Quelques conseils pour l'astrophotographie à grand champ

Le but de ce texte n'est pas de remplacer les livres existants sur le sujet (je conseille en particulier ceux de Pierre Bourge : "La photo astronomique d'amateur" et "A l'affut des étoiles" qui sont une mine d'idées et de renseignements). J'ai simplement envie de vous faire part de quelques astuces que j'ai utilisé pour faire des photos du ciel avec de petits moyens pendant 3 ans (une partie de ces photos sont visibles sur ce site). Mon matériel a pas mal évolué avec la construction d'un T200, mais ces quelques trucs peuvent être utiles. La partie sur les scanners peut servir pour toutes les formes d'astrophoto. Je parlerai essentiellement de la photo en couleur car c'est ce que je connais le mieux. J'ai très peu utilisé le TP2415 qui est un film noir et blanc sensationnel. Son usage est beaucoup plus exigeant, mais j'espère bien pouvoir l'utiliser maintenant que ma technique commence à être au point.

La photo avec de simples objectifs allant du grand angle au petit téléobjectif ne permet pas de détailler les galaxies ou les amas globulaires mais c'est un excellent moyen d'obtenir sans trop de difficultés de belles images de l'univers qui nous entoure. Le sujet de prédilection pour les courtes focales, ce sont les nébuleuses brillantes qui parcourent la voie lactée. Et croyez moi, en visant les régions d'Orion, du Cygne ou du Sagittaire avec un simple objectif de 135mm, il est possible de faire de superbes images à conditin d'avoir une technique bien rodée. On pourrait être tenté de choisir la plus longue focale possible mais il vaut mieux rester raisonnable au moins au départ. Pour moi, la plus belle photo du ciel que j'ai pu voir a été prise avec un objectif de 28mm de focale : il s'agit du panorama de la voie lactée réalisé par Axel Mellinger (http://canopus.physik.uni-potsdam.de/~axm/). C'est cette photo qui m'a encouragé à faire une photo du même type mais sur une portion plus réduite de la voie lactée (cliquer ici).

 

Avant de passer aux questions techniques, voici un bref aperçu de ce qu'il est possible de faire avec des objectifs de 28mm à 300mm de focale (classés par ordre de difficulté):

1. Les constellations

2. La voie lactée (nébuleuses obscures et brillantes)

3. Les grands objets célèbres du ciel profond (la galaxie d'Andromède, les pléiades, la nébuleuse d'Orion...)

4. Les grandes nébuleuses diffuses mais peu brillantes (La boucle de Barnard, IC1396, les nébulosités qui entourent Antarès ou Dzeta Ophiucus...)

 

Les constellations

C'est le sujet le plus facile. Choisir un grand angle ou un 50mm. Il suffit de poser 1 minute à f/2.8 pour voir les étoiles principales. Poser plus longtemps permet d'augmenter le nombre d'étoiles enregistrées. On peut aussi essayer de placer un filtre diffuseur devant l'objectif (par exemple un Cokin diffuseur n°1 ou n°2 qui coute autour de 100 F). Un tel filtre permet d'étaler les étoiles brillantes, ce qui permet de voir leur couleur. L'autre avantage est que les étoiles les plus brillantes seront plus grandes que les autres. Finalement sur un tirage papier, la constellation est beaucoup plus facilement reconnaissable. J'ai fait l'essai avec des personnes ne connaissant pas grand chose à l'astronomie. Je leur ai présenté une photo de la grande ourse sans filtre. Ils ne l'ont pas reconnue alors que sur la photo faite avec le filtre diffuseur tout le monde a reconnu la grande ourse d'emblée. Si on utilise un tel filtre il faut quand même poser un peu plus longtemps. Je dirais autour de 5 min à f/2.8 si le ciel est bien noir. C'est une technique similaire (mais certainement un peu plus élaborée) qu'utilise Akira Fuji. Ses photos de constellations illustrent souvent les articles de ciel et espace.

