Lundi 27 janvier : Geysers du Tatio (alt. 4300m) / Ascension du Cerro Soquete (alt. 5450m) -

La journée commence de très très bonne heure ! Réveillé à 2h30 du matin par les flatulences et ronflements intempestifs de mes voisins de chambrée, je tente de retrouver le sommeil -en vain- durant 2 heures en tournant, tournant et retournant à l'intérieur de mon sac de couchage. Las, à 4h30, j'aperçois une lueur entrer par la fenêtre du « refuge » dans lequel on dort : c'est la Lune ! Elle est levée. Ni une, ni deux, je me lève, m'habille chaudement (j'essaie de ne pas faire de bruit pour ne pas réveiller les copains) et sort précipitamment pour observer le ciel. Bien m'en a pris, il est superbe !!!!!!


La vue en sortant du refuge donne une idée du potentiel du site !


Il y a des gens qui ont dormi dehors dans un véhicule 4X4 pour être sur place au petit matin et bien voir les fumerolles. Pendant ce temps là je photographie tout ce qu'il y a autour de moi

Ô joie, enfin des étoiles, après tant de jours passés sans voir le ciel. Je prends mon trépied photo et je file en direction des geysers (toujours à 1,5 km de là à pieds) pour faire de magnifiques photos du paysage de nuit + voie lactée + Lune + les fumerolles des geysers. C'est trop beau. Bien sûr je suis tout seul sur le site, personne ne s'est levé pour voir les étoiles en même temps que moi, dommage ! J'en profite donc à fond puisque j'ai le site entier du Tatio rien que pour moi !!!



Il est 5h du matin, je suis seul sous les étoiles du Tatio !

Je réalise plein de photos panoramiques de nuit et parfois la vapeur des geysers m'entoure comme du coton, trempant de goutelettes d'eau mon appareil photo jusqu'à l'intérieur de son objectif ! Je me dépatouille finalement assez bien en essuyant les optiques entre chaque image à l'aide de mouchoirs en papier. Autour de moi, le bouillonnement incessant des geysers me rappelle que le danger, même s'il est faible, est quand même présent et que je dois faire attention où je marche dans l'obscurité. Il ne s'agirait pas de mettre par accident la jambe dans une piscine d'eau chaude !
Vous voyez ces photos bizarres ? Les étoiles dessinent de gros pâtés et la lumière de la Lune bave sur la photo... La faute à l'humidité ambiante lorsque le vent rabat les fumées dans la direction de l'appareil photo.c Sur l'image de gauche, on devine un arc en ciel blanc dans la vapeur du geyser (partie droite de la photo, au-dessus de l'ombre du photographe).

J'ai été particulièrement inspiré cette nuit car l'une de mes photos panoramiques a gagné (en novembre 2014) le premier prix du concours photo « PNA » (photographic Night Awards) organisé par le magazine Ciel et Espace ! Et le prix est justement un voyage au VLT au printemps 2015 ! C'est la photo ci-dessous :


Les geysers du Tatio dans toute leur splendeur sous la lumière de la Lune et la Voie Lactée !

Vers 5h30 point le jour et j'aperçois le phare de la planète Vénus à l'horizon, sous la Lune. Fatigué mais heureux, je rentre juste pour retrouver le groupe déjà levé en train de prendre le petit déj. Nous évoquons la rando de la journée : l'ascension du Cerro Soquete.

Sur cette image prise à l'aube, le Cerro Soquete se trouve à droite, on le reconnaît à son double sommet

Cette montagne, visible depuis le Tatio, culmine à 5450 m. Son sommet apparaît enneigé en raison des précipitations d'hier et il semble qu'un fine couche de neige soit tombée en haute altitude.

Départ en mini-bus à 8h30 pour nous amener au point de départ à 4600m d'altitude (je rappelle que le site géothermique du Tatio où nous dormons est déjà situé à 4300m)

Une fois sortis du minibus, la marche débute et traverse des terrains pierreux, puis sablonneux, pour enfin, vers 5000m rencontrer de la neige. La montée se fait tout doucement, histoire de ne pas s'essouffler trop vite. A 4810m, je fait une photo symbolique de l'écran de mon GPS car c'est l'altitude du Mont Blanc.

A 5000 m d'altitude, mon téléphone se met à capter le réseau téléphonique ! C'est vraiment étonnant le Chili : plus on monte et mieux on capte. Il parait qu'on capte très bien depuis le sommet du Licancabur et aussi depuis celui de l'Ojos del Salado (mais uniquement depuis le sommet car l'antenne est située du côté argentin et non du côté chilien). Revenons à l'ascension.


De belles images prises durant la montée, au moment où le Soleil fait son apparition

Vers 5200m, la pente s'accentue légèrement, donnant plus de difficulté aux marcheurs. A chaque fois que je fais un effort trop important ou un changement de rythme (accélération) je sens le pouls battre dans ma tête. Comme tout n'est pas plat et régulier et qu'il faut enjamber quelques gros rochers de temps en temps, je suis quand même contraint de faire des efforts importants à certains moments. Au fur et à mesure de la montée, un léger mal de tête s'insinue à l'arrière de mon crâne, pour progressivement s'amplifier avec l'altitude et redoubler avec l'effort. Le secret de la réussite en haute montagne réside dans l'effort qui doit être régulier et très lent : surtout s'essouffler le moins possible, limiter le plus possible les accélérations du cœur... pour éviter maux de têtes et étourdissements. Malgré un mal de tête de plus en plus présent, je parviens quand même au sommet d'où je prends quelques photos panoramiques du paysage et aussi des photos de ma mascotte : Mister Zor le lapin crétin ® le plus haut du Chili !



