Benj Poup

CROA / slalom entre Orion, la Licorne, les Gémeaux et le Cocher

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Le vent a cessé de souffler sur les hauteurs de Grand Fontaine, et l’atmosphère est calme. L’air est glacé et sec, et le ciel est d’une transparence rare. Sur l’horizon, les étoiles scintillent, mais sans affolement de leur part. Sirius domine tout son petit monde de son éclat, et on pourrait presque qualifier son scintillement de paisible. La lumière de la brillante étoile varie doucement, comme une balise côtière. L’absence de vent transforme ce qui aurait pu être une soirée difficile en une agréable parenthèse étoilée

Mon programme pour la soirée est essentiellement visuel : étoiles doubles, amas ouverts, nébuleuses… : J’ai emmené le C8 et quelques oculaires, mais pas d’alimentation pour la motorisation. Guy fera de même avec son 200/1000, tandis que Madjid passera une partie de la soirée à dompter un 300D capricieux. Cédric, arrivé avec un matériel « Tom Pouce » de premier choix (Televue de 60 sur mini-GP - ce qui laisse une place appréciable pour la thermos de chocolat chaud, très appréciable après minuit !) occupera également sa soirée à mettre le ciel en images.

Le tube tout juste sorti de son carton, et donc pas encore en température, je commence par quelques étoiles multiples, alors que la prudence et la turbulence auraient sans doute conseillé de commencer par des nébuleuses. Me voilà sur Sigma Orion, un système quadruple. Deux étoiles apparaissent, puis trois, même si la troisième n’apparaît que timidement Elle dessine un petit accent circonflexe avec les deux autres.

Toujours dans l’épée d’Orion, j’essaie de ne pas me laisser distraire par la célèbre nébuleuse, et grimpe sur NGC 1977, une nébuleuse qui baigne au milieu de 3 étoiles, et qui étend sa grande écharpe vers l’est. Lors de ma prochaine sortie hivernale, il faudra que je songe à pointer également NGC 1975, autre nébulosité visible juste à côté, mais, pour le coup, superbement ignorée.

Un peu plus au nord, et toujours dans l’épée d’Orion, NGC 1981, un large amas ouvert qui compte une poignée d’étoiles brillantes. Mais au C8, il se sent un peu à l’étroit dans le champ de l’oculaire. Il serait certainement beaucoup plus joli observé avec une focale plus courte.

Je repasse devant M 42, et m’arrête sur 44 Ori, autre système multiple, mais qui n’apparaîtra que comme une étoile double : la troisième composante, de magnitude 11, a pris des vacances, et ne montre pas le bout de son nez, quelque soit le grossissement.

Le temps n’est pas à la résolution des étoiles doubles ; impression confirmée avec le trapèze d’Orion. Les 4 étoiles dansent gentiment, mais m’empêchent de repérer la 5ème et la 6ème composante.
J’emprunte le 35mm de Madjid, et m’offre alors une plongée en champ large sur M 42. Enorme ! Elle occupe tout le champ de l’oculaire, et ses deux bras s’enroulent largement autour du trapèze. Deux volutes subtiles, à l’intérieur de la nébuleuse, apparaissent nettement. L’impression de profondeur n’échappe pas au regard !
Le trapèze éclaire la nébuleuse de l’intérieur, et révèle, par contre jour, les extensions qui la recouvrent. Je suis surpris d’observer, dans la petite patte nébuleuse qui manque presque de recouvrir le trapèze, une petite région plus sombre. On la voit très bien sur les photos, mais mon regard avait dû passer à côté. M 43 ne pose évidemment pas de problème.

Je continue ma route dans Orion, et file sur M 78, une nébuleuse qui m’a souvent donné du fil à retordre. Ma dernière observation de la nébuleuse date d’il y a deux ans, et à l’époque, je n’avais pu l’observer qu’à faible grossissement. Pour le coup, avec un matériel identique et une transparence de ciel fabuleuse, la chasse à la nébuleuse ne devrait pas poser de problèmes.
M 78 est immanquable : trois étoiles baignent dans la nébuleuse, sorte de goûte grisâtre un
peu aplatie. Le filtre Ultrablock permet de gagner en contraste, mais le bénéfice est bien maigre, puisque les étoiles deviennent pour le même coup à peu près invisibles. Je reste donc sur la vision « sans filtre ».

Je glisse ensuite sur NGC 2112, un amas ouvert situé tout près de M 78. Mais faute de savoir à quoi il ressemble, je passe probablement devant sans même le voir.

