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La photographie numérique

Le photocapteur CCD au format APS-C de 10 Mpixels équipant le Sony Alpha 100.

Le capteur photosensible (III)

Au coeur de l'APN se trouve un capteur CCD ou CMOS, une pièce de haute technologie au regard bleu métallisé ou vert bouteille. Les CDD (charge-coupled device) sont généralement utilisés sur les appareils compacts, les CMOS (complementary metal oxide semiconductors) sur les appareils reflex, les hybrides ainsi que l'appareil photo des smartphones et les webcams. Il existe un troisième type de capteur, le Fovéon, mais à ce jour il est uniquement disponible sur quelques appareils de marque Sigma.

Depuis 2000, ces technologies ont fortement évoluées mais toutes les prévisions concernant leur régression ou leur progression se sont avérées fausses. A l'heure actuelle les trois technologies sont performantes et font preuve d'innovations.

Comment fonctionne le capteur photosensible d'un APN ? Vu de près un capteur photosensible ressemble à une petite plaque solaire dont la surface irisée mesure tout au plus quelques cm2. Le tout est encapsulé dans un circuit électronique et présente des "pattes" comme un processeur. La carte est fixée dans un boîtier équipé de plusieurs entrées-sorties.

Microphotographie de la surface d'un CMOS. Nous sommes à l'échelle de 2.5 microns par pixel ! Document Semiconductor.

Du point de vue électronique, un capteur photosensible CCD, CMOS ou Fovéon convertit le rayonnement (les photons) en électricité grâce à des photodiodes. On appelle communément ces cellules photosensibles des pixels (de l'anglais "picture elements", éléments d'image) mais le terme est trompeur car il caractérise en fait les constituants de l'image résultante (celle d'un écran ou d'un tirage sur papier par exemple). Nous continuerons toutefois à l'utiliser car il est entré dans le langage courant.

Le spectre de sensibilité de ce capteur dépasse largement le spectre visible et s'étend généralement de 200 à 1200 nm ainsi que nous l'expliquerons dans l'article consacré à la sensibilité des APN aux rayonnements IR et UV.

La photodiode est un semiconducteur constitué d'une jonction P-N (positive et négative) qui convertit les photons bombardant la jonction en une proportion équivalente d'électrons.

La quantité de charges négatives ainsi accumulée doit ensuite être mesurée. Dans un capteur CCD la charge de chaque photodiode est transférée vers une ou plusieurs broches de sortie mais généralement une seule broche située dans un coin du CCD, derrière lequel le signal est converti en tension, bufferisé et transmis au système comme n'importe quel signal analogique. Une fois lu et mesuré, le signal est amplifié puis converti en signal numérique. Il peut alors être manipulé par le processeur d'image pour ensuite être enregistré.

Plus le rayonnement pénétrant dans la photodiode est intense (plus il y a de photons) plus il y a d'électrons générés et une haute tension en sortie du capteur. Puisque tous les éléments photosensibles capturent ce rayonnement, le signal de sortie est très uniforme, ce qui fait la qualité de cette technologie et son point fort.

En revanche, dans un CMOS chaque photodiode (pixel) est relié à plusieurs transistors. Chaque pixel assure ainsi directement sa propre conversion de charge en tension, le capteur contenant généralement un dispositif complexe réalisant l'amplification, la réduction du bruit et des circuits numériques annexes. On retrouve en sortie non plus un signal analogique mais digital, des bits.

Les CMOS contenant tout leur hardware et étant donc beaucoup plus compacts que les CCD, on préfère les utiliser pour fabriquer des systèmes miniaturisés. Les caméras à base de CMOS sont de ce fait plus petites que les caméras CCD.

Un appareil à base de CMOS consomme autant si pas plus d'énergie qu'un CCD mais il a besoin de moins de périphériques (circuit CDS, DSP, etc) et par conséquent, sauf exception (caméra Mintron série C),  il consomme globalement 25 à 50% moins d'énergie qu'un appareil CCD de même dimension.