Ci-dessus : La grande Ourse 50mm à f/2.8, 10 minutes de pose sur Ektar 400. A gauche : filtre Cokin diffuseur 1. A droite : sans filtre. L'assombrissement des 2 coins de l'image de gauche est du au support de filtre mal conçu (c'est moi qui l'ai fait) qui masquait une partie du champ.

La voie lactée

Peu de différence avec la photo de constellations, si ce n'est qu'il faut disposer d'un ciel bien noir et poser aussi longtemps que le ciel le permet. Le filtre difuseur ne donne pas de bons résultats sur la voie lactée (impression de flou). On doit pouvoir cependant faire des photos intéressantes en l'utilisant pendant une partie de la pose (1 minute par exemple) pour faire ressortir les étoiles les plus brillantes de la région du ciel visée.

Dans tous les cas, ne pas oublier de diaphragmer suffisament l'objectif pour éliminer le vignettage. Sinon, cette aberration peut laisser croire que les portions de voie lactée située sur les bords du champ sont moins brillants alors que ce n'est pas forcément le cas.

 

Les objets célèbres du ciel profond

Bien sur c'est par eux qu'ils faut commencer. Contrairement à ce qu'on ferait en visuel, ce n'est pas la brillance mais la taille de l'objet qui constitue le meilleur critère de choix pour obtenir une belle photo. M57 ou M27, même si elles sont très spectaculaires en visuel ne donnent pas grand chose avec 300mm de focale. On arrive tout juste à les reconnaître. Par contre la tête de cheval qui est presque invisible dans un téléscope est une cible facile même avec une courte focale. Et un 300mm permet d'obtenir une très belle image de cette nébuleuse.

 

Les grandes nébuleuses brillantes

Par nébuleuses brillantes il faut comprendre nébuleuses qui émettent de la lumière. Masi elles peuvent être très faibles. C'est un des sujets les plus intéressants en photo à grand champ. Prenez par exemple les nébulosités autour de Gamma du Cygne, la nébuleuse NGC7000, elles sont trop étendues pour être photographiées au foyer de la plupart des téléscopes d'amateurs. Un objectif de focale bien choisie est l'instrument idéal. Pour les plus brillantes (NGC7000, la tête de cheval, IC1396...) il n'y a pas de grandes difficultés. Pour d'autres plus difficiles comme la boucle de Barnard, les nébulosités autour de Dzeta Ophiucus, la nébuleuse du cone, IC1848 ... il faudra un très bon ciel. Le compositage sera obligatoire pour obtenir une image contrastée. L'Elite Chrome 200 est un bon choix pour photographier ces nébuleuses en couleur. Mais les meilleures photos de ces nébuleuses seront faites avec du TP2415 hyper et un filtre rouge. Mais là, le suivi devra être très bon et la pose sera longue. Bref c'est plus difficile mais c'est bien plus beau.

Pour tous les objets de cette catégorie, le cadrage n'est pas facile car ces nébuleuses sont invisibles. Dans le viseur de l'appareil photo on ne voit que les étoiles les plus brillantes. Il faut commencer par repérer le champ à photographier sur un atlas (On peut utiliser un papier transparent sur lequel on a tracé la taille du champ de ses objectifs photo) ou avec un logiciel. On note l'orientation de l'appareil photo, et les étoiles les plus brillantes qui devraient êttre visibles dans le viseur. Ensuite avant de faire la photo, on repère la zone à photographier aux jumelles jusqu'à ce qu'il soit possible de la pointer sans hésitations (le champ de jumelles 7x50 correspond à peu près à celui d'un 135mm). Ensuite on vise la même zone avec l'appareil photo. On peut aussi (et ça facilite bien les choses utiliser un chercheur ou une demi paire de jumelles qui sera aligné avec l'appareil photo).

