Benj Poup

CROA d'hiver, épisode 2 - Le ciel de Beine Nauroy, mon télescope, et moi ...

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Deux jours après une bruyante sortie étoilée, relatée ici (http://bpoupard.club.fr/Dotclear/index.php?2008/02/13/19-fevrier-sous-les-etoiles-episode-1), me revoilà à nouveau sur les terres de l'observatoire de Beine-Nauroy. Ce samedi soir, le ciel est dégagé, et l'observatoire fait le plein. J'installe tranquillement le C8, mes jumelles, mon oculaire de 40mm et mes petites cartes. Histoire de conjurer le mauvais sort, et faire oublier une soirée passée un peu en touriste quelques semaines plus tôt, qui avait occasionné, au final, plus de frustrations que de satisfactions. Cette fois, je m'apprête à suivre un itinéraire qui doit me conduire du côté du Lièvre, du Grand Chien, du Cocher, de la Licorne... Itinéraire inscrit dans mes 5 petites cartes, et dans lequel on trouve pêle-même, des étoiles doubles et des amas ouverts, pour l'essentiel, mais aussi quelques nébuleuses.

Ma première cible, dans le Lièvre, est l'étoile Kappa, située au-dessus de nu Lep, étoile qui, chez moi, représente le museau. Kappa, étoile brillante, représente l'une des deux oreilles de l'animal, et son repérage ne pose aucune difficulté particulière aux jumelles. Elle est annoncée comme double, mais le C8 n'est pas encore en température, et les images qu'il livre sont encore troubles. De fait, l'étoile est impossible à dédoubler. N'ayant pas de description précise de l'étoile, j'ignore si le compagnon recherché est brillant ou non, s'il est proche de l'étoile principale... Bref, je n'arrive tout simplement pas à la dédoubler...

Je file vers H3750, autre étoile double du Lièvre, située à côté de Beta Lep. Son repérage aux jumelles ne pose là encore pas de difficultés. Je commence d'ailleurs à rôder un système de pointage qui fera merveille pendant toute la soirée : mes cartes me permettent de situer les étoiles jusqu'à la magnitude 8, bien au-delà de ce qui est visible à l'oeil nu, mais tout à fait accessibles aux jumelles. Je chemine ensuite dans le champ d'étoiles aux jumelles, et dans bon nombre de cas, je parviens à retrouver les objets. Il est d'ailleurs étonnant de découvrir combien d'objets du ciel profond sont en réalité accessibles avec une simple paire de jumelles ! Reste ensuite cette petite gymnastique mentale, qui consiste à transposer le champ observé aux jumelles dans celui – inversé et plus restreint – que fournit l'oculaire de 40mm. Il me faudra quelques objets pour prendre mes marques, mais la méthode s'avérera par la suite d'une grande efficacité.

H3750 est ainsi devant moi, mais le problème reste le même que pour Kappa : je ne parviens pas à la dédoubler. Deux objets, et déjà deux échecs...

Je choisis, pour poursuivre, une cible facile à repérer et à séparer : l'étoile Gamma du Lièvre. A 100x, un boulevard sépare deux étoiles très brillantes. La plus brillante paraît jaune-orange, et sa compagne plus rouge. Dans le doute, je cherche un troisième larron entre les deux étoiles. Compagnon imaginaire ? Pas sûr. J'en soupçonne la présence plus près de l'étoile la plus brillante, soupçon qu'il faudra confirmer plus tard sur des cartes plus précises.

Un autre objet facile à repérer dans le même secteur : l'amas globulaire M 79. En fait, pas si facile à repérer, car il est déjà très bas sur l'horizon. Aux jumelles, il est à la limite de la visibilité; à 50x, au C8, il est nettement visible comme une tache floue. En vision décalée, à 100x, on devine deux ou trois étoiles qui dominent un noyau assez condensé et brillant.

Je remonte ensuite vers NGC 2017, qui n'est ni un amas, ni une galaxie, ni une nébuleuse, mais une étoile multiple – catégorie d'objet plutôt rare dans le catalogue NGC. Les 4 étoiles sont brillantes et largement séparées. S'agit-il d'une étoile multiple ou d'une simple (et faible) concentration d'étoiles ? Un petit oeil dans ma littérature astronomique m'en dira peut-être plus...

En promenant mes jumelles du côté de M 46 et M 47, je retrouve sur ma route NGC 2301, le fameux « cygne à bec de canard » qui avait fait le bonheur d'une soirée faste et lointaine. Aux jumelles, il est facilement visible à côté de trois étoiles très brillantes qui me servent ensuite de repère pour les retrouver au télescope à 50X. L'amas occupe la moitié du champ, et compte une soixantaine d'étoiles.

Je remonte vers les Gémeaux, et m'arrête sur M 35. Typiquement le genre d'objet céleste qui justifie à lui seul l'achat de mon 40mm. On retrouve non seulement le monstrueux amas d'étoiles, mais également, de l'autre côté du champ, son petit voisin, NGC 2158. M 35 pèse facilement ses 80 à 100 étoiles, tandis que NGC 2158 est plus difficile à résoudre. Une petite étoile brillante domine l'amas, et en décalé, on arrive tout juste à compter deux ou trois étoiles. Ces deux amas, baignés dans un champ très riche en étoiles, forment un superbe ensemble; une vision presque magique !

