau et al., elle consiste à étudier la variation de luminosité de l’étoile susceptible d’avoir un système planétaire. Quand une planète passe entre l’étoile et un observateur, elle obture une partie du disque stellaire. Il est donc possible de mesurer la variation de luminosité de l’étoile au cours du temps (fig. ci-contre). Si le phénomène est périodique, il est raisonnable d’en déduire que c’est une planète qui provoque ce phénomène. Cette méthode a fait ses preuves : plusieurs exoplanètes ont été détectée par ce biais. Et elle a pu très récemment prouver l’existence d’une atmosphère autour d’une exoplanète. Mais il y a des limites : une planète géante n’entraîne que 1% de variation de luminosité. Typiquement, une planète tellurique provoque une variation de 1/100 000. Les perturbations de l’atmosphère terrestre ne permettent pas un suivi correct pour de si petites variations de luminosité.

 

 

Observations de pulsars
Certaines étoiles de forte masse s’effondrent sur elles-mêmes lors de supernovae. Il en résulte la formation d’étoiles à neutron. Leur particularité est d’émettre une pulsation radio très puissante avec une fréquence précise. Cette fréquence a une dérive très faible au cours du temps. Elle peut, la plupart du temps, être considérée comme constante sur plusieurs mois. Toute anomalie sur cet intervalle de temps est interprétée comme une perturbation de l’étoile par une ou plusieurs planètes. À l’heure actuelle, quatre planètes ont été découvertes autour de pulsars.

Effets de lentilles gravitationnelles
Il arrive qu’une étoile proche passe sur la ligne de visée d’une étoile lointaine. Pour un observateur, la luminosité de cette dernière va varier. L’étoile la plus proche devient une lentille gravitationnelle : sa masse dévie la lumière de l’étoile lointaine. Si des discontinuités de la luminosité de l’étoile lointaine sont observées au cours du temps, c’est qu’il y a un autre objet autour de l’étoile proche (fig. ci-contre). Cette méthode est très prometteuse car les astronomes pensent pouvoir détecter plusieurs centaines de planètes géantes en surveillant 35 millions d’étoiles.

 

 

Méthode par astrométrie
La méthode par astrométrie est basée sur la détection des perturbations dynamiques. Les planètes et l’étoile tournent autour de leur centre de gravité. Pour un observateur, l’étoile va se déplacer légèrement dans le ciel au cours du temps. Un suivi temporel assez précis de la position de l’étoile par astrométrie permettrait de détecter la présence éventuelle de planètes et de caractériser ces planètes. Mais la résolution des moyens au sol limite la détection à de grandes perturbations que ne peuvent produire des planètes. Une autre méthode qui s’appuie sur les mêmes principes de détection des perturbations que la méthode par astrométrie est la mesure de la vitesse radiale. L’instrument HARPS est basé sur cette dernière.

1-2) Principes de la méthode de détection par vitesse radiale

La méthode par astrométrie est basée sur le mouvement de l’étoile autour du centre de gravité du système planétaire. Cela signifie que par rapport à un observateur, l’étoile va tour à tour s’approcher puis s’éloigner. Ce mouvement entraîne sur l’émission de l’étoile un effet Doppler. Quand un objet se rapproche, son spectre se décale vers le bleu pour un observateur fixe et quand il s’éloigne, le spectre se décale vers le rouge. Il est donc nécessaire d’avoir un spectromètre ayant une grande résolution.

 

 

 

 

 

 

1-3) Instrumentation existante et résultats

La détection d’exoplanètes depuis le sol par une méthode directe (imagerie classique) n’a pour l’instant pas vu de résultats probants, ceci dû à l’effet extrêmement perturbateur de l’atmosphère et aux performances encore insuffisantes des télescopes et techniques actuelles.

En revanche, depuis 1995, les découvertes n’ont cessé de se succéder avec l’exploitation de la méthode spectroscopique. La première découverte, désormais célèbre, d’une exoplanète autour de l’étoile 51 Peg B, réalisée par Mayor et Queloz, grâce à l’instrument ELODIE sur le 1.93m de l’OHP (Observatoire de Haute Provence), a véritablement lancé un intérêt croissant pour ce type de recherche.

À travers le monde, une batterie d’instruments spectroscopiques à haute résolution est venu se rajouter aux instruments existants tels que Hamilton (Lick), CES (Silla). Parmi ces nouveaux venus, on peut citer HIRES (Keck), AAO, Whipple+AFOE, et CORALIE. En 1999, grâce à ces programmes, pas moins de 16 exoplanètes avaient été découvertes (dont les plus petites égalaient moins de 5 masses joviennes). Début 2002, le total des exoplanètes formellement découvertes par la méthode de détection de vitesse radiale s’élevait à 75 (répartis dans 67 systèmes planétaires dont 7 systèmes multiples). Ainsi, en quelques années, le défi dans ce domaine n’a plus été la simple détection de quelques systèmes, mais s’est plutôt orienté vers une recherche massive afin d’établir de véritables statistiques sur les éléments orbitaux, les masses, périodes, etc… des systèmes planétaires.

