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Météorologie élémentaire

Hommage aux "fous volants". Document T.Lombry.

Les traînées de condensation

Lorsqu'un avion traverse certaines couches atmosphériques, on peut observer l'apparition de traînées de condensation non persistantes appelées "contrails". En général elles s'étendent sur cinq à dix fois la longueur de l'avion. Certaines sont persistantes, mesurant plusieurs dizaines de degrés de longueur ou traversant tout le ciel. Elles peuvent également se transformer en banc de cirrus (cirrus homogenitus, cirrus uncinus homomutatus ou cirrus fibratus vertebratus homomutatus). L'importance tactique considérable de ces traînées réside dans les renseignements qu'elles fournissent : position, déplacement et nombre d'avions.

Il est donc absolument indispensable d'en connaître les modes de formation, les caractéristiques et les moyens de les éviter ou de les éliminer.

Les facteurs physiques qui peuvent, en pratique, déterminer la formation des traînées de condensation sont :

- l'apport de noyaux de condensation dans une atmosphère sursaturée,

- l'apport d'eau sous forme de vapeur,

- le refroidissement de l'air.

L'apport de noyaux de condensation dans une atmosphère sursaturée constituerait une explication simple de la formation des traînées. Cependant, il est actuellement certain que ces noyaux de condensation existent en nombre suffisant avant le passage de l'avion et qu'en tout cas la sursaturation est un phénomène excessivement rare dans l'atmosphère libre.

Parmi les traînées formées par un des deux autres processus, nous distinguons :

- les traînées aérodynamiques,

- les traînées d'échappement (exhaust),

- les traînées de convection.

Deux traînées de condensation persistantes d'avions longs courriers volant à moyenne altitude. Ces cristaux de glace restèrent visibles plus d'une heure pratiquement d'un horizon à l'autre. Leur largeur était d'à peine 0.5° et s'est élargie au fil du temps, se transformant en cirrus fibratus vertebratus homomutatus comme illustré ci-dessous. Selon les courants en altitude, certaines traînées se transforment en cirrus ou conservent leur forme étroite et boulochées tout en se sublimant progressivement, devenant moins épaisses et moins brillantes. Documents T.Lombry.

Les traînées aérodynamiques

Formation

Le refroidissement de l'air est exclusivement la conséquence d'une détente admise généralement comme adiabatique. Pour un avion volant à 600 km/h, la dépression en bout d'aile peut atteindre 170 mbar. Les remous créés par les ailes ont tendance à s'organiser en un fort tourbillon assez persistant dans lequel la dépression demeure de l'ordre de 30 mbar sur une assez grande longueur.

Dans ces conditions, on peut observer des traînées de condensation "de bout d'aile" ayant en moyenne une longueur de 10 m et un diamètre de 50 cm. Cependant, ces traînées nécessitent une atmosphère presque saturée et préalablement non turbulente, sinon le tourbillon ne pourrait persister; elles sont assez rares et très fugaces.

A voir : L'armée soviétique bientôt équipée de Sukhoi T-50 (sur le blog, 2013)

Au cours de son vol le Sukhoi T-50 présenta quelques traînées aérodynamiques

Traînées aérodynamiques de bout d'aile, respectivement derrière un long courrier Airbus A-330, un Mirage III, deux F-18 Hornet, à l'atterrissage de la navette spatiale et derrière un avion furtif SR-71. Documents PixAir, Marcel Grand/Swiss Jet, NASA et A.F.Link. D'autres images d'avions de combats sont accessibles sur le site Swiss Jet de Marcel Grand ainsi que celui de la NAVY et de l'USAF.

On observe en général les traînées aérodynamiques lors de meetings aériens ou durant les exercices de "dogs fights" lors des manoeuvres d'évitement, les virages serrés, etc, dans une atmosphère assez humide.

Ces traînées ne sont donc pas associées à des nuages mais elles peuvent apparaître en présence de nuages de pluie tels que les nimbostratus, cumulonimbus et stratocumulus du fait que l'air est presque saturé d'humidité.

Elimination

Les traînées aérodynamiques peuvent être éliminées en s'écartant des couches d'air humide par changement d'altitude ainsi qu'en effectuant les manoeuvres à des vitesses plus modérées le cas échéant.

Contrails

 Ennuyeuses sur le plan tactique, les traînées de condensation peuvent contraindre un pilote de chasse ou de bombardier voire un aérostier téméraire à changer de niveau de vol.

