La météo n'a vraiment pas été conciliante en cette première lunaison du printemps, les nuits furent rares et compliquées (cirrus ou turbulence ).
Parmi les comètes que je tenais à observer, il y avait 452P/Sheppard-Jewitt, une comète périodique qui revient tous les 20 ans, découverte en 2003 lors de la recherche de nouveaux satellites de Jupiter : on pensa d'ailleurs au début que c'en était un, puis l'astre fut classé comme astéroîdal avec la désignation 2003 CC22.
Sam Deen le retrouva sur des images d'archives, et nota que son éclat était très changeant au moins depuis 2018.
Surprise à l'automne 2022, quand les images du réseau ZTF l'ont capturé mais d'aspect cométaire avec une queue. Il s'agit donc d'une comète, elle reçut alors la désignation P/2022 B5 puis le numéro 452.
Là encore, les images d'archives ont montré son aspect cométaire depuis au moins le mois de février 2022.
Elle passera au périhélie le 25 avril 2023, c'est l'une des raisons pour laquelle je voulais l'imager. L'autre étant qu'elle avait été signalée récemment d'aspect informe sans réelle condensation centrale.
Ce n'est pas un astre très brillant, il fallait donc poser longtemps, heureusement j'ai pu lui consacrer un peu plus de 2h d'observation
Par contre, je rêvais d'une nuit stable pour tenter de voir une éventuelle fragmentation, et là c'est loupé, la turbulence ne m'a pas fait de cadeau
Mais j'ai pu l'imager, c'est déjà çà !
Elle n'apparaît pas sur les poses individuelles (5 min d'intégration), mais on repère de suite sa trace sur le compositage stellaire, et surprise : c'est loin d'être la seule :
Je suis donc allé voir les astéroïdes présents dans le champ sur le site NEOCMTChecker de l'UAI, ce qui m'a permis d'identifier facilement les 6 intrus
Parmi ceux-ci, il y en a donc un (le numéro 21891) qui a été nommé en hommage au ténor italien (d'où le titre de ce post) Andrea Bocelli, sympa cette rencontre céleste du coup
Sa traînée me paraissait presque légèrement floue, j'ai donc fait un compositage sur 21891, mais non il est parfaitement stellaire au final :
Tant que j'y étais, j'ai mesuré son éclat : V = 18.5
Sur le compositage cométaire, 452P/Sheppard-Jewitt apparaît effectivement bien fantomatique et sans condensation centrale :
Voici un crop (champ de 30') du montage ramené à 2"/pixel :
et le champ complet, avec quelques galaxies (le phare bleu, en bas, est Eta Leo de mag 3.5) :
( Clic droit puis Ouvrir dans un Nouvel Onglet/Nouvelle Fenêtre pour voir l'image à 100% )
Newton SW 200/800 avec correcteur de coma, caméra ASI 294-MCpro + IR-cut, Nord à peu près en Bas
Monture AZ-EQ6 - ASIAir - poses guidées avec dithering
Nuit du 25 au 26 mars 2023, de 21h10 à 23h30 utc
26 poses de 5min à -20°C, Temps d'intégration de 02 h 10 min
Traitement Siril 1.0.6, Finition avec Gimp 2.10.28
Échantillonnage ramené à 2"/pixel
La comète présente une petite chevelure de 19" de diamètre et une queue d'environ 39" de long vers PA=284°.
Les mesures indiquent :
magnitude totale, m1= 18.9 ( rayon de 19" )
magnitude nucléaire, m2 = 19.7 ( rayon de 6" )
A ce stade, il est prématuré de parler de désintégration, il faut voir comment évolue son aspect et sa brillance dans les prochaines semaines.
Depuis plusieurs mois, la comète C/2020 J1 (Sonear) présente le même aspect fantomatique, mais elle est toujours là !
Finalement, heureusement que les comètes brillantes ne sont pas présentes tout le temps, car mine de rien leur prétraitement demande beaucoup de temps
J'avais commencé à regarder les images de C/2022 E3 (ZTF) acquises le 19 janvier au matin, car elles étaient prometteuses et fait rapidement le compositage d'une de mes séries (77 poses étalées sur une heure) pour voir ce qu'elle avait dans le ventre. Le résultat était plaisant :
mais un examen plus approfondi en compositant moins d'images a vite révélé que la dynamique à l'oeuvre dans la queue de plasma nécessitait de prendre nettement moins de poses, en pratique une vingtaine de poses de 30s au maximum, ce qui compte-tenu du délai entre les poses lié au dithering (une pose sur 2) et la perte de quelques images dans les séries à cause de la turbulence représente un intervalle de temps de moins d'un quart d'heure...