 

1-4) Vers des appareils plus sensibles

C’est dans ce contexte qu’a été prise la décision de développer une expérience de spectroscopie à haute résolution : le projet HARPS. Ce projet est réalisé sous la responsabilité de l’ESO, qui souhaite installer au 3.60 m de La Silla un spectrographe dédié à la recherche des exoplanètes.
La réalisation a été confiée à un consortium franco-suisse regroupant l’Observatoire de Haute-Provence, le Service d’Aéronomie du CNRS, l’Observatoire de Genève et l’Institut de Physique de Berne. Le programme de détection prévoit un large volume de nuits d’observations allouées à HARPS (près de 200 nuits). En outre, l’instrument peut aussi fonctionner pour l’étude de l’astérosismologie, mais en dehors de ce contingent d’heures.
Les instruments actuels permettent une précision en vitesse radiale de environ 8m/s au mieux. Avec HARPS, l’objectif recherché est une précision de 1m/s. En effet, une telle précision permettrait la détection de planètes de 0.1 masse Jovienne en orbite à moins de 1UA autour d’étoiles de type solaire en un an d’observations. De plus, la détections de planètes de 10 masses terrestres sur des orbites inférieure à 0.1UA demeurerait possible. Avant d’y revenir plus en détail ultérieurement, nous allons exposer ici les principales caractéristiques nécessaires à une telle détection. Des simulations numériques (Hatzes & Cochran – 1992) ont permis d’établir une relation entre la précision en vitesse radiale DRV, et la résolution R, le signal de photons S et la couverture spectrale B :

Par cette relation, on trouve qu’il est nécessaire que la résolution avoisine R=100000 afin d’atteindre une précision de 1m/s (ce point sera discuté plus en détail dans le chapitre 3). Cette spécification en entraîne d’autres :

2) Le projet HARPS

2-1) Objectifs scientifiques de HARPS

Depuis les années 90, la recherche de planètes extrasolaires a connu des évolutions importantes. Tous les mois, de nouvelles planètes sont détectées. Pour le moment, la grande majorité de ces découvertes sont faites au sol. De grands projets spatiaux comme COROT ou DARWIN sont prévus pour détecter plus de systèmes, les observations sol étant limitées par l’atmosphère.
Cependant, ces projets sont longs à mettre en œuvre et leur coût financier est très important. De plus, la durée de vie de ces missions étant limité, le temps d’observation sera précieux. La volonté des concepteurs de HARPS était de pouvoir faire une surveillance prolongée du ciel sur des télescopes de taille moyenne qui sont moins demandés. HARPS reprendrait la technologie de ses prédécesseurs mais en optimisant au mieux cette technologie pour atteindre une meilleure sensibilité.
Ainsi, HARPS serait en mesure de :

L’objectif de HARPS est d’observer le maximum de systèmes et de les caractériser. Comme on peut le voir sur la figure 5, la majorité des planètes actuellement connues sont du même type : forte masse, très proche de l’étoile. Mais il est difficile de dire si cette répartition est une réalité ou si elle est biaisée par les méthodes d’observations. HARPS pourrait améliorer cette statistique en augmentant considérablement le nombre de systèmes. Et sa précision étendrait le type de planètes observables. Sa capacité à caractériser un grand nombre de systèmes permettrait également de sélectionner pour les instrumentations spatiales les systèmes les plus intéressants à étudier.

2-2) Analyse du système

2-2-1) Fonctions à remplir

Après avoir développé des instruments comme ELODIE ou CORALIE, les concepts pour les instruments sont parfaitement connus et maîtrisés. Désormais, les limitations sont de deux ordres : le bruit de photon, et les erreurs instrumentales. Avoir une précision de 1ms-1 de la vitesse radiale implique de réduire ces deux phénomènes conjointement.
Il est possible de résumer les conditions à remplir pour aboutir à une précision de 1ms-1 en vitesse radiale :

2-2-2) Solutions envisageables

Suite à l’analyse réalisée précédemment, nous pouvons envisager diverses solutions techniques possibles pour atteindre les buts visés. Nous allons les lister et les discuter ici. Rappelons simplement que pour atteindre de très hautes précisions de mesure en vitesse radiale, il est indispensable d’avoir une stabilité spectrale à long terme.
Il y a deux moyens d’y parvenir :

Il va de soit que l’on recherchera à combiner ces deux approches.

