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BobSaintClar

Le crépuscule des yeux...

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Après la merveilleuse nuit de la star-party d'Aichi du WE dernier, j'avais quelques appréhensions à l'idée d'employer mes jumelles géantes sous le ciel médiocre de ma campagne urbanisée. C'est donc avec un enthousiasme modéré, surtout motivé par l'idée de réaliser un comparatif (c'est excitant), que j'ai installé tranquillement mon engin dans le jardin ce Samedi.

 

Le ciel a été dégagé toute la journée et ce soir, il affiche un bleu profond qui promet une transparence nocturne correcte et peut-être, un halo de pollution relativement contenu. Une heure plus tard, lorsque la nuit astronomique est bien installée, je dois déchanter : le fond de ciel est crémeux jusqu'au zénith. Il n'a pas la "qualité hivernale" attendue : pas de voie lactée, alors que le Cygne est encore assez haut. A l’œil nu, je ne vois pas le double amas de Persée. Je cherche les Pléiades et quand je les trouve, on ne peut pas dire qu'elles me sautent aux yeux ! Si l'équipement n'était pas déjà prêt, franchement, je ne le sortirais pas. Mais bon, après tout, la séance sera instructive : voir quelque chose de sympathique, dans ces conditions, serait une excellente nouvelle ! Je m'attends au pire, qu'est-ce que je risque ?

 

Je m'installe, c'est parti ! J'équipe les jumelles de leurs filtres Fujinon et commence par le Cygne, avant qu'il ne s'esquive. Ayant bien en tête la récente et superbe observation menée sur North America, je navigue autour de Deneb. Le fond de ciel est atténué par les filtres, mais... les nébuleuses sont invisibles. C'est une blague ? Qu'elles soient ténues ou moches, passe encore, mais rien ? Je prends mon temps, peine perdue. Oh purée, ça commence mal !

 

Douché, je pars vers les Dentelles. Même constat : je ne les vois pas. Au contact de l'étoile brillante de l'arc le plus fin, je note une vague excroissance... et encore, j'ai un doute ! L'arc le plus étendu, celui qui m'évoquait une grande plume festonnée quelques jours plus tôt, est noyé dans la fadeur ambiante. Cette misère !

 

Poursuivons le jeu de massacre. Je retire les filtres et retourne l'instrument vers le sud-est, direction les Pléiades. Je les trouve, c'est déjà ça ! La réalité n'a pas grand-chose à voir avec mon souvenir : il n'y a pas de luminosité globale tranchée, qui distingue l'amas de son environnement plus sombre. Ce n'est qu'une collection d'étoiles individuellement lumineuses, pas vraiment un objet en soi. Plus grave : il n'y a pas de gaz ! Même en vision indirecte, il n'y a strictement rien à voir aux alentours de Merope (les autres, n'en parlons pas). Dans le quadrilatère, je compte neuf étoiles (14 en montagne), mais peu importe : ce n'est pas moche, c'est pire que ça... c'est triste.

 

Je pointe le double amas de Persée : finalement, c'est l'objet le moins décevant du moment. Il perd beaucoup en contraste et donc, en beauté, mais la foultitude d'étoiles - même moins serrées - détourne l'attention du fond de ciel blafard. Les couleurs sont perceptibles mais l'effet 3D est très atténué, au détriment du plaisir d'observation.

 

Puisque je traîne dans le coin, allons voir Andromède. Elle est très haute, c'est plutôt bon signe, la voil... doux Jésus ! Ce n'est qu'une tache asymétrique, un nuage pâle sans forme ni structure qui se perd dans le fond de ciel ! M110 est loin (!) et misérable... quant à M32, je la cherche encore...

 

Il est 20h30, je décide de rentrer au chaud (température extérieure 2°) et de m'occuper une paire d'heures, le temps qu'Orion émerge de la vase. Ce serait dommage de ne pas conclure sur l'albatros (je n'ai pas pointé la Rosette, vous ne m'en voudrez pas)...

