Claude PEGUET

Lundi 3 octobre 2005 - Eclipse partielle de soleil

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Certains se souviennent peut-être d'un précédent CROA routier sur l'occultation de vénus par la lune.
Cette fois ci, c'était bien sûr pour l'éclipse, et voici mon compte rendu:


Depuis plusieurs jours les prévisions météo sont mauvaises pour la région lyonnaise et loin au-delà vers le sud. A priori il est nécessaire d’aller jusqu’au Vaucluse pour avoir une chance de voir l’éclipse. Le dimanche 2 au soir, c’est toujours ce scénario qui prédomine.
Dimanche soir je décide donc de partir vers le sud avec en perspective au moins 200 Km à parcourir. Je fais le plein du Kangoo et prépare le matériel.
J’ai hésité entre la L150/1200 Kepler et la L80ED Orion. La première dispose d’un filtre Astrosolar pleine ouverture correct, mais elle est encombrante et très sensible au vent. Hors un mistral pouvant atteindre 80 km/h est prévu dans la basse vallée du Rhône. Au contraire, la 80ED n’a pas de filtre correct mais sa stabilité au vent est 10 fois meilleure sur la EQ4, et, de plus, basse sur pattes, elle peut facilement être protégée du vent par le Kangoo. Je me décide donc pour la L80ED et lui fabrique un filtre en polymère noir (je n’ai plus d’astrosolar D=5), ajusté à l’intérieur du bouchon d’objectif, soit avec un diamètre utile de 50 mm. Ce n’est pas idéal pour la haute résolution mais, de toute façon, il est peu probable que les images soient bonnes. Au contraire le mistral devrait générer une forte turbulence. J’ai également fabriqué un « masque » à tenir à la main, de format à peu près A4, avec une fenêtre en polymère noir. Pour cet usage, ce dernier matériau est bien supérieur à l’astrosolar à cause de l’absence de reflet à sa surface.
Donc lundi 3, le réveil est mis à 5h15 temps civil. Je me lève sans trop de difficultés et à 6h21 (heure exacte, notes prises au magnéto comme pour toute autre observation ) je prends la route après avoir chargé tout le matériel préparé la veille. Il fait nuit, la route est humide, il pleut par moment, je roule prudemment en attendant la levée du jour. A cette heure il y a encore peu de monde et il n’y a pas de véritable ralentissement.
7h37 TC : j’ai passé Valence, il commence à faire jour, le ciel est toujours couvert malgré quelques minuscules trouées aperçues de temps en temps.
7h44 TC j’ai fait 119 Km, il y a une éclaircie très loin au sud.
8h07 TC j’en suis à 161 Km est ce n’est toujours pas ça. J’ai l’impression que l’éclaircie recule au fur et à mesure de ma progression.
A 194 Km, le ciel est variable, lumineux, mais encombré de nuages avec des trouées bleues. Je suis à l’aire de Mornas.
Je prends la Languedocienne car j’ai l’impression qu’il y a plus de nuages à l’Est, peut-être accrochés par le Mont Ventoux.
9h07 je sors au péage de Remoulins. Je regarde la carte Michelin pour étudier la suite de l’itinéraire. Finalement je prends la direction d’Avignon et cherche immédiatement un site. Je trouve un petit chemin qui s’enfonce dans la garrigue, une amorce de chemin bien orientée me permet de mettre la voiture face au mistral, tout en me permettant de voir le soleil par-dessus les petits arbres voisins. J’installe donc monture et lunette. Je relève la tête pour pointer le soleil, celui-ci a disparu derrière un nuage, et toute la partie nord du ciel est envahie par un voile très dense qui semble continuer à progresser. Mes chances diminuent. Mais ce n’est pas après plus de 200 Km que je vais abandonner. Je démonte et repart à 9h24 vers le sud et le morceau de ciel bleu qui subsiste.
Course avec les nuages sur un réseau de petites routes, j’aurais pas dû passer par là,….une pancarte indique la direction Beaucaire, Arles… Arles que je connais un peu, c’est vers le bleu, dans l’axe de la vallée du Rhône, là-bas j’ai des chances. Après Arles, si ce n’est toujours pas bon, il me reste la Camargue, les Saintes Maries, et là j’aurais fait le maximum, je me vois déjà arrêté par la mer, avec du bleu au large… Par contre, de toutes manières, pour le premier contact c’est foutu.
Arrivée à Arles, je contourne la ville et part vers Pont de Crau et au-delà. Le ciel est toujours parcouru de nuages balladeurs mais dans les trouées ça devrait aller. Durant les 10 derniers Km, le soleil est resté obstinément caché derrière un immense nuage de haute altitude en forme de dirigeable, mais là c’est fini il est redevenu visible. La difficulté est maintenant de trouver un endroit tranquille. De voie rapide en petite route, pas évident. Finalement une grande plateforme en gravier, entrée d’une ancienne carrière ou d’une ancienne décharge, fermée au fond par un portail rouillé, se présente. Il est déjà 10h30, j’ai fait 300 Km depuis Lyon, je m’arrête, voiture le nez au nord, et je recommence à tout monter.
Un bref coup d’œil à travers le masque en polymère pour constater que l’éclipse est déjà bien avancée. Je pointe le soleil à la lunette : l’image n’est pas terrible à travers le filtre en polymère mais je m’y attendais un peu. Le mieux c’est sans instrument, juste avec le masque. J’installe l’APN en afocal sur la Orion et je commence à photographier à intervalles plus ou moins réguliers. Images avec un désagréable liseré rouge sur les bords du soleil. J’aurais dû racheter de l’astrosolar.
Vers 11h45, alors que jusque là de nombreux véhicules étaient passés sans s’arrêter, une Mercedes tractant une caravane fait le tour de la plateforme et vient stopper tranquillement, le capot de la Mercedes pointé dans ma direction, à 7 ou 8 m de distance. Quand la voiture est arrivée j’ai pensé à des touristes curieux. Quand la voiture s’est arrêtée, j’ai vu à travers le pare-brise une dame et un gros chien-loup, et j’ai pensé à autre chose…
• La dame : vous regardez l’éclipse ?
• Moi : oui, vous voulez voir ?
• La dame : oui
Et je lui tends le masque, puis je lui montre l’image sur l’écran de l’APN. Elle en profite pour me dire, sans doute afin de lever toute ambiguité :
• Je suis péripatéticienne.
• Moi : C’est ce que j’avais cru comprendre. J’espère que je ne vais pas faire fuir vos clients.
• Elle : non, non, vous ne me gênez pas. Je suis là jusqu’à 6h00.
• Moi : moi je suis là jusqu'à midi trente, c’est la fin de l’éclipse.

