Ulysse

Ciel profond et pupille de sortie

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Je vous propose une expérience étonnante, très simple à réaliser, mais très instructive sur le comportement de l’œil par faible lumière. Il vous suffit pour cela d’une paire de jumelles (peu importe le modèle) de diaphragmes pour les objectifs, et d’un peu de temps libre la nuit. Un ciel clair n’est même pas nécessaire.

Le but de la manip consiste à diaphragmer fortement un objectif, par exemple à la moitié de son diamètre, et à laisser l’autre à pleine ouverture. Pointez ensuite un objet faiblement lumineux (un arbre, une maison, le fond du ciel si vous voulez) et essayez avec le même œil d’estimer la différence de brillance de l’image dans les deux oculaires. A combien arrivez-vous ? Ce n’est pas facile à estimer, mais moi je dirais autour de 30%. Pourtant il y a 4 fois moins de lumière qui rentre dans l’objectif diaphragmé, et donc dans l’œil ! La raison en est que l’œil n’a pas une réponse linéaire à la lumière, mais plutôt logarithmique.

Encore plus fort : observez maintenant avec les deux yeux, toujours en laissant un seul diaphragme d’objectif. La vision est un peu inconfortable, on sent bien qu’une des deux images est prépondérante ; il y a quelque chose de bancal. Mais si vous persistez à observer ainsi, cette gêne va finir par s’affaiblir, jusqu’à disparaître complètement au bout d’un certain temps ( 30 secondes, 1 minute ?). A partir de ce moment, vous oubliez complètement qu’un œil reçoit 4 fois moins de lumière que l’autre. Ce n’est pas une illusion : il suffit de fermer alternativement un œil puis l’autre pour constater que la brillance de l’image est identique des deux côtés. La seule différence perceptible est le manque de netteté d’une image par rapport à l’autre. Cela signifie tout simplement que l’œil s’est adapté à des conditions de lumière défavorables.

Personnellement, j’en tire deux conclusions :
Pour les jumelles, on dit souvent par exemple que des 10x50 collectent 56% de lumière en plus que des 10x40, en se basant sur le rapport des surfaces d’objectifs. Une telle affirmation est vide de sens, puisque nos yeux ne sont pas sensibles directement à cette différence de brillance. En réalité l’écart de performance de ces deux jumelles sur le ciel doit être à la limite du décelable. (à qualité identique bien sûr, mais ceci est une autre histoire...)

Pour les autres instruments, le diamètre a toute son importance car on peut adapter le grossissement en conséquence. Mais justement il ne faut pas hésiter à grossir beaucoup pour le ciel profond, puisque l’œil a la faculté de s’adapter aux très faibles brillances. La seule condition à respecter est d’observer suffisamment longtemps en continu pour permettre à cette adaptation de se réaliser complètement.
Qu’en pensez-vous ?

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Ulysse,

Ce que tu constates c'est simplement le fait que ta pupille se dilate ou se contracte en fonction de la quantité de lumière qu'elle reçoit. L'oeil a un diaphragme automatique.

Le seul probmème c'est que ce diaphragme n'est pas optimisé pour la très faible lumière. Un félin est mieux équipé car son oeil fonctionne littéralement en réflécteur.

Dans le deuxième exemple que tu cites, la luminosité perçue est la même parce que ta pupille est plus dilatée du côté de l'objectif diaphragmé que tu côté non diaphragmé. Il y a donc compensation. Mais tu te rends bien compte que la pupille ne peut se dilater à l'infini. En observation du ciel profond, elle est toujours dilatée au maximum à mon avis vu la très faible luminosité. Donc, la seule façon d'avoir plus de lumière c'est le diamètre de l'objectif.

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scc, ta réponse m'amène à fournir quelques précisions sur les conditions de cette expérience, qui manquaient visiblement sur mon premier message.