Stabilité de l’instrument :
La stabilité de l’instrument doit prévenir les décalages du spectre. C’est une contrainte très vaste : elle regroupe une stabilité purement mécanique (vibrations), en température, en pression (éviter les dilatations des éléments constitutifs du spectrographe), ainsi qu’une stabilité du faisceau en provenance du télescope. Une première solution pour se protéger des vibrations est de monter l’expérience sur un banc optique découplé au mieux du sol (utilisation de supports amortissant les moyennes et hautes fréquences). Par ailleurs, il serait judicieux d’éviter toute pièce mobile sur le spectrographe, et de réduire au minimum les interventions humaines (entretien minimum).
La meilleure solution pour assurer une stabilité en température et pression est de placer l’expérience dans une enceinte hermétique, contrôlée en température et en pression. La réalisation d’un vide contrôlé étant meilleure garante de stabilité en pression. De plus, l’utilisation d’une cuve à vide pourra prévenir de tout risque de pollution des optiques par des éléments extérieurs (poussières, aérosols), facilitant d’autant l’entretien, et d’éliminer les échanges convectifs internes. Enfin, il a été suggéré l’utilisation de fibres optiques pour garantir un faisceau d’entrée stable.
Cette solution, déjà testée avec succès sur FEROS et CORALIE présente notamment l’avantage de pouvoir découpler totalement le télescope du spectrographe du point de vue mécanique. Elle est donc entièrement compatible avec l’utilisation d’une cuve à vide placée dans une pièce isolée. Pour augmenter la stabilité du faisceau, il a été évoqué la possibilité d’utiliser un système d’optique adaptative. Nous allons y revenir dessus à la fin de cette partie.

Calibration :
Nous avons vu que la calibration est l’un des points essentiels pour assurer un gain en précision. Une bonne façon de réaliser une calibration efficace est d’utiliser des cellules à gaz (gas absorption cell) contenant de l’iode par exemple. Des telles cellules ont un spectre d’absorption riche en raies et très stable. En outre, c’est la lumière de l’étoile qui est utilisée en entrée de ces cellules (aucune différence entre les chemins optiques de l’étoile et de la cellule de calibration) : le spectre de l’étoile et le spectre d’absorption se voient donc superposés : cette méthode permet de s’affranchir de toute dérive ou instabilité temporelle d’ordre supérieur au temps de pose.
En outre, l’utilisation de fibres multiples permettrait de combiner les faisceaux et d’obtenir simultanément des spectres de calibration et le spectre de l’étoile étudiée. Une alternative est l’utilisation de lampes thorium-argon.
On dispose de deux fibres en entrée du spectrographe (fibre objet et fibre référence). En début de nuit, on établit une carte de calibration en réalisant le spectre d’une même lampe Th-Ar à travers les deux fibres. Puis au cours des observations, la fibre objet reçoit la lumière de l’étoile observée tandis que la fibre référence continue à être alimentée par la lampe Th-Ar. Nous avons donc une référence stable.

Traitement et corrections :
La précision sur les mesures nécessite également un traitement informatique approprié : en effet, il est nécessaire de prévoir les outils informatiques nécessaires pour corriger la mesure de divers effets tels que le mouvement combiné de la Terre autour de son axe et dans le système solaire.
Par exemple, si l’on observe depuis La Silla (-29°) une étoile se levant à l’horizon pendant une demi-heure, la variation sur la vitesse radiale due au simple mouvement terrestre s’élève à 3.5 m.s-1.
On voit donc qu’il est absolument indispensable de corriger ce type d’effets, avec des codes de calcul d’éphémérides précis.

2-3) Projet réalisé

La réalisation finale de HARPS est basée sur trois techniques fondamentales :

Pour mieux appréhender les différents sous-systèmes de l’instrument, l’étude partira de l’observation de l’étoile à l’acquisition des données sous forme informatique.

L’instrument optique pour HARPS sera le 3.60m de La Silla. L’image est récupérée dans le CFA : Cassegrain Fiber Adapter et est transmise au reste des systèmes de mesure par fibre optique. Il contient plusieurs ensembles :