 

A 23h, je ressors. Le ciel s'est amélioré : plus sombre, avec une zone zénithale presque propre. Du coup, je revisite les Pléiades, maintenant à ma verticale : c'est mieux ! La patate globale de l'amas est perceptible (mais sans plus), la nébulosité près de Merope est devinée en vision indirecte. Je compte désormais 11 étoiles dans le quadrilatère principal. Si je n'avais pas récemment vu le même amas sous un ciel de rêve, j'aurais trouvé l'image jolie...

 

Je remets les filtres et vise enfin M42, la reine des nuits d'hiver. Houuu là là, elle a pris cher, Sa Majesté ! Au sud-sud est, elle est assez haute - 10° de plus qu'en France métropolitaine - mais ne s'extraie pas du halo lumineux de l'agglomération tokyoïte et de ses extensions ferroviaires : elle étend peu ses ailes, sa tête d'oiseau n'est vue qu'en vision indirecte, aucune boucle ne vient la refermer, "l'homme qui court" est à la limite de la perception... ça craint ! Autour du trapèze, les nodosités complexes du cœur se laissent voir, quand même. Avec les filtres, la nébuleuse s'étend un peu plus mais paradoxalement, je perds en détails dans la partie centrale ; au final, c'est décevant ! Quand je repense au même objet, vu d'Aichi...

 

Je ne reste dehors qu'une grosse demi-heure : le ciel ne s'améliorera plus et j'ai vu ce que je voulais voir (ou pas). La rosée de début de nuit se change progressivement en givre... Il est temps de venir témoigner, ici même ;)

 

Le bilan est déprimant, mais je tire quelques enseignements de cette demi-nuit d'observation :

 

- Ma monture me donne satisfaction : je l'ai améliorée en dotant l'axe de la bascule d'un frein. La visée est confortable, surtout au-delà de 60° d'élévation.

- Avec mon instrument, sous un ciel médiocre à moyen, les amas ouverts sont la cible à privilégier. Les galaxies, on oublie (cette M31 de cauchemar...) et les nébuleuses gazeuses, on les filtre à bande étroite : mes Fujinon à bande large, ça va bien sous un bon ciel... sinon, ils sont trop permissifs.

- En-dessous de 70-75° d'élévation, la pollution lumineuse ruine tout !

 

Sur ce, bonne nuit ! :)

 

Edited by BobSaintClar
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    • By Jean-Philippe Cazard
      Bonjour à tous,
       
      M1 n'est pas une cible idéale pour un télescope installé au Chili (elle ne monte pas bien haut dans le ciel), mais c'est quand même un objet que tout astrophotographe image un jour ou l'autre ...
       
      Voici une première version en LRGB avec 3h en L et 1h par couche en R, V et B :
       

       
      Le traitement est un peu trop poussé et les images brutes n'ont pas été triées (donc les étoiles ne sont pas tip tip), mais l'idée de base était de bien faire ressortir les filaments
       
       
      Mais regardez en haut de la nébuleuse, on dirait qu'il y a une petite extension dans le bleu :
       
      *
       
      On est d'accord, c'est bien faible ...
       
      Mais comme c'est dans le bleu, l'idée a été de faire une version HOO (9h par couche) :
       

       
      Là, l'extension un peu "phallique" est bien visible :
       

       
      Sur la couche O3 en négatif et en poussant un peu fort sur les curseurs, elle est encore plus visible :

       
      Comme quoi même les objets très classiques peuvent réserver des surprises
       
      Sur l'image d'Hubble, les andouilles ont mal cadré, ils ont coupé le machin qui dépasse :
       

       
       
       
    • By JB
      Hello
      J'ai  encore sur mon DD quelques sessions de CP non encore traitées ou publiées..  Ce temps magnifique me donne l'occasion de faire du tri !
      Photos sans prétention avec ma vieille atik 314L, histoire de s'amuser depuis mon jardin de ville et de ne pas perdre la main en CCD, 
      Des petites sharpless de cet automne : 
      Sh-2-112 et Sh-2-88
      Une 15aine de poses de 10 minutes en Ha (filtre orion 7 nm)
      Newton 200/1000 UNC avec correcteur kepler, atik 314L. guidage asi224mc,  EQ6 modifiée (mts3 - escap)