Voici classés par saison une liste des objets (pas forcément des nébuleuses) les plus facilement accessibles (souvent on peut cadrer plusieurs objets dans le champ):

été : Lagune et trifide, M16 et M17, M6 et M7, région de M24, région de M11 (nébuleuses obscures), Nébulosités autour de Gamma du Cygne, Nord America et le pelican, les dentelles du cygne, La nébuleuse du cocon (petite mais avec une belle nébuleuse sombre à proximité). Un peu plus difficile : les nébulosités autour d'Antarès et rho Ophiucus, nébulosités autour de Dzeta Ophiucus, IC1396.

automne : M31, les pléiades, la nébuleuse Californie, M33 (un peu petite mais pourquoi pas ?), le double amas de Persée et les nébuleuses IC1848 et IC1805, Helix (interressante même avec 200mm de focale),

hivers : M42, la tête de cheval et NGC2024, la boucle de Barnard, la nébuleuse de la mouette (IC2177), M46 et M47, M35 et IC443, une bonne partie de la constellation du Cocher

printemps : M44, l'amas de la Vierge (nombreuses galaxies visibles comme de petites taches floues). Le ciel de printemps est assez pauvre en objets étendus. Profiter de cette saison pour faire de la photo de constellations. On peut à la limite avec un 300mm photographier M51 ou M101 (la structure spirale est peut-être visible).

J'en ai certainement oublié un certain nombre, mais le but de cette liste était de montrer qu'il y a vraiment de quoi s'occuper pendant un bon moment. Les sujets ne manquent pas même si on se limite à des courtes focales.

Le choix de l'objectif

A mon avis pour commencer, il vaut mieux utiliser un 50mm. Le guidage est beaucoup plus facile qu'avec des focales supérieures.

Pour les premières photos on peut l'utiliser à son ouverture maximale mais on se rendra vite compte qu'il y a beaucoup d'aberrations. Il faut tester l'objectif à f/2, f/2.8, f/4 et f/5.6 pour savoir à quel diaphragme les aberrations sont suffisament réduites. Là c'est une qestion de choix, il faut faire un compromis entre finesse de l'image et temps de pose nécessaire. Après avoir testé 3 objetcifs de cette façon (Pentax M1.4/50, Pentax A 2/50 et Canon FD 1.8/50) j'ai trouvé des résultats assez similaires: les images deviennent acceptables à partir de f/2.8 mais on gagne encore en finesse sur les bords du champ en passant à f/4.

Ci-dessus : le cygne avec le même objectif Pentax 1.4/50 utilisé à 2 ouvertures différentes : f/3.5 et f/1.4. Pose de 22min à f/3.5 et 15 min à f/1.4. Sur l'image à f/1.4 on note le vignettage important et le manque général de netteté. Un agrandissement sur la région de NGC7000 montre que les étoiles sont bien plus fines (et plus nombreuses) quand on ferme le diaphragme. La magnitude limite est supérieure même si diaphragmer l'objectif revient à perdre une partie du diamètre (et de la lumière). Le film utilisé (SuperG+400) avait été exposé à la chaleur, ce qui explique les couleurs peu agréables.

Pour mes objectifs de plus longue focale (Pentax Takumar 2.8/135, Pentax M 2.5/135 et Pentax M 4/200) j'ai remarqué de très bonnes images sur tout le champ même à pleine ouverture mais un vignettage gênant qui m'a conduit à les fermer d'un diaphragme.

J'ai aussi un grand angle Tokina 2.8/28 qui ne donne pas de bonnes images même à f/4 et qui a beaucoup de vignettage. Je ne l'ai pas beaucoup utilisé en astro.

On trouve des objectifs d'occasion à tous les prix. Alors que choisir ? Prenons l'exemple d'un 200mm. On peut trouver des 200 ouvert à f/4 entre 500 et 1000 F. Au dessus il y a des 200 ouverts à f/2.8 pour des prix beaucoup plus élevés (plus de 3000F). L'avantage d'un tel objectif réside dans le gain d'un diaphragme. La qualité optique est également le plus souvent améliorée, mais si on ferme le diaphragme d'un cran pour chacun de ces objectifs pour éliminer le vignettage, les 2 objectifs donneront de bonnes images. Selon moi il est plus avantageux d'acheter 2 objectifs de 200mm à f/4, qu'un seul à f/2.8 (c'est ce que j'ai fait). Ca revient moins cher et finalement les possibilités sont identiques car on peut fixer 2 boitiers photo et 2 objectifs et faire 2 photos simultanément qui seront compositées par la suite. Avec le 200 ouvert à 2.8, le même résultat serait obtenu en faisant 2 poses successives plus courtes. Mais finalement le temps de pose total est le même.

