luc pistorius

Syntha 150/750

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Bonjour,

Cela fait un petit moment que je suis les débats dans ce forum. Je me suis permis de répondre, car certains sont à la recherche d’avis sur le télescope Syntha 150/750. En effet j’en possède un, et je peux donner mes impressions...

Mais avant tout une petite présentation s’impose : je suis membre de la SAFGA (Société Astronomique de France Groupe Alsace), pratiquant l’astronomie depuis trente cinq ans au moins. Bien sûr j’observe quand le temps le permet (c’est un anti-stress formidable…), mais je suis également passionné par l’optique. Et à ce sujet j’ai été sollicité il y a trois ans pour la réfection de l’objectif de la grande lunette (diamètre 480mm) de l’observatoire de Strasbourg (démontage, nettoyage, nouvelles cales, remontage et réglages). Ceci avait été fait la dernière fois par Couderc en 1933, qui pour l’occasion avait retouché l’optique, et laissé sa signature avec la date sur la tranche de l’une des lentilles.

J’ai observé dans de très nombreux instruments, et construit plusieurs télescopes, dont deux avec optique Mosser (pour les connaisseurs). Actuellement mon test préféré pour juger de la qualité des optiques reste la méthode intra-extra focale préconisée par H.R. Suiter dans son ouvrage « Star testing astronomical telescopes ». Je pense donc être à même de juger de la qualité des instruments.

Mais venons-en aux faits : suite à toutes les discussions enflammées au sujet du matériel chinois, j’ai fait l’acquisition d’un Syntha 150/750 pour le tester et m’en faire une idée. Surtout dans le but de répondre aux questions des débutants, qui s’adressent à moi pour les conseiller dans l’acquisition d’un matériel correct et pas trop cher pour commencer. Et aussi, pourquoi pas le dire, parce que je suis toujours très curieux de ce qui se fait. Et bien j’ai été agréablement surpris. Tout d’abord le trépied. Bien qu’un peu léger, l’épaisseur de l’alu n’étant pas assez forte, celui-ci est très stable si on ne sort pas les allonges. Pour un observateur assis, c’est parfait.

La monture, bien qu’étant une copie, est très bien réalisée, pas de bavures, bonne peinture, et mouvements doux très agréables. Il y avait un léger jeu en déclinaison, mais en resserrant un peu, le jeu a été diminué, mais pas supprimé. Ce petit défaut ne perturbe en rien. Je n’ai pas encore monté les moteurs, cela sera fait dans quelques jours. Le petit niveau à bulle était complètement dérèglé, et là aussi j’ai du le démonter pour le mettre à « niveau » (un comble…).
Le viseur polaire (en option) est un peu juste, pas très lumineux, et les trois vis de réglage pour le caler sont une mauvaise solution pour un débutant car celui-ci va passer un temps fou à le rendre parallèle à l’axe polaire (un viseur fixe aurait été plus adéquat). Mais il a le mérite d’exister.
Les premières observations avec le tube optique ont révélé un bord de miroir rabattu. J’ai du diaphragmer le miroir jusqu’à 120mm de diamètre pour faire disparaître le défaut. Il restait un peu d’aberration de sphéricité, une légère surcorrection, mais pas très gênante, et ne dégradant en aucune façon la qualité de l’instrument. C’était un excellent télescope de 120mm de diamètre pour les planètes et les étoiles doubles, et de 150mm (en enlevant le diaphragme) pour le ciel profond.
J’ai pu échanger le tube optique chez le fournisseur, et le nouveau n’avait plus de bord rabattu, mais uniquement un peu de surcorrection (parabolisation un petit peu trop profonde). Mais cette surcorrection ne dépasse pas lambda/8, ce qui est très bon. Les images intra et extra focale laissent également deviner une surface de miroir douce, ce qui est excellent pour le contraste. En somme un très bon miroir ! On verra par grands froids s’il ne se déforme pas trop… (à mon avis ce n’est pas du Pyrex).
Enchanté par les bonnes prestations de ce tube, j’ai décidé de le modifier pour le rendre encore plus performant. En effet je pense que les débutants ont surtout besoin de conseils pour modifier tel ou tel instrument afin de l’améliorer, plutôt que de s’entendre dire qu’il faut acheter telle ou telle marque, en en dénigrant d’autres. On n’est pas obligé d’avoir le nec plus ultra pour se faire plaisir ! Je pense sérieusement que les seuls instruments à éviter sont ceux du supermarché à très bas prix.
La première modification a été d’enlever la plaque métallique du fond (tenue par trois vis), ce qui diminue considérablement le temps de mise en température, ainsi que les turbulences internes au tube. Je suis en train de la remplacer par une autre plaque avec un petit ventilateur et ses piles, mais ceci n’est pas absolument nécessaire, cela diminue surtout le temps de mise en température.
Ensuite j’ai diminué la surface (avec un cutter) des trois cales en caoutchouc qui sécurisent le miroir. Cette obstruction de bord de miroir déformait le premier anneau de lumière autour de la tâche d’Airy, et pouvait diminuer légèrement le contraste. En plus ces caoutchoucs appuyaient sur le bord du miroir, ce qui pouvait introduire un peu d’astigmatisme. De petites cales en bois de 5mm ajoutées entre les caoutchoucs et le support miroir laisseront un millimètre de jeu au-dessus du miroir, sans aucune contrainte. Normallement on pourrait même supprimer complètement ces caoutchoucs, puisque le miroir est collé en trois points, mais par grands froids la colle ne risque-t-elle pas lâcher ? Donc précaution…
Il est aussi impératif que la collimation soit bien effectuée. En effet, à l’achat, les miroirs sont souvent dérèglés, et observer ainsi ne donnera que de mauvais résultats.
Les oculaires livrés d’origine avec le télescope diffèrent suivant la marque de vente. Ceux en ma possession (10 et 20mm) sont très bien au centre et très moyens sur les bords. Ils ne peuvent rivaliser avec des oculaires de marques, malgré leur champ assez grand. On peut toutefois s’en contenter, surtout en observation planétaire, en attendant d’investir dans du haut de gamme.
Mais passons aux observations. Je tiens à préciser que ce modèle de télescope est la dernière version du Syntha 150/750, avec les branches d’araignée ultra fines (0,5mm), et le décentrage volontaire du secondaire pour intercepter correctement le cône de lumière (normal sur un Newton de courte focale). Obstruction centrale de 26% en diamètre ce qui ne doit pas influencer trop le contraste. Ce modèle est actuellement disponible chez les revendeurs sous différentes marques (Kepler, Fréhel, Skywatcher, etc…).
La nuit du 12 au 13 octobre était propice, il n’y avait strictement aucune turbulence (ce qui n’arrive que deux ou trois fois par an en Alsace).Magnitude visuelle à l’oeil nu estimée entre 4,5 et 5. Le Syntha était accompagné d’un Mizar 150/750 (idéal pour les comparaisons), d’une lunette Unitron 100/1500 et d’un Schmidt-Cassegrain Meade 254mm à F6,3.

