Je compulse depuis un moment les schémas et spécifications d'instruments anciens : des réfracteurs. Je n'arrivais pas à comprendre la transition achromat vers apochromat si chère à notre époque moderne. Mon propos est exclusivement sur le sujet de l'observation visuelle. Je suis également concernée par l'aspect photo mais j'ai ma solution perso avec un instrument Mak Newton donc.. les réflecteurs et catadioptres je laisse ça pour une autre recherche si j'ai besoin.   En bref, à force de tourner autour du pot à ne pas comprendre les raisons des réglages anciens tout en les trouvant particulièrement similaires et proposant des critères très efficaces par rapport à ce que j'utilise depuis que j'ai des informations sur la vision humaine, j'ai finalement craqué à aller chercher la Bible ... Pas eu besoin de tout mais @STF8LZOS6  m'a passé l'extrait qui change tout. On ne peut pas publier, c'est encore en vente...   Danjon et Couder sont nés à une époque à laquelle Zeiss pointait sont nez sur le marché des instruments et puis la grande guerre de 14-18 a mis l'Allemagne par terre et ce n'est ni Schott ni Zeiss qui faisait les instruments de pointe achetés par la plupart des professionnels de l'astronomie et des amateurs "fortunés". La frontière entre la science et le grand public était encore grande à cette époque. Au 19eme siècle : Merz et Repsold, allemand était grand constructeur et fondeurs de verre, il y a eu la société anglaise des frères Chance également, d'autres mais pas si nombreux (Bausch & Lomb : Rochester aux US <-> Eastman Kodak), Corning ... Il ne faut pas oublier les successeurs de Pierre-Louis Guinand : Mantois puis Parra-Mantois. On a un peu oublié que cette société française de la région parisienne, complètement ruinée après guerre de 1940-45 après le vol de son matériel, a produit les plus grandes lentilles brutes au monde : Nice, Meudon, Lick, Yerk.   Danjon et Couder se basent sur les matériaux Parra-Mantois pour écrire dans le livre Lunettes & Télescopes. Par bonheur, des informations précises sont données sur cette feuille : spécifications des verres D508 (crown) et D332 (flint)   Une première constatation : ce n'est pas la combinaison BK7 - F2 de Schott que Zeiss utilisait pour la lunette à tout faire d'entrée de gamme : la Zeiss E.   Deuxième point : il est énoncé un réglage à faire peur. Là, difficile. D&C propose un "standard" qui donne f=1m12 pour un achromat de 10cm à l'époque ou Zeiss sort la E110. Un peu de calcul et ça donne pour 11cm un ratio f/12.32 -> 1m35 C'est bien plus court que le 1m64 de la Zeiss, ça reste long quand même mais ça vaut le coup de regarder.   Je lis la page attentivement : il s'agit bien de faire coller les raies bleu et rouge comme d'habitude et ... de caler l'aberration sphérique sur la raie D (o O  ) : on fait plus ça maintenant. Je m'embrouille un peu et finallement 2 pages après ça explique les trois calages chromatiques (ouf, j'ai imaginé trop vite, et emmelé les crayons). Calage 555nm, 575nm et 580nm : c'est très lié au matériau, il faut regarder ça.   Bon en attendant, je me dis que le seul moyen fiable de l'époque de caler l'aberration sphérique c'est de la mesure au foucault, au Ronchi ou au masque de Hartmann. A l'époque, ce n'était pas simple de trouver une référence lumineuse stable et la lampe au sodium faisait bien l'affaire dans les labos. Bref, on calait avec ce qu'on trouvait de mieux pour servir d'étalon : 589nm.    Après un petit essai à 555nm, j'arrive pas à refaire le tableau parfaitement, mais au final je bricole un peu pour redresser les courbes pour me rapprocher des valeurs indiquées en rouge et sortir les spots de la 110 version D&C focus planétaire : le bleu est laissé large, à 4x le disque d'Airy, le rouge à 3x, le cyan déborde de ce que je fait habituellement au-delà du disque. Champ profond (pour >3mm de pupille), recherche du spot le plus petit (deuxième image) : on est à x2.4 le disque d'Airy. Ca me chiffonne de voir le rouge concentré comme ça A la suite dans le chapître, il explique que ce calage (555nm) c'est pour maximiser la luminosité pour l'oeil et minimiser le diamètre étoile, mais que ça donne une figure d'Airy avec du spectre secondaire (ben, ça je le crois).  