Caractéristique

CCD

CMOS

Signal de sortie du photosite

Electrons

Tension

Signal de sortie du chip

Analogique (tension)

Digital (bits)

Signal de sortie de l'APN

Digital (bits)

Digital (bits)

Hardware de traitement

Séparé du chip

Intégré au chip

Facteur de remplissage

Elevé

Moyen

Complexité du système

Elevée

Faible

Complexité du capteur

Faible

Elevée

Coût en R&D

Faible

Plus élevé

Hardware de traitement

Séparé du chip

Intégré au chip

Utilisation (en général)

APN compacts, vidéo

APN reflex, ordinateur, jouets

Performance

CCD

CMOS

Sensibilité à la lumière

Elevée (0.1 lux)

Plus faible (10 lux)

Sensibilité aux UV et à l'IR

Etendue

Plus étroite

Réponse

Moyenne

Rapide (10-100x plus)

Consommation d'énergie

Elevée (2-4x plus)

Faible

Dynamique

Elevée

Moyenne

Uniformité du capteur

Elevée

Faible à modérée

Bruit électronique 

Faible

Moyen à élevé (10x plus)

Shuttering

Assez rapide

Faible

Windowing

Limité

Etendu

Antiblooming

Elevé ou absent

Elevé

Biaising et clocking

Multiple, tension élevée

Unique, basse tension

L'avantage des CCD est qu'ils sont fabriqués pour transporter les charges à travers le chip sans distorsion, ce qui garantit la très haute qualité des capteurs en terme de fidélité et de sensibilité. Ils sont également plus performants que les CMOS car dans ces derniers la lumière a tendance à frapper plus souvent les transitors que la photodiode. Les CMOS utilisent le même processus de fabrication que les microprocesseurs équipant les ordinateurs.

Comme pour les semiconducteurs (processeurs et mémoires), il existe peu de fabricants de capteurs photosensibles au monde car l'investissement matériel est très élevé, de haute technologie et requiert du personnel hautement qualifié. Qu'une usine viennent à brûler et c'est un pays au bas mot qui peut se retrouver du jour au lendemain sans pièces détachées... Ainsi, si vous achetez un APN Nikon, la plupart du temps son CMOS sera fabriqué par... Sony. Si vous achetez un APN Kodak son CMOS proviendra de chez National Semiconductor qui fabrique également le Fovéon de Sigma. Autrement dit, si ce n'est pas le capteur qui fait la qualité d'un APN, ce sont tous les circuits annexes qui l'entoure, la logique (les fonctions logicielles) et bien sûr les optiques.

Bien que les CMOS soient apparus dans les années 1970, près de dix ans après les CCD, les constructeurs ne s'y sont pas vraiment intéressés jusqu'aux années 1990, époque à laquelle ils recherchèrent des solutions consommant moins d'énergie, augmentant la miniaturisation ("camera-on-a chip") et réduisant les coûts de production tout en préservant la qualité des images. Il faudra une autre décennie, beaucoup d'argent et des adaptations mais le résultat fut très probant et a fini par faire exploser le marché des APN.

Sensibilité et rendement des capteurs CCD et CMOS

En nous limitant au spectre visible, le taux de conversion des photons en électrons représente le rendement ou l'efficacité quantique du capteur. En théorie le rendement dépasse 99.9% mais il varie en fonction de la longueur d'onde. Dans les APN grands publics le rendement peut atteindre 60% dans le rouge mais il dépasse 90% dans certains systèmes professionnels.

Document T.Lombry

Le miroir reflex a été relevé et l'obturateur de ce Nikon D80 de 2006 a été ouvert, découvrant le capteur CMOS APS-C de 10 Mpixels (devant lequel se trouve le filtre IR bloquant dichroïque, mais invisible sur cette photo).

Le capteur présente également une excellente linéarité (le signal de sortie est presque proportionnel au nombre de photons incidents), sans échec à la loi de réciprocité durant les longues expositions comme leurs homologues argentiques. A titre de comparaison, même des émulsions aussi performantes que l'ancien Kodak TP2415 hypersensibilisé ne peut pas se mesurer face au temps de réponse et à la définition d'un capteur CCD ou CMOS. Un capteur CCD présente une sensibilité équivalente à celle d'un film de plus de 20000 ISO, le grain en moins (ou presque) ! Autrement dit, un capteur CCD est au moins 20000 fois plus sensible qu'une émulsion argentique !

La plus haute sensibilité par défaut d'un APN est de 102400 ou 409600 ISO selon les fabricants et supporte facilement des agrandissements de 800 à 1000%. Depuis 2016, le Nikon D5 détient le record avec une sensibilité extensible jusqu'à 3280000 ISO (mode Hi 5) mais comme l'a montré le test de Petapixel, à cette valeur extrême le bruit est vraiment trop apparent et l'image très dégradée. Elle pourrait juste convenir à quelques applications scientifiques (météo, microscopie, etc) bien que les caméras professionnelles soient plus performantes (mais aussi plus chères).