 

Le choix du film

En noir et blanc le meilleur film est le TP2415 sans contestation possible. Cependant il est d'un usage délicat. Il doit être hypersensibilisé, on doit le développer soi-même avec du D19. Comme c'est un film très fin, l'objectif doit donner de très bonnes images sinon on verra les aberrations. Le moindre défaut de suivi est également visible. Bref c'est un très bon film, mais il faut maitriser pas mal de choses avant de pouvoir l'utiliser à son plein potentiel. Comme en plus c'est un film qui reveint assez cher si on l'achète hypersensibilisé, il vaut mieux commencer par des films couleurs.

Quel film choisir en couleur ? Difficile à dire car les films sont constament renouvelés. Sachez qu'il n'existe aucune règle. Ce n'est pas parce qu'un film est marqué 800 ou 1000 ISO qu'il sera sensible en astrophoto. Dans une même série de film, la version 200 ISO et la 400 ISO peuvent donner des résulats complètement différents. La seule chose à faire est de se tenir au courant (via la liste APML (http://www.system.missouri.edu/apml/) par exemple) des films utilisables puis de les tester et d'en choisir un. Ensuite tant que le film est fabriqué, il faut le garder. C'est important car 2 films différents demandent des temps de pose différents. Il est bon de savoir quel est le temps de pose optimal pour son équipement, son ciel et son film. Pour espérer obtenir de bonnes photos, il faut pouvoir être sur que tout est au point et que la photo sera réussie (sauf incident imprévu). Au début j'essayais différents temps de pose sur différents objets, mais il est très difficile de pouvoir faire des comparaisons par la suite. Il vaut mieux pointer un objet représentatif (NGC7000 par exemple pour les nébuleuses qui émettent dans la raie Halpha) et de faire une série de poses de 4 min à 30 min ou plus (pour une ouverture de f/4) en doublant le temps entre chaque photo. Un tel essai doit être fait depuis le même site qui sera utilisé pour les photos suivantes. Ensuite, on peut affiner un peu : si par exemple les deux meilleurs résultats sont obtenus avec 16 min et 32 min, on peut refaire une série d'essais avec 16 , 20, 24, 28, 32 minutes. De toutes façons ce ne sera pas du temps perdu car on pourra obtenir une très bonne image en compositant toute la série. Enfin il n'est pas indispensable de déterminer le temps de pose à la minute près car de toutes façon, il ya des changements inévitables selon la transparence du ciel, la prése,ce ou non d'un petit croissant de Lune, la direction visée... Si on dispose de plusieurs appareils photos, on peut tester différents films en les plaçant dans chaque appareil avec un objectif de même ouverture et de même focale. On peut comparer ensuite différents films à différents temps de poses. Tous ces tests peuvent paraître longs mais ça vaut vraiment le coup de déterminer les paramètres optimaux de prise de vue pour pouvoir par la suite réussir ses photos à coup sûr. Rien n'est plus désagréable que de faire du guidage manuel pendant 30 minutes en se disant que la photo risque d'être complètement surexposée ou que le film choisi n'est paut-être pas du tout adapté à la cible visée.