La lumière est vraiment belle pendant cette ascension. Nous faisons une pause vers 5000m d'altitude pour manger et boire un peu. Simon masque le soleil avec sa main pour tenter de déceler la planète Vénus à l'oeil nu dans le ciel bleu : en fait elle était très facile à voir et quasi tout le groupe a pu l'apercevoir




Des images prises par Simon qui faisait partie du groupe de tête. (C) Simon Fabre

En haut, on cherche un peu ses mots, on se rend compte qu'on commence à être diminué physiquement et intellectuellement. Tout n'est pas très clair, il faut assurer ses appuis et réfléchir à ses mouvements, surtout au sommet qui était en fait un genre de promontoire rocheux avec des à-pics sur trois côtés. Contents de l'avoir fait, nous nous félicitons mutuellement, le paysage là haut est magnifique, ça déclenche une petite larme tellement c'est beau ! Simon m'a dit qu'il a pleuré sur une partie du chemin car il était débordé par l'émotion. Moi même j'ai eu une pensée émue face à tant d'immensité.

 
Le sommet du Cerro Soquete est proche. La neige fraîche tombée la veille fond au soleil

 
Nous voici arrivés au sommet. Le mal de tête ne se voit pas sur les photos (sauf celle du milieu où l'on devine que ça va pas fort), et pourtant il est bien présent...



Au sommet nous faisons une pause bien méritée pour recouvrer nos forces. C'est l'occasion de faire un parorama 360° du paysage

Dans la descente, malgré le retour progressif de l'oxygène, mon mal de tête s'amplifie à cause des efforts déployés pour « freiner » dans les cailloux. Le retour se fait beaucoup plus vite que la montée. Je souffre certainment de la fatigue car je n'ai que 4h de sommeil au compteur. Et en montagne ça se sent quand on est fatigué : coup de barre, maux de tête...


A notre retour au Tatio, j'ai l'impression de pouvoir mieux respirer par rapport au sommet. Ainsi se déroule l'acclimatation. C'est un bon entraînement pour le Licancabur, que nous prévoyons de grimper dans deux jours. En fait, la haute montagne ça n'a rien de facile. L'un des membres du groupe, Pierre, notre doyen de 73 ans, a dû abandonner durant la montée à cause d'un problème de coeur. Manu, notre guide, l'a escorté jusqu'à la route et la accompagné à San Pedro puis Calama pour qu'il puisse subir un examen complet. Nous le retrouverons mardi midi à SPA, mais ça m'étonnerai qu'il puisse faire l'ascension du Licancabur...

Après le retour du Soquette, une bonne soupe revigorante nous attend ainsi que des boissons sucrées à volonté. Je prends un Doliprane pour faire passer la migraine et je me m'allonge au soleil pour récupérer.

Nous décidons ensuite d'aller nous baigner dans les geysers (enfin à côté, dans la piscine chaude :-) avec cette fois-ci du soleil. Hier, c'était nuageux et pluvieux. C'est cool d'avoir la piscine pour nous tout seuls (on y va à 6 ou 7 du groupe). En même temps ça permet de se laver. Je m'étais posé la question de l'hygiène avant le départ car c'est loin d'être évident de trouver des douches à ces altitudes. En tout cas mieux vaut un bon bain dans la piscine d'eau chaude qu'une séance de toilette à la lingette pour bébé !


Un lapin crétin qui va mal finir ! :-)


La "piscine" d'eau chaude du Tatio


Faut vraiment un (lapin) crêtin pour prendre un bain dans un geyser d'eau bouillante !?!


Cette bouche ne crache pas d'eau mais de la vapeur brûlante, avec force et insistance. Fais gaffe Philippe, c'est chôôô !


Les pierre noires délimitent le périmètre où l'opn a le droit de circuler sans danger autour des sources chaudes


Difficile de la lasser du paysage du Tatio !


Sous un mélange de soleil et de nuages, le paysage du Tatio montre toute sa splendeur. A droite, l'image montre le Cerro Soquete que nous avons gravi ce matin



Tiens ? Le lapin crêtin a trouvé un petit copain ? (photo de droite)

Après la baignade, nous continuons la journée par une petite balade de 7 à 8km sur le site du Tatio pour découvrir d'autres geysers plus lointains, que les touristes ne vont pas visiter. On croise des vigognes et apercevons des flamants roses.

Repas du soir et observation des étoiles le soir avec Simon. Orion est à l'envers, Sirius à droite d'Orion, les deux nuages de Magellan visibles plein Sud... Je fais quelques photos en pose avec l'aide de la mini monture équatoriale Ioptron que j'ai emportée dans mes bagages. Les copains hallucinent à chaque fois que je sors du matos photo ou astro de mon sac ! Ils comprennent pourquoi mes sacs sont si gros et si lourds. Par contre, les autres sont tous couchés à 20 heures, comme les poules ! Même Simon rechigne parfois à sortir pour voir les étoiles... Mais mais mais... Quoi comment !? Suis-je le seul ici à être intéressé par les astres, car à 4300m d'altitude on a un super ciel et il faut en profiter. A force d'insister, Simon sort quand même pendant 30 minutes pour me tenir compagnie pendant que je photographie les constellations. On en profite pour admirer quelques objets célestes aux jumelles 12x50 et pointer les constellations australes au laser pour tenter de les reconnaître. Pas facile pour certaines comme la grue ou le paon ! ;-)

Cette nuit : repos, j'ai déjà fait les photos du ciel ce matin. Je teste l'action d'un somnifère pris juste avant d'aller me coucher, et je dors d'une traite de 23h à 6h30. Cool, pas un seul réveil cette nuit à cause des ronflements (ou autres bruits caverneux) des voisins ou à cause de la porte qui s'ouvre. Chouette je me sens revigoré !!!

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