Un oeil humain est capable de percevoir un object illuminé sous 1 lux, ce qui équivaut à la lumière de la pleine Lune. Jusqu'en 2017, la sensibilité d'un CCD variait entre 0.1 et 3 lux. A cette époque, le CMOS était encore 3 à 10 fois moins sensible avec 6 à 15 lux seulement. Ce dernier était pratiquement inutilisable sous 10 lux et présentait un niveau de bruit fixe 10 fois supérieur au CCD. C'est la raison pour laquelle toutes les caméras vidéos et les capteurs dédiés à l'astronomie étaient équipés d'un capteur CCD. En 2017, Sony fabriqua le premier capteur CMOS, le IMX390CQV, capable de produire des images couleurs jusqu'à 0.1 lux. Il réduit également le scintillement des LED et peut capturer des images HDR avec une dynamique de 120 dB. Depuis 2020, les capteurs CMOS présentent des performances qui surpassent les capteurs CCD.

Le CMOS est normalement utilisé dans les jouets et les appareils de sécurité domestique bon marché. Mais il a deux exceptions. D'une part on peut fabriquer de très grands CMOS qui présentent une plus grande sensibilité que les CCD. D'autre part les CMOS réagissent 10 à 100 fois plus rapidement à la lumière que les CCD d'où leur utilisation dans les APN et des applications spécialisées ou nécessitant une cadence d'images très élevée (15-60 fps pendant 10 ou 20 minutes).

C'est en 2007 que les ventes des photocapteurs à pixels actifs CMOS dépassèrent celles des photocapteurs CCD, les photocapteurs CMOS représentant 54% du marché mondial des photocapteurs. En 2012, la part de marché des photocapteurs CMOS atteignit 74%. En 2017, ils atteignaient 89% des ventes mondiales de capteurs d'images. Depuis, la technologie des capteurs CMOS s'est étendue à la photographie moyen format.

La grille de Bayer

Un capteur photosensible CCD ou CMOS est constitué d'une seule matrice photosensible qui est recouverte d'un filtre coloré appelé une grille de Bayer. Contenant des éléments de différentes couleurs, elle permet de sensibiliser sélectivement les pixels à une seule des 3 couleurs primaires : le rouge, le vert ou le bleu. Notons que sur certains modèles d'APN, la grille de Bayer présente une légèrement absorption dans le proche infrarouge.

A lire : Sensibilité des APN aux rayonnements IR et UV

Adapté d'un document de Vincent Bockaert/123di.com

Le processeur d'image associé au capteur photosensible combine ces trois couleurs primaires RGB pour créer par synthèse additive (une multiplication) une image couleur.

Comme l'écran d'une télévision, vu de près, la grille de Bayer n'est qu'une juxtaposition de filtres rouges, verts et bleus alignés. Mais ne mesurant quelques microns chacun, à bonne distance la mosaïque de la grille de Bayer constituée de millions pixels forme une image couleur uniforme.

Simulation très agrandie de la grille de Bayer fixée sur les CCD et CMOS des APN. Constituée d'une mosaïque de filtres RGB, elle permet au processeur d'image (non visible) de reconstruire une image couleur.

Si généralement cette technologie donne d'excellents résultats, pour sa part, Sony a préféré adopter une technologie originale en remplaçant la grille de Bayer par une grille 4 couleurs dite RGBE : une grille RGB classique plus un filtre émeraude pour remplacer le deuxième vert comme indiqué dans ce schéma RGBE. Le système fut exploité en 2003 dans son modèle DSC-F828 mais qui eut un succès mitigé. Le résultat donne des couleurs plus conformes à la réalité bien qu'elles paraissent légèrement plus chaudes que la solution de Bayer comme on peut le voir sur ces deux images.

Pour sa part, pour ses modèles SD9 et SD10, Sigma a adopté le système Fovéon X3 dans lequel 3 grilles respectivement rouge, verte et bleue sont superposées, à l'image des émulsions argentiques. Les photosites mesurent 9 microns. Actuellement, pour un oeil professionnel du moins, le résultat reste inférieur aux performances de la grille de Bayer. Par ailleurs l'appareil est assez cher (environ 1700-2000 € avec optique pour une définition de 10 Mpixels).

Malgré tout, la société Semiconductor insights par exemple, experte dans ces technologies et qui assure du conseil auprès des entreprises estime que le Fovéon pourrait révolution l'industrie de la photographie.

En effet, actuellement les technologies CCD et CMOS exigent que les APN s'entourent d'algorithmes mathématiques complexes pour évaluer les couleurs, ce qui requiert des processeurs d'images dédiés dans l'appareil. Cette technologie ajoute des coûts et de la complexité à la conception des APN, ce qui explique le délai entre l'instant où vous appuyez sur le déclencheur et le moment où vous entendez le "clic" de l'enregistrement réel de l'image. On y reviendra.

