Observation de la lumière cendrée

lors de l'éclipse totale du soleil du 26 février 1998

Traitement des images



 
 

  1. Acquisition et numérisation des images
    1. Acquisition des images

    2.  

        Les images présentées ici ont été réalisées en Guadeloupe lors de l'éclipse du 26 février 1998.
      L'instrument utilisé est une petite lunette fluorite de 55 mm de diamètre et de 440 mm de focale, ce qui a permis d'envisager l'obtention d'images grand champ de la couronne solaire. Etant donnés les temps de pose utilisés - jusqu'à 4 s - une monture équatoriale motorisée était indispensable. La mise en station  se faisant en plein jour, d'abord en dégrossissant la position de l'axe polaire à l'aide d'un compas de relèvement et d'un inclinomètre en fonction la déclinaison magnétique et de la latitude du lieu donnée par la carte IGN, puis en affinant l'azimuth de l'axe polaire en appliquant la méthode de Bigourdan (partiellement) sur le soleil.
      Le boîtier photo était un Olympus OM 1 motorisé. Le miroir était bloqué en position haute pour réduire les vibrations.
      Un film négatif couleur a été choisi (Kodak Ektar 100) du fait de la dynamique plus grande que sur les film positifs.
      Les temps de pose se sont étagés entre 4 seconds et 1/250 s.
      Et surtout ... le ciel était parfaitement dégagé !
       

    3. Numérisation des images


    Le film a été scanné à l'aide d'un scanner Nikon LS 2000 avec les réglages suivants :

    - résolution de 2700 dpi : la taille des fichiers de sortie est de 2498 x 3762 pixels (soit un champ de 2.97° x 4.49° avec des pixels de 4.3 x 4.3 arcsec2) ;
    - 12 bits par couleurs : pour une meilleure différenciation des niveaux de gris ;
    - 16X multiscan : le fichier de sortie est la moyenne (ou la médiane?) de 16 scans successifs, ce qui améliore le rapport signal/bruit ;
    - mode cleanimage : cette fonction de "nettoyage" logicielle est très efficace pour réduire les rayures et autres défauts de surface du film, ceci sans réduire la résolution ou effacer les étoiles du champ.

    Le négatif a été scanné en mode positif pour profiter de la meilleure dynamique du scanner dans ce mode. L'inversion des couleurs et la balance des couleurs est ensuite réalisé dans Photoshop.
     

  2. Traitement des images

  3.  

     Les canaux rouge, vert et bleu ont été traités séparément en 16 bits par couleurs à l'aide de deux logiciels de traitement d'images CCD (Qmips et AstroArt). Le étapes principales du traitement sont les suivantes :
     

    1. Traitement des images de la couronne externe

    2.  

       

      a – Centrage et addition des images :

      Etant donné la taille des pixels (4.3 arcsec) et la vitesse du mouvement relatif de la lune par rapport au soleil (0.5 arcsec/s), il n'est pas possible d'utiliser le disque lunaire pour centrer des images de la couronne prises dans un intervalle de temps plus long que 9 secondes, sauf si ce mouvement relatif est correctement pris en compte (en amplitude et direction).

      Ce problème a été résolu ici en utilisant les deux étoiles de magnitude 6.5 visible dans le champ pour recentrer les images entre elles - le mouvement relatif du soleil étant négligeable (0.04 arcsec/s). Les 7 poses de 1 s ont été ainsi recentrées avec une précision de 1 pixel en translation et 0.05° en rotation.

      Les images recentrées ont été ensuite additionnées pour améliorer le rapport signal/bruit (voir Fig 1a) :

      Fig 1 a - addition des 7 poses de 1 s  (canal vert) :

      Note :

      La lumière cendrée est visible sur ce composite (la dynamique n'est pas déformé par un quelconque traitement). Cliquer sur l'image pour l'agrandir. La lumière cendrée est aussi visible très faiblement sur les négatifs. J'ai d'abord cru d'abord qu'il s'agissait d'un reflet instrumental alors que j'avais pris le maximum de précautions pour les éviter ....
       

      b- Masque radial symétrique :

      Le but du masque radial symétrique est de compenser la diminution radiale à grande échelle de la luminosité de la couronne. Le profil du masque est le profil d'un des azimuths les moins lumineux de la couronne mesuré sur le composite précédent. Ce profil est lissé par un filtre gaussien pour retirer le bruit du au grain du film.

