Benj Poup

CROArgh - Les dégonflés de la Machine Pneumatique

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Ces deux derniers mois de jeûne astronomique laissent quelques traces, si l'on en croit le récit qui va suivre. Des habitudes perdues, des illusions – bientôt perdues, elles aussi – voilà le résumé peu glorieux de l'une des rares soirées de ciel dégagé, mais pas forcément étoilé, dont Bruno David et moi-même avons été les participants.

Disons plutôt, les victimes.

Tout avait plutôt bien démarré, avec, comme il se doit, un joli ciel bleu. Celui-ci accompagnait les derniers rayons du Soleil, et annonçait une belle nuit. Un regard de l'autre côté du ciel, là où se trouvait la Lune gibbeuse au même moment, aurait pourtant dû nous inciter à la méfiance. Mais l'astronome affamé d'étoiles baisse parfois sa garde...

Bruno passe me prendre, son astromobile débordant de matériel. C'est jour de fête, le volumineux 250mm est de sortie ! Du coup, je décide de voyager léger : une simple paire de jumelles, une équatoriale-photographique que je dois tester, un appareil-photo et un atlas seront mes seuls accessoires.

Au moment d'emprunter les chemins de terre près de Merfy, un peu au nord de Reims, ni l'un ni l'autre ne songeons au programme d'observation que nous avons négligé de monter. Pas grave, cette négligeance coupable saura nous revenir au visage en temps utiles.

Bruno installe le 250mm et les 10kg de contrepoids sur sa frêle monture EQ3 – qu'il me semble avoir entendu gémir, si si ! - pendant que j'improvise, tant bien que mal, une pseudo-mise en station avec la platine-photo. Sachant que je ne dispose pas de niveau à bulle, ni de viseur polaire, je me contente d'aligner à peu près l'axe du moteur sur la polaire, en me fiant au laser vert fixé à la va-que-j'te le long de l'axe. Du travail d'orfèvre...

Le Lion est déjà haut dans le ciel, un peu noyé dans les lumières de la Lune. Orion se couche, et nous rappelle que l'hiver est terminé... astronomiquement parlant. D'ailleurs, de l'autre côté du ciel, Véga pointe le bout de son nez.

Notre premier regard, ce soir, est pour la Lune. Gibbeuse, et donc très très brillante. Du côté « ombre », nous repérons une petite étoile qui se rapproche du limbe, et dont l'occultation est probablement imminente. Faute d'avoir consulté mes éphémérides, j'ignore quand devra avoir lieu cette occultation. Aux aguets, je me débats quelques instants avec les axes de la monture, pour recentrer au mieux la Lune. Mais celle-ci glisse hors du champ ! Je desserre et resserre les freins, donne un coup en AD, pour récupérer la Lune et la recentrer, et là, le temps de faire la manip', je réalise avec épouvante que mon étoile a déjà disparu... Et merde !

Pour nous remettre de ce cuisant échec, nous nous lançons dans un inventaire des étoiles et des constellations visibles sur l'horizon sud. Nous faisons ainsi connaissance avec Alphard, l'étoile la plus brillante de l'Hydre femelle, et réalisons que la Machine Pneumatique passe au même moment quasiment au méridien! Mais soyons honnête, nous n'en verrons pas la moindre étoile.

Je profite de l'occasion pour tester un atlas récemment récupéré sur le web, que j'avais pris soin de tirer en format A3, et que j'avais plastifié. Les étoiles visibles sur les cartes montent jusqu'à la magnitude 9, ce qui correspond à la limite de l'observable avec une paire de jumelles de 50mm. Je le vérifie en tentant le pointage de M 51, située très haute au-dessus de notre tête. Les étoiles visibles sur la carte tombent naturellement dans le champ de mes jumelles. Et je suppose quà la faveur d'une nuit sans Lune, il sera possible de repérer toutes les étoiles de l'atlas. Mais la Lune est belle et bien présente, et son éclat nous empêche pour le moment de repérer M 51. Autant dire que l'aventure en ciel profond s'annonce délicate.

Dans le même temps, j'affine comme je peux la mise en station de l'équatoriale-photo, et tente quelques poses autour du Cocher, qui décline sur l'horizon ouest

Notre attirail technologique choisit cet instant précis pour nous lacher : les piles de ma lampe frontale rendent l'âme, les batteries de mon boitier-photo sont vides, et l'intervallomètre de Bruno a lui aussi décidé de prendre des vacances.

Désarmés, et faute de combattants, nous nous rabattons sur Mars et Saturne, mais le coeur n'y est pas vraiment. Il faut dire que le petit vent froid qui secoue le tube et s'insinue dans nos couches de vêtements n'arrange rien à l'affaire.

Du coup, nous levons le camp, avec pour seule consolation la perspective de nuit plus clémentes ... au cours desquelles nous partirons certainement à l'assaut de la machine pneumatique !

Benjamin Poupard - Le Voyageur immobile

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Bravo pour le CROA, dommage qu'il y avait la Lune et quelques petits désagréments!

Personellement, c'est rare que je prépare mes observations... D'abord un coup d'oeil sur le ciel, puis je choisi une constellation que je vais arpenter durant la nuit et je regarde sur le terrain les éphémérides!

A+
Paul

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Salut Benjamin

Hé bien, vous avez joué de malchance avec vos alims!

Pour le reste, une soirée préparée est à moitié réussie.

Et quand la Lune est grosse, il faut se cantonner à l'observer, à faire des planètes ou étoiles doubles pas trop faibles, éventuellement quelques nébuleuses planétaires à forte brillance surfacique et à l'opposé de la Lune sur la voûte étoilée.

En ces périodes de Lune gibbeuse, tout ciel-profondiste que je suis, j'apprécie de dessiner cratères et chaînes montagneuses de notre satellite. Ca change un peu.

Par contre, Mars est trop petite et Saturne pas assez changeante pour plusieurs soirées rapprochées.

Et la turbulence vers Paris n'a pas été terrible pendant les éclaircies de cette semaine. Etait-ce mieux vers Reims?

Xavier

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Oui, la sagesse rappelle que Lune gibbeuse rime avec ... je cherche une rime en "euse" qui exclut de fait l'observation du ciel profond.

Mais comme je disais, nous étions affamés!

Normalement, dans de telles circonstances, j'aurais préparé un itinéraire à base d'étoiles doubles, mais j'avoue avoir été pris au dépourvu.

Côté turbu, on ne peut pas dire que l'atmosphère était ce qui se faisait de plus calme : ça soufflait au sol, et ça soufflait également en l'air. Les images de la Lune et de Saturne ne donnaient pas spécialement envie de se taper sur les cuisses - sauf peut-être pour se réchauffer.

Benjamin

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Merci pour la narration de ce semi-échec.
Les soirées ratées sont en effet aussi instructives pour les autres...
Ceci dit, pour un astronome amateur, être près de Merfy ça ne s'invente pas!

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