De son côté, Guy se promène dans Cassiopée, et s’arrête sur NGC 457, très à son aise dans le champ du 200/1000. Ma dernière observation de ce curieux amas date d’il y a deux petites semaines, mais avec un grossissement de 115x, il étouffait dans l’oculaire, le pauvre !

Je descend sur M 41, dans le Grand Chien : l’amas occupe tout le champ, et ses étoiles les plus brillantes scintillent, ballottés à leur tour par la turbulence. Au milieu du amas, l’étoile la plus brillante se détache nettement, porté par sa jolie couleur orangée.

Après ce petit survol d’Orion, mon itinéraire me conduit vers la constellation de la Licorne. Peu d’étoiles brillantes auxquelles accrocher la mire du Telrad, mais quelques habiles lignes tirées depuis Orion ou les Gémeaux devraient faire l’affaire. Je commence par pointer NGC 2264, le célèbre « sapin de noël », en espérant débusquer, au sommet du sapin, la non moins célèbre nébuleuse du cône. Première impression : le sapin est beaucoup plus joli en grand champ. Vu au 21mm, il est un peu à l’étroit - et il est bien connu que les plantes vertes ont besoin d’espace ! La nébuleuse, quant à elle, est a priori invisible. En sachant où regarder, on peut peut-être soupçonner sa présence autour de la poignée d’étoiles qui marque le sommet du sapin, mais … c’est subtil.

Je glisse de quelques degrés vers NGC 2261, la Variable de Hubble, nébuleuse que j'observe pour la première fois, soit dit en passant. A l'extrémité la plus brillante,de la nébuleuse, l'étoile responsable de ce joyeux ramdam, et dans son sillage, une autre étoile... Comme sur les photos !

Guy détourne un peu mon attention : son télescope est pointé, au grossissement maximum, vers M 76. Je l'imite, mais en choississant une vision plus large. Les deux lobes de la nébuleuse, séparés par une région sombre, nagent dans un magnifique champ d'étoile. En forcant un peu sur l'imagination et les souvenirs, il est même possible de deviner les deux "bras" qui entourent la nébuleuse. A condition, toutefois, d'être solidement convaincu qu'ils sont là. J'alterne les grossissements, et j'essaie les filtres : à 200x, c'est moche... Avec le filtre, ce n'est guère mieux. Le meilleur compromis "nébuleuse+étoiles" étant obtenu à 100x.

Madjid s'offre une petite pause aux jumelles : nous voilà face à M46 et M47, un passage obligé du ciel d'hiver. Les deux amas ouverts flottent dans le large champ des jumelles. M 46, à gauche, est un ensemble compact d'étoiles peu brillantes qui trouve, sur sa droite, le large paquet d'étoiles brillantes qu'est M 47. L'un sans l'autre, ils ne seraient certainement pas aussi beaux! Juste au-dessus de M 47, NGC 2423, un autre amas ouvert, discret mais immanquable. Tellement immanquable que je n'en trouve aucune trace dans mes notes d'observations passées! Un oubli, peut-être ?

Je rends une rapide visite rendue à l'étoile double Epsilon Monocerotis, facile à dédoubler, et dont la composante la plus brillante semble plus chaude que sa compagne. Cette visite ne suscite pas un grand enthousiasme, et nous filons vers NGC 2244, l'amas ouvert situé au coeur de la nébuleuse de la Rosette. L'ensemble est trop large pour le C8, et c'est encore une fois aux jumelles que nous entreprenons son exploration, à la recherche de quelques traces de ladite nébuleuse. Mais rien de bien probant, là encore.

Le nez rivé sur mes cartes, je pars à la recherche d'autres objets à découvrir, quand un bolide passe au-dessus de notre tête. Et évidemment, je n'ai rien vu...

Tant pis, continuons !

Me voilà maintenant sur NGC 2301, un amas ouvert des plus étranges, . En gros, pour ceux qui ne le connaissent pas encore, NGC 2301 apparait à l'oculaire comme une barre verticale d'étoile, qui dessine une sorte de symbole d'intégrale, du milieu de laquelle part, à 90°, une barre horizontale moitié plus courte, barre qui se termine par une sorte de bec... L'ensemble compte une cinquantaine d'étoiles, et occupe tout le champ du 35mm.

NGC 2301 donnera lieu aux descriptions les plus surréalistes de la soirée, qui pourraient se traduire ainsi:

Guy :"On dirait un cygne... sans la queue, mais avec un bec de canard!"
Moi :" Ouiii, tu as raison, c'est Donald!"

A quelques degrés de là, je glisse sur NGC 2324, un autre amas ouvert, plus compact et aux contours irréguliers et aux étoiles beaucoup plus faibles - une quarantaine d'étoiles visibles en vision décalée. Joli.