 

Le guidage

Bien sur il est possible de photographier quelques constellations avec un simple appareil photo posé sur trépied, mais dans ce cas on ne dépasse guère la magnitude 6 et bien peu de nébuleuses sont accessibles. Pour faire de belles photos du ciel à grand champ, il est indispensable d'avoir une monture équatoriale. Ca peut être un simple équatorial planchette, une monture du même type que celle d'un 115/900 (c'est ce que j'ai utilisé pendant 3 ans), ou une monture plus perfectionnée. Selon le matériel dont on dispose on pourra aller plus ou moins loin dans l'utilisation des longues focales et dans les poses longues. Et je pense qu'il vaut mieux rester raisonnable. Une photo bien exposée, avec un bon suivi, prise avec un 50mm est bien plus belle que celle qu'on pourrait obtenir avec un 300 avec un suivi pas très bon, sous exposée parce qu'on passe tout de suite à f/5.6 et que le temps de pose nécessaire devient long. Ca ne veut pas dire qu'il faut laisser tomber les téléobjectifs mais ce n'est vraiment pas le mieux pour commencer.

Passons en revue le matériel nécessaire à l'obtention d'une bonne photo:

- la monture doit pouvoir être mise en station précisément et elle doit être suffisament robuste pour suporter une lunette guide et un appareil photo (ou mieux 2 appareils photo)

- la lunette guide n'a pas besoin ni d'une grande focale ni d'une qualité optique exceptionnelle. J'ai pendant longtemps utilisé un simple téléobjectif de 400mm à f/5.6 avec un oculaire guide fixé à l'arrière. Le seul point à surveiller est la rigidité du porte oculaire. On peut améliorer les choses en percant 2 trous taraudés sur les bords de la crémaillère pour ajouter des vis de blocage en nylon mais ce n'est pas forcément suffisant surtout si on prévoit d'utiliser des focales relativement longues. Pouvoir orienter la lunette guide indépendament des boitiers photo pour trouver une étoile guide n'est pas indispensable, mais c'est bien pratique surtout si on utilise plusieurs apareils photo simultanément ou si on veut faire des mosaiques. Je ne serais surement pas arrivé au bout de mon panorama de la voie lactée si je n'avait pas eu de réglage de l'orientation de la lunette guide.

- L'oculaire guide: un oculaire réticulé éclairé est un accessoire très pratique mais cher (plus de 1000F) mais on peut le remplacer par un oculaire récupéré sur un chercheur. La focale d'un tel oculaire étant assez longue il est préférable de l'utiliser avec une barlow. Pour l'éclairage on peut utiliser une diode placée à l'avant du tube de la lunette (dans le pare-buée). Le fond du ciel est éclairé en rouge. Les étoiles faibles disparaissent mais de toute facon il est préférable d'utiliser une étoile brillante car le guidage est nettement plus confortable.

- Une chaise: croyez moi, faire du guidage debout est assez pénible. Il m'est arrivé plusieurs fois d'oublier ma chaise à la maison et ça a généralement écourté ma séance de photos. Si vous avez la place dans la voiture pour emporter un tabouret à hauteur réglable, c'est l'idéal.

Pour en finir avec le matériel, la fixation des appareils photos et de la lunette doivent être le plus rigide possible. Ceci dit avec des focales courtes (moins de 135mm) il ne devrait pas y avoir de problèmes de flexion différentielle même avec un équipement léger. Pouvoir faire tourner les appareils sur eux mêmes pour faciliter le cadrage est un plus, mais pas besoin d'acheter une rotule pour ca, un petit bricolage fait aussi bien l'affaire.

Le montage ci-dessus a été bricolé en 1 quart d'heure, a coûté quasiment rien et m'a permis de réaliser mon panorama de la voie lactée sous un ciel de montagne.

La motorisation en ascension droite est quasi indispensable même si j'ai un copain qui a réussi de très bonnes photos sans moteur en AD sur un monture GP avec un 300mm. Si la monture est motorisée, il faut pouvoir accélérer le moteur et le ralentir (ou le stopper) avec une raquette de commande. A la limite, il vaut mieux un guidage totalement manuel qu'un suivi motorisé sur lequel on ne peut pas faire de retouche.

