Bisphère 2
Visite
et description des biomes (II)
"Welcome to Biosphère Two", me dit Zabel en souriant ainsi qu'au public
venu découvrir ce laboratoire unique en son genre. Tout en marchant sur
les sentiers qui serpentent à travers la serre, Zabel nous rappelle que
dans ses grandes lignes Biosphère 2 a tenté de reproduire in vitro les
grands biomes ou régions écologiques terrestres, de la forêt pluvieuse
au désert. Seules les régions polaires n'ont pas été simulées mais
les eaux froides sont représentées tandis que les régions humides et
semi-désertiques ne sont pas isolées des autres biomes.
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A
gauche, les principales régions climatiques terrestres
correspondant à autant de biomes. A droite, le schéma de
l'installation reproduite in vitro dans Biosphère 2.
Documents Schoolmouv
et Biosphere2/U.Az. |
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Chaque
biome consiste en un immense espace dont l'atmosphère est contrôlée et
dans lequel les quantités d'eau, de carbone et d'autres composés sont
surveillés avec précision afin de mesurer le bilan énergétique du
système et ses réponses face aux changements de concentration du gaz
carbonique ou à d'autres facteurs climatiques (tels que l'échange net de
carbone, la transpiration, la production de gaz à l'état de trace, la
balance isotopique).
L'acquisition et la communication des données sont entièrement automatisées.
L'échange des gaz entre les biomes peut être mesuré tandis que des
ventilateurs ont été installés à l'intérieur de chaque mésocosme
pour empêcher la stratification de la température.
Enfin les systèmes
d'irrigation ont été étudiés de manière à ce que l'eau s'écoule en
sens unique à travers la forêt pluvieuse, le désert et le biome d'agro-sylviculture intensive.
L'océan
Le mésocosme
marin de Biosphère 2 est un biome totalement fermé qui simule un récif
corallien des Caraïbes (Atkinson et al., 1999). C'est un grand réservoir
de la taille d'une piscine d'une superficie de 35 x 20 m, dont la
profondeur oscille entre 7 m au milieu du bassin à moins de 1 m du côté
de la lagune qui est partiellement séparée de l'océan par un récif émergeant.
Cet océan
artificiel contient 2.5 millions de litres d'eau salée. Un bel aquarium
qui contient quelques dizaines d'espèces d'animaux sans parler des
invertébrés et de la microfaune !
Des
systèmes mécaniques simulent ou remplacent les processus
environnementaux naturels. Des paramètres physiques et chimiques tels que
le mélange, l'échange des gaz, les concentrations nutritives et la
pression partielle de gaz carbonique peuvent être contrôlés indépendamment.
Il se différencie de tout autre système artificiel de récif par son échelle
et sa complexité biologique.
Les animaux
ne sont pas nourris et ce mésocosme est assez grand pour
permettre aux populations de se développer à partir de la chaîne alimentaire interne
soutenue par les algues et la photosynthèse du corail.
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A
gauche, le site d'Akumal dans le péninsule du Yukatan au
Mexique fut choisi comme biotope de référence pour prélever quelques échantillons de
corails pour le biome de l'océan de Biosphère 2. A droite, analyse du récif in
vitro par un chercheur de Biosphère 2. Ci-dessous, un corail
"cerveau" et une anémone réimplantés dans le
biome de l'océan de Biosphère 2. |
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L'océan
de Biosphère 2 est idéal pour simuler des changements chimiques ou
biologiques sur les récifs de coraux. Ainsi Langdon et ses confrères ont
démontré en l'an 2000 que les taux de calcification squelettique du
corail diminueraient de 40% au cours du 21e siècle lorsque la
concentration du carbonate présent dans l'eau de mer arriverait à équilibrer
celle du gaz carbonique atmosphérique que nous continuons à y déverser
(plus de 54% pour les seuls Etats-Unis contre 8% pour l'Allemagne en l'an
2000).
La forêt pluvieuse
Le mésocosme de la forêt pluvieuse ou tropicale est situé à l'extrémité nord de Biosphère 2 et représente
un habitat de 67000 m3 constitué de toute une textures de sols allant de la
terre sèche à la terre grasse argileuse (Leigh et al., 1999). Cette forêt chaude et humide
s'étend sur un espace de 50 m de côté et culmine à 27 m de hauteur.
Les passionnés de faune et de flore tropicales seraient enchantés de
vivre dans cette jungle !
Ce biome planté entre 1989 et 1991 est aujourd'hui partiellement parvenu à
maturité et présente un patchwork complexe de différentes espèces végétales
tropicales présentant des canopies variées qui sont autant d'éléments idéaux
pour mesurer les différentes composantes des activités photosynthétiques.