Pour les militaires l'adage "pas vu, pas pris" garde tout son sens. Cette traînée de condensation très particulière n'aurait jamais dû exister car elle démasqua au grand public l'existence du fameux programme Aurora des avions furtifs de la nouvelle génération. On comprend ainsi mieux l'intérêt tactique que peut avoir un avion ne laissant aucune trace de son passage.

La démonstration la plus médiatisée de cet effet et son impact sur les missions tactiques, fut la découverte des contrails de l'avion furtif Aurora dont l'unique photographie est présentée ci-dessus. Jusqu'à cette preuve indiscutable, le DoD américain avait toujours nié l'existence des "black programs" (non identifiés comme tels dans les budgets officiels). On en reparlera plus longuement dans le dossier consacré aux affaires militaires.

Formation

Traînées de condensation au lever du Soleil dans le sillage d'un A-340. Document Emmanuel Tailliet via Airliners.net.

Les traînées d'échappement résultent de la saturation en vapeur d'eau des couches atmosphériques traversées par l'avion; cette saturation donnant lieu à la condensation et à la solidification ensuite d'une quantité suffisamment importante de vapeur d'eau.

Les réactions chimiques de combustion dans les moteurs de l'avion s'accompagnent de la libération d'une certaine quantité de chaleur et de vapeur d'eau éjectées par les tuyères d'échappement et cédées aux couches atmosphériques traversées. Celles-ci se réchauffent en même temps qu'elles s'enrichissent en vapeur d'eau. Ces deux actions ont des effets opposés sur l'humidité relative des couches traversées : l'addition de vapeur d'eau augmente cette humidité relative, alors que le réchauffement des couches la diminue.

Ainsi, lorsqu'il y a formation effective d'une traînée blanche dite d'échappement, elle résulte toujours de ces deux processus contraires, l'apport de vapeur d'eau à l'atmosphère l'emportant sur le réchauffement de l'air.

Lorsque de telles traînées se forment, elles s'allongent dans le sillage de l'avion et sont généralement très intenses et très persistantes (jusqu'à plusieurs heures). Ces traînées sont formées de cristaux de glace ainsi qu'en témoignent certaines photographies et certains phénomènes de halo qu'on y observe fréquemment; ces cristaux de glace proviennent de la solidification de la vapeur d'eau et on admet généralement que cette solidification nécessite d'abord le passage de la vapeur par l'état liquide.

En outre, il est clair que ces traînées sont d'autant plus intenses, c'est-à-dire d'autant plus visibles que le nombre de cristaux de glace qu'elles contiennent par unité de volume est grand. En général, on admet que la concentration en cristaux de glace doit être au moins de 0.01 g/m3 dans une traînée bien visible, et peut se réduire à 0.004 g/m3 pour des traînées faiblement visibles. Il est d'ailleurs évident que la persistance de ces traînées sera fortement influencée par la concentration en cristaux de glace.

A voir : Contrails derrière un A-380 - Contrails derrière un B-747

Vui de près ou au moyen d'un télescope, les traînées de condensation peuvent être extraordinaires, surtout vues d'avion. A gauche, les contrails d'un B-747de PIA volant à 28800 pieds. Au centre, les extraordinaires volutes laissées par un B-747 de la KLM photographié 1000 pieds plus bas. A droite, un B-747 (au-dessus) croisant un B-777 vers 30000 pieds. Documents Emmanuel Taillet, Josef P.Willems et M.Bailey via Airliners.net.

D'autre part, puisque les traînées de condensation sont constituées de cristaux de glace, on doit s'attendre à ce qu'elles ne se produisent qu'à des altitudes relativement élevées où la température des couches atmosphériques est suffisamment basse. Une température (calculée théoriquement) inférieure à -29°C est nécessaire pour qu'il y ait formation de traînées de condensation. Ceci veut dire que si la température des couches atmosphériques traversées par l'avion est supérieure à -29°C aucune traînée ne se formera, quelle que soit l'humidité de ces couches. Les altitudes normales (dans la zone tempérée) où ces "contrails" se forment, sont en général comprises entre 25000 et 40000 pieds. Les nuages propices à leur apparition sont donc les cirrus et les cirrostratus.

Au bout de quelques dizaines de minutes voire plusieurs heures, si la masse d'air est suffisamment humide en altitude, ces traînées de condensation finissent par s'étendre et se confondent avec des nuages cirriformes en provoquant une certaine opacité du ciel.