Pour les retouches en déclinaison, on peut les faire manuellement à condition d'être précautionneux pour ne pas provoquer de vibrations. Si la monture est motorisé en delta, ce n'est pas forcément une bonne chose car s'il y a un jeu important à l'inversion des moteurs (cas des montures GP que j'ai pu utiliser) les retouches sont difficiles à faire avec précision. Sur mon T200, je fais même les photos au foyer sans moteur de déclinaison, je trouve que le contact direct et la sensation qu'on a en tournant la molette donne une bien plus grande précision qu'avec une raquette de commande et un moteur si ceux-ci ne sont pas de première qualité. Si on craint vraiment les vibrations pendant la retouche en déclinaison on peut déposer un tissu noir sur l'objectif et l'enlever dès que la retouche est faite. Je faisais ça systématiquement au début mais je me suis rendu compte que sans ce tissu les vibrations n'apparaissaient pas sur la photo. Depuis j'ai laissé tomber et c'est beaucoup plus comfortable.

 

La mise en station

On recommande souvent dans les livres d'utiliser la méthode de Bigourdan. Celle ci présente à mon avis 2 défauts: d'abord elle est assez longue car il faut attendre de voir la dérive d'une étoile, et en plus avec une monture telle que celle d'un 115, il n'est pas facile de faire des ajustements en azimuth. C'est pour ça que je préfère l'utilisation d'un viseur polaire. J'ai fini par en fabriquer un mais dans un premier temps on peut se contenter d'utiliser le chercheur comme si c'était un viseur polaire. Pour en savoir plus sur cette méthode je vous conseille de consulter le site de Serge Bertorello (http://serge.bertorello.free.fr/). Il explique différentes méthodes de mise en station dont celle du viseur polaire qui peut être réajuster chaque nuit s'il n'est pas fixé dans l'axe de la monture. J'ai pendant un certain temps utilisé sa méthode en utilisant le chercheur du téléscope en remplacement d'un viseur polaire dédié.

Quelque soit la méthode choisie la mise en station doit être la meilleure possible. C'est ce facteur qui va être déterminant pour le confort du guidage pendant le reste de la nuit ! Un défaut de mise en station est également visible sur le cliché (en particulier si la pose est longue et si la région visée est proche du pôle célèste).

 

Scanner les images

La prise de vue est bien sur l'élément essentiel pour obtenir de bonnes images. Le traitement ultérieur ne corrigera jamais les défauts à la prise de vue. Ceci dit le traitement sur ordinateur permet un certain nombre de possibilités. Le principal avantage est de pouvoir controler toutes les étapes de la réalisation d'un image. Il y a quelques années, on pouvait soit faire confiance à un photographe pour tirer ses clichés, soit se monter un labo photo. Cette possibilité est envisageable en noir et blanc, mais pour faire du tirage de photo en couleur, il faut y consacrer pas mal de temps et d'argent. Avec un ordinateur et un scanner, on peut faire la même chose beaucoup plus confortablement. Tous les réglages de luminosité, de contraste de saturation des couleurs se font en quelques clics de souris. L'autre gros avantage est celui de pouvoir faire du compositage. J'y reviendrait plus en détail dans le paragraphe suivant.

Pour pouvoir profiter des différents traitements (compositage, mosaïque ou simplement réglage du contraste et de la luminosité) il faut commencer par scanner les images.

La meilleure facon de scanner une image est de le faire directement à la source : c'est à dire scanner directement le négatif ou la diapo plutot qu'un tirage papier. Si on ne dispose que d'un scanner à plat, il vaut mieux faire scanner ses négatifs ou diapo par Kodak sur PhotoCD. Les tirages qu'on obtient sont général peu soignés et si on les scanne sur son scanner à plat on perd une partie des informations contenues dans le négatif d'origine. L'idéal c'est quand même de disposer d'un scanner à négatif (ou d'un dos pour transarents sur un scanner à plat). On peut même scanner une partie de diapo à l'aide d'une webcam en dévissant l'objectif de quelques tours pour raccourcir la distance de mise au point et augmenter ainsi la résolution du scan. Mais avec cette technique, on ne peut avoir qu'une partie de la diapo à la fois, mais ça peut être utile pour certaine diapos ou l'objet n'occupe qu'une petite partie du champ (cas des planètes ou de M27 photographiée avec 200 ou 300 mm de focale).