La forêt
pluvieuse est divisée en deux secteurs : les terres basses et la forêt
pluvieuse supérieure. C'est dans cette dernière zone qu'une petite
montagne équipée d'un station panoramique a été érigée pour
le public. Cette Vista a été baptisée "Tepui".
Cette forêt
pluvieuse à échelle réduite est comparable aux forêts d'Amazonie
(Arain et al., 2000). Des expériences (Lin et al., 1998, 1999) ont prouvé
l'utilité de ce biome et ont malheureusement démontré que la forêt
pluvieuse, si elle permet de régénérer le gaz carbonique ambiant en
limitant sa concentration, serait saturée en gaz carbonique au milieu du
XXIe
siècle.
L'agro-sylviculture
À l'origine le biome d'agriculture
intensive fonctionnait en système clos (B.Marino et
al., 1999). Aujourd'hui le biome de sylviculture (IFB) couvre environ
2 km2,
il dispose d'un volume d'air de 35000 m3 et d'un volume de terre d'environ
2000 m3.
Le
sous-sol présente une épaisseur d'environ 1m et est maintenu à l'image
d'une prairie fertile (Torbert et Johnson, 2001). Ce biome est divisé
en 3 chambres de 33 x 17 m disposant chacune de ses
propres moyens de contrôles : des systèmes de contrôle du gaz
carbonique, de contrôles environnementaux, de sondes (température,
humidité relative, lumière et humidité du sol) et de système de
surveillance continu des gaz à l'état de trace.
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Le
biome de l'agro-sylviculture et ses
champs d''agriculture intensive. |
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Une forêt
de peupliers génétiquement identiques (Populus deltoides Barr.) a été
plantée en mai 1998. Bien qu'ils soient taillés annuellement leur taux
de croissance est dramatique, atteignant une moyenne d'un mètre par mois
! Ces arbres sont utilisés pour mesurer un certain nombre de réponses de
l'écosystème à des concentrations élevées de gaz carbonique (Griffin
et al., 2002) et permettent, entre les coupes, de relever différents paramètres
relatifs à la respiration du sol (Murthy et al, 2002).
La savane
La savane
a été conçue pour exécuter plusieurs fonctions dans Biosphère 2. Son
premier objectif est de fournir une zone hydrologique de transition entre
le désert et les mésocosmes de la forêt pluvieuse. Le but est
d'apprendre comment la chimie atmosphérique trouve son équilibre suite
aux changements des régimes hydrologiques dans les mésocosmes tropicaux.
La savane est un modèle à petite échelle des savanes tropicales,
reproduisant les processus qui se déroulent dans ces écosystèmes tout
en retenant les détails essentiels de sa biodiversité et de son esthétique.
Les zones
de végétation comprennent des espèces comestibles, comprenant des
acacias pour les galagos, des plantes à grosses graines pour les pinsons
et des arbres à fruits destinés à l'ensemble de la faune.
La savane
est divisée en quatre régions principales : une pente de quartzite, la
savane supérieure, une pente de granit et la savane inférieure. La
section la plus au nord de la savane se compose d'une pente construite à partir
de roches de quartzite. La chute d'eau est située dans ce secteur.
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Le
biome de la savane séparé de celui de l'océan par une petite falaise. |
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La savane
supérieure est constituée de trois zones de végétation. La section
située juste à côté de la chute d'eau se compose d'espèces d'eau douce
des régions humides des Everglades de Floride comprenant les espèces
suivantes : Cornus foemina, Typha domingensis, Salix caroliniana, Crinum
americanum, Ludwigia octovalvis et Cladium jamaicense.
La zone
constituant la forêt de galerie est dominée par des espèces d'Acacia
avec des herbes plutôt clairsemées aux étages inférieurs choisies
parmi les espèces suivantes : Andropogon gayanus, Panicum maximum,
Paspalum guenoarum, Setaria poiretiana et l'envahissante Brachiaria
mutica.
Les Billabongs sont des dépressions dans la savane supérieure. Elles ont été
conçues pour être périodiquement inondées afin de produire un habitat
hyper saisonnier. Cette zone alterne des saisons de vives eaux avec des périodes
d'aridité, éliminant la plupart des arbres mais en permettant aux herbes
de survivre.
Les Billabongs sont dominés par une canopy d'herbes constituées de
Brachiaria mutica et de Chloris gayana, contenant localement des espèces
tortillées de Vigna luteola et des vignes lathyroides de Macroptilium.
La savane
inférieure est située le plus au sud, à côté de la zone semi-désertique
supérieure. Elle est dominée par les Brachiaria mutica. D'autres plantes
sont présentes dans ce secteur comme les Dichanthium annulatum, Cenchrus
setigerus, Panicum maximum, Sorghum halepense et le Brachiaria decumbens.
Prochain chapitre
Les
biomes (suite)
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