Grâce au Fovéon X3, le capteur enregistre les trois couleurs primaires dans chaque pixel, éliminant le recourt à des processeurs additionnels d'où résulte en théorie de plus belles images, une conception simplifiée des appareils et une amélioration de leurs performances.

Dimension du capteur

Sur la plupart des APN, la surface du détecteur est beaucoup plus petite que celle d'un film de 35 mm. Comparé à la surface d'une image de 24 sur 36 mm, le capteur d'un APN de 3, 4 ou 5 Mpixels mesure en général 7.20 x 5.35 mm. Vous placez donc plus de 20 capteurs CMOS de cette dimension sur une image 24x36 ! Pas étonnant que la qualité s'en ressente.

Il faut utiliser des capteurs d'au moins 6 Mpixels pour couvrir à peu près les 2/3 d'une image 24x36. Ces capteurs de 23.7 x 15.7 ±0.1 mm fixés dans des chips de 40 x 30 mm équipent les systèmes APS-C (Advanced Photo System Classic) dont plusieurs reflex et optiques Canon (série EF-S), Nikon (série DX), Pentax (série DA), Sony (séries DT, SEL), Tamron (série Di II) et Tokina (série DX).

Le CMOS "full frame" équipant les Nikon D3 et D700 parmi d'autres.

En fait, la dimension des capteurs n'est pas exprimée en millimètres mais se réfère à une vieille mesure anglaise dans l'"imperial system" (inches, etc) remontant aux années 1950 utilisée à l'époque pour définir la dimension des tubes des caméras TV. Elle s'exprime en fraction et correspond à peu près aux 2/3 du diamètre de la matrice originale qui sert à les fabriquer. En effet, on a découvert à l'époque que seuls les 2/3 environ de la surface située au centre de la galette (wafer) de silicium étaient exploitables. Pour des capteurs des APN reflex de plus de 3 Mpixels cela correspond à une dimension ou type 1.8" (à ne pas confondre avecc le type 1/1.8" des compacts) également appelé APS-C qui correspond à un diamètre de 45.720 mm et une matrice de 15.7 x 23.7 mm (rapport 3:2), donc assez proche du 24x36. Aujourd'hui, seul Olympus utilise encore des capteurs au rapport 4:3 sur ses APN de sa série OM-D.

Depuis 2001, il existe des capteurs CMOS de 24x36 mm dit "full frame" (FF ou FX) mais à l'époque ils étaient encore réservés à des appareils de milieu et haut de gamme. Les CMOS FX équipent par exemple le Canon EOS-1D X de 18.1 Mpixels (5810 € boîtier nu), le Canon EOS 1-Ds Mark II de 16.6 Mpixels (8000 € boîtier nu), le Canon EOS 6D de 20.2 Mpixels (1549 € boîtier nu), le Nikon D610 de 24.3 Mpixels (1699 € boîtier nu), le Nikon Df de 16.2 Mpixels (2235 € boîtier nu) et le Sony Alpha a99 de 24.3 Mpixels (2300 € boîtier nu), tous des hauts de gamme.

A 1 ou 2 mm près, le capteur FX équipe également le Canon EOS 5D de 12.8 Mpixels (2599 € boîtier nu), l'ancien Kodak DCS-14n de 13.8 Mpixels ainsi que les Nikon D3 et D700 de 12.1 Mpixels (respectivement 4599 € et 2600 € boîtier nu).

Cette très lente pénétration du format 24x36 s'étendit aux autres marques à mesure que le prix des composants électroniques diminua et de la stratégie, de l'envie également des sociétés d'investir dans ce format car cela les oblige à fabriquer de nouvelle optiques adaptées au format "full frame" numérique (comme Nikon propose des optiques DX et des optiques FX).

Chez Canon par exemple, il fallut attendre 17 ans d'évolution technologique pour atteindre le format "full frame". Quant à Nikon, il a seulement franchi le pas en 2007 sur son modèle D3, exploitant toujours le format DX (APS-C) sur le restant de sa gamme, y compris sur le D300 sorti en même temps que le D3. Sony supporte le format "full frame" depuis fin 2008.

