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La théorie de la Relativité

Le cadre historique

L'électromagnétisme (VIII)

A la fin du XVIIIe siècle, grâce au physicien français Charles Coulomb nous découvrons que l'attraction entre deux aimants suit la même loi "en carré inverse" que la gravitation de Newton. Seule différence, la force électrique (F) est attractive si les deux charges (q, q') sont de signe opposé :

avec r, la distance qui sépare les 2 charges.

Mais l'éther qui remplissait l'espace gardait toujours ses propriétés mécaniques. Il était à l'origine de la réfraction de la lumière qui pouvait changer de vitesse en changeant de milieu. La situation était similaire concernant l'électricité et le magnétisme qui étaient deux phénomènes distincts évoluant dans l'éther.

A propos du premier phénomène, rappelons qu'au VIe siècle avant notre ère Thalès de Milet nous a appris comment attirer la matière en frottant de l'ambre - qui incidemment se dit êlektron en grec - sur de la fourrure. C'est l'électricité statique, une propriété des électrons "au repos" qui leur permet d'attirer la matière, dans la mesure où la force de gravité n'est pas trop forte.

Bien plus tard en 1752, au péril de sa vie, Benjamin Franklin démontra avec son cerf-volant que les éclairs véhiculaient du "feu électrique". En fait les éclairs représentent des décharges électriques entre des objets de charge opposée. Franklin étudia la polarité des objets chargés d'électricité et inventa le concept de charge "positive" et "négative". Lorsque ces deux charges sont reliées l'une à l'autre, un courant électrique s'écoule de la charge négative vers la positive. Pour le second phénomène, le physicien danois Hans Oersted découvrit vers 1819 qu'un courant électrique (des électrons en mouvement) se déplaçant dans un fil faisait dévier l'aiguille aimantée d'une boussole. Le sens de cette force dépendait du sens du courant (la fameuse loi du "tire-bouchon").

Thales de Milet

Hans Oersted

En 1823, le physicien français André Ampère travailla sur les matériaux conducteurs et établit la théorie de l'électrodynamisme.

Vers 1831, le physicien anglais Michael Faraday se pris d'une passion pour les aimants. En saupoudrant de la limaille de fer autour de barres ferromagnétiques, il observa que l'intensité des lignes de force variait comme l'inverse du carré de la distance, comme la gravitation. Essayant de rapprocher deux aimants l'un de l'autre, il constata que ceux-ci se repoussaient. Que se passait-il ? En fait, il existe des forces tout autour de l'aimant qui sont orientées dans différentes directions, en accord avec le sens de l'aiguille de la boussole et des lignes de force qu'observa Faraday. En étudiant ces forces il découvrit l'induction magnétique, les courants induits dans les fils conducteurs (solénoïdes) par des aimants. Il nota également que l'action de cette force magnétique sur la lumière provoquait sa polarisation.

Autodidacte, Faraday ne chercha pas à calculer mathématiquement les effets qu'il découvrit et il n'était pas très attaché au type de matériau qu'il utilisait. Seuls comptaient pour lui les effets dans l'espace. Il nota qu'un champ magnétique qui variait s'accompagnait d'un champ électrique, mais il ignorait sa dénomination. En revanche, il considérait son effet comme une réalité. Ayant réalisé quelque 15000 expériences, il précisa que l'influence de cette force aux allures "tentaculaires" s'étendait jusqu'aux confins de l'univers.

Entourant une photo de limaille de fer s'alignant le long des lignes de force du champ magnétique d'un aimant réalisée par Windell Oskey, à gauche André Marie Ampère et à droite, Michael Faraday.

Ayant l'esprit libre des théories traditionnelles, Faraday dépassera les idées de son temps, voyant un milieu continu là où les savants voyaient encore des structures ponctuelles. Les physiciens jugeront ses idées trop naïves, car ne faisant pas appel aux mathématiques. Seul un certain James Clerk Maxwell ne partagera pas cette idée.