    • By home91
      Bonjour,
       
      le ciel laisse peu d'occasion de sortir ces derniers jours. J'ai profité d'une accalmie hier soir dans le ciel parisien pour m'essayer sur IC1805, la nébuleuse du cœur, mais cette fois-ci avec ma 80ED.
      J'avais imagé il y a quelques jours en grand champ et je voulais voir ce que cela pouvait donner.
      Il y a peu d'images mais je vous présente tout de même le résultat en 2 versions. La version en pseudo SHO permet de mettre en évidence certaines zones avec plus de contraste.
       
      Pour la prise de vue, ciel Bortle 8-9 (10 kms de Paris), Orion 80ED avec POA ARES-C Pro + L-Extreme, guidage 9x50 + ASI120, 24x300s.
      Empilage sous SIRIL et traitement sous PIX. 
       
      Au passage, mon Orion est le vieux modèle et je cherche un réducteur/aplanisseur adapté à cette lunette. Auriez vous des conseils ?
       
      Bon ciel
      Olivier


    • By bretagne
      bonjour a tous
      petite eclaircie hier soir qui fut de courte durée hélas
      jetée de monture pour faire du grand champ de la region de la licorne 
      il m'a fallu recadrer l'image a cause des passages nuageux
      reduction d'etoiles avec fitswork
      setup
      askar 135mm
      sony a7s + filtre DN 
      great polaris
      65x30 sec a 3200 iso
      SIRIL+ PS6
       
      a plus 
       
      olive

    • By JMBeraud
      Bonjour à tous,
       
      Après EGB1, j’ai jeté mon dévolu sur MWP1 et ALV1, nommés d’après les noms de leurs découvreurs. Ces deux NP se trouvent par hasard très proches, de notre point de vue en tout cas, l'occasion de leur tirer le portrait ensemble.
       
      En 1992, C. Motch, K. Werner and M. Pakull examinaient une faible source X sur les clichés de ROSAT. Celle-ci s’est avéré être l’étoile centrale d’une nébuleuse planétaire, qui n’est donc pas une banale naine blanche, mais un pulsar de type GW Vir (périodes de moins d’une heure).
      MWP1 est l’une des plus ancienne NP connues, elle a environ 150 000 ans (en prenant une vitesse d’expansion de 20km/sec), alors que la plupart des NP visibles se dissipent pendant quelques dizaines de milliers d’années. Plus de détails ici.
      Elle mesure environ 17 AL de large, et est distante de 4500AL. Cela lui donne une taille apparente de 13x9’.
      Comme beaucoup de NP MWP1 interagit avec l’ISM, et est bipolaire, ce qui peut résulter d’une étoile centrale double, ou bien d’une étoile à très fort champ magnétique.
       
      L’astronome amateur Filipe Alves a quant à lui découvert la tache diffuse qu’est Alv1 en novembre 2009. Ce papier décrit la découverte, avec quelques autres, notamment Ou4. Elle se trouve être passé inaperçu jusque-là, de par son signal assez faible. 
       
                     
      Conditions :
      - T410mm, F/D 3.8, Wynne 3 pouces au foyer, barillet et tube de construction personnelle avec (araignée + PO + DO + porte filtre) Axis Instruments
      - ASI 2400MC à -10degC,  filtre Optolong L-Ultimate (duo Ha OIII 3nm)
      - Guidage ASI174MM
      - Echantillonnage 0.78"/pix
      - Ciel urbain SQM zenith 20.2 - 2 lampadaires à 20m
      - Gain 200 - DOF – traitement SIRIL + CS6 "à la bio"
      - 104 x 5' = 8h40 les nuits du 17 et 30 Novembre 2023
       
      Champ complet:

       
      Crop sur MWP1:

       
      EDIT: le starnet qui en dit un peu plus en version 2 - cf plus bas:

       
      Crop sur Alv1:

       
      La prochaine NP devrait être un poil plus faible, je vais voir ce que ça va donner...
       
      Jean-Marc
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