Etant donné que je n'utilise que des diapos, je ne parlerai pas du scan d'un négatifs. La principale difficulté vient du fait que les scanners bon marché ont beaucoup de mal avec des transparents très denses (cas du fond noir d'une diapo). Pour scanner une diapo correctement on peut se contenter d'utiliser le scanner normalement, mais les résultats pourraient être meilleurs. Sur mon scanner (un Microtek scanmaker 35t plus) des bandes bleues verticales apparaissent en surimpression de l'image. Elles ne sont pas visibles immédiatement mais dès qu'on pousse un peu le contraste. Pour s'en débarrasser il existe plusieurs techniques:

ma préférée consiste à scanner la diapo puis immédiatement après un cadre du même format mais totalement opaque (et j'insiste: vraiment opaque, une diapo complètement noire parce que non exposée laisse encore passer un peu de lumière). J'utilise un cache diapo obturé par une épaisseur de papier d'alu et recouvert par du velours noir adhésif qui évite les reflets. Quand on examine attentivement l'image obtenue après avoir scanné cette diapo opaque, on s'apercoit qu'il ne reste que les lignes bleues genantes. Il suffit ensuite de soustraire cette image au scan de la diapo. Pour que cette technique soit efficace, il faut que le scanner soit arrivé à un certain équilibre thermique pour que les artefacts soient les mêmes sur le scan de la diapo et sur l'image du noir. Je laisse toujours mon scanner allumé un certain temps avant de commencer à scanner.

La deuxième technique consiste à scanner la même diapo plusieurs fois avec des orientations différentes pour ensuite en faire la moyenne (après les avoir remis dans le même sens dans le logiciel bien sur). Le seul problème c'est que l'entrainement de la tête du scanner présente une certaine erreur et que 2 scans faits dans des orientations différentes ne se superposent pas toujours exactement. Ca ne pose pas de problème si on utilise Registar par exemple, mais sinon ça devient assez pénible. Une variante consiste à scanner les différentes diapos destinées à un compositage dans des orientations différentes. Cette technique (ou sa variante) permet de réduire l'importance des artefacts.

Mais le meilleur moyen d'obtenir un bon scan reste quand même d'avoir des diapos suffisament exposées. Dites vous qu'une diapo qui parait belle à regarder en projection est trop sombre pour le scanner. Il faut donc volontairement surexposer les diapos si on projette de les scanner. Sinon (et surtout si on a un scanner bas de gamme) on ne pourra pas tirer toutes les informations présentes sur la diapo. Pendant la phase de test des films il faut tenir compte de ce paramètre et si possible comparer les images obtenues après le scan.

 

Le compositage

Le compositage consiste à utiliser plusieurs clichés du même objet (avec les mêmes paramètres) pour améliorer le rapport signal sur bruit. Ainsi en faisant la moyenne de 2 cliché le rapport signal/bruit est multiplié par environ 1.4. Il faut 4 clichés pour doubler ce rapport. A quoi sert d'améliorer ce rapport ? Ca peut servir à réduire le grain ou à améliorer le contraste ou à faire un peu des deux. Il n'y a pas de miracle, ce gain de contraste est possible car le temps de pose a été multiplié par deux. En gros on pourrait faire la même chose en utilisant un film plus lent (et plus fin) et à poser plus longtemps. Alors quel avantage au compositage ? Tout simplement comme je l'ai signalé précédemment, la qualité d'un film en astrophoto n'est pas lié à sa sensibilté annoncée par le fabriquant (valable en photo diurne). On peut choisir le meilleur film possible et choisir aussi le temps de pose total qu'on va consacrer à une image. L'autre avantage du compositage est de pouvoir fractionner les poses : on peut faire une petite pause entre 2 séances de guidage manuel, la mise en station peut être moins précise sans que ce soit gênant, il y a moins de chances qu'un élément imprévu survienne (passage d'un avion, coup accidentel dans le trépied...)