Ont suivi quelques propos sur les avantages de la caravane, plus spacieuse que le camping-car ; sur la nécessité d’avoir un chien, bien sûr, pour la sécurité… Quelques propos aussi sur l’astronomie et sur la question de savoir s’il y a du monde là-haut, sur une autre planète, elle ne le croit pas mais se pose quand même la question. Enfin une rencontre sympathique autant qu’inattendue (j’aurais quand même dû me douter que ça arriverais, à force de fréquenter les terre-pleins au bord des routes ).
Puis la dame est aller mettre la caravane sur les vérins, a fait sortir Mabrouk le chien qui est venu flairer ce client potentiel, mais ne s’est pas intéressé à la lunette. Puis tous les deux sont allés s’installer dans la caravane pendant que je continuais mes photos. Et hélas, je crains que ma présence ne lui ait causé du tort, car pendant les trois quart-d’heure restants, deux semi-remorques sont venus successivement, se sont arrêté, puis sont repartis. Aussi, dès la fin de l’éclipse (dernier contact raté à cause des nuages, à 3 mn près), j’ai tout plié rapidement et ai libéré la place pour ne pas nuire d’avantage au petit commerce.
Ensuite rien de notable. Rentrée sur Lyon nez dans le mistral, plutôt content d’avoir réussi à voir l’éclipse, mais était-ce bien raisonnable de faire 600 km pour une partielle, surtout compte tenu des images que j’avais. Finalement j’aurais peut-être aussi bien fait d’aller carrément en Espagne…


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waouwww !!! Quel courage !!! Et quel passionné ! Ton récit est superbe...
C'est vrai que faire 600Km pour une partielle peut paraître fou mais quand on aime on ne compte pas

Alors comme ça on discute caravaning avec une fille de joie ? Louable intention

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Superbe ton CROA, Claude, c'est les aléas de la vie..

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Eh oui c'est les aléas de la vie
Bon, je ne comptais pas faire 600 km au départ, mais une fois parti....
C'est ma manière de manifester contre le climat pourri de la région lyonnaise. Que fait le ministre de l'Intérieur et des cultes (culte d'Uranie)?
Cordialement,
Claude

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Moi, ça fait 3 jours qu'il pleut, donc je n'ai pas pû la voir, je suis déçu !!!!
Par contre ton CROA, super !!

dami.

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Merci de vos commentaires
Il ne faut pas hésiter à se déplacer quand on le peut. J'étais disponible (ARTT) et j'avais la voiture.
Je n'ai quand même pas fait aussi bien qu'un groupe d'observateurs d'occultation belges, qui avait fait des centaines de bornes pour une occultation d'étoile par un astéroîde ou occultation rasante par la lune, je ne sais plus. Un temps pourri avec de la neige, et un moral à toute épreuve bien récompensé par une éclaircie très temporaire juste au bon moment et au bon endroit. J'ai du lire ça dans Pulsar et peut-être que certains sont sur ce forum mais je ne me souviens plus des noms.
Cordialement,
Claude

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