Guy, à la recherche de la tête de cheval, fait face à un impair. Il tombe finalement sur NGC 2024, la "flame nebula", située juste à côté, à proximité d'Alnitak, la brillante étoile de l'extrémité est de la ceinture d'Orion. Noyée dans la lumière d'Alnitak, la nébuleuse n'a rien d'évident. Mais l'épaisse bande sombre qui coupe la nébuleuse ressort par contraste sur le fond du ciel. L'obscurité nichée entre les étoiles sert alors de repère, et la flamme devient beaucoup plus évidente. Je ne manquerai pas de lui rendre visite à nouveau, et cette fois, le crayon à la main. Voilà qui clôt, au moins pour cette soirée, le chapitre "Orion"

Je file maintenant vers les Gémeaux. Au menu, NGC 2266, un amas ouvert. Il dessine grossièrement un triangle, avec l'un des bords limité par une série d'étoiles plus brillantes, la plus lumineuse étant située à la pointe.

Je continue en direction de M35 et NGC 2158, deux amas ouvert. L'ensemble ne tient pas dans le champ du 35mm - d'ailleurs, M35, à lui tout seul, doit occuper toute la largeur de champ - et je me retrouve donc à devoir placer le petit NGC 2158 sur un bord de champ, et M35 (dans sa partie non-amputée) de l'autre côté. Le contraste de taille est saisissant ! Le champ est superbe !

Sirius continue de nous envoyer ses rayons bleutés, par bouffées. Tout est calme. Le chocolat chaud de Cédric est le bienvenu (merci Cédric !)

Madjid, de son côté, se réchauffe devant l'écran de on portable, et opte pour une bière fraîche. Vu la température, sûr qu'elle restera fraîche !


Madjid, sous les étoiles ...

En route vers le Cocher, j'accompagne Guy entre les cornes du Taureau, et m'arrête sur M1, la nébuleuse du crabe. Nous essayons différentes combinaisons de grossissements et de filtration, pour finalement ne retenir que la combinaison qui avait fait recette sur M76, à savoir le 21mm, sans filtre, qui offre le meilleur compromis entre contraste et champ de vision.

A proximité du Cocher, une petite tentative vers NGC 1664, le "amas de Kanterbrau". Mais il ne fera pas recette ce soir.

14 Aur, étoile double plutôt facile, me sert ensuite de point de départ à une petit immersion dans les amas du Cocher. Car jusque-là, j'avais toujours fureté un peu au hasard au milieu des amas, sans trop savoir lequel je regardais. Cette fois, je mets un peu d’ordre dans mon itinéraire. Après 14 Aur, le premier objet sur ma liste est NGC 1893, amas ouvert assez large, et constitué d’étoiles brillantes.


Je file vers M36, et croise sur sa route NGC 1931, un amas ouvert entouré d’une nébulosité qui ne fait ici aucun doute. L’impression qui se dégage est celle d’une étoile entourée d’un large bord flou. Puis dans le même mouvement en AD, je tombe sur M36, objet bien connu, fort joli, mais un cran en dessous de M 37 et M 38 - point de vue qui n’engage que moi, bien évidemment.

Le duo M38 / NGC 1907 se révèle beaucoup plus intéressant, un peu à l’image de M35 et NGC 2158.

NGC 1907 est un tout petit amas étoiles très compact, aux étoiles très faciles à résoudre. Le petit amas contraste avec la taille fabuleuse de M 38, qui occuperait volontiers le champ de l’oculaire si on ne lui disait pas de laisser un peu de place aux autres !

Il est deux heures du matin, et si je m’écoutais, je m’attaquerais aux galaxies du Lion, qui commence à se lever. Mais la raison l’emporte - demain, lever de bonne heure… - et je range, à regret, le matériel.

Reste l’agréable impression d’une soirée bien remplie, pendant laquelle j’ai pu suivre un programme d’une rare densité, et ce, sans trop d’embûches. Le mois de janvier se termine plutôt bien !

Benjamin

Vous avez tenu jusque-là ?

Pour votre récompense, vous pourrez trouver les cartes de champ qui m'ont servi à établir mon itinéraire (env. 300 Ko au format pdf)

Orion , le Cocher , la Licorne et les Gémeaux

[Ce message a été modifié par Benj Poup (Édité le 08-02-2006).]

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On s'y croirait!!!

A bientôt sous les étoiles de l'Aisne!

Madjid


PS : Benjamin, tu n'étais pas obligé de parler de la bière ;-)

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