Paradoxalement, on imagine que plus les pixels sont petits, plus la résolution spatiale est élevée et donc que l'image présente du piqué, est dite de qualité. En pratique on constate que si techniquement on est capable de créer des éléments de 5.5 microns par exemple comme sur les Olympus E300 et E500 de 8 Mpixels (et même deux fois plus petit), Canon par exemple sortit en 2005 le modèle EOS 5D de 12.8 Mpixels dont les pixels ont pratiquement la même taille que ceux du modèle 1D Mark II de 16 Mpixels, soit 8.2 microns.

A gauche, comparaison entre les principaux formats de capteurs photosensibles. Les plus communs sur les reflex sont les APS-C et FX. A droite, le CMOS ClearVid de Sony sorti en 2006 permet d'augmenter la résolution du capteur de 40% ainsi que sa sensibilité sans augmenter la densité des pixels.

Il apparaît qu'un capteur FX mesurant 24x36 mm donnera une image plus nette s'il utilise des pixels proches de 9 microns. En effet, plus petits, le système électronique perd sa capacité à capturer les photons et génère plus de bruit électronique et dans un spectre plus étendu. La diffraction est également beaucoup plus importante.

Mais de son côté, Canon ne l'entend pas ainsi et espère agrandir la taille des pixels pour produire des images aux couleurs plus riches et augmenter la dynamique de l'EOS 20D qui utilise des pixels 20% plus petits, de 6.4 microns. Ceci dit, cette technologie est en évolution constante.

Comme le rappelle Nikon, le format FX permet de photographier à des sensibilités plus élevées qu'en format APS-C avec un bruit réduit, même dans les conditions de faible éclairement. De plus, grâce à la courte profondeur de champ obtenue avec ce genre de photocapteur, l'effet de flou d'arrière-plan ou bokeh est plus esthétique. On y reviendra à propos des objectifs.

Le record de miniaturisation est détenu par la société Micron qui est parvenue en 2005 à diminuer la taille des pixels jusqu'à 1.7 microns. Selon Hisayuki Suzuki, directeur du markering Imagerie de Micron, "réduire la taille du pixel permet d'envisager des applications mobiles et domestiques offrant une plus grande résolution et de plus petits facteurs de forme. En outre, de plus petits pixels permettent d'augmentation les fonctions dans d'autres applications telles que médicales, biométriques et la haute vitesse."

Sony a trouvé une autre astuce pour augmenter la résolution des images. Reprenant un concept déjà proposé en 2003 par Fujifilm sur son APN SuperCCD, sachant que la densité des pixels sur un chip dépend de la largeur des pixels, une manière d'augmenter la densité du chip sans modifier la taille des pixels est de placer ces derniers non plus dans une matrice rectangulaire mais en losange. Ainsi, en 2006 Sony a sorti un chip baptisé ClearVid (Clear + Vivid) pour sa nouvelle caméra vidéo DCR DVD505 qui utilise des pixels de 2.9 microns mais dont le pitch, l'écart de centre à centre, au lieu d'être de 2.9 microns et de 2.05 microns. Le gain est appréciable car les résolutions horizontale et verticale ont ainsi augmenté de 40% et par conséquent la sensibilité par pixel est également plus élevée que sur les chips classiques.

Notons, car on l'apprend souvent à ses dépens et après avoir réalisé des tirages par exemple, que si vos tirages vous reviennent tronqués c'est parce que le capteur de votre APN ne respecte pas le rapport 3:2 du format dit 24x36. Il est sans doute plus étroit de 14%. Vous possédez vraisemblablement un compact au format APS-C propriétaire de Canon ou l'un des derniers APN reflex au rapport 4:3.

Par ailleurs les optiques classiques couvrant un champ plus étendu que celui calculé pour un capteur numérique, les images auront l'impression d'être agrandies de 30 à 65% voire 200% selon les capteurs. On reviendra sur ces dimensions et leurs conséquences sur les images lorsque nous discuterons des objectifs.

Pixels et résolution du capteur

Ainsi que nous venons de l'expliquer, le chip d'un APN (mais également d'une caméra vidéo numérique) est constitué d'une matrice de lignes et de colonnes de photodiodes ou "pixels". Un amateur qui souhaite agrandir ses photographies est vite confronté au problème de la pixelisation des images et de la perte de résolution dans les détails. C'est ici qu'on prend conscience de l'intérêt d'utiliser un APN offrant une grande définition (le nombre de pixels composant l'image), d'utiliser une optique de qualité et de réaliser des impressions en haute résolution (300 dpi).

Résolution d'un capteur numérique (seconde d'arc/pixel)

P : Taille des pixels (microns)

F : Longueur focale du système optique (mm)

R(") = 206 * P / F

Pour une focale de 20 mm, en utilisant un capteur CMOS dont les pixels mesurent 9 microns, la résolution est d'environ 93" par pixel. Pour améliorer la résolution et donc la quantité de détails, vous devez soit augmenter la longueur focale soit utiliser un capteur offrant des pixels plus petits.