Ci-dessus : l'effet d'un compositage de 4 images comparé à une seule image. A droite 1 pose de 15 minutes à f/4 sur Elite Chrome 200 avec un 135mm, à gauche 4 poses identiques compositées. La photo présente un agrandissement de la région autour d'Antarès et de M4.

La technique du compositage n'est pas très difficile. On scanne les deux images (ou plus), on les aligne pour que les étoiles se superposent et on en fait la moyenne. L'étape la plus  délicate est l'alignement des images. Mais j'ai écrit un petit logiciel nommé MoonStack qui résout le problème. Il suffit de lui indiquer une étoile commune aux 2 images et il fait le reste.

Les apports du compositage sont énormes. On peut par exemple utiliser 2 ou 3 appareils photo simultanément et  finalement en 15 minutes de pose vous faites une photo aussi bonne que si elle avait duré 2 ou 3 fois plus longtemps (compte tenu du prix d'un objectif d'occasion un peu ancien c'est  tout à fait possible). On peut aussi améliorer une ancienne photo. Imaginez que votre photo de NGC7000 qui date de l'année pasée ne soit pas assez posée à votre gout. Pas besoin  de refaire complètement la photo, vous pouvez très bien faire 2 ou 3 poses supplémentaires qui seront compositées avec la photo de l'an passé. Enfin dernier avantage, si le ciel n'est  pas suffisament noir, le compositage permet de compenser un petit peu. C'est très utile pour photographier les objets très bas sur l'horizon. Pour les autres objets rien ne remplace un  déplacement vers un ciel moins pollué, mais ce n'est pas toujours possible.

 

Les mosaïques

Faire une mosaïque permet de prendre une photo plus grande que le champ donné par l'objectif. Il faut découper la zone qu'on veut prendre en photo en plusieurs morceaux et à faire une prise de vue pour chaque (cette prise de vue peut être multiple si on veut en plus faire un compositage). En général on pourrait se dire qu'il suffit d'utiliser une focale plus courte pour augmenter le champ. C'est vrai mais, mais avec une focale plus courte les nébuleuses seront moins détaillées. En plus de ça les objectifs granbd angle (focale inférieure à 28mm) ont en général un vignettage assez important. De plus certaines photos comme les panoramas de la voie lactée ne peuvent pas être faits sans mosaïque car la zone du ciel photographiée n'est pas forcément accessible au  même moment. Dans le cas du panorama d'Axel Mellinger (photographie de toute la voie lactée), il a du photographier à la fois de l'hémisphère Sud et de l'hémisphère Nord en Hiver et en été. Sans aller dans ces extrèmes, la mosaïque permet de photographier un grand champ en gardant une bonne résolution. Un appareil au format 6x6 ou une chambre de Schmidt sont bien plus adaptés pour ce type de photos mais on peut avec un peu plus de travail arriver à faire des images comparables avec un appareil standard au format 24x36. Et je n'ose pas imaginer les images qu'on pourrait obtenir en faisant une mosaïque à partir de photos prises sur un format 6x6 !

Si le compositage (l'alignement des images essentiellement) vous paraît compliqué, alors il vaut mieux laisser tomber les mosaïques pour l'instant. Les problèmes de raccordement au bord des images sont vraiment difficiles à résoudre. Si avec une focale de 135mm ou plus on arrive sans trop de problème à raccorder les images, faire la même chose avec une focale inférieure oblige à tenir compte des déformations liés à l'utilisation d'une courte focale. Quoi qu'il en soit la réalisation d'une mosaïque demande une bonne planification et beaucoup de patience au traitement. A titre d'exemple mon panorama de la voie lactée m'a demandé une nuit complète de prise de vue, et 4 jours de traitement (avec en prime l'écriture d'un programme destiné à corriger les déformations de mon objectif). Pour cette mosaïque d'Orion au 135mm, ça a été quand même nettement plus facile.
Mais quelle joie d'obtenir enfin un belle image !

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