Faraday savait aussi que le magnétisme et l'électricité produisaient les mêmes effets et il inventa la dynamo. Des conducteurs en rotation (induit ou rotor) placés dans le champ magnétique d'un aimant fixe (inducteur ou stator) font naître une différence de potentiel à leurs bornes. Ce petit appareil transforme l'énergie mécanique en énergie électrique continue[1]. Mais Faraday manquait de notions mathématiques pour y voir clair et son travail devra être reformulé plus tard par les physiciens.

En 1834, Karl Gauss et Wilhelm Weber appliquèrent les découvertes d'André Ampère en reliant deux laboratoires par un télégraphe expérimental : un message constitué d'impulsions électriques traversait un fil conducteur et était détecté en observant la déviation d'une aiguille aimantée. Mais leur faible budget ne leur permit pas d'approfondir leur expérience.

En 1843, non sans avoir dû convaincre un public sceptique, le physicien américain Samuel Morse installa le premier télégraphe sans fil entre Washington et Baltimore, distante de 60 km. Le Gouvernement fut immédiatement conquis par l'invention. Sept ans plus tard, une vingtaine de compagnies télégraphiques avaient installé quelque 19000 km de câbles télégraphiques à travers les Etats-Unis. En 1866 on posa le premier câble télégraphique transatlantique et en 1880 on estima la longueur totale des câbles sous-marins à 160000 km ! Aujourd'hui toute la planète est câblée !

La découverte de l'électromagnétisme fut très importante et conduisit également à la fabrication des électroaimants que l'on retrouve dans les aciéries, les alternateurs à hydrogène et les accélérateurs de particules.

A lire : The History of Amateur Radio

Karl F.Gauss

James C. Maxwell

Le champ

Pour expliquer la propagation du courant électrique dans l'éther, en 1873 Maxwell se met à la portée de son public et notamment de Faraday et prend l'analogie des roues dentées et des pignons. Aujourd'hui encore les manuels sur le magnétisme font allusion aux tourbillons. Mais Maxwell sait que l'explication ultime se trouve dans les équations, dans le langage symbolique des mathématiques, bien à l'écart des paradoxes de la représentation et des sens[2].

Sous l'influence des idées de Newton et se basant sur les travaux d'Ampère, Maxwell propose une théorie qui offre l'avantage d'éviter la propagation instantanée à distance. En effet, ses équations lui permettent de déduire que les phénomènes électriques et magnétiques n'agissent pas instantanément mais se propagent à une vitesse finie. Il découvre que cette vitesse est précisément celle de la lumière.

En 1861, après avoir analysé les travaux de Oersted et de Faraday, il créa le concept fondamental du "champ", abandonnant celui des fluides électriques dans l'éther. Par champ, il désignait une perturbation de l'espace qui, en chaque point, a le potentiel de produire une force sans référence aux corps qui pouvaient s'y trouver. "Le champ disait-il crée une toile à travers tout le ciel " [3]. Son effet peut être gravitationnel lorsque cette force est liée à la Terre, électrique autour d'une charge ou magnétique autour d'un courant électrique. La position de cette force varie uniquement en fonction du temps, ce qui permit à Maxwell de prédire l'existence des ondes (électromagnétiques). En dehors du champ la force n'a aucun effet. C'est la raison pour laquelle en dehors du champ électromagnétique d'une station de radiodiffusion ou lorsqu’un obstacle empêche sa propagation on ne capte plus du tout ses émissions.

Cette fois, Maxwell oublie définitivement les corps matériels, les particules. Le champ permet de décrire l'espace et de comprendre l'interaction entre les corps. Les "tentacules" localisées de Faraday se transforment dans l'esprit de Maxwell en un champ infini, continu et omniprésent. Insidieusement, Maxwell donne une fonction à l'espace. Comme le disait Einstein, "cette théorie était fascinante. Désormais, à l'idée classique de force qui fait jouer un rôle muet à l'espace, le concept de champ consiste en un processus dans lequel les corps en interaction baignent dans l'espace. Cet espace a la propriété d'interagir avec les corps". Mais les scientifiques refusaient cette idée, l'éther ayant déjà une propriété mécanique.

