Derrière ce titre un peu long
se cache une histoire somme toute pas banale. Elle a commencé il y
a plusieurs années lorsque
Jean LECACHEUX
me parla pour la première fois des observations d'occultations d'étoiles
(voir la
page précédente pour plus
de détails sur ces phénomènes). Il tenta bien de me
faire prendre le virus, en m'encourageant en m'envoyant régulièrement
les avis d'observation possible sur la France.
Malgré tout le virus ne m'avais pas encore attrapé...
Il le fit un 13 Décembre 2003. Ce jour là je participais à
une conférence organisé par
l'association Aude à l'observatoire
de Paris. Eric FRAPPA y présenta avec brio un bel exposé sur
ces fameuses occultations et pour finir invita la salle à participer
une observation prévue le 22 Décembre suivant. Jean LECACHEUX,
qui était présent, me précisa que l'observation serait
possible depuis une bande traversant la France de Wissembourg à Biarritz
approximativement.
Or il se trouvait que je devais me trouver du coté
de Metz pour la Noël.
Je récupérais alors sur le net les infos
relatives à l'évènement et m'inscrivait par la même
occasion sur la liste
PLANOCCULT.
Cette liste regroupe tous les fans d'occultation et des informations bien
à jour y circulent.
Le 22 au matin, toute la famille embarquait comme prévu
pour la région messine. Par manque de place (le père Noël
avait passablement remplis la malle de la voiture), je ne pris pas le télescope.
De toute façon, de jumelles devaient suffire pour l'observation prévue.
Mais un détail important menaçait mon projet : la météo
était plutôt exécrable ce jour là sur le nord de
la France. Les prédictions de Météofrance ne me laissait
guère de chance. Enfin on verrait...
Mais dans l'après midi le temps se dégagea
et la température chuta. Enfin vers 19h le ciel semblait assez clair.
Je sortais avec les jumelles en reconnaissance : oui ! on apercevais bien
l'étoile à l'aide de petites jumelles 8x40mm (mag 6.2 tout
de même). C'était décidé : je tentai l'aventure.
Il me restait un point à régler : où
observer ? Jan Manek avait fournit une carte mais la prédiction était
imprécise. Finalement le site d'Euraster me fournissait une carte
de la
région orientale de la Moselle
avec la bande de centralité. Un message de Jean LECACHEUX avait averti
les observateurs que cette prédiction serait assez précise
car l'étoile était bien connue (catalogue Hipparcos) et surtout,
Alphonsina avait déjà provoqué une occultation quelques
semaines auparavant avec de bons résultats : son orbite était
donc bien connue.
L'occultation avait lieu à au moins 80km d'où
je me trouvait. Pour gagner du temps de voyage je choisis de prendre l'A4
direction Strasbourg et d'en sortir vers Sarre-Union : la centralité
passait quelques km plus au Nord. Vers 20h30 TU, les amarres étaient
larguées. Une heure et 100km plus tard, je me positionnais 2 km au
sud du village de Keskatel.
Un chemin de champ complètement gelé et pas
trop défoncé me permis de trouver un site en rase campagne.
En plein champ, je n'étais pas trop gêné par les lumières
des villages environnents. Sur place, je commençais à m'organiser
:
Je prenais quelques repère visuel afin de retrouver
ma localisation plus tard.
L'heure ? L'horloge DCF77 était resynchronisée
sur le signal de Francfort. Bon. Le chrono était ensuite lancé
en cherchant à le déclencher sur des tops de minute pile. La
chose faite, l'instant de synchronisation était noté : il était
21h40m00s TU.
Bon il était temps de sortir, chronomètre
et jumelles en main. Malgré le froid (-3° sur le tableau de bord
de la voiture), je m'installais contre la porte du véhicule et me
calais. L'observation commença. Bigre ! il faudrait tenir 10mn la
tête complètement en arrière. L'étoile en question
était très
proche de Epsilon Aurigae
donc à 80° de hauteur à ce moment là....
Le temps passait. Pas de repère pour me dire où
j'en étais...
Brutalement l'étoile disparu. Petit instant de
surprise passé et le chrono était déclenché.
Top, top, top, top... L'étoile réapparut. Cette fois, je l'attendais
et mon erreur fut bien moindre.
Encore quelques minutes passaient. La nuque commençant
à me dire que cela suffisait, j'arrêtais et me précipitais
dans la voiture. Il était 21h55 TU.
Je notais sur mon carnet l'intervalle de temps entre les
deux appuis au chrono : cela donnait 4.85s de temps d'occultation. L'instant
final était donné pour 21h51m25.86s. Une simple soustraction
donnait 21h51m20.41s pour le moment de début d'occultation.
L'excitation de la réussite me gagnait : je l'avais
donc fait cette observation... Une petite lumière qui s'éteint
cinq petites secondes. A l'instant prédit. Fantastique ! La magie
de la mécanique céleste avait fonctionné. Pendant quelques
instants, mon esprit se balada, me repassant en mémoire ceux qui avaient
permis ce que je venais de faire. Ceux dont l'histoire avait retenu le nom
et ceux qui m'avaient aidé. J'imaginais ensuite les autres observateurs
de Pologne, d'Allemagne, toute proche, de France ou d'Espagne en train de
noter leur butin de minutes et secondes, leur déception peut-être
car les nuages durent parfois être de la partie.
Au sortir de ma rêverie, les affaires rangées,
la voiture repris le chemin du retour. J'étais heureux.
Marc SERRAU. Cesson. Le 6 Janvier 2004.