J'ai fait ces observations en pleine nuit, à la fois sur le fond du ciel et sur le paysage environnant, qui n'était éclairé par rien d'autre que la faible lumière de la voûte celeste, sur un site éloigné des lumières parasites. Ces sujets étant très peu lumineux, je sais que mes pupilles étaient dilatées au maximum, soit 6,5 mm environ.
D'autre part mes jumelles étaient des 10x40, ce qui donnait une pupille de sortie de 4 mm pour le côté non diaphragmé, et de 2 mm pour le côté diaphragmé. Donc dans tous les cas la brillance de l'image était limitée par l'instrument, et non par mes pupilles. Que mes pupilles fassent 4, 5 ou 8 mm ne changerait d'ailleurs rien au résultat : dans un oeil le faisceau entrant fait 2 mm de diamètre, dans l'autre 4 mm, ce qui fait bien 4 fois plus de lumière.
Ben oui, je sais, c'est étonnant...

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Effectivement, ça méritait d'être précisé!

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Ulysse, je crois que tu confonds la capacité de notre cerveau à niveler les images fournies par les deux yeux pour minimiser la gêne, avec l'aptitude à apprecier des intensités de lumière différentes. Depuis que j'ai des jumelles de 40, je trouve mes 32 bien fades.

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Ca se pourrait Phil.

Un des problèmes de la mise au point visuelle en astrophoto c'est précisément l'adaptation de l'oeil pour compenser un léger défaut de mise au point. D'où la nécessité pour des longues focales d'utiliser des méthodes genre foucaultage.

[Ce message a été modifié par scc (Édité le 15-11-2003).]

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Tes jumelles de 40 et de 32 mm ont-elles le même grossissement? Et qu'appelles-tu fades : des images plus sombres, ou des objets moins riches en détails ?

Oeil ou cerveau : difficle à dire en réalité, les deux organes travaillant de concert pour "fabriquer" les images. Mais faut-il pour autant rejeter cette hypothèse d'une adaptation à une plus faible lumière ? J'ai constaté à maintes reprises sur mes 10x40 que toute la richesse de l'image ne se dévoile qu'après 4 ou 5 secondes. Ceci est particulièrement vrai sur la Voie Lactée. Au premier coup d'oeil, je me dis "Ah, c'est pas mal!". Après quelques secondes d'observation, c'est un véritable tapis d'étoiles qui apparaît, et là je dis "Ouaaaahhh! C'est géant!". Dans la mesure où je vois plus de choses au bout d'un certain temps, je pense qu'il y a plus qu'un simple "ajustement" qui serait fait par le cerveau.

Ensuite, si c'était purement cérébral, il me semble que l'adaptation serait plus rapide, quasiment immédiate, et pas de plusieurs secondes.

J'observe maintenant avec des jumelles ayant une pupille de 2,7 mm, dont j'ai déja parlé. Je constate la même chose, mais le phénomène est beaucoup plus lent, donc moins remarquable. Cependant le premier coup d'oeil est presque décevant : le ciel est bien noir, mais les étoiles assez peu nombreuses. Mais si j'attends assez longtemps, d'une manière indéfinissable et sans qu'aucun changement flagrant n'apparaisse, l'image devient jolie, assez riche en étoiles, et le fond du ciel semble avoir la même luminosité qu'avec des pupilles de 4 mm.

Tout cela me fait penser à ces journées ensoleillées, quand on rentre dans un pièce sombre après avoir été dehors : au début tout est est bien noir, on ne voit pas grand chose, mais au bout d'un moment quand la vue s'est adaptée on voit bien que la pièce est parfaitement éclairée.
Je dis que dans une certaine mesure, un phénomène similaire peut se produire dans des environnements très sombres.

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...Euh...je vois pas trop où tu veux en venir, là .
Quelle tête tu aurais fait si Taka t'avait livré des 22X50, en te disant "vous verrez pas la différence avec les 60 " ?