Des traînées de condensation arc-en-ciel dans le sillage d'avions longs courriers. Documents Michael Marston via CNN dont une vidéo est publiée sur Facebook, Miron Zagorski et alien_eye via Reddit.

Suppression

En principe, le moyen radical pour supprimer les contrails serait de récupérer l'eau des gaz d'échappement par des condenseurs appropriés; cet équipement étant peu pratique, d'autres méthodes doivent être envisagées, et notamment :

- Grimper 2000 pieds au moins au-dessus de la tropopause,

- Planer vers les altitudes inférieures en réduisant la puissance du moteur,

- Faire un léger piqué au moteur et regagner l'altitude primitive (de courtes traînées persistantes pourront se former pendant le retour en altitude),

- Diminuer le régime moteur de manière à réduire la quantité de vapeur d'eau éjectée,

- Descendre rapidement en dessous de l'altitude minimale de formation des traînées de condensation,

- Ouvrir les volets de capotage des moteurs (à piston) ou les "air-brakes" pour augmenter le volume d'air brassé dans la traînée et ainsi réduire le pourcentage d'humidité. Les traînées ne disparaîtront entièrement que si les deux premières règles sont appliquées, dans les autres cas la persistance ou la longueur de la traînée sera affaiblie, tout au moins si les conditions ne sont pas anormales.

A voir : Galerie photos de contrails, Flickr

A gauche, autant de traînées de condensation en un même endroit signifie généralement que la masse d'air devient très humide en altitude. Un changement de temps est annoncé. Au centre, les contrails d'un B-747 d'Iberia au-dessus d'un banc d'altocumulus où elles se forment régulièrement. A droite, une photographie insolite des contrails d'un B-747 d'Air India se projetant devant le premier quartier de Lune. Documents Wilfried Krecichwost, Javier F. Bobadilla et Mark Garfinkel via Airliners.net.

Les traînées de convection

Formation

Ces traînées sont formées par le réchauffement des couches d'air traversées par l'avion, réchauffement provoqué par la chaleur dégagée lors de l'échappement des produits de combustion.

Les couches d'air ainsi réchauffées deviennent plus légères que les couches voisines et s'élèvent; si les couches atmosphériques traversées sont instables, ce mouvement ascendant s'amplifiera. L'ascendance s'accompagnera d'un refroidissement adiabatique et la vapeur d'eau se condensera sous forme de nuage. 

Ce type de traînée est persistant et peut se rencontrer à toute altitude, le plus fréquemment entre 8000 et 20000 pieds. Elles apparaîtront donc en particulier près des altocumulus et des altostratus en couches non uniformes.

L'importance tactique des traînées de convection est modérée bien que ces traînées ne soient pas rares et qu'elles soient généralement persistantes, elles ne se forment que dans des conditions atmosphériques très spéciales (instabilité des couches traversées) et pour les supprimer il suffit de changer quelque peu d'altitude.

Suppression

Deux règles simples sont applicables :

- Grimper ou descendre de quelques centaines de pieds (un changement d'altitude de 1000 pieds devrait être largement suffisant dans la plupart des cas),

- Eviter les altitudes des formations nuageuses cumuliformes.

Aspects opérationnels

Dans la plupart des cas, le pilote ignore que son appareil laisse une traînée de condensation dans son sillage même s'il s'attend à sa formation. Etant donné l'importance que peuvent avoir de telles traînées en opérations, il est nécessaire de surveiller ou de faire surveiller la formation éventuelle de ces traînées.

A gauche, une image insolite de contrails probablement laissées par un chasseur indiquant une zone de larguage aux bombardiers. Cet usage inattendu des traînées de condensation se pratiquait déjà dans la RAF durant la Seconde guerre mondiale dans le même contexte. A droite, les contrails d'un B-52 volant en atmosphère claire vers le FL300. Documents D.R..

Impact des contrails sur la température

Les climatologues savent bien que lorsqu'il y a trop de traînées de condensation dans le ciel cela peut affecter la température en un lieu puisqu'elles jouent le même rôle qu'un banc de cirrus épais. Mais jusqu'en 2001 personne n'avait vraiment étudié le sujet. En raison de l'intense trafic aérien sur la côte est des Etats-Unis et l'apport d'humidité venant de la mer, cette région est connue pour présenter énormément de contrails. Sur certaines photos satellites les contrails couvrent parfois 75% du ciel !

