Sans moyen de mesure, ou a minima sans point de comparaison, il est extrêmement difficile de se faire une idée de la qualité d'un filtre solaire Halpha. Les rassemblements comme les ROS sont très intéressants pour cela. On peut comparer sur un même instrument différents filtres, mais on n'a aucune idée de la valeur réelle de la bande passante du filtre.
Et ce d'autant plus qu'il y peut y avoir un écart certain entre les FWHM annoncés par les fabricants et les valeurs réelles.
Pour les plus anciens d'entre nous, cela fait penser aux lambda/20 P-V qui étaient annoncés sur les miroirs des années 70-80. L'arrivée de plateforme de mesure (par exemple Ciel et Espace ou AiryLab) a remis de l'ordre dans cela. Et plus grand monde ou presque s'aventure à raconter n'importe quoi.
Mais le travail reste à faire pour les filtres Ha
Cet été, j'ai eu l'opportunité d'avoir en même temps trois étalons Ha à mesurer. Et j'ai eu une matinée avec de très bonnes conditions, ce qui m'a permis de faire des images avec ces trois filtres, dans des conditions de seeing quasi-identiques.
Ces filtres avaient respectivement des FWHM de 1.0 A, 0.6 A et 0.3 A (en faisceau collimaté). Il s'agit de valeurs mesurées, et pas des valeurs annoncées par les fabricants. Par charité, je ne donnerai ni le nom des fabricants, ni valeurs de FWHM annoncées par les fabricants
La chose intéressante ici est plutôt de voir à quoi ressemble une image Ha faite avec un filtre de 1.0 A , 0.6 A ou 0.3 A dans les mêmes conditions de seeing et avec la même instrumentation (Takahashi TOA 150 + Basler 1920-155).
Les images présentées sont traitées de façon minimaliste et identique : masque flou tout simple, visualisation linéaire et c'est tout
D'abord un groupe de tache :
Interprétation:
À mesure que le FWHM diminue, la contribution parasite de la photosphère diminue et une couche de plus en plus haute de la chromosphère est échantillonnée.
Avec un étalon de 1,0 A :
- la granulation photosphérique est encore visible à travers la chromosphère. Cela explique le caractère granuleux de l'image.
- les filaments sont pâles et peu différenciés.
Avec un étalon de 0,3 A :
- la granulation photosphérique n'est plus visible,
- les plus petites taches (niveau photosphérique) ont disparu, recouvertes par les fibrilles (niveau chromosphérique),
- les ombres des plus grandes taches sont en partie recouvertes par les fibrilles.
- les spicules sont nettement plus marquées,
- le contraste général des structures Ha augmente.
Avec un étalon de 0.6 A :
- on est entre les deux et la granulation photosphère a pratiquement disparu,
Le limbe solaire :
En plus des effets déjà décrits, on observe que l'effet double-limbe se réduit quand la bande passante se réduit. Mais le double limbe reste quand même présent à 0.3 A FWHM.
Il faut passer en double-stack pour voir l'effet double limbe disparaitre.
Pour ceux que cela intéresse, voir les fichiers bruts non traités :
http://astrosurf.com/viladrich/astro/instrument/solar/reference-images/Spot-2023-09-09-0841-mica-spaced-etalon-03A-telecentric-f31.zip
bonjour,
pour donner un peu de détail au magnifiques séries de 3 décembre .
à la 150mm cette fois , séance gâchée par la réapparition des parasites sur mes films
Paul
Toujours un peu de retard dans le traitement des images prises cet été.
Voici trois images prises le 19 août à St Véran.
Avec le filtre Altair G-band 2 nm. On note pas mal de points ombraux dans l'ombre de la tache de droite, des points brillants dans les filaments et aussi beaucoup de points brillants intergranulaires
Toujours en G-band, mais cette fois-ci avec le filtre Andover de 2 nm. Il est difficile de dire si la différence de rendu est le résultat des différences de seeing ou de bandes passante s(2.9 nm mesuré sur l'Altair contre 2.0 nm sur l'Andover). Probablement un peu des deux
On a un pont de lumière (non complet) dans chaque tache. Si on regarde bien, on s'aperçoit qu'en certains endroits, ces ponts de lumières sont partagés par une fine ligne sombre. Ce n'est pas un artéfact, mais un phénomène bien réel :
On revient au filtre Altair G-band, avec le même groupe 1h30 plus tard, avec un développement des pores qui se trouvent entre ces deux taches. On a aussi de nombreux points brillants dans les filaments situés dans le côté gauche de ces deux taches :
Pour rappel, le premier que j'avais testé avec une bande passante de 2.1 A FWHM. C'était le pire filtre que j'avais mesuré.
J'ai mesuré ce nouveau Quark avec trois méthodes différentes, ce qui permet de croiser les mesures.
1° Tout d'abord par interférométrie avec la lampe Ha :
On obtient des franges d'interférence, et à partir de ces franges on remonte à la bande passante du filtre en moyenne sur toute sa surface. On obtient ainsi une FWHM de 1.2 A :
2) La 2e méthode consiste en une mesure en faisceau collimaté avec une variante de Sol'Ex :
La surface mesurée est toute petite (10 micron x 4 mm), la mesure est donc naturellement meilleure que la mesure précédente : FWHM = 0.9 A
3) La 3e méthode consiste en une mesure en faisceau télécentrique à f/28 avec deux variante de Sol'Ex (qui diffèrent par leur dispersion) :
Concrètement, le Quark est monté sur la Takahashi TOA 150.
Comme on est à f/28 et non en faisceau collimaté, il y a un élargissement de la bande passante, on obtient cette fois ci FWHM = 1.0 à 1.1 A
Au bilan, l'ensemble de ces mesures sont cohérentes, la valeur de FWHM à retenir (celle en faisceau collimaté) est de 0.9 A.
Pour mémoire, voici une statistique sur six étalons à lame de mica mesurés jusqu'à présent :
Et les résultats détaillés incluant des filtres Coronado et des filtres Ca K :