Un des points clés de HARPS réside dans la calibration faite par une lampe à thorium-argon. Cette référence est située le plus près possible de l’acquisition de l’image. Ainsi, toute perturbation des mesures sur le trajet jusqu’au spectrographe se retrouvera sur la référence, ce qui permettra de les éliminer du spectre final.
Pour amener l’image au spectrographe, des liaisons en fibre optique sont utilisées. Cela représente un sous-système à part entière. La transmission se fait sur un peu plus de 40m, le choix et la qualité des fibres est donc importante. Pour éviter de perdre des photons, il faut contrôler parfaitement les interfaces CFA/fibres et fibres/spectrographe.
Les stabilités thermique et opto-mécanique ne peuvent s’obtenir que dans un environnement contrôlé. Le spectrographe est donc placé dans une cuve à vide. C’est un cylindre de 1m de diamètre et de 3m de long. Cette cuve est-elle même contenue dans une salle contrôlée thermiquement pour ne pas trop solliciter le contrôle interne de la cuve à vide.
Dans cet instrument, le spectrographe est un spectrographe à échelle. L’élément disperseur est un bloc monolithique de 837x208mm. Le spectre final en sortie aura une dimension de 60x60mm environ. Nous verrons plus en détail le sous système spectrographe dans la prochaine partie.
Le spectre créé est récupéré par un détecteur de type CCD. C’est l’association de deux matrices de 2k x 4k pixels. Chaque pixel a une taille de 15um. Ces matrices sont couramment utilisée par l’ESO pour ses instruments.
Le dernier sous-système est l’outil de traitement qui se compose d’une partie matériel hardware et d’une partie logicielle. Les choix technologiques de ce sous-système sont ceux de l’ESO, qui souhaite utiliser les mêmes systèmes de commandes et de logiciels pour tous ses instruments.
Les caractéristiques arrêtées en septembre 2001 peuvent se résumer ainsi :

Caractéristiques
HARPS
Champ de vue
1 arcsec
Étendue spectrale
380-690nm
Résolution spectrale
90 000
Format du spectre
68 ordres ; 61.44 x 62.74mm
FWHM
4 pixels

 

 

2-4) Organisation du projet

Principaux responsables :

Le PI (Principle Investigator) du projet est le Professeur Michel Mayor, de l’Observatoire de Genève.
Co-Investigators :

Project Scientist : Dr Didier Queloz, Observatoire de Genève

Organismes impliqués :

Le projet HARPS implique les organisations suivantes, regroupées en consortium :

Planning :

Le projet est organisé de la manière suivante :

Date
Objet
Janvier 1999 BDR – Baseline Design Review – Présentation de la proposition scientifique, des spécifications et du schéma général ; Première proposition des plans de management, d’organisation et financier.
Février 2000 KO – Kick-Off – Accord entre l’ESO et le consortium chargé de la construction de HARPS.
Avril 2000 FDR Optics – Optics Final Design Review – Etablissement final du design optique par l’ESO
Juillet 2000 PDR – Preliminary Design Review - Présentation et évaluation par l’ESO des plans préliminaires de chaque sous-système établis par les partenaires. Accord pour études détaillées.
Décembre 2000 PDR SW – idem que ci-dessus, mais concernant la partie logicielle (SoftWare)
Mars 2001 FDR – Final Design Review – Présentation et evaluation par l’ESO des plans définitifs de chaque sous-système établis par les partenaires. Accord pour passer en phase de construction (MAIV : Manufacturing, Assembly, Integration and Verification)
Juillet 2001 FDR SW – idem que ci-dessus, mais concernant la partie logicielle (SoftWare)
Septembre 2002 PAE – Provisional Acceptance Europe – Evaluation par l’ESO de l’instrument intégré à Genève.
Avril 2003 PAC – Provisional Acceptance Chile – Evaluation par l’ESO de l’instrument, après commissionage, au 3,6m de La Silla.
Novembre 2007 FAC – Final Acceptance Chile – Phase ayant lieu après 5 ans d’exploitation – Validation finale de HARPS.

Pour simplifier, la réalisation de HARPS (détaillée ci-dessus) a été découpée en 5/6 phases :

3) Étude du spectrographe

3-1) Principe d’un spectrographe à échelle

Nous allons ici exposer le principe du spectrographe à échelle, solution adoptée pour l’instrument HARPS.
Un spectrographe à échelle est utilisé lorsque l’on désire obtenir des spectres à haute résolution.
Ci-dessous, le schéma typique d’un spectrographe à échelle (à noter qu’ici contrairement à HARPS, le pré-disperseur est un réseau au lieu d’un grism ; les valeurs numériques sont sensiblement les mêmes que pour HARPS).

Le montage est de type Littrow (un seul et même miroir collimateur).
Le principe d’un tel spectrographe consiste à utiliser un ordre d’interférence m très élevé. Le réseau échelle a une période ‘a’ grande (a>>l) et un angle d’incidence i élevé avec i=i’=q (condition de Littrow).
À la longueur d’onde du blaze, on a :

Ce qui donne une résolution R :

avec fcoll= focale du collimateur et L=largeur de la fente

Remarque importante : ici le spectrographe n’a pas de fente, puisque c’est un montage par fibre optique (fiber-fed) qui est utilisé : c’est donc le diamètre de la fibre qui tient lieu de largeur de fente.

Ainsi, si l’on considère par exemple le schéma ci-dessus, en adoptant un diamètre de fibre de 100mm, on obtient une résolution de R=2.1500/0,1 tg 75=100000 environ (ce qui correspond à peu près à la résolution de HARPS qui est de 90000).