Gadget : Aimant bipolaire et limaille de fer, Physicsfun

Le concept de champ

"Une ligne de force peut-être définie comme la ligne qui est constamment tangente à une toute petite aiguille que l'on déplace dans la direction de sa longueur". Faraday.

Champ magnétique autour d'un aimant. L'aiguille de la boussole suit les lignes de force du champ magnétique.

Le champ magnétique (B) s'oriente toujours perpendiculairement aux lignes de force (L).

"C'est la description des champs entre les deux charges, et non les charges elles-mêmes qui est essentielle pour comprendre leur action". Einstein.

Champ électrique entre deux particules chargées de signe opposé.

Les surfaces équipotentielles (E) sont toujours égales et toujours perpendiculaires aux lignes de force (L) du champ électrique.

Le physicien américain Henry Rowland démontra à la même époque qu'un champ magnétique se développe toujours autour des charges électriques en mouvement. C'était également l'un des effets induit par l'éther[4].

Le concept de champ n’était pourtant pas une idée révolutionnaire car il existait déjà à l’époque de Newton mais il était alors considéré comme une commodité mathématique. Le champ servait à retrouver les forces qui agissaient sur une particule mais in fine tout devait s’expliquer en terme d’action à distance entre particules. Maxwell y vit une réalité, les vecteurs orientés dans l’espace représentant des choses réelles, des champs électriques et magnétiques oscillant à diverses fréquences et parfois polarisés. De nos jours on explique l'existence des particules chargées comme étant une région du champ électromagnétique à l'intérieur duquel la force est tellement élevée que l'énergie est concentrée dans un tout petit espace dont les limites s'estompent. Cette énergie se propage dans l'espace sans support.

En 1873, Maxwell publia son célèbre "Traité sur l'Electricité et le Magnétisme" et proposa la même année sa “théorie cinétique des gaz". Précédant les idées des statisticiens Francis Galton et Karl Pearson, Maxwell raisonna statistiquement sur les molécules, calculant des distributions et des moyennes. Ses descriptions ouvrirent une voie nouvelle et féconde, la mécanique statistique.

L'évolution des idées s'accéléra ensuite rapidement. Les termes "magnétiques" et "électriques" pouvant être échangés - ils produisaient les mêmes effets - le physicien allemand Heinrich Hertz améliora la définition du champ et le nomme "champ électromagnétique" en 1887. Il démontra son indépendance des lois de la mécanique.

Bien que personne ne voulut encore le reconnaître, en donnant au champ un cadre formel et une réalité concrète, Maxwell sonna le glas de l'éther qui perdit dorénavant toute fonction.

C'est à ce point de l'histoire que le champ devint synonyme d'énergie. Nous savons qu'en interrompant brusquement un champ électrique (mais aussi magnétique), il se produit une étincelle, c’est le fameux court-circuit bien connu de ceux qui bricolent. Cela signifie que le champ contenait de l'énergie. Cette découverte a des implications fondamentales dans la loi de conservation de l'énergie que nous avons apprise à utiliser en cosmologie et en thermodynamique. Ce concept d'énergie sera réutilisé par la suite dans la théorie d'Einstein.

Prochain chapitre

Les équations de Maxwell

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[1] Pour obtenir une tension alternative, il suffit de plonger puis de retirer les conducteurs du champ magnétique, mais il est plus facile d'inverser le système. Il est plus simple de construire une enceinte, dans laquelle les conducteurs sont fixes et entourent l'aimant central qui se déplace (inducteur), donnant aux bornes des fils un courant alternatif.

[2] Lire J.Maxwell, "A Treatise on Electricity and Magnetism", 1 ed.1873, Dover, 1954, préface.

[3] Lettre de Maxwell à Faraday du 9 novembre 1857.

[4] Henry Rowland publia également une carte du spectre solaire reprenant 20000 raies spectrales.

[5] M.Faraday, "Experimental Researches in Electricity", Londres, 1839/1855, Vol.3, p402.

[6] A.Einstein/L.Infeld, "L'évolution des idées en physique", Flammarion, 1983, p142.


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