Il écrit :   Donc, on laisse encore plus filer le bleu et même le vert pour que ce soit plus blanc "un peu orangé" ?   Je teste moi-même avec ma semi-apo (photo) dont je vire la lentille arrière tout simplement, c'est une lentille BK7-SF5 calée comme ça. J'avais juste oublié qu'elle ne bavait pas : confirmé sur un spot fluo de nuit.   Pourquoi ça marche sur l'oeil humain, et surtout pourquoi on peut systématiquement laisser le bleu plus dispersé ?   L'oeil est plus sensible au bleu, même de jour. L'énergie du photon 486nm est plus grande que celle du photon 656nm  (35%). Ah pourtant, on a moins de cônes S ou M que de cônes L... Ah oui moins, donc plus espacés. Je reprends le doc sur la perception : il faut deux cônes du même type pour la luminosité, ça marche par différence. 1 cône S (pic à 447,8nm, mais n'intervient pas directemenr sur la luminosité) pour 5 cônes M (541,3) pour 10 cônes L (568,6), et des bâtonnets à (507nm )mais encore moins... => forcément la luminosité bleue n'a pas besoin d'être aussi concentrée.   Le contraste / la luminosité ne se gère pas de la même façon que la gestion couleur. Vu que le cône S est responsable du rouge, je commence à estimer quelques soucis vu sa densité quand on observe une étoile ponctuelle. Bref, il y a quand même une différence entre le besoin de concentration du spot côté vert-bleu par rapport à l'orange-rouge. Autant en profiter.   Au final, Danjon et Couder nous apprenent plusieurs choses.   a) La combinaison Parra-Mantois est similaire au BK7-F2, dispersion 500um à f12.32 contre environ 560um à f14.9, Le RC PM serait de 3.81 sur la E et le BK7-F2 de 4.53 sur le modèle D&C. Les verres non ED, même pas special Kurz-Flint par exemple était au-dessus en qualité. *** correction dispersion verre Parra-Mantois 1,5% de différence *** b) Il nous enseigne pourquoi il y a une différence nette entre champ profond (luminosité prioritaire), aspect couleur agréable (Airy aspect le plus blanc) et optimisation planétaire (richesse des rayons jaunes et rouges) : Au final sur un achromat ancien avec ces verres : 555nm pour le meilleur rendement par rapport au diamètre => magnitude observable 565-575nm meilleur résidu coloré pour les observations des grandes surfaces (nébuleuses, lunaire, terrestre, planétaire) 580nm pour améliorer le piqué de la plage de couleurs les plus fréquentes et donc de tirer le grossissement.   c) du coup : pourquoi le f/D de 12.32 et sa formule ne se sont pas imposés ?   Zeiss a fabriqué ses lunettes en BK7-F2 et f/D=15, c'était plus élevé que ce que la dispersion un peu moins bonne du BK7 F2 nécessitait (12,21 aurait suffit). Mais Zeiss a fait un modèle d'objectif plus lent, avec un calage Steinheil qui ralentit encore la pente de vert à bleu et l'a calé à 550nm : compatible grand champ. W Rohr, l'indique : optimal à 550nm et j'ai vérifié quelque chose d'approchant 551nm. Bref, un vrai objectif agréable pour le résidu coloré, avec un petit plus planétaire sans être dédié, capable d'encaisser un x2.5D (ortho abbe 6mm livré avec sur la E110) C'est l'aspect bon à tout faire, pas trop cher pour les matériaux et de qualité excellente qui en a fait la référence.   Bon, une fois la page d'histoire tournée. Aujourd'hui on utilise des verres à faible dispersion pour corriger le chromatisme des instruments que l'on souhaite à f/D plus court, pour être plus facilement maniable. Voilà, on corrige bien la couleur, mais parfois, le navire de guerre utilisé pour traverser la rivière n'est pas capable de pêcher le petit poisson.   Ce n'est pas cité là mais quand je lis à plusieurs reprises des articles de Couder et ensuite Texereau http://atom.lylver.org/AstroSurf/PDF/Texereau/1952LAstr__66__413T.pdf cf page 414 bas et http://atom.lylver.org/AstroSurf/PDF/Texereau/1933AnOSt...3..113C.pdf cf page 114 §2 qui parlent de lambda/12 (strehl .978) pour les plus grands écarts de tautochronisme , on est loin des performances piqué central de certains apochromates qui montent difficilement à strehl .95   Certes, il faut parfois filtrer, sur les grands diamètres, c'est la solution de l'époque sinon on a de la bouillie inexploitable comme sur le réfracteur de Lick quand vous laissez un amateur regarder dedans et photographier sans demander à l'astronome guide de la visite nocturne.