Ainsi que nous le verrons page suivante à propos de la définition des images, pour un tirage amateur (ni pour des expositions ni pour des publications), un APN de 3 Mpixels permet déjà de réaliser des agrandissements A4 (20x30 cm) et même jusque A1 (50x70 cm) après traitement d'image. Mais si vous envisagez une publication A4 à 300 dpi dans un magazine photo, il est vivement conseillé de travailler avec une définition d'au moins 8 Mpixels. On y reviendra.

La haute résolution est également nécessaire pour les portraits où la qualité d'une image ne dépend pas seulement de la mise en scène, des lumières ou de l'optique mais également de la netteté des détails de la peau (y compris les poils et les cheveux). Pour les distinguer sur des agrandissements, il faut augmenter la définition jusqu'à 10 Mpixels minimum.

L'écran TFT du Sony Alpha DSLR-A100 et les boutons et autre sélecteur permettant d'accéder au menu et aux fonctions. Comparé à ses concurrents, ce design est très épuré. Mais l'essentiel est qu'il soit pratique.

C'est dans ce contexte ainsi que pour la création de posters et autre "wallpapers" et dans les nombreux cas où le photographe rogne et recadre (crop) son sujet qu'on apprécie l'avantage de disposer d'un APN offrant une très haute définition, des photodiodes relativement petites et disposant d'une excellente optique. Dans ces conditions, un capteur de 16 Mpixels est un minimum.

On lit parfois que la photographique numérique est en retard sur la photographie argentique en terme de résolution d'image. C'est à la fois vrai et faux. En fait on mélange deux concepts.

Nous verrons à propos des optiques que la taille des pixels et des sels d'argents sont aujourd'hui équivalentes; la photographie numérique a donc atteint la résolution de l'argentique. Mais il demeure une limitation, celle de la résolution des optiques qui demeure toujours inférieure à celle des capteurs.

Pour l'heure, Canon, Nikon et Sony notamment proposent des APN dont la résolution dépasse 24 Mpixels. Canon a également fabriqué le premier capteur CMOS de 120 Mpixels en 2010 mais aucune optique ne peut encore exploiter cette résolution. Pour l'heure, le Canon EOS 5DS au format FX atteint 50.6 Mpixels, ce qui est déjà exceptionnel. Mais du côté des APN hybride, Sigma propose depuis 2019 un capteur full frame de 60 Mpixels (Sigma fp) et Panasonic de 80 Mpixels (Lumix G9).

En attendant que les fabricants d'APN reflex résorbent éventuellement ce retard, le traitement d'image permet de pallier à cet inconvénient ainsi que les techniques d'impression offset lorsqu'on envisage des impressions grand format. On y reviendra.

Le bruit électronique

Les capteurs photosensibles émettent différents types de bruits ou signaux parasites. D'abord, un bruit thermique ou bruit de Johnson-Nyquist lié à la température des composants et un courant d'obscurité provoqué par le déplacement aléatoire des électrons (le mouvement brownien qui est une agitation thermique), même en l'absence totale de photon. Le niveau de bruit augmente avec la sensibilité (ISO) et la température du capteur ou de la température ambiante (il double tous les 5°). Le bruit électronique est également appelé bruit de lecture (readout noise) ou bruit numérique.

Bruit électronique du Canon EOS 20D à 1600 ISO équipé d'un objectif zoom de 10-22 mm à f/4.5. Document Imatest.

D'autres types de bruits s'ajoutent au bruit électronique : le bruit de Schottky ou bruit quantique des photons qui génère des pixels brillantes aléatoirement, le bruit impulsionnel qui génère des pixels noirs, le bruit de numérisation lié à la transformation du signal analogique, le bruit de quantification généré lors de la compression de l'image et le bruit périodique généré par le processus cyclique d'un composant électronique.

Sur un APN grand public d'entrée ou de milieu de gamme, le bruit électronique (de lecture) devient apparent à partir d'environ 1600 ISO au point de détruire les plus fins détails de l'image. Ce problème a été accentué avec la technologie CMOS. Il est plus apparent chez certaines marques (Canon) bien qu'à faible sensibilité (inférieure ou égale à 400 ISO), Nikon comme Canon présentent un niveau de bruit équivalent.

Ce bruit qui parasite les images prend soit la forme de pixels brillants dispersés aléatoirement dans l'image soit d'un motif constitué de bandes parallèles parfois colorées qui apparaissent lors des poses nocturnes prolongées. Il peut être réduit de différentes manières.