Par ailleurs, comme nous l’avons dit, nous travaillons à des ordres très élevés (de l’ordre 89 au 159), et l’on est confronté à l’effet de superposition des ordres, bien visible sur la figure 9, où sont représentés seulement les premiers ordres dans le visible. On peut caractériser l’intervalle spectral libre DeltaLambda la quantité telle que : , soit.

Cet intervalle spectral est d’autant plus petit que m est grand et l’on voit clairement que l’on à une confusion des ordres rendant impossible l’étude sur les grands ordres, du moins si l’on n’utilise pas des méthodes appropriées. Ainsi, il est nécessaire d’utiliser un pré-disperseur (réseau ou prisme) ayant une direction de dispersion perpendiculaire à la direction de dispersion du réseau échelle. Chaque ordre se voit ainsi séparé et l’on a un étalement du spectre entier : on appelle communément ce spectre un échellogramme (fig. ci-dessous à droite).

On a donc le moyen d’atteindre de très hautes résolutions.

Sur HARPS, le pré-disperseur (cross-disperser) est un grism (contraction des mots ‘grating’ et ‘prism’): c’est un prisme sur lequel est gravé un réseau, ce qui permet une dispersion avec un angle de déviation quasi nul, et supprime la coma. Le montage est ainsi compact et peut être placé dans un train de lentilles.
Sur la figure 11, la lumière de l’étoile (faisceau divergent) rentre au niveau du point rouge et est réfléchie par le miroir parabolique (1) qui en donne un faisceau parallèle. Ce faisceau est réfléchi et dispersé par le réseau échelle (2), qui renvoie sur le miroir le spectre avec recouvrement des ordres. Ce spectre va devoir être dispersé orthogonalement : pour cela, le faisceau est réfléchi par un petit miroir plan (3) qui le redirige vers le miroir parabolique qui en donne à nouveau un faisceau parallèle dirigé cette fois vers le grism (4, dont on voit la coupe). Ainsi, les ordres du spectres qui étaient jusqu’alors superposés se voient dispersés dans la direction perpendiculaire à leur dispersion initiale. Après passage dans un train de lentille (5) donnant un faisceau convergent, l’échellogramme se forme sur le capteur CCD (6).

 

 

 

3-2) Limitations à l’estimation des vitesses radiales

Nous avons vu que de nos jours, les spectrographes permettent d’atteindre des précisions en vitesse radiale de quelques m.s-1. Dans la plupart des cas, cette précision est limitée par le bruit de photons.
Une technique utilisant la totalité de l’information spectrale disponible, a été proposée par Connes (1985) afin de calculer les variations de vitesse radiale. Cette procédure définit pour chaque spectre un facteur de qualité Q, utilisé pour calculer l’incertitude sur la vitesse radiale due au bruit. La voici développée :
Nous considérons tout d’abord un spectre A0, calibré et obtenu au temps t0=0, appelé temps de ‘référence’ ou temps à vitesse radiale nulle. Ce spectre est considéré comme exempt de bruit. Pour chaque pixel i correspond une intensité A0(i) et une longueur d’onde l(i).

 

Plaçons-nous maintenant au temps t : le spectre, que nous nommons A, est affecté d’un décalage Doppler par rapport à A0. Les deux spectres A0 et A ont le même niveau d’intensité.

Le décalage Doppler est donné par la formule : (1)

Pour un décalage considéré comme petit par rapport aux largeurs de bande, le changement d’intensité pour un pixel donné peut être exprimé par : (2)

D’où l’on sort le décalage Doppler : (3)

Cette dernière équation montre que les variations de vitesse sont estimées en mesurant les changements d’intensité sur les spectres enregistrés. Afin d’augmenter la précision sur la mesure et de faire diminuer le bruit, la totalité de l’étendue spectrale doit être prise en compte. De fait, la contribution de tous les pixels sera pondérée selon le poids W(i). (4)

Ce poids W(i) est inversement proportionnel au carré de la dispersion individuelle. Il est donné par : (5)

L’utilisation d’une telle pondération permet d’utiliser au mieux la mesure.
En effet, on démontre que lorsqu’on cherche à sommer des mesures, l’inverse du carré de la dispersion est un bon indicateur de la ‘qualité’ de la mesure. Ainsi, l’utilisation de ce poids W(i) permet d’utiliser pour la mesure la totalité du spectre disponible, en favorisant les mesures où la dispersion est minimale et où donc la mesure est meilleure. La dispersion individuelle sur la mesure de variation de vitesse radiale, mesurée au point i, est donnée (Equ. 3) par: (6)

Comme nous l’avons considéré, le spectre A0 est exempt de bruit. Le bruit du spectre A est issu de la somme quadratique du bruit de photons et du bruit du détecteur : (7)