Tout d’abord vérification de la collimation du Syntha et légère retouche pour parfaire (ceci est rendu simple du fait que la plaque arrière a été enlevée et que les vis de réglage sont parfaitement accessibles).
Quelques objets remarquables observés, avec chaque fois le même grossissement pour les instruments (mise en température effectuée):
- Double amas de Persée : Très spectaculaire dans tous les instruments, étoiles très piquées dans le Syntha. G=32x
- M13 : Résolu pour les étoiles les plus brillantes jusqu’au centre pour tous les instruments, bien moins dans l’Unitron, ce qui est normal. G=180x
- M57 : Assombrissement central bien perçu dans tous les instruments, avec renforcement lumineux de l’anneau visible dans tous les télescopes sauf la lunette. Etoile de magnitude 12 sur le bord de l’anneau visible dans le Syntha et le Meade, mais pas dans le Mizar (curieux !) et pas dans l’Unitron. G=180x
- Dentelles du Cygne près de 52 du Cygne : sans filtre, non visibles. Avec filtre Lumicon OIII, visibles dans Syntha (avec légers détails), Mizar (idem) et Meade (beaucoup de détails). G=32x
- Delta du Cygne : Etoile double avec plus de trois magnitudes (2,9 et 6,3) d’écart et séparation de 2,4 secondes. Un test de vérité pour un 150. La composante la plus faible doit se trouver dans les anneaux de diffractions de l’étoile principale.
Clairement visible dans le Syntha, par instants dans le Mizar, pas vu dans l’Unitron, ni dans le Meade, mais ce dernier, après vérifications, était très mal collimaté. G=240x
- Double-double (epsilon de la Lyre) : clairement séparées dans tous les instruments. Quelques problèmes sur le Meade (non collimaté). G=240x
- Saturne : Avec si peu de turbulence, la planète est magnifique dans tous les instruments, sauf le Meade (non collimaté). Division de Cassini très nette. Détails sur la surface de la planète. Le Syntha donne des images d’une rare qualité pour ce type d’instrument. Il me semble même deviner l’anneau de crêpe… G=80 à 240x.
D’autres observations ont été effectuées cette nuit-là, mais une chose est claire, le Syntha 150/750 n’est pas déméritant et donne même quelques fois des résultats légèrement supérieurs à certains autres instruments de qualité reconnue. A ce sujet il semblerai, suite aux comparaisons effectuées avec le Mizar de même diamètre et même focale, que la réflectivité des derniers modèles de Syntha ait été améliorée, ce qui est une excellente chose. Il est certain que les rapports d’observation ci-dessus peuvent paraître un peu optimistes, mais ce sont ceux d’une soirée exceptionnelle, avec très peu de turbulences ; il va de soi que les soirs de turbulence, les images seront de moins bonne qualité. Il faudra alors choisir de réduire un peu les grossissements. Il y a tellement de choses à voir dans le ciel !
Il est certain que le gros problème de ces productions de masse est la différence de qualité suivant les exemplaires (on peut effectivement tomber sur un cul de bouteille, mais c’est devenu rare). On peut toujours demander l'échange si on n'est pas satisfait. Et les quelques modifications apportées ne peuvent qu’améliorerla qualité.
Récemment, j’ai pu jeter un coup d’œil dans un Syntha 200/1000 dernière génération, et faire quelques tests intra-extra focale : pas mal non plus ! Malheureusement le ciel s’est couvert très rapidement. Je pense revoir cet instrument prochainement, ainsi qu’une lunette achromatique 120/1000 de la même marque, pour faire plus d’essais.