La méthode la plus simple est d'utiliser la fonction de réduction de bruit (NR) disponible sur la plupart des APN qu'on active via le menu pour toutes les photographies. Un amateur expérimenté peut aussi enregistrer une image noire (dark frame) qui sera soustraite des images brutes. Cela exige toutefois quelques manipulations et généralement un traitement sur ordinateur après la prise de vue.

Certains APN haut de gamme équipés d'un capteur CMOS FF sont capables d'atteindre les plus hauts ISO avec un bruit de lecture < 1 électron. A 409600 ISO par exemple, le Canon EOS 1DX Mark III affiche 0.829 électron, le Nikon D7500 affiche 0.664 électron et sur ce modèle il atteint même 0.559 électron à 1638400 ISO ! Mais l'APN qui bat tous les records est le Sigma fp, un modèle hybride qui passe sous le seuil de 1 électron dès 636 ISO.

Sur de rares modèles haut de gamme comme le Canon EOS 6D, le bruit d'origine thermique peut être réduit en utilisant un système de refroidissement actif jusque -18°C. Il s'agit toutefois d'une option onéreuse dont il faut avoir fréquemment l'usage. On reviendra sur le sujet à propos des appareils photos numériques en astrophotographie et des caméras CCD.

A lire : Noise, Imatest

Sensor Characteristics - Camera Sensor rankings, DxOMark

Input-referreds Read Noise vs. ISO Setting, Photons to Photos

Digital Camera Reviews and Sensor Performance Summary, ClarckVision, 2016

A ce bruit électronique peut s'ajouter les poussières présentes sur le filtre anti-aliasing qui protège le capteur photosensible. Elles apparaissent surtout lorsque l'APN est fortement diaphragmé (f/8 et supérieur) sous forme d'anneaux concentriques ou de taches sombres sur les images. Notons que le vignetage peut accenter ces défauts.

Protection du capteur

Malgré la présence d'un obturateur mécanique sur la plupart des APN reflex, les fabricants ont dû inventer de nouvelles techniques pour prévenir le dépôt de poussière sur le capteur photosensible ou l'effet indésirable des rayonnements. Plusieurs solutions ont été proposées car ce problème affecte le capteur à différents degrés.

Le système "anti-poussières" ICS imaginé par Canon pour le système EOS 400D.

Olympus par exemple utilise un filtre SSWF sur lequel Sony semble également avoir capitalisé. Un revêtement anti-statique constitué d'une couche mince d'oxyde d'indium est appliqué sur un filtre passe-bas (IR bloquant) placé juste devant le CCD pour s'assurer qu'aucune poussière ne vienne s'accumuler sur le capteur par électricité statique. Un vibreur anti-poussière "supersonique" (en fait ultrasonique à 35 kHz) se déclenche ensuite lorsque l'appareil est mis sous tension. D'autres modèles utilisent une bande adhésive pour capturer les poussières.

Si cela ne suffit pas, le Canon EOS 400D (Digital Rebel XTi) vous propose un système dénommé "Integrated Cleaning System" comprenant notamment un filtre passe-bas (anti-moiré et IR bloquant) sur lequel est fixé un piézo-élément qui le fait vibrer pour faire chuter les poussières. Mais comme visiblement cela ne suffit pas, le constructeur a prévu de réaliser une "white frame" : vous photographiez une surface blanche dont se servira le processeur d'image pour supprimer les traces de poussière qui s'obstineraient à rester sur les images. Cette méthode semble plus efficace que les fonctions équivalentes existant dans les logiciels de traitement d'image.

Nettoyage du capteur

Comment voit-on que des poussières se sont déposées sur le capteur ou plutôt sur le filtre qui le protège ? Comme on le voit ci-dessous, en utilisant une petite ouverture de diaphragme (par ex. entre f/22 et f/32) vous remarquez qu'il y a de petites taches sombres plus ou moins floues sur vos images. Tous les points sombres sont en principe les traces laissées par des poussières (voire des gouttes de liquide) collées sur le filtre protégeant le capteur.

Ces poussières se déposent généralement sur le filtre lors du changement d'objectif dans un endroit exposé au vent ou aux pollens soit, sur les objectifs zoom, par l'effet d'aspiration du système zoom.

Agrandissement d'une photographie prise avec un grand-angle à f/18 révélant les poussières (points noirs) sur le filtre protégeant le capteur d'un reflex. Elles apparaissent généralement après avoir changé d'objectif en plein air, d'autant plus s'il y a du pollen ou des nuages de poussière dans l'air.