En considérant que A et A0 ont le même niveau d’intensité et que le décalage spectral est minime, on peut établir A = A0. Le poids W(i) est alors donné par : (8)

La variation de vitesse dV mesurée selon toute l’étendue spectrale est donnée par : (9) Si l’on note dVRMS l’incertitude sur la variation de vitesse radiale, l’equ. 5 donne : (10) avec (11)

On voit que si l’on néglige le bruit du détecteur, ce facteur Q est indépendant du flux; il est fonction du profil spectral pour une bande spectrale donnée. Il représente la ‘qualité’ du spectre et sa ‘richesse’ en bandes spectrales. En considérant que est le nombre total de photo-électrons sur toute l’étendue spectrale, l’incertitude sur la variation de vitesse est donné par : (12)

On voit donc que cette incertitude est directement liée au nombre de photo-électrons ; elle est aussi liée à l’ordre spectral k considéré.
Des simulations numériques ont été réalisées afin d’examiner les dépendances du facteur de qualité Q. Ainsi, il est apparu que Q va varier selon la classe spectrale de l’étoile, selon la longueur d’onde (1), selon la vitesse radiale v.sin(i) (2) et selon la résolution spectrale (3).
On se rend bien compte de l’intérêt que représente l’étude de ce facteur de qualité Q. Ce type de résultats issus des simulations permet d’affiner les caractéristiques de l’étude (quel type d’étoile cibler pour obtenir la meilleure précision) et du spectrographe (quelle résolution spectrale R adopter). Ci-dessous, deux tracés montrant respectivement et pour différents types spectraux:

  1. le facteur de qualité Q en fonction de la longueur d’onde ;
  2. le facteur de qualité Q en fonction de la résolution spectrale.

 

Incertitude sur l’estimation sur la vitesse radiale :

Afin de déterminer l’incertitude sur l’estimation de la vitesse radiale, il est nécessaire de connaître le nombre total de photo-électrons sur le domaine spectral considéré (equ.12). C’est ce que représente le graphe ci-contre, pour différents type spectraux d’une étoile de magnitude Mv=0 (sans la contribution atmosphérique et avec un ‘pas’ de 100Å.).

Ainsi, un flux spectral F* (en ph/cm2/s) pour chaque type d’étoile peut être déterminé pour chaque ‘pas’ de longueur d’onde.

Le nombre total de photo-électrons sur un intervalle de 100Å. est alors donné par : (13)
avec Stel la surface collectrice du télescope (cm²), etot l’efficacité de transmission (incluant l’atmosphère, le télescope, le spectrographe et le détecteur), texp le temps d’exposition en secondes et mv la magnitude visuelle de l’étoile considérée.

L’incertitude sur la variation de vitesse radiale est donnée par : (14) avec (15).
Cette dernière valeur dVRMS0 représente l’incertitude fondamentale sur la vitesse radiale due au bruit de photons pour une pose de texp=2.512mv (sec).

Nous avons donc compris que pour un spectrographe donné, l’incertitude sur la mesure de la vitesse radiale n’est absolument pas constante et définie, mais dépend de nombreux facteurs :

Comparaison : performances de CORALIE et apports de HARPS

Durant cette étude, plutôt que de donner des performances ‘brutes’ de HARPS (difficiles à interpréter seules), il nous paraissait intéressant de nous renseigner sur un spectrographe existant du même type, CORALIE, et de comparer ces deux instruments afin d’estimer l’apport prévu de HARPS.
Tout d’abord, voici résumées quelques caractéristiques comparées des deux instruments :

CORALIE
HARPS
Design optique
Spectrographe à échelle, fibre optique
Télescope
1.2m (Suisse), La Silla
3.6m, La Silla
Banc optique
Non isolé, Contrôle T°
Isolé (cuve), Contrôle P,T°
Etendue spectrale
380nm à 690nm
Format du spectre
68 ordres, 26 x 26mm
68 ordres, 61.44 x 62.74mm
Résolution spectrale
50000
90000
Efficacité du spectro @550nm
6%
28%
Efficacité totale* @550nm
1.5%
5%
*: i.e. tenant compte de l’atmosphère, du télescope, du spectrographe et du détecteur.

CORALIE : Ce spectrographe est monté sur le télescope Suisse de 1.2m de La Silla. Contrairement à HARPS, il n’est pas placé dans une cuve à vide ; il est contrôlé thermiquement mais reste sujet aux variations de pression atmosphérique. Il a été démontré par une étude que le modèle de prédiction d’incertitude sur la mesure et les incertitudes déterminées expérimentalement concordent sensiblement. Par suite, un graphe montrant ces prédictions sur l’incertitude de la mesure en fonction de la longueur d’onde et de la vitesse radiale projetée (v sin I) a été tracé (ci-contre). On y voit que dans le meilleur des cas, la précision de la mesure de vitesse radiale peut descendre au dessous de 1.5m.s-1. De fait, des mesures récentes faites sur le Soleil (S/N très élevé) ont démontré qu’une incertitude inférieure à 1m.s-1 pouvait être atteinte avec CORALIE.