Je glisse ensuite sur NGC 2129, à deux pas de M 35. Pour le coup, les étoiles sont faciles à compter, et c'est à se demander si l'on peut parler d'amas ouvert. Je compte 3 étoiles brillantes qui dominent un ensemble d'une douzaine d'étoiles, le tout formant un amas large et lâche, sans condensation, et finalement sans saveur. Je passe mon chemin.

Me voilà maintenant sur la nébuleuse du Crabe, que j'observe à 50X, dans un joli champ étoilé. On voit une simple tache floue, sans détail visible, que ce soit en vision directe ou décalée. Je m'offre un deuxième regard à 100X. Le ciel paraît plus sombre, et la tache floue devient une tache floue ... allongée. Doubler le grossissement me permet de doubler les qualificatifs!

Voilà une heure que j'observe le ciel, et je me rends compte que l'air est extrêmement sec. Pas la moindre goutte d'humidité sur la lame de fermeture, ni sur le Telrad ! Le froid en oublie même d'être mordant.

Je bataille un petit peu avec ma cible suivante, mais cette bataille, au coeur de la constellation du Cocher, valait la peine d'être menée : 26 Aur est une très jolie étoile double ! Deux composantes assez serrées, avec un fort écart de magnitude. Elle est séparée à 50X. L'étoile la plus brillante serait blanche, et son compagnon paraît plutôt jaune-orangé. Je suis en tous cas ravi de cette découverte !

Je poursuis avec les étoiles doubles, et m'arrête sur Theta Aur. L'étoile est très brillante et son pointage ne pose aucun problème. En revanche, sa luminosité complique la tache. J'arrive à soupçonner la présence d'une étoile perdue dans sa clarté, mais celle-ci n'est visible au début qu'en décalé. En sachant où poser le regard, elle finit par apparaître en vision directe. La séparation angulaire entre les deux étoiles – 54 " - permettrait de les repérer facilement, mais l'écart de magnitude important – 2,7 et 10,7! - complique considérablement l'exercice. Un autre compagnon, de mag. 7,2 est normalement visible à moins de 4", mais je suis passé à côté.

M 37 est également un moment merveilleux au 40mm. Comme une vision de l'espace à travers le hublot d'un vaisseau en orbite. Les étoiles de M 37 sont plus brillantes, mais moins serrées que celles de M 35. Par sa densité d'étoiles, M 37 fait davantage penser à M 46; Une étoile brillante domine l'amas, qui doit compter facilement une centaine d'étoiles.

Les étoiles de M 36 sont plus brillantes, mais moitié moins nombreuses que celles de M 37. l'ensemble forme un amas d'aspect moins concentré. Le coeur de l'amas est marqué par une petite dizaine d'étoiles très brillantes.

M 38 me refait le coup de M 35, observé plus tôt. A 50X, je découvre, en dessous de M 38, un petit amas; nom de code NGC 1907. M 38 est un intermédiaire entre M 36 et M 38 en nombre d'étoiles. Les plus brillantes semblent tracer une grande croix qui barre l'amas. Une petite dizaine d'étoiles se détachent en vision décalée au télescope, mais elles sont invisibles aux jumelles. Dans le même secteur, je jette un oeil rapide sur NGC 1893, un autre amas ouvert – pour sa part invisible aux jumelles.

Je quitte le Cocher pour redescendre sur le Grand Chien. Je m'arrête sur nu1 Cma, une jolie double avec une teinte bleutée pour la plus faible, et jaune pour la plus brillante. Je file ensuite sur Pi Cma, une étoile multiple. A 100X, elle apparaît sous la forme d'un triangle isocèle, qu'une quatrième étoile, plus faible, accompagne.

Depuis Sirius, je me livre à un petit jeu de saute-étoiles, qui me conduit sur NGC 2360, bien visible aux jumelles. A 50X, au télescope, l'amas est superbe ! Il compte 30 à 40 étoiles peu lumineuses, qui forment un ensemble assez homogène. Deux étoiles plus brillantes, sur le bord, lui donnent une forme vaguement triangulaire. Voilà donc une heureuse surprise : cet objet jusqu'alors inconnu, va trouver naturellement sa place dans la liste d'objets que je retournerai voir dans le futur.

Au fil de mon voyage, je vagabonde entre les étoiles et tombe sur un objet mystérieux ... En fait, il n'a de mystérieux que le fait d'être hors de mes cartes de ce soir. Cet amas, situé dans le prolongement de Sirius et du museau du Grand Chien, est facilement visible aux jumelles. Au télescope, il présente des bords bien délimités par des étoiles plus brillantes, et on peut ainsi compter une quarantaine d'étoiles. Après un rapide coup d'oeil sur mes cartes, de retour à la maison, il se trouve que ce mystérieux amas n'est autre que ... M 50, un objet qui fait souvent partie de mes itinéraires. Comment ne l'avais-je pas reconnu ?

Mon parcours se termine sur l'entrée suivante du catalogue Messier, située à l'opposé dans le ciel : la célèbre galaxie des Chiens de Chasse. Les deux noyaux sont bien visibles, et on devine le tracé des bras spiraux. M 51 pourrait marquer le début d'un itinéraire galactique – le Lion commençant également à se lever. Mais cela me conduirait au-delà du raisonnable, et je décide de me garder ce pan entier du ciel pour d'autres soirées.

Benjamin Poupard - Le Voyageur immobile

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CROA sympathique et vivant ...

J'aime aussi beaucoup les amas ouverts et les étoiles doubles

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