Comment nettoyer le filtre ? Soit l'appareil dispose d'un système incorporé de nettoyage mais il n'enlève pas toutes les poussières soit vous devez procéder manuellement et à vos risques ou déposer l'appareil en révision chez un représentant agréé. Consultez tout d'abord le mode d'emploi de l'appareil pour les méthodes à suivre.

Si vous réalisez ce travail vous-même, sachez qu'on nettoie le filtre qui recouvre le capteur mais en principe jamais le capteur, sauf en laboratoire. En effet, vous pouvez également nettoyer le capteur mais vous allez devoir démonter l'appareil (dévisser des modules, soulever des circuits imprimer, retirer le filtre avec plus ou moins de difficulté et seulement ensuite accéder physiquement au capteur), ce qui signifie perdre les effets de la garantie. A réserver aux professionnels équipés des outils appropriés.

Pour retirer les poussières fixées sur le filtre, si le système est doté d'un obturateur mécanique, via le menu verrouillez le miroir reflex en position haute puis enfoncez le déclencheur à fond afin de procéder à l'ouverture de l'obturateur.

Généralement cette ouverture couplée au verrouillage du miroir ne fonctionne que si la batterie est chargée à plus de 50%. Cette mesure de sécurité évite la fermeture du dispositif et de coincer éventuellement vos doigts ou le pinceau électrostatique dans la chambre noire si la batterie était presque vide. A défaut de cette sécurité, ne procédez au nettoyage qu'avec une batterie totalement chargée dans l'appareil. Un accident signifierait pour votre APN un retour garanti au service technique.

Pour nettoyer ce filtre, travaillez sous une lumière forte et dans un endroit à l'abri des courants d'air et des poussières. Retirez l'objectif et nettoyez-le séparément avec un produit d'entretien pour optique (Zeiss ou Hama par exemple).

L'utilisation d'une souflette (poire à air) doit s'effectuer avec prudence et de telle manière à créer un flux d'air sortant de la chambre noire. Pour y parvenir, placez l'embout de la poire d'un seul côté du filtre et soufflez fortement. Evitez de souffler sur la surface dans toutes les directions.

Parmi les méthodes déconseillées, citons les sprays car la forte pression peut éjecter des particules liquides tandis que les plus grosses poussières posées sur la surface peuvent rayer le filtre en se déplaçant.

Evitez également les brosses et pinceaux ordinaires. Si les poils de ce dernier sont mal fixés ou se cassent, l'un d'eux risque de tomber sur le filtre ou de se fixer près du verre de visée et vous aurez toutes les difficultés pour le retirer.

Utilisez plutôt une petite brosse anti-poussière électrostatique. Visible Dust par exemple vend un pinceau électrique "Arctic Butterfly" (~80 € plus 2 piles AA) conçu à cet usage. Allumez-le et le pinceau va se charger d'électricité statique en quelques rotations. Ne faites jamais tourner le pinceau près du capteur !! Il suffit ensuite de l'appliquer sur le filtre recouvrant le capteur pour extraire en douceur les petites poussières, du moins celles qui n'adhèrent pas au support.

Pour les rares éléments résistants, utilisez un coton-tige imbibé de produit d'entretien pour optique ou d'alcool isopropylique à 99% (les autres alcools et diluants sont à proscrire car ils laissent des traces) en offrant le moins de pression possible sur la surface pour ne pas l'endommager.

Une fois le nettoyage terminé, refermez l'obturateur mécanique et déverrouiller le miroir reflex. Cette méthode est couramment utilisée et, correctement pratiquée, elle ne pose aucun problème. Vous pouvez même répéter l'opération plusieurs fois si des poussières subsistent. Nikon va même jusqu'à conseiller de nettoyer le filtre avec une souflette et une peau de chamois.

Notons que Carl Zeiss propose un kit d'entretien comprenant du détergeant, des mouchoirs humides, un tissu en microfibre et un pinceau mais ne l'utilisez jamais ce dernier pour nettoyer le filtre interne comme expliqué ci-dessus. Ce kit est uniquement destiné au nettoyage de l'objectif et des filtres externes.

Ceci dit, si vous n'êtes pas sûr de vous, il vaut parfois mieux laisser une poussière récalcitrante en place que de vouloir à tout prix l'enlever et risquer d'endommager un élément. La prudence est reine des vertus. En cas d'hésitation, bien compréhensible la première fois, consultez votre photographe qui n'hésitera pas à vous faire une démonstration.

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