 

 

 

HARPS : Avec une résolution atteignant presque le double de CORALIE, et un télescope de 3.6m, ajouté à de multiples améliorations exposées plus haut, HARPS montre un gain remarquable. En effet, comme nous le voyons sur la figure ci-contre, le modèle montre que le gain de précision sur l’incertitude pour HARPS est 7 à 9 fois plus important que CORALIE. On le comprend facilement, cela se répercute d’autant sur le temps de pose qui, pour une même incertitude donnée, serait de 50 à 80 fois plus court pour un même astre. Traduit en magnitude, cela signifierait que pour une même incertitude donnée, HARPS pourrait viser des cibles plus faible de 4.2 à 4.8 magnitudes ! (toujours par rapport à CORALIE).

 

 

 

Voici maintenant tracées sur un même graphe les efficacités totales (prenant en compte le télescope, le spectrographe, et le capteur) de HARPS et de CORALIE, en fonction de la longueur d’onde et pour un même seeing.

 

3-3) Stabilités thermiques et mécaniques

L’analyse fonctionnelle avait montré l’importance du contrôle de l’environnement du spectrographe pour atteindre une grande précision dans la mesure de la vitesse radiale. La stabilité du spectrographe passe par plusieurs points :

La première condition pour avoir une bonne stabilité est de s’affranchir des perturbations atmosphériques au sein du spectrographe. En effet, à l’air libre, les optiques peuvent se salir rapidement et des variations rapides de pression sont possibles. Ces variations entraînent typiquement des décalages spectraux. Une variation de 1mb de la pression peut faire varier la mesure de vitesse radiale de 100m/s. Le premier choix est de mettre le spectrographe dans une cuve pour l’isoler de l’extérieur. Cependant, des cellules de convections apparaissent au sein de la cuve, ce qui conduit à des inhomogénéités hygrométriques et thermiques du milieu.

La solution technique est de faire le vide dans la cuve. Deux avantages : tout d’abord, il n’y a plus de variation de pression et les effets de convection thermique sont supprimés.

Mais ce choix technologique implique que tous les matériaux supportent le vide et en particulier ne dégazent pas. Ce phénomène est bien connu pour les techniques spatiales. Dans le vide, certains matériaux dégagent des gaz et autres poussières. Ces impuretés sont alors attirées par les éléments les plus froids de l’environnement. En règle générale, ce sont les optiques comme les lentilles ou les miroirs qui sont les plus froids. Sans précaution, les optiques peuvent se salir rapidement.

Une autre contrainte intervient : l’analyse proscrit tout système mécanique qui pourrait créer des vibrations. Or, une cuve à vide implique des pompes à vides. Ce type de matériel produit des vibrations basses fréquences qui se propagent très facilement. Les pompes seront placées en dehors de la salle où se trouve la cuve à vide.

Le pompage est assuré par deux pompes : une première pompe qui abaisse en quelques heures la cuve de 1 bar à 0.1mb. Elle est essentiellement utilisée après ouverture de la cuve pour une intervention humaine par exemple. La seconde pompe sert au maintien du vide au cours des campagnes d’observations. Elle permet de descendre à 0.001mb, l’objectif étant de rester continuellement sous les 0.001mb. Toujours dans un souci de limiter au maximum les vibrations, toute action de cette pompe se fera hors des périodes de mesure.

Le second point de stabilisation est la tenue mécanique du spectrographe. Il faut tout d’abord découpler le banc optique, où sont placées les optiques, de la cuve à vide. Ce banc optique est tenu en trois points dans la cuve pour limiter les points de contact. Ces derniers sont équipés d’amortisseurs pour éliminer les vibrations hautes fréquences. Sa forme devra être la plus compacte et la plus symétrique possible pour minimiser les effets de gravité. Le matériau doit être très rigide pour ne pas se déformer par son propre poids, les chemins optiques seraient alors modifiés. Un premier choix technologique fut le granit : forte rigidité, faible conduction thermique. Toutefois, le granit a un inconvénient : il est poreux. Dans le vide, le dégazage est très important et il se reproduirait à chaque fois que l’on ouvrirait la cuve. Ce qui est inadmissible d’un point de vue propreté des optiques. Il faut donc passer par un bloc métallique. L’Invar serait le meilleur choix. Sa déformation thermique est tres faible (environ 10 fois moins que l'acier) et il ne dégaze pas. Cependant, comme nous l'a exposé Francesco Pepe, de l'Observatoire de Genève, la stabilité a long terme de l'Invar (un acier Inox) est loin d'être connue. Par ailleurs, il supporte mal un traitement thermique (disloquement structure) et il est très difficile à souder. Mais le facteur critique était la dilatation thermique: le banc optique, bien isolé, est situé à l'interieur de la cuve. Ainsi, un gradient thermique sur la cuve se traduirait en un gradient sur le banc optique. Or, si le banc est en acier normal (conductivité 5 fois meilleure que l'Invar), pour un gradient de la cuve donné, le gradient sur le banc sera plus petit. Cela compense en grande partie le meilleur coefficient de dilatation de l'Invar. Considérant tous ces points, et tenant compte également du prix de l'Invar (double de l'acier), il a été décidé de s'orienter vers un bloc acier.