Avec un suivi pendant près de 04h30 et plus de 300 poses réparties initialement en 6 séries, il a donc fallu les redécouper au mieux et voici donc le résultat des 19 compositages résultants :
Hyper long à traiter mais cette fois on voit bien mieux les évolutions dans la queue de gaz
L'animation des images révèle toute cette belle dynamique (c'est plus joli en mp4 mais nettement plus volumineux...) :
On note :
un noeud qui apparaît vers la 5ème pose et se déplace dans l'axe de la queue,
et surtout un décochement un peu plus loin qui se déplace lui aussi
Vers la fin, le noeud semble rattrapper le décochement et la structure se dédouble.
J'espère que çà vous plaira. J'y ai passé un temps fou (siurtout pour faire la vidéo...), mais je trouve que çà valait le coup
Deux petites comètes de magnitudes 12 et 14.5, dans la vierge et la couronne, mais qui montrent bien leur queue, même en visuel au T407:
C/2019 U5 et 364P le 22 mars dernier au soir dans le sud des alpes:
L’occasion de retrouver les copains dans un petit gite fleurant bon la nature et le crottin, où l’on entend les clarines des bêtes à viande ou les gazouillis annonciateurs du printemps, concert de grives, mésanges, pic noir et autres pipits.
Première nuit et quelques heures après le crépuscule, de quoi visiter les comètes du soir, dont la C2020 V2 (ZTF) en vadrouille dans le Triangle. Image pâle mais néanmoins intéressante où l’on distingue une longue queue rectiligne et ténue accompagnée de quelques jets notables, l’un à droite légèrement incurvé, un autre à gauche moins marqué avec un angle un peu plus ouvert et enfin un qui double le départ de la queue. De plus, l’on ressent comme un rayonnement à partir du noyau. Déjà les nuages envahissent le ciel et invitent à bâcher les instruments.
Le lendemain sera pitoyable, j’ai la crève – il s’avèrera que c’est le COVID - je suis bon à rien, incapable de pointer et retrouver les champs stellaires, je suis envahi par l’humidité et elle aura définitivement le dessus, j’abdique, je plie et dans la maladresse, je fais tomber mon télescope endommageant le chercheur. Ce sera vite réparé le lendemain car l’avantage d’un télescope minimaliste tel que le mien c’est qu’il n’y a pas grand-chose à casser : https://magnitude78.astrosurf.com/t400-carbone-acceuil/
Je me rattrape sur les observations solaires. D’abord avec la Lunt 50 double stack des amis Noël. Un Soleil vraiment explosif où tout mériterait un dessin de détail, tant en surface avec des réseaux de filandres et de tâches remarquables que sur le limbe parcouru de nombreuses protubérances. L’une est vraiment imposante et complexe. Une zone de jets, une grande draperie, des sortes d’arbrisseaux aplatis et des filoches qui s’évanouissent au loin.
Il y a là un instrument d’exception, la grande lunette de l’ami Jean-David, énorme triplet apochromatique CFF de 185mm à F/D6.6, équipée d’un prisme de Herchel et d’un oculaire Morpheus de 9mm offrant un grossissement de 150x. Observer dans un tel instrument est une première pour moi. La vision est à la hauteur de ce prestigieux matériel et je m’arrête sur la formation la plus imposante, la tâche AR3256. La complexité de la structure est inimaginable, quasi intranscriptible quand parfois la turbulence disparait. La zone centrale sombre montre des bords déchiquetés en forme de plumes, la petite zone la plus à gauche est comme hérissée de fines aiguilles. Vient ensuite une zone grisâtre rayonnante ponctuée de bouts de filoches, de grains, de minuscules plumets. Ça m’évoque par endroits comme la chair d’une figue.
Peut-être la suite à venir, en fonction du ciel et de la forme du moment.... en tout cas pas ce soir.....