Conclusion : Le Syntha 150/750 est un instrument à conseiller à ceux qui ne veulent pas payer trop cher, et qui, s’ils sont vraiment passionnés, pourront toujours passer à un télescope plus important par la suite. Il reste également facile à transporter, et c’est un plaisir que d’observer avec lui, même lorsqu’on est blasé… (eh oui !).

Amicalement.

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Mr Pistorius, revenez quand vous voulez !

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Merci pour cet article.
Cela est rassurant pour un débutant peu fortuné (comme moi).
Preuve qu'il n'est pas nécessaire de s'offrir Hubble pour admirer le ciel.
Si vous avez d'autres tests faites nous en profiter.
Encore merci.

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Merci pour ton compte-rendu précis et très instructif.
Imagine-toi que j'ai vu le même genre de défaut dans un Vixen 150 très récent (sur-correction) ! Cette marque a de quoi vraiment s'inquiéter maintenant. Ce n'est plus du plagia pur et simple.
Quant à Mizar, je possède un 130/720 mécaniquement excellent mais à l'optique déplorable (même mon ETX 90 le "pulvérise"). Le 150 que tu avais pour comparaison était-il correct ?

PS : Synta s'écrit sans "h"...

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Cet article très objectif montre bien que le constructeur Synta a fait d'énormes progrès pour se mettre au niveau des japonais. J'avais eu l'occasion de tester une 100mm de la même usine et j'avais constaté que l'optique était très correcte pour une lunette de ce prix. La Vixen du même diamètre posséde un défaut de sphéricité bien plus gênant. Les montures sont il est vrai d'un montage assez précaire et les entrainements ne permettent pas l'astrophoto. La monture Vixen GP est à ce point de vue bien plus précise. Il est assez regrettable que l'écart de prix entre Vixen et Synta soit si grand. Les japonais ont beaucoup perdu en laissant les chinois copier leurs instruments. Je me demande souvent si Synta n'était pas un sous-traitant de Vixen qui a utilisé les mêmes brevets. On constate que les chinois peuvent fabriquer du très bon matériel quand ils sont sous contrôle japonais.
Pour confirmer mes dires, rappelez-vous que Synta a sorti une 80/400 et peu de temps après Vixen sortait la Planet 80/400.
Synta sort une lunette 120/1000 et quelques mois plus tard, Vixen sort la néo-achromatique 120/800. On peut se demander si les deux constructeurs ne fonts pas tailler leurs objectifs dans le même atelier. Auparavent, personne ne taillait des diamètres si grands. Vixen veut probablement se démarquer en choisissant une formule optique plus sophistiquée.
Autre remarque étonnante. Célestron travaillait avec Vixen et aujourd'hui, c'est avec Synta.
Pour info, une nouvelle monture va sortir chez Synta avec de l'électronique et du Goto. Elle ressemble un peu à la Taka EM200. Mais son prix sera moins élevé. Je pense que l'on en entendra bientôt parler sur ce forum.

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Salut à tous,
L'EQ 6 sera disponible chez optique Unterlinden le mois prochain. Le prix ? A priori 8000 Fr pour le modèle non Goto.
Il est dommage que la france soit le dernier pays à la voir arriver sur le marché...

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Bonjour à tous...
Pour Sylvain: Le Mizar 150/750 semblait très correct en effet, la différence n'étant pas trop importante avec le Synta (merci pour la rectification).
pour Gérard: en effet Synta, qui produit pour de grandes marques renommées, a fait de gros progrès. Une discussion récente avec un responsable de chez Unterlinden, m'a appris que les importateurs faisaient remonter certaines informations à Synta quant à des améliorations pour rendre les produits encore plus performants.
En tous cas, les essais menés le soir du 13.10. étaient révélateurs, car la turbulence était pratiquement nulle. Ce soir-là, en observation planétaire, le newton de 150 était supérieur à une lunette Unitron 100/1500, renommée pour sa grande qualité. Je suis persuadé que les mêmes essais menés un soir d'atmosphère turbulente auraient donnés les résultats inverses.
Il faut donc comparer ce qui est comparable...

Amicalement

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