      Il y a un masque différent pour chaque couleur :

      Ces courbes représentent donc aussi le profil dans les différents canaux d'un des azimuths de la couronne solaire mesuré au travers de la lunette, du film et du scanner. La couronne est détectable jusqu'à 8 rayons solaires du centre du soleil.
      La luminosité de la lumière cendrée (additionnée à celle du ciel), dans le canal rouge, est équivalente à celle de la couronne à 6 rayons solaires du bord du disque.

      Fig 1 b - masque radial (canal vert) :

       

      L'étape suivante est de faire la différence entre le masque (affecté d'un coefficient de pondération) et le composite :

      Fig 1 c - composite couronne externe (canal vert) :



    3. Traitement des images de la couronne interne

    4.  

        8 images sont utilisées : 4 x 1/30 s and 4 x 1/250 s.

      Etapes principales :
      a - centrage des images en translation et rotation par rapport aux protubérances et aux détails de la couronne interne,
      b - addition des 8 images pour améliorer le rapport signal sur bruit.
       

    5. Addition du composite couronne externe et du composite couronne interne

    6.  

        Etapes principales :

      a - Centrage des deux composites par rapport aux protubérances et aux détails de la couronne interne.

      b - Addition des deux composites (Fig 2 a) :

      Fig 2a : addition des composites couronne externe et couronne interne (canal vert)

      Note :

      Cette image parait globalement plus sombre que celle en Fig 1c. Il n'y a pas d'erreur. Il faut se rappeler qu'il s'agit de la somme de deux images. Sur la première (le composite couronne externe), la couronne interne et externe est visible, mais sur la seconde (le composite couronne interne) seule la couronne interne est visible. La valeur relative de la couronne externe par rapport à la couronne interne est donc dans cette image somme plus faible que dans l'image de la figure 1c. La valeur absolue (sur 16 bits) reste la même.
       

      c - Masque radial non symétrique (Fig 2b and 2c) :

      L'objet de cette étape est justement de résoudre ce problème, autrement de trouver un moyen de réduire les variations angulaires et radiales à grandes échelles de la couronne interne, ceci sans modifier la couronne externe. Le masque radial non symétrique (appelé filtre angulaire dans Qmips) consiste à affecter à chaque pixel l'intensité moyenne des pixels se trouvant à la même distance du centre du soleil et dans le même secteur angulaire que le pixel considéré :

      pixel value (r, q) = Max (average { pixel value (r, q ') } - offset , 0.)
      with -a &deg;< q - q ' <+ a &deg;
      where
      r = distance of the pixel from the sun center,
      q = pixel azimuth,
      a = setting parameter (best result was achieved with a =17&deg;),
      offset = setting parameter to limit the action of the mask to the inner corona.
       

      Un filtre gaussien est ensuite appliqué pour réduire le bruit dû au grain du film.

      Les courbes suivantes montrent le profil du masque selon deux azimuths :

      Fig 2b : masque radial non symétrique (canal vert)






      On fait ensuite la différence entre le composite précédent et le masque (affecté d'un coefficient de pondération) :

      Fig 2c :



    7. Traitement particulier à la lune


    La surface de la lune est visible dans les différents composites précédents (Fig 1a - 1c - 2c), mais les détails sont flous car le centrage des images a été fait sur les étoiles - pour avoir une couronne nette - et non sur la lune. Pour avoir une lune nette, il suffit de reprendre les images en recentrant cette fois-ci sur la lune. C'est ce qui a été fait en prenant les 7 poses de 1 s et deux autres poses de 4 s (non utilisées pour la couronne) avec une précision de  0.2 pixel. Ces neufs images ont ensuite été additionnées :

    Un masque flou très léger permet ensuite de remonter le contraste :

    L'image nette de la lune résultante est ensuite insérée dans le composite "couronne" (Fig 2c) à la place de l'image floue de la lune. Cette dernière étape du traitement est réalisé dans Photoshop.
     

  4. Résultats
L'image obtenue après traitement montre la couronne solaire jusqu'à 8 rayons solaires du centre de soleil, tout en conservant les détails de la couronne interne. Deux petites protubérances sont visibles sur le limbe Est du soleil. (voir Fig 3).
Plus de 14 étoiles sont visibles depuis la magnitude 6.5 jusqu'à la magnitude 8. La lumière cendrée est parfaitement visible et on reconnait facilement les principales formations de la lune.


Fig 3 :

C'est plus facile avec une résolution plus grande et quand les étoiles sont repérées - 1766 x 1200 pixels - 590 ko

1766 x 1200 pixels - 590 ko

2400 x 1600 pixels

Article original paru dans Pulsar janvier 2000

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