Le troisième point de stabilité réside dans le contrôle thermique. Le choix d’une cuve à vide a déjà permis d’éliminer les échanges thermiques par convection. Dans un premier temps, on pourrait penser que la température n’a que peu d’effets sur un instrument. Pourtant une simulation a montré que l’augmentation de 1°C de l’environnement entraîne un déplacement de 40mm du spectre sur le CCD. Il est donc nécessaire de réguler la température interne de la cuve et empêcher toute variation thermique rapide du système. La cuve est placée dans une salle climatisée, la température sera constante à 0.3K à long terme. La cuve est elle-même contrôlée par un système de tubes qui l’entourent, et où circulent un fluide réfrigérant. Toujours dans un souci de stabilité mécanique, le système de recyclage du fluide est situé à l’extérieur de la salle de HARPS. La cuve en acier permet d’isoler le spectrographe des variations rapides de température. En effet, bien que l’acier soit un bon conducteur thermique à long terme, il conduit mal la chaleur sur de courtes périodes de temps. Il y a un effet d’intégration qui limite les échanges rapides de chaleur. S’affranchir des conditions extérieures est un premier point mais il faut également s’assurer que les éléments intérieurs à la cuve ne génèrent pas de chaleur. Tous les éléments choisis sont thermiquement passifs. La limitation de systèmes mobiles dans la cuve en vue d’une stabilité mécanique permet aussi de limiter les sources potentielles de chaleur comme des moteurs. Le seul problème réside dans le détecteur. Le CCD dissipe plusieurs Watts dans la cuve. Or, le capteur est en contact avec le banc optique d’acier. Ce flux étant continu, une conduction thermique apparaîtrait dans le banc optique, qui se déformerait et toutes les autres pièces rattachées à ce dernier verraient leur température augmenter. Il est donc nécessaire d’isoler thermiquement le CCD du banc optique.

Pour cela, on utilise des liaisons de petites dimensions (entretoise, lame). Une fois la conduction contrôlée, il faut éliminer les effets radiatifs. En face du détecteur se trouve une série de lentilles, susceptibles de se déformer par la chaleur. Un cryostat est placé autour du détecteur pour dissiper la chaleur émise à l’extérieur de la cuve à vide. Malgré toutes ces précautions les tests ont montré que la série de lentilles face au CCD subissaient des déplacements le long de leur axe optique. Cela a pour conséquences sur le spectre des défocalisations, des changements de facteur d’échelle ainsi que des décalages dans les ordres. L’unique solution est de compenser ces déplacements sans introduire de pièces mécaniques mobiles. Pour cela, on utilise une barre en DURAL. Ce matériau se déforme à la température dans le sens inverse du déplacement des lentilles. En choisissant correctement la longueur de la barre, on peut contrôler l’ampleur de la déformation. Ce principe ne fait appel à aucun capteur de déplacement, ni moteur de compensation. La stabilité mécanique est préservée. Voici les résultats obtenus avec et sans correction par la barre de DURAL :

On voit très nettement l’efficacité de la barre en DURAL. La défocalisation est entièrement corrigée et les deux autres décalages ne dépassent le mm. Au final, la stabilité thermique du spectrographe sera de 0.05K à long terme, et de moins de 0.01K sur une nuit.

Conclusion

La grande maîtrise de l’environnement du spectrographe, ainsi que l’amélioration des systèmes de transmission optique, confèrent à HARPS une qualité très supérieure à ses prédécesseurs. Les améliorations ont pu se faire grâce à une compréhension globale du système et des liens étroits entre chaque sous-système. Cette étude nous a permis de réaliser et de quantifier les limites à atteindre pour des instruments actuels. On constate que de nos jours, les précisions requises par les objectifs scientifiques nécessitent des études poussées et l’utilisation conjointe de diverses techniques de pointe.

Bibliographie/Contacts


Projet réalisé dans le cadre du DESS Outils & Systèmes de l'Astronomie et de l'Espace - Observatoire de Paris-Meudon - Année 2001-2002
Xavier Vanhaecke et Sylvain Rondi