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Bingo, Phil ! Tu as tout compris !
Je pense effectivement que les performances de ces jumelles en ciel profond sont dues essentiellement à leur grossissement élevé. Et j’aurais fait à peu près la même tête avec des 22x50, c’est à dire celle-là :

Une règle fondamentale en astronomie est que la performance des instruments est déterminée par le diamètre de leur objectif. C’est vrai dans la mesure où on a accès à toute une gamme de grossissements, et qu’on suppose que pour chaque objet et pour chaque instrument on peut toujours choisir un voire plusieurs grossissements qui vont permettre d’exploiter tout le potentiel de l’optique. Mais pour les jumelles, il n’en va pas de même, du coup il faut étudier conjointement l’effet du diamètre et celui du grossissement. Et à grossissement fixé, l’effet du diamètre est finalement assez limité.

Je ne suis pas le seul à le penser. Connais-tu cette page par exemple : http://www.weatherman.com/binadler.htm
J’aime beaucoup ce petit texte, qui délivre de bien précieux conseils. L’auteur dit par exemple qu’il y a très peu de différences entre des Canon 15x45 et des Optolyth 15x63, deux modèles qui sont de qualité optique équivalente.

Pour ce qui est de l’expérience que j’évoquais, je revoie un peu ma copie. Tu as sûrement raison, ça doit venir du cerveau, qui fait du super boulot ! Cette expérience reste intéressante, mais elle montre autre chose que ce que je pensais. Je reste cependant persuadé qu’il faut savoir patienter un moment avant de pouvoir prendre toute la mesure d’une image obtenue avec une petite pupille de sortie.

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Oui , j'avais déjà lu cet article de Alan Adler . Je ne crois pas qu'il faille le prendre au pied de la lettre. L'idée de Adler ( à laquelle j'adhère totalement) c'est que le grossissement est un facteur important dans la visibilité des objets. J'ai quand même du mal à imaginer que des 63 ne montrent pas plus que des 45 ! Faut pas pousser !
Si le grossissement compte beaucoup, un peu de diamètre ça fait pas de mal non plus. Et puis ya intérêt parce que mes 16X70 vont un jour se retrouver face à une certaine paire de 15X50 ( ) et j'ai pas envie d'être ridicule, na !

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Je continue à m’amuser tout seul avec ces histoires du pupille de sortie, alors voici la suite.
J’ai fait un essai la nuit avec des lunettes de soleil , ce qui m’a permis d’y voir plus clair ( ). Lorsque je chausse ces lunettes, ou lorsque je me mets à observer avec une petite pupille de sortie, la première chose que je remarque est l’assombrissement de l’image par rapport à la situation antérieure. Tant que mon cerveau garde le souvenir de ces images relativement lumineuses, ce que j’observe ma paraît bien terne, et sans grand intérêt. Mais au bout d’un moment, ce souvenir s’estompe, et comme mon cerveau n’a alors plus d’autre référence que l’image actuelle, celle-ci paraît plus lumineuse qu’avant, plus consistante, et donc plus intéressante. Ce que je pensais être un phénomène physiologique n’est donc qu’une question éminemment subjective, se rapportant à la concentration et à l’esthétique.

Cela pourrait expliquer pourquoi, même dans les meilleurs sites, le fond du ciel paraît toujours lumineux. L’œil ( ou le cerveau ?) prend comme référence le fond du ciel pour évaluer la brillance relative des objets, mais a beaucoup de mal à estimer la brillance absolue de cette référence. On a la même chose en acoustique : un appareil semble d’autant plus bruyant que la pièce est silencieuse, mais il nous est très difficile, a priori, d’estimer la qualité de ce silence, autrement dit l’intensité du bruit de fond qui sert de référence.

Cela expliquerait aussi pourquoi les images ne semblent pas totalement noires lorsqu’on observe le ciel avec un grossissement élevé.

Phil, si tu es encore là, est-ce qu’on aura droit à un CROA comparatif entre les Canon et les Fujinon ? Ce serait bien que le moins ridicule des deux protagonistes se dévoue

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Ulysse > je crois qu'il faut que tu arrêtes de fumer le paillasson de mémé !

Arf, un comparatif Canon / Fujinon, le Phil tellement il a honte de ses jumelles qu'il fait croire qu'elles sont embuées pour retarder la triste échéance (pour ne pas dire déchéance...)

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