Suite aux attentats du 11 septembre 2001 à New York, tout survol du territoire des Etats-Unis fut interdit durant trois jours. Durant cette période, le ciel s'est subitement éclairci, vidé de ses contrails. C'est alors que les climatologues étudiant les variations de la température et l'évolution des extémas ont fait une étonnante découverte.

L'avenir de l'astronomie : la radio ?

Une étude conduite en 2006 par le professeur Gerry Gilmore, titulaire de la chaire Opticon (astronomie infrarouge optique) à l'Institut d'Astronomie de l'Université de Cambridge, nous apprend que les traînées de condensation risquent à l'avenir de perturber les observations astronomiques conduites par les observatoires dans le domaine optique.

Nous savons depuis plusieurs décennies que les astronomes éprouvent des difficultés pour conserver leurs "fenêtres" d'observation en raison de la pollution lumineuse.

En extrapolant les conditions atmosphériques actuelles, Gilmore est parvenu à la conclusion qu'en 2050 il sera impossible d'exploiter de très grands télescopes en raison de l'augmentation de la vapeur d'eau dans l'atmosphère et des contrails qui en découlent suite à l'augmentation du trafic aérien, la photo ci-dessus étant un exemple très significatif.

Mauvais temps pour les astronomes qui devront bientôt se convertir à la radioastronomie ! Reste à trouver un nouveau site d'observation; pourquoi pas en Antarctique ? Sinon il faudra attendre la base lunaire...

Lorsque le trafic aérien est normal au-dessus des Etats-Unis, c'est-à-dire très dense, en moyenne on constate une baisse de la température de l'ordre de 0.25°C. Durant les 3 jours d'arrêt du trafic aérien et donc en l'abence de contrails, la température moyenne a augmenté de 1.10°C, la différence atteint 1.35°C. Elle retomba à des valeurs négatives lorsque l'espace aérien fut réouvert. Les climatologues de l'Université de Wisconsin n'avaient jamais vu ça depuis 30 ans !

Ce phénomène confirme l'impact des contrails sur la température. Il signife également que la température moyenne dans une région du monde peut drastiquement être modifiée si on supprime une seule source de pollution. On y reviendra à propos de l'effet de serre induit par la vapeur d'eau.

A propos des chemtrails : des rumeurs !

Les chemtrails n'existent pas ! Il s'agit d'une légende urbaine, d'une rumeur lancée voici quelques décennies par les amateurs de la théorie du complot. Selon leurs divagations, les chemtrails seraient des produits chimiques similaires à l'agent orange qui auraient été dispersés par des avions au moyen d'équipements adaptés. Ces "épandages" à grande échelle auraient été dissimulés au public par les gouvernements.

Devant les conséquences éventuelles de cette histoire, Christine Shearer et ses collègues scientifiques ont voulu vérifier cette rumeur et publièrent les résultats de leurs recherches en 2016 dans la revue "Environmental Research Letters". Selon un sondage réalisé 2011, il s'avère que 17% des sondés croyaient que ces épandages étaient vrais et qu'on nous cachait la vérité. Les chercheurs ont intterrogé 77 scientifiques spécialisés dans la chimie de l'atmopshère et 76 d'entre eux ont déclaré n'avoit jamais rencontré une seule preuve validant la théorie des chemtrails. les seules expériences chimiques réalisées dans l'atmosphère concerne l'éjection de gaz de barium par la checheurs de la NASA pour étudier l'ionosphère et de gaz de nitrates césium par des astronomes et des physiciens afin d'étudier les lueurs nocturnes.

Enfin, les chercheurs ont montré que les rares études publiées sur les soi-disant chemtrails se basaient sur des échantillons non représentatifs récupérés dans l'air, dans un étang ou dans la neige. A chaque fois, plus de 80% des scientifiques ont trouvé des preuves invalidant la démonstration qui ont toujours conclu que les chemtrails n'existaient pas. Quant à imaginer que la majorité des chercheurs peut se tromper, il s'avère que les analyses des échantillons suspects n'étaient pas conformes, les scientifiques comparant pour ainsi dire des pommes et des poires (par ex. ils relèvent le nombre particules dans l'air mais leur référence se base sur le nombre de particules dans l'eau. Même chose pour l'échantillon de neige. Ils prétendent qu'elle fut récoltée dans l'air alors qu'elle présente les mêmes caractéristiques moyennes que les sols ou les poussières du désert !). Bref, rien ne confirme l'exitence des chemtrails, que tu contraire.

Prochain chapitre

La turbulence

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